Soudain je sens avec horreur ma souche se déraciner.
« Oh non ! Je m’exclame dans ma tête. Par tous les dieux et les princes-démon de la Cité-Monde ! Je vous en supplie, tout mais pas ça ! »
Hélas, un craquement inquiétant se fait entendre et j’ai tout juste le temps de lâcher mon ancre avant de la voir s’envoler dans la tornade. Aussitôt je me retrouve moi aussi emporté par cette déferlante qui me traîne, me cogne et me retourne dans toutes les directions. Le monde n’a plus de haut ni de bas, c’est un tourbillon incessant de gris, d’ocre et de noir qui me donne envie de vomir et me déboussole complètement. J’ignore pendant combien de temps le vent m’entraîne dans son sillage, parmi les débris de la tempête qui semble ne jamais vouloir se calmer. Des pierres tranchantes m’entaillent les bras et les jambes, un éclat cisaille ma joue et j’ai de la poussière dans les yeux. À bout de souffle, j’ouvre la bouche pour chercher un peu d’air dans cette fournaise mais je ne parviens à respirer que du sable qui me fait tousser violemment. Dans un réflexe désespéré, mes mains agrippent une fissure dans le sol et je m’empresse de les coincer le plus solidement possible à l’intérieur. Le vent rugit, s’enrage de me voir ainsi échapper à son courroux, redouble d’efforts pour me faire lâcher prise. J’ai des crampes partout et l’horrible impression que la tempête va m’arracher les bras mais je tiens bon pour le moment. Mon corps se raccroche à la vie avec l’énergie du désespoir.
« Syndra ! Au-secours ! »
Je hurle, j’utilise toutes les forces qu’il me reste dans cet appel à l’aide, mais le souffle ardent m’a trop éloigné de mon amie et elle ne peut plus m’entendre. Une bile acide me brûle la gorge, je vomis quantité de sable et de poussière en me tordant les boyaux. J’ai la tête qui tourne, je me sens affreusement faible. Le gris du ciel se confond avec le rouge brique de la Dévoreuse dans une toile chaotique et infernale, comme si un artiste fou avait détruit un portrait du monde en mélangeant toutes ses peintures. Mes oreilles bourdonnent, un concerto entier de basses et de cuivres massacre un instrumental dans mon crâne. Je commence même à avoir des hallucinations car soudain une haute silhouette drapée d’une toge diaphane apparaît dans mon champ de vision.
Ce mirage porte les traits d’une jeune femme à la chevelure de jais, à la peau soyeuse et au teint pâle. Elle a un visage noble et le port altier, la mâchoire fine et de grands yeux bleus qui évoquent l’éclat d’une mer aux eaux turquoises sous un soleil d’été. Sa beauté saisissante la rend presque irréelle, pourtant son regard envoûtant me transperce avec une telle force qu’elle ne peut être issue d’un rêve. Sur son front brille une gemme d’éclat comme jamais je n’en ai vu auparavant : finement ciselée, de la taille d’un noyau de pêche et d’un blanc éclatant, elle est enchâssée dans une couronne de bois flotté entrelacée d’argent qui dessine de majestueuses ramures au-dessus de son visage. C’est grâce à cette parure magnifique que je parviens à l’identifier.
« Princesse Ceara… ? »
Sans dire un mot, la princesse d’Ambreciel pose ses yeux sur moi et sourit. Le monde semble alors s’arrêter de tourner pour se figer dans un carcan de glace. Le hurlement de la tempête devient un bruissement chantant, l’air suffoquant se change en une douce brise hivernale qui soulage mes poumons et m’offre un regain de forces. Une chaleur agréable caresse ma peau et les entailles causées par les rochers se referment. Sur le front de Ceara, la gemme d’éclat resplendit de mille feux : elle diffuse au cœur de la tornade une lumière blanche aux reflets étincelants. Fasciné, j’admire un long moment le légendaire joyau d’Ambreciel qui palpite dans son diadème comme une splendide étoile de givre. Perdu dans sa contemplation, je sursaute lorsque Ceara se met à parler.
« Ecoute-moi, enfant de la Cité-Monde. »
Sa voix pure, cristalline et impérieuse résonne à l’intérieur de mon crâne. Je sens tout à coup une énergie brûlante me traverser et m’attirer vers elle, comme une force surnaturelle à laquelle je suis incapable de résister. La princesse d’Ambreciel s’avance au milieu de la tempête d’un pas tranquille, ignorant la violence des vents qui se déchaînent. Les plis de sa robe et sa longue chevelure ne s’agitent même pas.
« Lorsque tombera l’antre de la Dévoreuse, le Façonneur et les trois apprentis devront se réunir. Le joyau d’Ambreciel resplendira quand sera éveillée sa première Lame. Mais prends garde à Celle-Qui-Marche-Dans-Les-Pas-D’un-Homme, car elle vous trahira pour libérer Morgulath de sa prison séculaire. »
Je l’écoute, totalement fasciné. Je ne comprends absolument rien à ce poème étrange qu’elle déclame, mais sa voix est si douce et mélodieuse que je ne peux en détourner mon attention.
« Hâte-toi, enfant de la Cité-Monde. Ceux qui errent parmi les ombres sont déjà à ta poursuite et le voleur d’éclat est en chasse. »
Elle se tait et le vent chasse l’écho de sa voix comme le temps balaie un souvenir. Je voudrais pouvoir lui répondre, demander à quoi rime tout cela mais Ceara regarde soudain par-dessus son épaule d’un air inquiet. J’ai l’impression qu’elle craint de se faire surprendre, une haute silhouette sombre se dessine derrière elle. Ses doigts fins tracent alors un symbole dans l’air et une bourrasque plus puissante que les autres emporte son reflet, laissant dans son sillage une pluie de poussière scintillante.
Je reste là un long moment, seul et immobile, avant de me rendre compte que le souffle de la Dévoreuse m’a laissé en vie. La tempête est passée, le mur de sable s’estompe, mais le souvenir de ce mirage incroyable reste gravé dans mon esprit. Bon sang, mais que signifie cette hallucination ?! Est-ce vraiment la princesse d’Ambreciel que j’ai vue en songe, ou bien la sorcellerie des démons du désert ? Je soupire d’épuisement et je m’assois en tailleur pour essayer de retrouver mes esprits. Cette journée est bien trop riche en émotions et en mystères qui me dépassent complètement.
« Salim ! »
Je me retourne pour découvrir Syndra qui se précipite vers moi. Sa robe est couverte de poussière, elle a les cheveux en bataille et une coupure au niveau du front mais elle ne semble pas gravement blessée. Vipérine la suit d’un pas hésitant, elle a plusieurs écailles arrachées au niveau du poitrail. Syndra se jette dans mes bras et me serre contre elle de toutes ses forces.
