un balai sur les pignons

Par Erioux
Notes de l’auteur : À partir d'ici, je vais tenter de réduire les chapitres pour faciliter la lecture

Gwion et monsieur Ficher n’en croyaient pas leurs yeux. Jamais ils n’avaient contemplé de couleurs aussi chatoyantes et iridescentes. La pierre d’Anna devait peser plus de cinq-cents grammes.

  • Je pense qu’il s’agit d’une opale ou d’une pierre de lune supposa le marin en tentant d’en estimer la valeur. Je n’en ai jamais vu d’aussi belle ni d’aussi grosse. Elle doit bien valoir un millier de francs ou même davantage.
  • Ouaaa ! Cela expliquerait le rapt de ta grand-mère. Ils vont exiger une rançon ou un échange, ajouta Gwion. Tu veux en faire quoi?
  • Je ne sais pas. Je leur donnerais tous ce qu’ils veulent pour récupérer Irène… mais je crains qu’ils ne désirent pas uniquement la pierre… Ceux que j’ai vus au port n’étaient pas humains. Je ne sais plus quoi penser, pourquoi ai-je ouvert cette trappe ? Anna saisit le panneau ramené par son ami et fit mine de le lancer.
  • Tu as de la famille qui pourrait te soutenir? Une place où crécher? Monsieur Fisher fixa Anna qui se réfugia derrière ses paupières. Tu sais, tu peux demeurer ici… le temps que l’on retrouve… ta grand-maman, il avait la gorge nouée. Puis, il chercha le regard fuyant du garçon. Gwion, si tu veux, tu peux également rester, tu pourrais protéger la petite blatte… l’appartement est bien assez grand pour nous trois.

Les deux enfants offrirent à monsieur Fisher un inestimable sourire, serti de paillettes d’or et de diamant si pur qu’il se promit de ne jamais abandonner les deux mouflets.

Les trois compagnons d'infortune enlacèrent leur bras et sanglotèrent silencieusement  autour de l’opale mystérieuse.

*

En quelques jours, la routine familiale s’installa dans le petit appartement. Tôt le matin, monsieur Fisher se rendait au port pour y trouver du boulot. Les enfants laissés à eu même préparaient les repas ou déambulaient dans les rues, libres. Anna, travestie en garçon, suivait Gwion lors de ses expéditions douteuses : sauter une clôture et fuir un chien enragé, voler d’une corde à linge le caleçon d’une dame et l’enfiler sur sa tête ou bien lancer des cailloux aux carreaux de Gwenn dents noires. Anna devint une véritable petite polissonne.

Mais ces amusements ne faisaient qu’animer les pauses d’une terrible enquête. Les enfants cherchaient à retrouver Irène et ses kidnappeurs. Ils questionnaient les pêcheurs, le brasseur et le briquetier : personne n’avait rien remarqué. Ils regardaient par les fenêtres, écoutaient aux portes; aucun indice, pas de bruit suspect, rien de la sorte… rien. Anna s’était-elle imaginée ces hommes en noir? À la fin de la journée, ils revenaient vers leur QG pour le souper en se souhaitant plus chance le lendemain.

*

Le sabot avait volé au visage de monsieur Fisher. Gwion glissant sous la table tentait d’échapper à Anna qui voulait l’assommer avec le balai. Loup de mer désirant participer au jeu l’agrippa par le fond de culotte. Un javelot ménager traversa la pièce et passa à travers la lucarne.

  • Vous allez cesser vos querelles tous les deux, éclata monsieur Ficher au même moment que le carreau, vous êtes insupportables, vous allez tous briser si vous continuez ainsi ! Monsieur Fisher regardait, découragé, le ravage qu’avait causé le passage de la tornade juvénile dans le logement.
  • C’est Gwion, il m’a encore traitée de pouilleuse et m’a tiré une natte. J’exige qu’il me présente des excuses, ordonna la princesse de la maison.
  • Pardon? C’est toi qui m’as traité de fainéant parce que tu n’étais pas capable de laver la cocotte de fonte seule… cocotte, cotte, cotte, répliqua le petit roi en imitant la poule.   
  • Silence ! Je ne peux plus vous endurer, je sors. Vous allez me ramasser cet appartement et retrouver le balai que vous avez lancé par la fenêtre, avant mon retour.

Les deux enfants coururent vers la lucarne pour constater que le balai avait atterri sur le toit d’un édifice voisin. Comment allaient-ils le récupérer?

  • Je crois que je peux monter jusque-là à partir de la ruelle, argua Anna. La complicité entre les deux altesses était réapparue et ils élaboraient, côte à côte le plan d’extraction.
  • C’est très haut, si tu tombes, tu risques de te briser le cou… et tu vas avoir le vertige.
  • J’ai l’habitude des hauteurs… elle leva le bras pour lui indiquer une corniche, tu vois la frise sous la gouttière? Si tu me fais la courte échelle, je pourrais l’atteindre et me hisser le long du solin… ensuite…
  • Ça va j’ai saisi et moi je reste planté, inutile à attendre ton retour? Conclus un Gwion à l’amour-propre chiffonné.
  • Toi, tu es le plus mignon des escabeaux… et tu surveilles la ruelle. Si quelqu’un s’approche, tu imites le hibou, le loup ou la langouste…
  • Bon, j’ai compris… abdiqua Gwion en s’efforçant de se rappeler le cri de la langouste.

