Dong…
Le son grave de la cloche résonne à travers tout le village.
Dong…
Je porte la main à mon épée. À partir de maintenant, il peut arriver à tout moment. Je scrute les maisons alentour, à l’affût.
Dong…
Toujours rien. Impossible de savoir d’où il viendra. Seul mon pendentif m’apporte un tant soit peu de réconfort, de sentiment de sécurité.
Dong…
Un cercle écarlate gravé de runes apparaît au sol. Le ciel s’assombrit, les nuages s’amassent, la tension s’épaissit. Le cercle se met à briller d’une lueur malfaisante et un coup de tonnerre retentit au loin. Le ciel lui-même ne souhaite pas voir cette aberration apparaître sous son toit.
Dong…
Je serre le pommeau de mon épée de toutes mes forces. Il est venu.
Dong…
Une tête de bouc émerge du sol, avec ses grandes cornes recourbées et ses pupilles rectangulaires où brille une intelligence malaisante. Un torse d’homme massif s’ensuit, ainsi qu’une paire de jambes munies de sabots. Le tout fait plus de cinq coudées de haut, et presque trois de large.
Dong…
Il reste là où il est apparu, immobile. Son puissant torse se soulève au rythme de sa respiration calme et profonde. Ses yeux d’ébène, plongés dans les miens, reflètent toutes les horreurs des enfers qu’il a vécues.
A sa hanche pend une rapière rouge. Sa lame, tournée en une longue spirale de métal écarlate, semble aussi acérée que la mienne est émoussée. Sa légèreté et sa prestesse narguent mon manque de finesse. Il a bien choisi son arsenal, le fourbe. Munie de ma grande et lourde épée, jamais je ne pourrai rivaliser avec sa vitesse.
finesse
Dong…
- Enfin, tu viens me rejoindre… sonne sa voix d’outre-tombe.
Il écarte grand les bras, voulant m’attirer dans l’accolade que se donnent les frères et sœurs.
Dong…
Je reste muette, rassemblant ma rage.
Dong…
- Jamais… gronde-je.
Dong…
Un sourire triste naît sur ses lèvres. Sans rien dire, il tire élégamment sa rapière de sa ceinture avec un long crissement et se met en garde.
- Ma déception n’aura d’égale que ma férocité. Je t’attends.
Dong…
Je reste muette. Lentement, je tire ma lame de sa gaine. Ma lame, qui m’a tant de fois sauvée. Ce n’est que justice qu’elle m’accompagne, elle qui fut là tout au long de mon périple. C’est ici que mes errances prennent fin, quelle qu’en soit l’issue. Je porte mon pendentif à mon front, ultime prière à un dieu qui ne m’a jamais écoutée, et l’arrache avant de le jeter au loin.
Dong…
J’embrasse mon arme en un dernier hommage avant de me mettre en garde. Ici et maintenant ma quête s’arrête. Ici et maintenant je vais mourir, et seul le Destin peut décider de ma renaissance.
Dong…
Je commence à avancer lentement, sûrement. Face à moi, mon adversaire fait de même. La distance qui nous sépare se réduit. Huit pas. Six pas.
Dong…
Arrivés à quatre pas, nous nous arrêtons et nous toisons l’un l’autre.
Dong…
Puis, avec un cri de rage, je me jette à corps perdu dans le combat.
Dong…
Dong…
Dong...