« Loué soit Ran le Tout-Puissant ! s’exclame-t-elle. Tu es en vie ! J’ai eu tellement peur quand la tempête t’a emporté ! »
Je lui rends maladroitement son étreinte. J’aimerais pouvoir partager son soulagement mais mon cerveau reste bloqué sur la vision de la princesse Ceara dans l’ouragan, du joyau d’Ambreciel qui luisait sur son front et de ses paroles qui n’ont aucun sens. Un frisson parcourt mon dos, j’ai le sentiment que quelque-chose de terrible va bientôt se produire.
« Morgulath…
Je ne peux m’empêcher de murmurer ce nom à voix basse, bien qu’il me glace le sang.
- Qu’est-ce que tu dis ?
- Celle-Qui-Marche-Dans-Les-Pas-D’un-Homme va libérer le démon Morgulath. »
Syndra m’observe d’un air étrange, elle doit me prendre pour un fou. Je tourne et retourne cette phrase dans ma tête comme un puzzle mais la clé de l’énigme m’échappe. Est-ce que j’ai fait un cauchemar, suis-je en train de délirer ? J’ai l’impression de devenir cinglé, le visage de la princesse Ceara m’obsède.
« Lorsque tombera l’antre de la Dévoreuse, récite Syndra d’une voix blême, le Façonneur et les trois apprentis devront se réunir. Le joyau d’Ambreciel resplendira quand sera éveillée sa première Lame. Mais prends garde à Celle-Qui-Marche-Dans-Les-Pas-D’un-Homme, car elle vous trahira pour libérer Morgulath de sa prison séculaire. »
Cette fois c’est à mon tour de la dévisager comme un ahuri. Syndra m’adresse un sourire crispé où se disputent confusion et stupéfaction.
« Toi aussi, tu l’as vue… ? dis-je d’une voix hésitante.
Elle acquiesce et je sens aussitôt un poids quitter mes épaules. Quel que soit le sens de cette apparition surnaturelle, je ne suis pas en train de divaguer. Il s’est bien passé quelque-chose d’anormal et d’inexplicable pendant que la tempête faisait rage. Syndra s’écarte de moi et nous nous regardons un long moment sans rien dire. Finalement, je décide de rompre le silence.
« Tu crois que c’était vraiment la princesse ? Ici, en plein cœur de la Dévoreuse ?
- C’est impossible, répond Syndra. Tu sais bien qu’elle ne quitte jamais le Palais d’Ambre.
- Je sais, mais elle avait l’air tellement réelle…
Mon amie secoue la tête d’un air catégorique.
- Non, Salim. Pendant qu’elle me parlait, une pierre l’a traversée comme si elle n’existait pas. J’ignore ce que nous avons vu exactement mais ce n’était pas la véritable Ceara. Plutôt une sorte d’illusion créée avec de la magie. »
Je pousse un grognement d’agacement bien audible. Encore cette foutue magie ! Je commence à en avoir ma claque des phénomènes surnaturels et des mystères à répétition. Depuis qu’on est partis à la poursuite de la Main-Noire, j’ai l’impression que ma vie se transforme encore plus en cauchemar. Je m’en ouvre à Syndra sans détour, j’ai besoin d’évacuer ma colère et ma frustration. Hélas, j’aurais mieux fait de m’abstenir : mon amie pousse un soupir exaspéré et réplique avec une tirade véhémente.
« C’est difficile pour moi aussi, Salim ! Au cas où tu n’aurais pas remarqué, c’est moi qui deviens une Anormale ! Je découvre des pouvoirs que je ne contrôle pas et qui me terrifient, je ressens une douleur insupportable à chaque fois que je les utilise. À cause d’eux j’ai même reçu des coups de Lame d’Arcane tout à l’heure ! Le capitaine Dolan menace de tuer mon père pour m’épouser, si je refuse ses avances j’aurai la mort de centaines de Fangeux sur la conscience ! Et maintenant, une tempête de roche a failli nous écharper et même la putain de princesse d’Ambreciel s’y met en m’envoyant des visions incompréhensibles ! »
Elle se tait quelques instants pour essuyer ses larmes et reprendre son souffle. Sa colère est telle qu’elle a littéralement hurlé ses derniers mots. Elle reprend d’une voix plus douce mais complètement épuisée pour s’excuser.
« Désolée. Ce n’est pas de ta faute, je n’aurais pas dû te crier dessus comme ça.
- Non, c’est moi qui suis désolé Syndra. Je n’arrête pas de me plaindre mais ce que tu vis depuis ce matin est dix fois pire. Je ne sais pas comment tu fais pour encaisser tout ça. »
Elle me sourit et hausse les épaules, une larme perle sur sa joue couverte de poussière rouge. Je ne reconnais plus vraiment la Syndra de mon enfance, cette amie qui m’a pris sous son aile dans les mines de Tys-Beleth et qui m’a consolé après la mort de mon père. D’une certaine façon je la trouve changée, plus courageuse mais aussi plus grave, comme si les évènements de cette matinée avaient balayé chez elle la joie et l’insouciance. Cette nouvelle Syndra est incontestablement plus adulte, plus belle et plus farouche que la précédente. Mais ses yeux brillent d’une tristesse qui ébranle son assurance. Dans son regard, je retrouve la petite fille effrayée et seule qui cherche désespérément de l’aide et qui rêve que sa vie redevienne ce qu’elle était avant.
« Nous ferions mieux de rejoindre la caravane avant la prochaine tempête, dit-elle. Si le capitaine Dolan s’aperçoit de notre absence, il sera furieux.
- Parce-qu’il lui arrive parfois d’être de bonne humeur ? »
Mon trait d’esprit lui arrache un sourire, mais je le vois aussitôt faner et disparaître. La perspective d’épouser cet homme affreux suffit à chasser instantanément ses pensées heureuses. Vipérine le sent, elle glousse et se frotte tendrement contre sa maîtresse. C’est fou comme les cavalins sont de vraies éponges à émotions.
Bien qu’épuisés tous les deux, nous reprenons la route de Tys-Beleth d’un pas traînant. Inutile de faire demi-tour et de retourner à Ambreciel, nos familles seraient privées d’eau potable par l’intendant du Guet. Sans compter qu’il serait suicidaire d’essayer de regagner la Cité-Monde à travers la Grande Dévoreuse sans aide.
« C’était très courageux de ta part de rester à mes côtés, dis-je à Syndra en guise de remerciements. Cette tempête de roche aurait pu te tuer.
- Nous sommes des Trompe-la-mort, pas vrai ? répond-elle. Tu ne m’abandonnerais jamais seule au fond des mines, alors c’est hors de question que je te laisse ici. »
J’acquiesce d’un hochement de tête reconnaissant. Syndra a raison : pour nous qui bravons les profondeurs de Tys-Beleth, s’entraider est une nécessité absolue pour rester en vie. Les Fangeux qui travaillent à la surface doivent supporter la chaleur et se protéger des attaques de pillards, mais ceux qui descendent dans les mines affrontent des périls plus dangereux encore.
« Est-ce que je peux te poser une question indiscrète ?
- Je pense savoir ce que tu vas me demander, Salim. Mais vas-y, je t’écoute.
