Je ferme les yeux ; le monde s'ouvre. Autour de moi s'éveille dans la pénombre tout un univers endormi. Mon corps comme en suspens me semble si léger dans les premiers pas de mon envol. La pénombre se pose sur mes ailes noires ; le son de ma voix accompagne ma danse ; Je suis une chauve-souris s'éveillant dans les airs.
Petite bête en déroute, chasseur étrange des nuits glacées, je suis seule sur mon territoire. Mes oreilles frémissants au moindre bruit, mes ailes réagissant au moindre vent, rien de ce qui vit autour de moi ne m'échappe. Je suis une chauve-souris expérimentée ; je n'ai besoin d'aucune aide. Le moindre insecte ayant le malheur de sauter trop près de ma trajectoire se retrouvera dans mon gosier. Mais pour cette nuit, la chasse n'est pas ma priorité.
Je suis une chauve-souris solitaire et adulte. J'ai connu toute sorte de vie et de rencontres, d'amours et d'ennemis. Je connais mon apparence et sait la peur qu'elle procure à ceux qui me voient. Après tout, il n'est pas de prédateur que l'on ne craint. La vie d'une chauve-souris, entre la fuite et la chasse, est au final bien déserte.
Les étoiles m'ouvrent les ailes. J'ouvre les yeux ; le ciel clair vient à moi. Plus je m'élève dans les air plus tout ce détail devient minuscule. Dans une infime brise se voit balayé, insectes, vers, maisons et nids d'oiseaux. Je suis une chauve souris de la campagne ; et à cette heure si tardive, plus personne n'a de lumière allumées. C'est une chance pour moi ; nombre de fois j'ai risqué la mort en m'aventurant dans une maison humaine, au plafond si bas et aux habitants si hystériques et paniqués.
La lune réchauffe ma fourrure balayée par le vent. Le froid m'enveloppe même dans cette nuit qui m'est si familière. Malgré tout, la solitude me pèse à en perdre l'appétit. Dans ma vie, peu de fois m'arrive ce genre de coup étranges, ou je me dit qu'au final tout est si petit et sans importance. Malgré tout, désormais, quand ceci arrive, je sais où me diriger. Je traverse d'en haut tout ces village, m'élevant en haut des collines, cherchant à atteindre une vieille maison reclus et en ruine.
Ce n'est même plus une maison, tant elle est immense par rapport au reste des habitations humaines. C'est un véritable manoir, un château à l'abandon, qui ne vaut plus rien, sans doute. Inhabité en apparence, il est une cachette idéale aux souvenirs enfuis. Je ne sais pas ce qui a pu arriver à ce gros tas de pierre bien empiler pour un jour être fui de tous. Je ralentis l'allure, et m'engouffre entre deux pierres abîmées.
L'intérieur froid et humide semble avoir été pourtant abandonné à la va-vite. Nombres de meubles brisés, de lumières fêlées, de miettes de tapis traînent ça et là, comme dans une attente éternelle. Je traverses les différentes pièces, une à une. Montant à l'étage, je sens le vieil escalier de bois prêt à lâcher à tout moment. Je suis heureuse de pouvoir voler.
Enfin, je me pose à une poutre bien solide dans cette pièce si haute. La tête en bas, les yeux bien ouverts, je recouvre mon corps, le protégeant du froid et de l'humidité.
« Bonjour, je lance.
– Bonsoir, me répond-il. »
Un papier peint étrange se décolle des murs fissurés. Dans cette pièce trône un landau de fer, inutilisé depuis des siècles. Dans ce landau se trouvent de nombreuses araignées, qui ne feront jamais partie de mon repas. Et au milieu de ces araignées, se trouve un ours en peluche usé par le temps et l'abandon, gris de son immobilité et l'humidité accumulée.
« Comment vas-tu, ma vieille amie ? Me demande-t-il d'une voix douce.
– Ma foi, je vole, on me fuis et je chasse, ainsi vont les nuits.
– As-tu retrouvé les maîtres que je cherchais ? »
La première fois que je l'ai trouvé, j'ai été bien surprise de le comprendre. Bien seul, j'ai d'abord eu pitié de lui et je suis rendue lui rendre visite, une fois, puis une autre. Ainsi, nous sommes devenu amis, et il me demanda de chercher ceux qui l'avaient perdu. Incapable de bouger, il ne pouvait le faire seul malgré son désir. Je suis une chauve-souris fidèle. Je lui ait promis de lui retrouver ses humains. Depuis ce jour, moi et mes amies nous approchons des humains, des enfants, à la recherche de celui tant attendu. Mais toujours ils pleurent, nous fuient, et jamais je n'ai pu trouver celui qu'attend mon vieil ami, qui se fait bien triste.
« Malheureusement, pas encore. Mais je n'abandonnerai pas. Ils sont forcément quelque part.
– Comment est-ce, la vie, au dehors ? La lune est-elle toujours aussi belle ?
– Le temps passe, et rien ne change. Toujours autant d'insectes, toujours les mêmes étoiles.
– Le vent se fait violent, ce soir ?
– Non, mais il est froid. Nous sommes en basse saison, et l'hiver ne me plaît guère, bien que les nuits soient plus longues. La fraîcheur est dangereuse, pour nous autres. »
Il se fit silencieux. Sans qu'il n'ait besoin de le dire, je sentais mon coeur battre plus vite, comme si il voulait exister pour deux. Je suis une chauve-souris ; et je suis tombée amoureuse d'un ours en peluche. Je soupirai.
