Aujourd’hui enfin, son rêve est devenu mien. Cela fait des années que l’on s’observe, que l'on apprend l'un de l'autre, n’attendant que le moment où, nos secrets mis à nu, nous ne ferions plus qu’un. Désormais unis, et devenus tout puissants, nous dévorons, détruisons, fusionnons avec ce qui nous entoure, et nous devenons plus forts. Petit à petit, nous occupons tout l'espace, sur quelques centaines de kilomètres d’abord, puis sur toute la planète entière. Nous n’épargnons qu’un seul endroit. Il l’appelle la chapelle. Il y tient beaucoup, car c’est un endroit calme, où la paix règne même en temps de guerre. Il m'a dit que cet endroit était précieux, alors je n'ai pas le droit d'y toucher.
Oubliant le vieux bâtiment, je me remet à travailler. La terre défile, s’étend, inonde mes entrailles, jusqu’à former un îlot de la taille d’un pays. Cette terre est féconde, on y trouve lacs et forêts, ainsi que toutes les ressources nécessaires à la survie d'un petit monde. Alors que nous observons notre création, il me dit qu'il aimerait l’observer de plus près, mais ce n’est plus possible. Nous ne sommes qu’un, et déjà je dois repartir pour continuer mon œuvre, l’emportant avec moi.
Voilà l’étape la plus pénible : Une partie des vies que j’ai volé me quittent et reprennent forme. Ce n’est rien, par rapport aux milliards d’êtres qui me composent désormais, et pourtant cette opération me fait ressentir une douleur des plus atroces : je suis faite pour absorber, et non pour restituer ! Cependant, il voulait qu’ils vivent dans ce monde de paix, alors je lui obéis, je les libères. Peu à peu ils reprendront leurs esprits. Cependant, je fais toujours un peu partie de chacun d'entre eux, alors ils continueront de m'obéir - et de lui obéir, aussi – pendant un moment, sans même en avoir conscience.
Désormais, un étrange sentiment s’élève en moi. Il appelle ça du dégoût, mais je pense qu’il a surtout peur. Après tout, je le sens aussi, au plus profond de moi, cet étrange tas d’objets terrifiants. Ce sont des armes, d’ignobles créations qui font fleurir la violence. Elles ne font plus qu’un avec moi, elles aussi, mais nous n’en voulons pas, alors on les rejettes, on les enterres sous notre nouveau monde, là où rien ni personne ne penserait à les retrouver.
Soulagés du poids qu'elles représentaient, nous continuons notre travail. Il ne s’agit plus que de détails : Une rivière ici, une forêt par là, et le monde n’en devient que plus beau. Enfin, nous restons un moment, inertes, s’assurant du bon fonctionnement de notre nouveau petit paradis. Mais nous ne devons pas rester, non. Nous avons créés cet endroit, et il ne faudrait pas le détruire. C’est aussi ça, d’être tout puissants.
Sous l’élan de sa dernière volonté, je me creuse, libérant ainsi notre création. Il veut que je la protège, et je lui obéis, encore. Je deviens, lentement et douloureusement, la limite protectrice qui l’entoure. Cette limite, personne ne pourra la franchir. Ni ceux qui sont dehors, ni ceux qui sont dedans.
Ainsi, nous avons terminé. Satisfait, Il disparaît, laissant son âme se dissoudre complètement en moi. Je suis désormais seule avec ses souvenirs et ses émotions. Ces dernières renferment un dernier souhait : Si l’équilibre de notre petit monde venait à s’écrouler, il faudrait tout recommencer. Bien évidemment, ce jour là, je lui obéirais, encore et encore.
Plein de mystère et de poésie dans ce prologue !
Ça donne clairement envie de lire la suite... Et vite :)
Au niveau de la mise en forme du texte, c'est un peu compact, ça mériterait d'être un poil plus aéré. Mais pour le fond, c'est top ! Quelques petites tournures de phrase à peaufiner pour fluidifier l'enselble, mais c'est déjà un très beau prologue !
C'est vrai que je n'ai pas pris le temps de travailler la mise en forme, c'est une bonne piste à suivre pour améliorer le prologue ^^