- Ce prisonnier que tu essaies de sauver, tu le connais ?
Syndra pousse un long soupir. Je peux lire sur son visage qu’elle n’a pas envie de me répondre. On dirait que je viens juste de lui poser la question qu’elle redoutait. Pourtant après un moment de silence, elle murmure à voix basse :
- Si je te raconte ce que je sais, peux-tu me promettre de ne pas le répéter ? »
Je lui adresse un sourire moqueur et je blague au sujet d’une fanfare qui va faire le tour d’Ambreciel pour l’annoncer dès demain à tous les habitants. Hélas, cette fois mon humour semble la laisser de marbre.
« C’est très important Salim, je ne plaisante pas. Personne ne doit être au courant, surtout pas le capitaine Dolan.
- D’accord, dis-je en retrouvant mon sérieux. Tu as ma parole. Sur la mémoire de mon père, je jure de ne jamais trahir ton secret. »
Elle hésite encore quelques secondes puis acquiesce finalement d’un air résigné. Tous ces mystères me font imaginer des choses improbables, j’ai l’impression qu’elle va m’annoncer que cet homme est un Anormal ou un démon. Mais malgré tout je reste loin de la vérité. Incrédule, je lui demande de répéter une deuxième fois pour être sûr d’avoir bien compris sa réponse.
« C’est la célèbre Main-Noire, me confirme-t-elle. Je la connais depuis des années. J’étais même son apprentie jusqu’à l’hiver dernier. »
Je me fige comme un imbécile et je dévisage mon amie, immobile et la bouche ouverte. Nom d’un Souterreux, vous y croyez à celle-là ? D’abord la princesse d’Ambreciel qui m’apparaît en songe et maintenant ce soldat ivre qui serait Jaken Main-Noire en personne ?! Soit je suis en train de rêver, soit j’ai reçu une sacrée pierre sur le crâne pendant la tempête. Syndra ne peut s’empêcher de rire devant ma tête d’ahuri.
« Tu étais son apprentie ? Tu es sérieuse ? »
Elle acquiesce avec conviction. Pendant que nous marchons pour rejoindre la caravane, elle se met à me raconter sa vie aux côtés de Jaken et tout ce qu’il lui a enseigné. Je l’écoute en silence, complètement fasciné. Cette histoire me paraît encore plus dingue que l’apparition de Ceara dans le souffle de la Dévoreuse.
« Jaken m’a entraînée pendant deux ans environ. Il m’a appris à crocheter des serrures, à me déplacer silencieusement sur les toits et à changer d’identité en quelques instants. Avec lui je me sentais libre, on pouvait franchir toutes les portes et s’inviter dans les plus belles réceptions ! Tu n’imagines pas tout ce qu’on peut faire avec quelques vêtements, un peu de maquillage et de la teinture pour les cheveux ! »
Elle continue de me raconter ses exploits, emportée par son enthousiasme. Je découvre avec stupéfaction une autre facette de mon amie dont je n’avais jamais soupçonné l’existence. Une Syndra aventureuse, qui aime le danger et qui n’hésite pas à prendre des risques, qui s’amusait à parcourir Ambreciel la nuit pour visiter toutes sortes d’endroits interdits.
« Il m’a fait voir tellement de choses incroyables, Salim ! Nous avons cambriolé des marchands, pillé le garde-manger de l’intendant du Guet, visité le manoir de la famille Ravinel ! Il m’a même emmenée sur une tour du Palais d’Ambre pour admirer la Cité-Monde au coucher du soleil ! »
Je continue de l’écouter pendant de longues minutes sans faire de commentaire. Maintenant que Syndra a commencé à se confier, j’ai l’impression qu’il est impossible de l’arrêter. Elle m’explique en détail le déroulement de leurs sorties nocturnes, les subterfuges pour échapper au Guet quand un cambriolage tourne mal, les heures passées à jouer les funambules sur des fils à linge tendus entre deux façades. Jaken lui a donné des cours d’histoire, lui a appris à parler comme une Vertueuse, lui a montré comment fabriquer toutes sortes d’explosifs et de fumigènes. Il confiait à Syndra des missions quotidiennes pour l’entraîner à se fondre dans la masse : pénétrer dans des manoirs vêtue comme une domestique, assister à une cérémonie religieuse parmi les prêtresses de Ran, effectuer un retrait chez Jerman&Sœurs en se faisant passer pour la pupille d’un marchand. Pendant presque deux ans, Syndra était ses yeux et ses oreilles dans les bas-quartiers d’Ambreciel : elle se promenait, observait, interrogeait les gens et lui racontait tout ce qu’elle apprenait au cours de ses journées. Jaken ne l’épargnait pas et la poussait sans cesse au-delà de ses limites ; il disait ne vouloir s’entourer que des meilleurs car lui-même n’avait jamais échoué lorsqu’il acceptait un contrat.
Le temps passe, le paysage défile sous mes yeux. J’en oublie presque que nous sommes en train de marcher dans la Dévoreuse et qu’une tempête de roche a failli nous tuer une heure avant. Syndra m’entraîne avec elle dans un autre monde plein de dangers et d’aventures qui n’a rien à voir avec le quotidien sombre et ennuyeux des habitants des Fosses. Elle parle de Jaken avec admiration, évoque ses souvenirs d’une voix pleine de nostalgie. À travers elle je découvre une Ambreciel très différente de celle que je connais ; une ville où chaque jour est une opportunité à saisir, où les portes verrouillées sont des défis à relever et où s’échapper des rives de la Fangeuse n’est finalement qu’une question d’audace. Lorsqu’elle termine finalement son récit, je me sens partagé entre l’émerveillement et la jalousie.
« C’est incroyable ! Je m’exclame. Je n’en reviens pas que tu sois l’apprentie de la Main-Noire et que tu ne m’aies rien dit !
- Je l’étais, me corrige-t-elle. Je ne travaille plus avec Jaken depuis l’année dernière. Je suis une Trompe-la-mort désormais.
Je hausse les sourcils d’un air intrigué.
- Je ne comprends pas pourquoi tu as arrêté de l’accompagner pour venir trimer à Tys-Beleth.
- Ce n’est pas moi qui ai pris cette décision, Salim. Quand mon père a su que Jaken m’avait prise sous son aile, il est devenu furieux. J’ai entendu leur dispute un soir. Il disait que cette vie-là était trop dangereuse pour moi, qu’il voulait que je sois honnête et que je l’aide à faire fonctionner l’école. Jaken lui a promis que dès le lendemain il mettrait fin à mon apprentissage.
- Qu’est-ce qui s’est passé ensuite ?
- Mon père m’a interdit de revoir Jaken et de m’approcher des hauts-quartiers. Évidemment, je lui ai désobéi. Je savais que la Main-Noire avait reçu un contrat important pour voler des documents chez un notaire, alors je suis sortie discrètement pendant la nuit et j’ai escaladé le mur de la seconde Enclave pour tenter le cambriolage.
- Tu y es allée toute seule ? m’étranglé-je.
