018

Le soir venu, autour d'une méga salade de riz avec plus de légumes que Noah savait en nommer, Alphonse demanda :

— Alors, que s'est-il passé avec la tortue ?

Noah le dévisagea. Il y avait quelque chose au coin de ses yeux. Alphonse savait.

— Eh bien, euh…

— Elle a parlé, n'est-ce pas ?

John sursauta sur sa chaise et fixa Noah. Il guettait sa réponse avec avidité, les yeux grands ouverts comme un hibou. Noah eut trop peur que son ami se foute de sa tronche, alors il dit :

— Tout le monde sait que les animaux ne parlent pas…

Alors, John regarda en direction d'Alphonse. Puis il revint à Noah. Puis il regarda Alphonse…

— Euh, dit-il enfin. Noah, je ne te l'ai peut-être pas dit, mais Al', c'est un chamane. Il parle aux animaux et aux plantes et elles lui répondent.

Noah se cala contre le dossier de sa chaise et soupira. D'abord ce Théo, puis le démon, ensuite la tortue et maintenant John. Il lui demanda :

— Ah bon, tu y crois aussi, toi ?

— Ce n'est pas une croyance, Noah. Il sait quand les animaux vont mourir ou quand les bébés vont naître. Il peut te dire si une plante qu'il n'a jamais vue est toxique ou pas.

— Ok, ok… Vous êtes tous bizarres. Depuis mon réveil, je croise des gens bizarres. Donc, il est possible que Caroline m'ait… soufflé des idées. Il n'y avait pas de son, donc techniquement, elle n'a pas parlé, hein…

— Mais la voix que ton esprit lui a donnée n'était pas la tienne, précisa Alphonse.

Sans attendre de confirmation, il ajouta :

— Excellent ! Je ne pensais pas que ça te viendrait si vite ! Il a dû faire du bon boulot, ce Théo ! Il est temps que tu deviennes un homme, Noah ! Ç'aurait été un sacrilège de quitter ce monde dans goutter une bonne prune !

Et l'homme sortit trois verres à shot, qu'il ne remplit qu'une fois.