Deuxième jour.
Première heure : cours de maths.
Pas de plan de classe… ce qui signifie : placement libre.
Je m’installe à côté de l’avant-dernière fenêtre, vers le milieu de la salle.
Méline et Ambrinne s’assoient juste devant moi.
Un garçon de la classe, Paul, s’approche et me demande s’il peut s’asseoir à côté de moi.
Je n’ai même pas eu le temps d’ouvrir la bouche que Naïm arrive, pose sa main sur l’épaule de Paul et dit :
— « Casse-toi. Elle veut pas que tu te mettes là. C’est ma place. »
Naïm le pousse légèrement, s’installe à ma droite, le regarde droit dans les yeux et ajoute :
— « Qu’est-ce t’as ? Tu veux que je t’aide à trouver une place ? Allez, barre-toi, bouffon. »
Paul s’éloigne, nous dévisageant de haut en bas.
— « Naïm, pourquoi tu lui as parlé comme ça ? Qu’est-ce qui te prend ? » lui demandai-je, surprise et un peu choquée.
C’était donc ça, sa vraie personnalité ? Lui, qui avait été si mignon la veille ?
— « Ce mec est un vrai con. C’est pas une bonne fréquentation.
Après, si ça te gêne que je sois là, t’inquiète, je pars… »
En parlant, il rangeait déjà ses affaires, prêt à s’en aller.
— « Non, non, non ! Reste là ! Je veux pas que tu t’installes ailleurs. »
Naïm sourit, se rassoit, me frotta les cheveux avec sa main, me fit un clin d’œil et ajouta :
— « T’en fais pas, ma petite Yaya. Je pars pas. Je reste à tes côtés. »
Sa main glissa sur ma joue. Il se rapprocha.
Nos fronts n’étaient plus qu’à quelques centimètres l’un de l’autre.
Je sentais sa respiration sur mon menton.
Et là, ce fut à mon tour de le surprendre.
Il ouvrit grand les yeux lorsque je pressai mes lèvres contre les siennes.
Un simple smack, mais qui, en quelques secondes, se transforma en la cible parfaite pour les photos, les rumeurs… et les fous rires de nos camarades.
Ambrinne et Méline éclatèrent de rire en se moquant de la teinte rouge cramoisi qu’avait pris mon visage.
Pour la deuxième fois, on se retrouva tous les quatre au CDI.
Mais cette fois, c’est moi qui appelai Gustave pour lui demander de venir nous récupérer et nous emmener à la maison.
Son ton fut hésitant, presque confus, mais il m’annonça qu’il serait là dans quinze minutes – à cause du trafic.
J’avais tellement hâte de les emmener chez moi, de leur présenter Mère.
Gustave arriva pile quinze minutes plus tard, comme promis.
Il descendit de la voiture pour nous ouvrir la porte, en gardant ce ton toujours très formel qui faisait sourire Méline :
— « Mesdemoiselles, Monsieur. Je vous souhaite une agréable fin d’après-midi. »
— « Wouaaah, c’est classe chez toi ! » s’exclama Ambrinne en posant un pied dans l’allée de la maison.
Naïm, lui, restait silencieux, un peu en retrait.
Peut-être qu’il appréhendait de rencontrer ma mère.
Peut-être qu’il s’interrogeait encore sur ce qu’on était tous les deux...
En entrant, je croisai le regard de Maman. Elle était debout, dans le salon, les bras croisés, regardant tour à tour mes amis… et moi.
— « Yaely, tu me présentes ? » dit-elle, poliment mais froidement.
J’avalai ma salive et fis un pas en avant.
— « Voici Méline, Ambrinne et Naïm. Ce sont mes camarades de classe. On devait juste réviser ensemble un peu au CDI, mais j’ai préféré les inviter ici. »
Elle resta silencieuse quelques secondes, puis hocha doucement la tête.
— « Très bien. Soyez les bienvenus. Je vais faire servir un goûter. »
Gustave nous guida dans la véranda, où une table était déjà dressée.
Petits fours, jus de fruit, biscuits maison... Méline écarquilla les yeux :
— « Euh… c’est toujours comme ça chez toi ?! »
— « Pas tout le temps, » répondis-je en riant, « mais Gustave adore les goûters bien organisés. »
Nous avons passé près d’une heure à rire, grignoter et discuter.
Même Maman, en revenant quelques minutes plus tard, se permit un petit sourire en entendant Méline raconter sa théorie du « bisou surprise ».
Quand mes amis repartirent, je raccompagnai Naïm jusqu’au portail.
Il resta un moment silencieux, les mains dans les poches, avant de souffler :
— « J’ai passé une super journée. Et… je crois que t’es en train de devenir une fille que j’ai vraiment pas envie de laisser passer. »
Je baissai les yeux, le cœur battant.
Il s’approcha et m’embrassa doucement sur la joue.
Puis il partit, sans rien dire de plus.
Ce soir-là, j’ai compris que ma vie d’avant était vraiment derrière moi. Et que, peut-être, j’étais enfin en train de commencer quelque chose de beau. Naïm Ambrinne et Meline étaient le déclencheur de mon bonheur.
Mais quelque-chose me tourmenter...
Leur mentir comme ça sur ma réelle identité me peinais vraiment.
Devrais je leur dire ?
Ils comprendrais non?
Et j'espère que Naïm ne cache pas non plus une double facettes.
Sinon, hâte de lire la suite ~~