- Oui. Je pensais que si j’arrivais à impressionner Jaken, il prendrait ma défense pour convaincre mon père. Je voulais rester son apprentie.
- Mais ça n’a pas fonctionné, deviné-je.
- Non. Rien ne s’est passé comme prévu. Jaken était déjà sur place quand je suis arrivée. J’ai déclenché une alarme et nous avons dû prendre la fuite. En descendant d’un toit, je me suis foulé la cheville. Au lieu de m’aider, la Main Noire m’a abandonnée sur place et les gardes m’ont capturée. Pendant des heures j’ai espéré qu’il revienne me chercher. Mais je ne l’ai jamais revu. Les soldats m’ont ramenée chez moi par la force et ont menacé de brûler l’école de mon père en représailles. Il a réussi à négocier avec le Guet, mais en guise de punition j’ai été enrôlée dans les caravanes pour travailler à Tys-Beleth pendant cinq ans.
- Mais pourquoi Jaken ne t’a pas aidée à échapper aux gardes ?
- J’ai appris par la suite qu’il avait profité de ma capture comme diversion pour retourner chez le notaire et finir son cambriolage. Il n’a même pas demandé de mes nouvelles ni cherché à savoir ce que j’étais devenue. »
Elle serre les poings en terminant son récit et une larme de déception coule le long de sa joue. De nouveau je remarque que les arabesques sur son bras semblent s’animer lorsqu’elle est en proie à une émotion forte.
« C’est pour ça que tu étais bouleversée quand son nouvel apprenti a été capturé devant la banque ! Parce-qu’il a choisi de l’abandonner comme il l’a fait avec toi !
Syndra acquiesce tristement.
- Oui. Jaken est égoïste, Salim. Il m’a fallu du temps pour comprendre que mon père avait raison. C’est un homme dangereux qui détruit tout ce qu’il touche. Il se sert des gens à son avantage avant de les trahir, il ne connaît pas le remord ni la compassion. Tu ne dois surtout pas t’approcher de lui. »
J’acquiesce distraitement sans vraiment écouter son avertissement. Je suis plongé dans mes pensées, je me rends compte que les révélations de Syndra expliquent énormément de choses qui m’échappaient jusqu’à présent.
« Quand on a entendu les explosions ce matin et qu’on s’est précipités vers Jerman&Sœurs, tu n’essayais pas de rencontrer Jaken. Tu étais inquiète pour lui ! »
Elle me répond d’un hochement de tête affirmatif. Les évènements se bousculent dans ma tête, ils m’apparaissent sous un jour nouveau et je comprends enfin pourquoi mon amie se comportait de manière étrange depuis la nuit dernière.
« Mais pourquoi ? Demandé-je. Pourquoi est-ce que tu te préoccupes autant d’un homme qui t’a fait du mal et qui t’a abandonnée ? »
Syndra détourne le regard, elle baisse les yeux honteusement. Du bout des doigts, elle caresse le museau de Vipérine comme pour se donner du courage. La cavaline vient loger sa tête au creux de sa main et s’y frotte amoureusement. Soudain, l’évidence me frappe comme un coup de poing en plein visage.
« Par les couilles de Morgulath, tu es amoureuse de la Main-Noire ! »
Mon amie reste silencieuse mais elle n’a pas besoin de me répondre. Sa réaction éloquente suffit à la trahir. À l’évocation de ses sentiments pour Jaken, Syndra rougit comme une tomate et un sourire de culpabilité s’étire malgré elle sur son visage. En ce qui me concerne, j’ai plutôt l’impression qu’une main griffue me retourne les tripes et me tord douloureusement l’estomac.
« Bon sang, Syndra ! C’est à cause de lui si tu te retrouves condamnée à Tys-Beleth ! Ouvre un peu les yeux, cet homme est un voleur et un assassin !
- Et alors, tu crois que je ne suis pas consciente de tout ça ? Tu t’imagines quoi Salim, que je peux contrôler mes sentiments à volonté et l’oublier du jour au lendemain ? »
Elle se tait subitement car nous sommes interrompus par des cris et une cavalcade non loin. Des tintements métalliques et des sifflements de cavalins résonnent, quelque-chose soulève un nuage de poussière impressionnant dans l’air. Les bruits viennent de l’autre côté d’une grande dune de sable rouge que nous escaladons à la hâte. Parvenu au sommet de celle-ci, je retiens une exclamation de stupeur et contemple le spectacle de désolation qui s’offre devant moi.
En bas, de la fumée s’échappe d’une longue colonne de chariots brisés derrière lesquels une foule de Fangeux effrayés tentent de se réfugier.
La caravane est presque entièrement détruite.
On en découvre un peu plus sur les personnages (surtout Syndra) et c'est bienvenu.
Par contre - du moins c'est comme ça que je l'ai ressenti - c'est peut-être un peu trop d'un coup, je ne suis pas certain que Syndra aurait balancé autant d'infos en étant amoureuse de son mentor malfrat.
Mais tu sais maintenir le lecteur en haleine à chaque fin de chapitre. Ça c'est un gros plus !
Ça me fait plaisir que tu sois plongé à ce point dans mon histoire, ça montre que j'ai plutôt bien réussi à capter l'attention du lecteur et à proposer une intrigue palpitante :)
Je suis une fois de plus d'accord avec toi concernant les révélations de Syndra sur son passé commun avec Jaken.
Péri me faisait aussi remarquer qu'après la tempête de roche et l'apparition de Ceara, ça venait un peu comme un cheveu sur la soupe. En gros, vu qu'ils viennent de frôler la mort et d'assister une apparition inexplicable, c'est complètement tiré par les cheveux que d'un seul coup, Salim se soucie du prisonnier. D'un côté je suis d'accord avec elle, mais de l'autre je me dis justement que le fait d'avoir frôlé la mort, ça crée une sorte de proximité qui pousse aux confidences, qu'en penses-tu ? Je serais curieux d'avoir ton avis là-dessus.
Encore merci pour tes commentaires,
Ori'
Oui frôler la mort crée une proximité. Mais pour moi, ça la crée entre eux, par pour un tiers.
Si tu veux rattacher plus facilement Jaken au duo, peut-être que tu peux le faire par le biais d'une étreinte. Salim et Syndra s'étreignent (logique après un tel épisode) et (peut-être?) qu'en se serrant l'un l'autre, ça lance un peu le dos endolori de Syndra. Du coup, ça te permettrait de lancer la conversation sur le soldat avec qui elle a une connexion.
Mais effectivement, ça me semble cohérent. Après une telle épreuve, on a logiquement envie d'étreindre l'autre pour se rassurer et montrer son soulagement. C'est d'ailleurs la première réaction de Syndra quand elle voit que Salim est en vie :)
Survivre à une tempête de sable pour découvrir que la caravane est détruite, c’est pas de bol quand même !