La nuit était déjà bien installée sur la rue déserte. Les deux enfants étudiaient la paroi à escalader. De cet angle, le bâtiment semblait manifestement plus haut. Anna qui s’était commise ne pouvait plus reculer.   

  • Tu es certaine que tu veux le faire? Je n’ai qu’à piquer un balai et nous rentrons sagement chez Monsieur Fisher… 
  • Pas question de voler pour réparer notre erreur Gwion… Hum, mon erreur. C’est moi qui ai lancé le balai, c’est moi qui le récupère. Alors, qu’est-ce que tu attends? Prête-moi tes mains qu’on en finisse.

Anna propulsée par Gwion attrapa, tel qu’elle l’avait planifié, la frise. Elle escalada la gouttière en se balançant devant le garçon admiratif. Avec adresse elle rampa le long d’un court appentis, mit le pied dans un œil-de-bœuf pour atteindre un étroit balcon. En équilibre sur la balustrade, elle fit une brève pause pour replacer un de ses sabots glissants.

Houuuuu Houuuuu, dans la ruelle, quelqu’un arrivait.

Une silhouette se dessina à la fenêtre du balcon. Un bourgeois nerveux cherchait à identifier la provenance du hululement. Anna, piégée entre le passant et le curieux se plaqua contre le mur. 

Gwion n’était pas très fier de son cri de hiblougoust… il tenta d’avoir l’air le plus innocent possible lorsque s’arrêta devant lui Budog le chiffonnier.

  • Alors morveux, tu traines encore dans cette ruelle? Tu cherches des embrouilles à mon fils? accusa Budog.
  • Ton fils? Celui qui a une tête de têtard? Nargua Gwion.

Le répugnant vide poubelles tenta d’agripper le guetteur à l’aide de sa gaffe de bois, mais Gwion esquiva la perche, déguerpit et se retourna un peu plus loin pour attirer l’attention sur lui.

  • Allez peigne-zizi, essaie de me rattraper ! provoqua le galopin grimaçant.

L’insulte eu l’effet escompté, l’homme trébuchant de colère poursuivit le petit insolant en battant l’air de sa lance crochue, le bourgeois quitta sa fenêtre, rassuré; c’était juste le chiffonnier qui s’en prenait aux gamins du quartier.

La ruelle était redevenue silencieuse. Anna reprit son ascension. Hop, sur la jardinière, vlan, accrochée à l’auvent et hue, à cheval sur le pignon ! Il était là. Entre la cheminée et la couverture d’ardoise : le trésor des sorcières, le sceptre ramasse poussière. Pas question de se lever avec ces patins dans les pieds ! Anna se traina à califourchon jusqu’au balai. Cramponnée à l’arête du toit, elle étirait le bras pour le saisir.

  • Allez, un peu plus loin, ses longs doigts flattaient la hampe. Juste un peu plus, le balai roula sous son majeur. Je vais t’attraper.

La main sur le balai, elle perdit prise, glissant, griffant les bardeaux, se débattant éperdument vers le vide. La gouttière. Elle planta les talons, se cabra, se redressa en équilibre et se stabilisa enfin, triomphante à dix mètres du sol. 

Gwion de retour à son poste avait assisté à la voltige, terrifié.

  • Attrape Gwion, tu vois, ce n’était pas si difficile ! Elle passa le balai à son acolyte et marcha le long du conduit pour rejoindre le tuyau de descente.
  • Tu es folle, allez, redescends maintenant ! On a le balai, il suppliait Anna en la regardant flâner près du précipice à la manière d’un funambule. 

Le sabot, le traitre glissant, ricocha contre le fer de la gouttière. L’héroïne trop confiante bascula, chutant vers le trottoir et s’y s’écrasa dans un grand bruit mat.

  • Anna ! Anna? Réponds-moi, Anna ! tu m’entends? S’il te plait, réponds-moi. Gwion était couché sur le corps et pleurait de honte. Que devait-il faire? Monsieur Fisher allait le chasser. Le village allait l’accuser.

*

Des cris et des coups avaient sorti le valet de chambre de ses rêveries. Il passa des pantoufles et une veste puis regagna le corridor de service qui menait à la petite entrée donnant sur la ruelle.

  • Qui va-là à cette heure tardive? Vous en faites un de ces boucans.
  • Monsieur, c’est mon amie. Elle est tombée de votre toit. Elle s’est cassé le cou, elle ne bouge plus.
  • Vous ne me servez pas une de vos mauvaises blagues, j’espère? Il avait reconnu Gwion, un vaurien du secteur. 
  • Non, Monsieur, ouvrez-moi, je vous en prie, supplia le gamin.
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Mattarya
Posté le 26/04/2025
Très facile à lire. On sent le moment léger et enfantin, d'une vie presque normale,
avant de basculer à la fin du chapitre avec la chute d'Anna.
Le contenu est parfait, pour ceux qui comme moi ,lisent entre deux marmots qui se chamaillent 🤣
Erioux
Posté le 26/04/2025
Merci:) mes marmots ont 20 et 25 ans, j’ai beaucoup plus de temps pour moi;) ça me permet d’écrire à présent!
Erioux
Posté le 26/04/2025
Merci:) mes marmots ont 20 et 25 ans, j’ai beaucoup plus de temps pour moi;) ça me permet d’écrire à présent!
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