Satin bleu roi

Je le dis sans complexe

J’aime mon sexe.

 

Je n’avais pas remarqué sa présence, jusqu’à il y a peu. Pourtant, je dois admettre qu’il a toujours été là. Ces gens transparents qui un jour, au détour d’un mot ou d’un regard, deviennent lumineux à vos yeux, investissent brutalement leur corps et obtiennent de vous le statut de présent.

Présent donc important, remarquable.

C’est ainsi que ça s’est passé.

Quel mot m’a-t-il dit ? Quel regard m’a-t-il lancé ? Je ne sais, mais un jour du dernier été, brutalement, j’ai ressenti sa présence et il est devenu important pour moi.

Si je n’avais aucune attention pour lui auparavant, aujourd’hui je déborde d’affection.

 

J’ai choisi du satin

Pour y faire son écrin

 

Ce fut mon premier cadeau pour lui. Nue, je l’admirais. Sa forme douce, toute faite de courbes gracieuses, son duvet lisse si agréable au toucher, le mystère de ce pli fermant à la vue tant de contrées à découvrir.

Puis couvert de coton, il perdait de sa superbe, retournant à son statut d’invisible. Je ne pouvais plus supporter de le traiter ainsi. Il méritait tellement mieux.

Je le voulais admirable, même caché, que la seule idée de sa présence soit déjà un enchantement.

Tel un roi, il devait se distinguer par de précieuses étoffes à la coupe unique, le luxe soulignerait son rang de seigneur de mon corps.

Je ne fus pas longue à trouver cette culotte d’un satin raffiné et délicat. Lui aussi approuva, ainsi couvert il restait magnifique, tout en courbes, tout en mystère, doucement protégé, mais nullement effacé.

Il n’a plus jamais revu de coton depuis... De toute façon, il n’en voudrait pas. Je le sais, il me l’a dit.

 

C’est l’heure du câlin

Je le couvre de ma main.

 

Nous ne faisons pas que parler, nous nous touchons.

Nous sommes comme la nuit et le jour, le noir et le blanc. De ma main extérieure, je le touche et lui, en retour, d’une main invisible et intérieure il me procure mille sensations.

Dès le premier contact, ce lien intime fut évident. Je n’ai pas eu à exiger tant de plaisir en retour, il l’a offert de lui-même, cela ne se discutait pas.

Tel un inconnu qui, en quelques paroles échangées, vous devient aussi familier que si vous l’aviez toujours connu. C’est ainsi que ça s’est passé. Mes doigts ont tout de suite trouvé les mots pour lui parler. Ses doigts intérieurs ont su me répondre de la plus délicieuse des manières.

Je lui parle souvent d’amour, je lui lis le scénario, je lui donne les images, il ajoute l’univers des sens, essentiel... À nous deux, notre romance s’incarne littéralement. Je me sens si vivante depuis qu’il est mon complice.

 

Des vagues de déraison

Sur une plage de sensations

 

Souvent, j’imagine mon corps comme un bord de mer, la partie émergée est si sage, je suis la fille qu’on attend que je sois. Mes rochers bien ancrés au sol, mon sable si fin, mes dunes impeccables et si elles bougent un peu, ce n’est que par l’action lente du vent.

La partie immergée est orageuse, violente, rongée de vagues gourmandes qui montent à l’assaut de la côte. Cachée, mais si présente par le long rugissement de l’eau qui frappe le sol au milieu d’une écume coupable.

Les gens bien s’attardent sur les grains secs, marchent sagement, tout au plus ils pointent leur regard sur l’horizon. Mais je ne suis pas une fille bien.

L’été dernier, j’ai mis mes mains dans l’eau, caressé les galets lisses et humides. J’ai abandonné mon corps aux caprices de l’océan. J’ai voulu oublier de nager, j’ai désiré couler.

J’ai appelé les vagues pour qu’elles submergent ma côte, qu’elles trempent mon littoral de sueur et de tempêtes.

J’étais maladroite et peu au fait des choses de la mer.

Mais les vagues sont venues.

Fortes, puissantes, tourbillonnant mon corps entier au gré de leurs désirs, de mon plaisir.

Puis me rejetant sur la grève, épuisée, haletante, se retirant comme un amant craintif, les vagues laissent un goût salé sur ma peau... Le souvenir de notre union.

 

Je veux juste dire merci

Un merci à la vie

 

Ce n’est pas anodin d’avoir soudain un sexe sous sa responsabilité.

J’aurais pu fuir ce moment et snober celui qui voulait devenir mon roi. Lui dire crânement que je n’avais pas besoin de lui, que je m’étais bien débrouillée seule jusque là.

Lui dire qu’on ne débarque pas dans la vie des gens comme ça, qu’on s’annonce à l’avance, qu’on s’écrit un peu d’abord, que l’on convient d’un rendez-vous, qu’on s’échange des photos.

Lui expliquer les coutumes, les plages de sable sec, l’inconvenant bruit du ressac et les gestes barrière.

Lui expliquer la lente mort dans les règles sociales.

Mais j’ai eu envie de vivre.

Et je vis...

Merci.

 

 

 

 

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m00ndrip
Posté le 03/02/2021
Eh bien, je ne sais que dire... Le texte est... Envoutant, c'est le mot. Ton style d'écriture est tout simplement fascinant, les moments où je me laisse porter par les mots à ce point sont devenus assez rares, et je te remercie pour m'avoir fait ressentir cela une nouvelle fois. A l'occasion, je lirais avec plaisir d'autres de tes textes !
mariedeloin
Posté le 03/02/2021
Un doux merci, aussi doux que ton message !
Tes encouragements me donnent plein de force.
Goutte de Lune, c'est tout un programme ton pseudo...
Fy_
Posté le 14/01/2021
Bon, je me lance !
C'est vrai quoi, ya pas à avoir honte de dire ce qu'on pense, quel que soit le sujet, tu as raison !
J'ai beaucoup aimé ton texte, très délicat et sensuel. Tu oses parler de choses encore taboues pour notre société tout en le présentant sous un angle très agréable. Il y a un certain choix des mots qui est fait sans détour, mais sans vulgarité non plus, c'est très bien mené :)
J’espère découvrir d'autres de tes textes, merci à toi pour ce partage et à bientôt ! :)
Au plaisir de te lire,
Fy
mariedeloin
Posté le 14/01/2021
Ooh merci!
Tu ne peux pas savoir comment ça me rassure.
J'aime tes mots, c'est exactement dans cet esprit que j'ai voulu aborder ce sujet ! C'est un vrai plaisir de découvrir ce premier commentaire ! MERCI
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