Le vent rugit, s’enrage de me voir ainsi échapper à son courroux, redouble d’efforts pour me faire lâcher prise
→ J’aime bien le fait que tu attribues une volonté au vent
« Lorsque tombera l’antre de la Dévoreuse, le Façonneur et les trois apprentis devront se réunir. Le joyau d’Ambreciel resplendira quand sera éveillée sa première Lame. Mais prends garde à Celle-Qui-Marche-Dans-Les-Pas-D’un-Homme, car elle vous trahira pour libérer Morgulath de sa prison séculaire. »
→ Je déteste les gens qui parlent par énigme…
Propositions de correction :
J’ai l’impression de devenir cinglé, le visage de la princesse Ceara m’obsède.
→ Je séparerais en deux phrases à la virgule.
- Parce-qu’il lui arrive parfois d’être de bonne humeur ?
→ J’enlèverais le « parfois »
Effectivement, ils ont survécu à la tempête mais le convoi n'a pas eu cette chance. Tu verras si tu continues ta lecture qu'il y a une explication tout à fait logique à cette destruction.
Le sortilège de Ceara est assez mystérieux pour le moment mais il s'éclairera progressivement au fur et à mesure de l'histoire. La princesse d'Ambreciel est un personnage particulier, il y a souvent une double lecture dans ses propos.
Pour l'instant, c'est normal si ça parait être du charabia, je voulais que le lecteur se sente aussi perdu que Salim et Syndra ;)
Allez je reviens voir comment ils s'en sortent de la tornade.
Tu vas m'étriper, mais tout dans ton texte me fait penser à un YA, pas à un récit de fantasy adulte. Du coup, je ne fais que râler à la lecture, je t'avais prévenu... J'ai écrit un iiimmeense pavé ! 🙂 Ne m'en veux pas trop.
Dans ce chapitre-ci, Sa et Sy s'en sortent de la tornade, grâce à l'apparition de la princesse, puis Sy se met subitement à raconter sa vie à Salim.
Perso, j'ai trouvé les éléments déconnectés les uns des autres et j'ai donc eu du mal à suivre correctement. Donc pour résumer, les deux ados s'en sortent. Sy n'a pas essayé une seconde de protéger Salim sous sa monture et il a failli mourir, emporté par une tornade. Il est couvert de bosses et de griffures, voire pire, mais aucun des deux se semblent s'en soucier, car il est soudain important de dévoiler le secret de Sy et de qui elle est amoureuse. Pourquoi les deux ados se soucient-ils si peu l'un de l'autre ? Sy n'aide pas du tout Salim, que ce soit pendant la tempête ou lorsqu'il est blessé. Salim et Sy parlent rapidement de la princesse qui leur a sauvé la vie, puis s'éternisent alors sur la vie de Sy. Je mets plus de détails dans mes notes plus bas de pourquoi j'ai trouvé ça incongru.
Je n'aime pas non plus l'idée de l'académie des voleurs ou j'ignore comment tu vas l'appeler. Avec ces histoires d'apprentis, tu n'utilises pas la réalité de la pègre dans un monde moyenâgeux (ou moderne). Pourquoi Jaken a-t-il "employé" (ils ont un contrat ?) une gamine gentille comme Sy qui n'a aucune expérience, alors que Jaken, c'est un bandit ? Il ne connait aucun autre bandit ? Il n'y a aucun gamin des rues ou associé qui conviendrait ? Tu dis qu'il a du tout lui apprendre. Tu m'étonnes qu'il la lâche. Et il ne l'a lâche pas en l'utilisant dans une mission, non, il a écouté gentiment son papa. Désolé, je me retiens de ne pas utiliser l'ironie, figure de style interdite sur PA. J'ai donc supprimé un paragraphe par soucis de conformité. Je m'arrête donc là, mais sache que ces affaires de gentil gangster et d'apprenti gangster me font davantage penser à un récit jeunesse, voire YA, qu'à un récit de fantasy à la Gagner la Guerre. Car oui, cette crapule de Don Benvenuto est mon perso de fantasy française préfèré. Il vole, ment, escroque, viole (oui il viole la héroïne), assassine et pourtant il est génial. À coté, Jaken est un voleur gentil, qui s'en fait pour ses "apprenties" et même pour leur réputation (il ne va quand même pas allé contre les réprimandes de papa hein). Il n'est pas super doué, il se fait attrappé et fouetté à sa première mission. En plus, c'est un beau gosse dont les gamines tombent amoureux...
Je t'avais prévenu, c'est pas mon type de récit. J'aime les persos plus durs, moins clichés, plus agés, moins de tropes connus, avec des mondes plus complexes. Que Jaken soit raciste, sexiste, qu'il trahisse ses partenaires, qu'il ne soit pas professeur de l'école des voleurs, qu'il ne pense qu'à l'argent, oui, ça ça m'irait très très bien. En gros, je ne suis pas la team YA.
Mon but est en général d'aider l'auteur à traquer les incohérences, les scènes louches, les persos peu vivants etc, et aussi à souligner ce qui est original et ce qui fonctionne, mais j'ai du mal à le faire dans les récits jeunesse, car je peine à mettre de côté mon âge, mon background et mes lectures. J'espère malgré tout que certaines de mes remarques te seront utiles, sinon n'en tiens pas compte.
Mes notes :
"Soudain je sens avec horreur ma souche se déraciner."
> Le "avec horreur" fait un peu redite avec le "oh non" et le "soudain" est peut-être pas nécessaire, mais peut-être est-ce un enchaînement direct d'avec avant auquel cas je ne sais pas 🙂
"avant de la voir s’envoler dans la tornade."
> Ce "la" se refert à qui ? Syndra ?
"et me déboussole complètement."
> Peut être supprimé à mon avis
"Dans un réflexe désespéré, mes mains agrippent une fissure dans le sol"
> Attends voir, il est proche du sol ? Là je pensais qu'il était carrément entraîné dans une tornade, car tu dis "Le monde n’a plus de haut ni de bas" donc à partir de là, je l'imagine virevolter de partout.
"Dans un réflexe désespéré, mes mains agrippent une fissure dans le sol et je m’empresse de les coincer le plus solidement possible à l’intérieur."
> Le "les" se rapporte à ses mains ? Comment ce geste est-il possible ? Comment les coince-t-il dans une fissure alors que le vent menace de l'entraîner ?? 🤔 Qu'il s'accroche à un machin de toutes ses forces pourquoi pas, mais qu'il glisse simplement ses mains dans le sol me paraît improbable.
"Sa beauté saisissante la rend presque irréelle"
> J'oterais ce "presque"
"et de grands yeux bleus qui évoquent l’éclat d’une mer aux eaux turquoises sous un soleil d’été."
> Ton perso a-t-il déjà vu la mer ? Peut-il employer une telle comparaison ? Ça colle avec son personnage ? Perso je l'imaginais mineur (travailleur de la mine)
"Le monde semble alors s’arrêter de tourner pour se figer dans un carcan de glace."
> Cette phrase pourrait venir avant, car jusqu'à là je me demandais si tu avais oublié la tempête et la lutte de Salim.