– La vie n'est vraiment pas simple…
– Pourquoi te plains-tu ? Tu n'apprécies donc pas tes envols ? Tes insectes ?
– Dans ma vie, tout le monde me fuit. Personne ne m'apprécie. Je ne fais que peur aux enfants, et donne des envies de meurtres aux adultes. J'aimerais connaître la chance de savoir que quelque part, quelqu'un m'aime et m'attends.
– Au moins, tu fais des rencontres, des expériences. Moi, je suis cloué au sol, ne pouvant rien voir d'autre que les toiles d'araignées qui me parsèment. Je n'ai même pas la chance de pouvoir ne serait-ce ressentir ce vent qui te fait tant frissonner… Je n'ai pas la chance de sentir battre un cœur, un muscle sous mon tissu et mon coton. Je ne suis qu'un ours oublié dans un autre temps. Et faute de mieux, ma vieille amie, je t'attendrais toujours, moi. »
A cet instant, je ressentis toute la peine qui pouvait peser dans ses mailles de cotons. Ne sachant plus comment agir, alors, doucement, je me décrochais de ma poutre. Déployant des ailes, planant dans la plus douce des vitesse vers lui, mes pattes s'accrochèrent à son dos.
« Que fais-tu donc ? Me demanda-t-il de sa faible voix douce. »
Je ne répondis pas. Son poids pour moi était considérable, et demandait de la concentration. Mais je réussi à le soulever, d'abord un peu, puis enfin plus haut. Dans un dernier effort, je le hissais jusqu'à un vieil rebord de fenêtre, brisé depuis longtemps, où le vent s'engouffrait dans la pièce. Je le posais alors, face à la vie, et m'installais près de lui.
« Alors, comment-trouves tu la vie ?
– Dire que mon maître est peut-être là, quelque part…
– Peu importe, lui dis-je. Regarde cette lune ronde ; ces étoiles discrètes et lumineuses. Ce vent faisant frissonner feuilles et pierres des alentours. C'est beau, tu ne trouves pas ?
– Oui. Ça vit. »
Nous fîmes silence. Moi qui d'ordinaire regardais si peu, contemplait ce paysage avec l'être qui m'était le plus cher, et enfin il me semblait vivre pour quelque chose qui en valait la peine, bien que minuscule.
– Tu crois qu'un jour ce château sera de nouveau vivant, lui aussi ? Me demanda mon ami de sa voix si émouvante.
– Ne t'inquiète pas, mon vieil ami. Ton heure viendra. Et on s'arrangera, pour continuer de vivre. Un jour, un petit garçon ou une petite fille entrera dans ce château. Il ou elle rentrera, te verra ici, et tombera amoureux de toi, qui paraît si calme et si doux. Ces humains te répareront, et tu vivras heureux. Les murs seront réparés, et tu ne vivras jamais plus aucune fuite. Et jamais plus on ne t'abandonnera.
– Et toi, que deviendrais-tu ?
– Les humains et les chauves-souris ne savent pas vivre sans se faire peur. Je devrai sans doute partir. Mais je ne m'en fais pas, tu seras entre de bonnes mains.
– De toute façon, tout ceci n'est qu'un rêve lointain. »
Comme pour le protéger, je posai alors mon aile sur ses poils abîmés.
– Peu importe. Tant que la lune vibrera, nous vivrons. Et même si je ne peux être dans ce rêve qui t'anime, moi je me plais à vivre cet instant à tes cotés, t'aider à percevoir ce que tes yeux de verre n'osent plus imaginer. Cette existence me suffit. »
Il ne répondit pas. Je fis silence. Pour le reste de la nuit, nous restâmes l'un contre l'autre, se réchauffant de la nuit, admirant l'obscurité. Et jamais celle-ci ne m'avait paru aussi belle.
je vois que tu as écrit plein de trucs sur le site, y a-t-il une histoire où tu as particulièrement besoin de retours ?
Un texte qui se laisse porter par l'imagination de son auteur, j'imagine que tu n'avais pas de plan précis en l'écrivant^^
La description de la chauve-souris est réussie et la description de l'amitié est également très bien écrite. La chute fonctionne.
Quelques remarques :
Tu joues beaucoup avec les temps verbaux, trop ?
" ce genre de coup étranges," -> coups étranges
"à atteindre une vieille maison reclus" -> recluse
"comment-trouves tu la vie ?" le tiret est mal placé
Bien à toi
Je sais pas pourquoi, je trouve que cette histoire avec une stricte concordance des temps est moins jolie, donc je l'ai laissée comme ça, c'est peut-être étrange mais tant pis x)
une histoire ou j'ai particulièrement besoin de retour ... ça dépend de ce tu apprécies aussi ! Les écrits sur lesquels je travaille le plus en ce moment, ce sont "Musique Capsule", "Les fleurs de l'ombre" et "les fleurs du souvenir", et le texte ou j'ai le plus de doute et donc le plus en recherche, peut-être, de retour c'est "l'exploration en forêt des songes" Néanmoins j'aime toutes mes histoires donc s'il y en a une qui te tente plus qu'une autre n'hésite pas x') Et ce n'est pas grave si rien ne te plaît, il n'y a pas obligation à s'imposer ce que j'écris :D
C'est parce qu'en général je n'ai pas forcément de préférences donc je demande à l'auteur.
Il y a des changements de temps passé-présent (au début présent, puis passé (logique car on est dans la rétrospéctive de leur rencontre), puis le temp reste au passé alors qu'on retourne dans le moment présent. C'est juste une information, cela n'a pas dérangé ma lecture.