"C’est grâce à cette parure magnifique que je parviens à l’identifier."
> Pourquoi ? Où l'a-t-il vu ?
"elle boîte bas au niveau d’un postérieur
> Phrase bizarre
"Depuis qu’on est partis à la poursuite de la Main-Noire cette nuit"
> Ce n'était pas la nuit, mais le matin avant le travail
"j’ai l’impression que ma vie se transforme de plus en plus en cauchemar."
> J'enlèverais "de plus en plus"
> Petite réflexion : sa vie était déjà un cauchemar avant, vu la dureté de son travail à la mine non ?
"et même la putain de princesse d’Ambreciel s’y met"
> Je mettrais "et même la putain d’Ambreciel s’y met" 🙂 ce qui marquerait plus encore son mépris pour la princesse
"je n’aurais pas dû te crier dessus comme ça."
> En effet, elle ne remarque pas qu'il est blessé ? J'ai eu l'impression qu'il a pris cher dans la tornade et il me semblait lasséré de partout ou pire.
"D’une certaine façon je la trouve changée, plus forte et courageuse mais aussi plus grave, comme si les évènements de cette matinée avaient balayé chez elle la joie et l’insouciance. Cette nouvelle Syndra est incontestablement plus adulte, plus belle et plus farouche que la précédente. Mais ses yeux brillent d’une tristesse qui ébranle son assurance. Dans son regard, je retrouve la petite fille effrayée et seule qui cherche désespérément de l’aide et qui rêve que sa vie redevienne ce qu’elle était avant."
> C'est un peu trop "tell" tout ça. En plus, tu te contredis, je n'arrive pas à d'avoir où tu veux en venir. Il la trouve forte mais en fait non. Pourquoi dire qu'il la trouve forte alors ? Ou alors s'il veut la protéger malgré tout, même si elle ne veut pas de sa protection (genre le lourd), pourquoi se dire qu'elle est forte ? Ne devrait-il pas se dire qu'elle est faible au contraire ? Sa réaction me laisse perplexe.
"la Grande Dévoreuse"
> Depuis le chapitre précédent, j'ignore ce qu'est la grande dévoreuse
"- Ce prisonnier que tu essaies de sauver, tu le connais ?"
> Pourquoi revient-il à ce prisonnier ? Le lecteur sait que c'est J, mais Salim devrait se moquer éperdument de ce type non ? D'autant qu'il est blessé en ce moment et choqué par sa vision. Il a failli mourir au paragraphe d'avant et là, il demande un truc sur un inconnu, un garde random aperçu au cours de la matinée pour la première fois de sa vie. C'est comme si disons je tombe dans l'escalier au travail, j'ai eu la peur de ma vie, genre j'ai failli me rompre le coup. Je suis toujours sous le choc avec des bosses au bras et partout, et là un collègue me demande si je connais untel rencontré durant la matinée. Jamais je ne lui debalerais ma vie à ce moment précis, genre que je travaillais avec lui avant et que ça a mal tourné et donc que j'ai choisi un autre job. D'abord, il faut s'occuper de l'essentiel, de la santé de la personne, de sa sécurité. Et puis j'aurais tout simplement pas la tête à cà. Enfin, je sais pas si tu vois ce que je veux dire. La scène ne me paraît pas crédible à cause de la demande en mariage, la tempête de sable et l'hallucination juste avant. C'est comme si rien de tout ça n'avait eu lieu et qu'il décidait d'aller boire un café pour révéler les secrets de leur vie. Bizarre...
Je vois ce que tu veux faire, une sorte de scène de confidence, mais je ne sais pas si ce moment est le plus adapté. On ne dirait pas que Salim est un mineur (au sens gars de la mine), quelqu'un avec un vrai passé, car si c'était le cas dans un monde si dur et violent, il pourrait aussi craindre le fouet pour lui-même. Après tout, on l'a peut-être vu ce matin, son amie est une Anormale, il est pauvre, un moins que rien, et en plus ils se sont mis en retard en restant en arrière. J'ai l'impression que tout ça est eclipsé par les actions de stalkage de sa copine qui sont mises au premier plan, comme si sa vie entière en dépendait, sans s'attarder sur les sentiments et la vie de Salim lui-même.
"Je peux lire sur son visage qu’elle n’a pas envie de me répondre. On dirait que je viens juste de lui poser la question qu’elle redoutait."
> On dirait plutôt qu'ils ont failli mourir. C'est pas franchement le moment propice aux longues discussions. Je serais elle, je leverais les yeux au ciel ou alors je m'inquièterais pour les nombreuses blessures de Salim, ce qui serait quand même plus cohérent s'ils sont amis. Pourquoi ne lui dire que maintenant ? Qu'est-ce qui fait qu'elle a envie de se livrer à lui dans cette situation ? Si elle lui a menti toute sa vie, c'est qu'elle a une bonne raison. Soit elle ne lui fait pas confiance auquel cas ce serait toujours le cas, soit elle lui aurait dit avant ou alors Salim a découvert un truc et il la met face au mur, elle n'a plus le choix que de lui dire la vérité. Là je peine à comprendre, d'autant que la situation ne s'y prêtre pas.
"Nom d’un Souterreux, vous y croyez à celle-là ? D’abord la princesse d’Ambreciel qui m’apparaît en songe et maintenant ce soldat ivre qui serait Jaken Main-Noire en personne ?! Soit je suis en train de rêver, soit j’ai reçu une sacrée pierre sur le crâne pendant la tempête. "
> Attention au ton de tes chapitres. Avec Jaken, tu étais en mode humoristique, ton que tu as direct brisé avec la scène de torture (ce que je trouve dommage comme tu sais). Ensuite avec Salim tu n'as plus de ton humoristique non plus, mais là dans ce paragraphe si. Comment ça se fait ?
Remarque : tu utilises le terme apprenti pour désigner le partenaire de Jaken. Est-ce bien le bon terme ? Ce terme m'a aussitôt plongé dans le YA où il est toujours question d'apprentis, même dans des situations bizarres. Là récemment je lisais un récit sur PA avec l'Académie de la mafia (sans que le récit soit comique). Je pense qu'utiliser un autre terme qu'apprenti, comme associé ou partenaire, serait plus adapté, d'autant qu'on est dans la pègre. J'ai aussi l'impression que Jaken agit en solitaire, mais je me trompes peut-être, donc je le vois mal mettre une annonce dans le journal pour trouver un apprenti quoi, mais plus qu'il accepte la compagnie de gamins des rues pour réussir ses coups, soit en les faisant plonger à sa place en mode gros batard, comme dans le chapitre 1, soit parce qu'ils bossent ensemble quoi et se partagent les gains à la fin. Au passage, je trouvais ça cool que Jaken soit sexiste et déguelasse, voire qu'il abandonne carrément sa partenaire sans pitié. Dommage qu'après tu dis qu'il veut aller la sauver et lui donne sa veste comme un héros. Moi je l'aurais fait plus crevard. Mais après tu serais plus dans le récit adulte que dans le YA. Mais tu me dis que tu veux un récit plus adulte ? Je peine à te suivre. Ton texte ne marche pas ce que tu me dis dans les commentaires.
Bon si tu as par la suite une école des voleurs, c'est ok ce terme je pense (pas pour moi hein, je ne supporte plus de lire ce type de récit. Une école des voleurs et je tombe à la renverse. Récemment sur Netflix, ils ont carrément fait l'académie des gens bizarres ou va Mercredi de la famille Adams. Une bonne idée pour ruiner l'image de ces films de mon enfance. J'attends l'académie des dictateurs ou un truc du genre. C'est la seule académie que je n'ai pas encore vue. En mode humoristique, je suis sûre que ça serait drôle en plus. 🙂
"Le temps passe, le paysage défile sous mes yeux. J’en oublie presque que nous sommes en train de marcher dans la Dévoreuse et qu’une tempête de roche a failli nous tuer une heure avant."
> Nous on l'oublie aussi. Ton exposition juste avant est soit trop longue soit trop courte. Trop longue parce que c'est que du tell et on a envie de lire en diagonale parce que bon 3615 la vie de Sy. Ou trop courte car on aimerait connaître ses émotions, ses sentiments, ce qui s'est passé, pourquoi elle a besoin de voler etc
"Jaken lui a promis que dès le lendemain il mettrait fin à mon apprentissage."
> Je suis triste que Jaken soit si gentil au final. Au début, je crois que j'aurais aimé suivre un voleur. Pour être tout à fait franche, j'aurais préféré suivre un anti-héro qu'un voleur chic type affublé de deux ados. Tu reviens dans le YA. Je t'avais prévenu, dans le YA, je ne fais que râler, il m'est impossible de lire ça.
"Les soldats m’ont raccompagnée chez moi"
> Dis-donc, ils sont chics les soldats. Les soldats et les voleurs sont gentils. Avec la scène de torture, tu veux montrer que non ? Mais ce n'est pas cohérent avec le reste selon moi. Si on chope un voleur la main dans le sac, c'est rideau. D'ailleurs ici au Japon, ça rigole pas non plus avec le vol. Une eléve de mon mari qui a 12 ans a volé des chouchous à la supérette de quartier. Elle a filé dans une cellule au commissariat du coin direct, jusqu'à ce que les parents viennent chouiner, mais c'était pas gagné il paraît. Je peine à croire que dans un monde où il est toléré de tuer arbitrairement en fouettant des gens lambda dans la rue, des gardes qui plus est, des policiers, puissent être gentils avec des voleurs. Pareil avec l'arrestation de la gamine du chapitre 1. Vu qu'ils peuvent tuer des gardes sans soucis, pourquoi ne la tuent-ils pas ?
Trop d'incohérences dans les récits YA, je risque d'y passer des heures...
"Mais pourquoi Jaken ne t’a pas aidée à échapper au Guet ?"
> Parce que c'est un gangster normalement non ? Jakeen me paraît de suite plus fade. (Bien sûr, il y avait la scène de torture pour ça aussi)
"je me rends compte que les révélations de Syndra expliquent énormément de choses qui m’échappaient jusqu’à présent."
> Ah bon ? On ne connait pas assez tes persos pour comprendre pourquoi. Qu'est-ce qu'elles expliquent ?
Bon, on revient au point initial : je risque de te donner des remarques négatives, ce qui est interdit ici et décourageant peut-être. Or, je ne veux pas décourager, ce n'est pas mon intention. Je ne suis vraiment pas ton public cible, je ne suis même pas sûre que ce soit judicieux de tenir en compte mes remarques. Si tu veux un gentil voleur, des histoires d'amour d'ado, une académie des voleurs etc, je pense que ça peut plaire à un certain lectorat. Ça peut être très bien, surtout ici sur PA où 80% des récits sont YA justement. Je ne sais donc pas si mes remarques t'aident et je ne sais même pas à quel point les commentaires comme les miens sont acceptés ici. En général, c'est 2-3 lignes pour motiver l'auteur et moi je débarque avec un pavé ! Je veux bien continuer si tu penses que cela t'aide, mais sinon dis-toi juste que le récit est trop orienté jeunesse pour moi et jette toutes mes remarques ! Fais-moi donc signe si tu veux que je poursuive, à tes risques et périls quoi 😄
Encore une fois merci d'avoir pris le temps de rédiger l'un de tes fameux pavés ! Tu ne cesses de dire que tu as peur d'être blessante ou décourageante, mais moi je trouve ça hyper intéressant et positif car tu me donnes un autre regard sur mon texte et tu m'obliges à me poser des questions sur mon scénario, à peser les choix que je fais dans mon écriture. Ça ne veut pas dire que je garde forcément toutes tes idées ou tes remarques, mais c'est précieux pour prendre du recul et améliorer un texte. La critique est toujours bonne à prendre tant qu'elle est constructive :)
Déjà, je viens sur le fond. On ne sera jamais d'accord sur ce débat YA/pas YA, donc je vais le clore une fois pour toutes : peut-être que mon texte a des accents YA de ton point de vue, mais il n'est absolument pas écrit dans cette intention. Oui, il y a deux personnages adolescents. Oui, au début ils sont naïfs et pleins d'idéaux un peu idiots, on pourrait croire qu'on est dans un récit à la sauce HP ou Mercredi comme tu le dis, où on va les voir aller à l'école et devenir des sorciers, quelque-chose du genre. Mais pas du tout.
"Si tu veux un gentil voleur, des histoires d'amour d'ado, une académie des voleurs etc, je pense que ça peut plaire à un certain lectorat".
Je ne vais pas en dire trop ici pour ne pas divulgâcher mon scénario, mais le monde d'Ambreciel est dur et va se charger de piétiner sauvagement cette vision. Rien ne va aller dans le sens que le lecteur attend (du moins, je l'espère).
Jaken est trop soft ? C'est un homme qui a ses faiblesses sous sa carapace, comme tout le monde. Pourtant, tu verras par la suite qu'il n'hésite pas à se montrer cruel et à tuer dès que c'est nécessaire. Oui, il a recueilli une gamine des rues pour en faire son acolyte (Je vais voir pour remplacer le terme d'apprenti, si ça fait trop YA à ton goût. C'est vrai que ça se discute) et oui, il n'a pas pu se résoudre à la lâcher totalement quand le Guet les a capturés près de Jerman&Soeurs. Ça ne veut pas dire pour autant que c'est un gentil voleur, ça fait seulement de lui quelqu'un d'humain qui est capable de s'émouvoir et d'éprouver de l'affection en dépit du monde impitoyable dans lequel il tente de survivre.
(Et non, il n'y a pas d'école de voleurs à Ambreciel, la seule qui compte dans les bas-quartiers, c'est l'école de la vie tout simplement).
"Les gardes ont raccompagné Syndra chez elle" --> Peut-être que le côté trop gentil de cette phrase est dans le terme "raccompagné". Je vais le remplacer, ramenée de force serait sans doute plus adapté. Tu as raison quand tu dis qu'il manque une notion de brutalité ici.
- "Jaken lui a promis que dès le lendemain il mettrait fin à mon apprentissage."
> Je suis triste que Jaken soit si gentil au final.
--> Oh, mais il ne le fait pas simplement par gentillesse, il l'a abandonnée pour se protéger lui-même. Ça, c'est la vision de Syndra qui idéalise le type dont elle est tombée amoureuse, mais quand on rencontrera le personnage de Ballard, le lecteur va vite s'apercevoir que la réalité est bien différente.
Il est loin d'avoir lâché Syndra juste "pour faire plaisir à son gentil papa".
"la Grande Dévoreuse"
> Depuis le chapitre précédent, j'ignore ce qu'est la grande dévoreuse
--> Si tu n'a pas noté cette info ou si tu l'as oublié, c'est sans doute parce-que tu fais des pauses dans ta lecture. La Dévoreuse, c'est le nom donné à la plaine désertique qui entoure Ambreciel et que tout le monde craint de traverser, c'est expliqué à plusieurs reprises dans les premiers chapitres ;)
- "j’ai l’impression que ma vie se transforme de plus en plus en cauchemar."
> J'enlèverais "de plus en plus"
> Petite réflexion : sa vie était déjà un cauchemar avant, vu la dureté de son travail à la mine non ?"
--> Oui, c'est exactement ce que j'essayais de transmettre avec ce "de plus en plus". Peut-être que "encore plus" serait plus adapté ici, je vais faire la correction.
- "elle boîte bas au niveau d’un postérieur"
> Phrase bizarre
--> Je ne sais pas ce que tu trouves de bizarre ici, "boiter bas" est une expression commune dans le milieu équestre pour parler d'un cheval blessé au niveau d'une jambe. Quant aux jambes justement, celles de devant sont appelées les antérieurs et celles de derrière les postérieurs (oui, on parle bien de jambes pour un cheval et non de pattes). Donc, elle boîte bas au niveau d'un postérieur signifie simplement que Vipérine est blessée en bas d'une de ses pattes arrière, ce qui la fait boiter.
- "Pareil avec l'arrestation de la gamine du chapitre 1. Vu qu'ils peuvent tuer des gardes sans soucis, pourquoi ne la tuent-ils pas ?"
--> Oh, tu vas voir que Ravinel va lui faire subir bien pire. Et l'explication de pourquoi il a choisi de garder Coddie en vie arrive dans les chapitres suivants qui prennent son pdv.
Je ne vais pas reprendre toutes tes remarques car je dois retourner bosser, mais je note bien que tu trouves le passage de confidence après la tempête incohérent et je vais voir comment je peux améliorer les choses.
Garde aussi en tête que tout ça n'est qu'un premier jet qui n'a subi, pour l'instant, aucune retouche ni correction d'aucune sorte. Je ne m'interdis évidemment pas de revenir sur les chapitres par la suite pour modifier des choses et déplacer des informations si ça s'avère nécessaire.
Un immense merci pour ton retour et à bientôt !
Ori'
PS : tu es libre de continuer ou non selon ton envie, je ne vais certainement pas te forcer si tu estimes que l'histoire ne te plait pas ou ne correspond pas à tes goûts. La lecture doit rester un plaisir avant tout ;)
Je ne dis pas non plus que ton début est naz hein, je dis que je n'en sais rien encore et qu'il me faut aller de l'avant pour savoir. S'il est naz à mes yeux, je te le ferai savoir plus tard 😊 (on ne se refait pas haha !)
Donc oui, pas de soucis, je continuerai, afin de pouvoir te rendre un avis plus global. Là ces commentaires chapitre par chapitre ne sont pas non plus les meilleurs je pense, pour consolider l'intrigue et son déroulement, mais c'est bien pour l'aspect micro. Et puis, ça permet une sorte de régularité dans les corrections je trouve (enfin, je parle pour moi)
> Phrase bizarre
--> Je ne sais pas ce que tu trouves de bizarre ici, "boiter bas" est une expression commune dans le milieu équestre pour parler d'un cheval blessé au niveau d'une jambe. Quant aux jambes justement, celles de devant sont appelées les antérieurs et celles de derrière les postérieurs (oui, on parle bien de jambes pour un cheval et non de pattes). Donc, elle boîte bas au niveau d'un postérieur signifie simplement que Vipérine est blessée en bas d'une de ses pattes arrière, ce qui la fait boiter.
>>> Ce que je ne comprends pas dans cette phrase, c'est pourquoi postérieur est au masculin si c'est une patte ou une jambe ? Ça semble se référer à un truc postérieur formulé ainsi.
"elle boîte bas au niveau d’une jambe postérieure" ?
Hihi, je suis toujours surprise par le nombre de trucs qu'on lit pour écrire nos textes 😊
C'est vrai que Salim et Syndra ont une relation très particulière mais pour te rassurer, à l'heure actuelle je n'ai pas prévu d'histoire d'amour entre eux 😅
Personnellement je vois plus son comportement comme celui d'un frère un peu possessif, qui l'admire et en même temps est un peu jaloux d'elle car elle est plus forte et déterminée que lui, donc il a tendance à saisir toutes les occasions pour montrer que lui aussi peut la défendre.
Je termine ce pdv de Salim. Très bonne révélation sur le lien entre Syndra et Jaken. Je me doutais qu'il y avait quelque chose entre les deux (perspicace n'est-ce pas ^^) mais je n'aurais pas imaginé qu'ils se soient côtoyés si longtemps.
Je ne sais pas encore trop quoi passer de l'apparition de la princesse. Je n'en devine pas encore vraiment les conséquences donc j'attends de voir. La description que tu fais d'elle est bien réussie.
La chute de chapitre est très bonne. On se demande ce qui a pu provoquer une telle catastrophe.
Curieux de découvrir le prochain pdv (et pressé de retrouvé Jaken on va pas se mentir xD).
Un plaisir,
A bientôt !
Et oui, Syndra et Jaken se connaissent bien. C'était déjà sous-entendu depuis le chapitre 3 quand Jaken évoque "mon ancienne apprentie", ou lorsqu'il se rappelle de leur première rencontre "des années plus tôt" en la voyant calmer Vipérine.
Le fait que Jaken connaisse Ballard indiquait également qu'il connaissait forcément sa fille.
L'apparition de Ceara dans la tempête est mystérieuse pour l'instant mais va trouver un premier éclairage dans le prochain chapitre. Et j'insiste sur "premier", car forcément je ne fournis pas toutes les réponses d'un coup !
La coupure de fin de chapitre me paraissait logique, il y a une transition nette dans le récit au moment où Salim escalade la dune et découvre le spectacle de la caravane détruite. Quant au pourquoi de cette destruction, j'ai déjà laissé traîner quelques indices qui peuvent te mettre sur la piste... ;)
Jaken reviendra dans le chapitre 6, le prochain est consacré à Coddie !
Bonne lecture et à bientôt :)
Ori'