1.04 Les chemins de l'univers (Partie 1) [Part 1]

Par Feydra
Notes de l’auteur : Quelques passages violents dans cet épisode et le suivant.

Le visage tourné vers le ciel, les yeux fermés, Allegra laissait les rayons du soleil réchauffer son visage. Une légère brise effleurait sa peau. Cela faisait des mois qu’elle n’avait pas expérimenté ces sensations si ordinaires. Cela allégea un peu le poids qui pesait sur sa poitrine depuis qu’elle avait vu les images de sa planète détruite. Elle pensa à son épouse et à leurs filles, mortes sans aucun doute. Sa gorge se serra et elle lutta contre les larmes.

À ses côtés, Trevor surveillait leur groupe d’un regard d’acier. Il venait à peine de quitter la navette. Ses deux hommes, légèrement décalés, essayaient de garder une posture sévère et concentrée, mais ils jetaient de fréquents regards aux arbres qui ne ressemblaient à rien de ce qu’ils connaissaient. Neal et son collègue, Richard, n’étaient pas moins émerveillés. Pourtant, aucun d’entre eux ne se laissait aller à l’imprudence.

Le regard de Trevor était rivé sur le groupe d’hommes et de femmes qui s’avançaient vers eux. Tendu comme un arc, il laissa sa main à côté de la crosse de son arme. Il portait encore les stigmates de sa dernière rencontre avec les habitants de la planète et préférait ne pas se laisser aller.

— Le petit sec en avant c’est Altarius, leur chef, murmura-t-il, à destination d’Allegra. Celle-ci se rapprocha de lui, plaqua une expression agréable sur son visage et se prépara à la négociation.

Altarius était accompagné de son acolyte, Peter, qui fixait un regard peu aimable sur Trevor, son fusil bien en évidence entre ses bras. Une femme, armée elle aussi, le suivait un pas derrière. Enfin, un autre homme plus jeune, qui ne portait aucune arme, laissait errer son regard sur chacun d’entre eux et on pouvait sentir son impatience sur son visage.

Ils s’arrêtèrent à quelques mètres de leurs invités.

— Je ne pensais pas que vous tiendriez votre promesse, commença le chef.

Trevor grimaça.

— Le docteur D’Lesser y tenait.

L’homme observa chacun des membres du groupe.

— Mais il n’est pas ici…

— Il avait une tâche importante à accomplir sur la station. Mais il a envoyé son assistant, le docteur Davian, ainsi que le docteur Missiani.

Neal salua Altarius d’un hochement de tête. L’homme le scruta quelques secondes, et le salua. Puis, ses yeux clairs se posèrent sur Allegra qui attendait en silence.

— Je vous présente Allegra Sonenfeld. Elle a toute autorité pour négocier au nom de notre groupe.

Un rictus dépara les traits tirés du chef.

— Je ne suis pas surpris que vous ne vous occupiez pas de cette tâche, vengeur.

Trevor se contenta de sourire calmement.

— Cela ne fait pas partie de mes compétences, en effet.

Peter grogna et cracha par terre. Son animosité irradiait si fort que les deux hommes de Trevor resserrèrent leurs emprises sur leurs armes et fixèrent leurs regards noirs sur lui. Leur commandant ne réagit pas. Cependant, Altarius jeta un regard noir à son compagnon. Peter détourna les yeux.

— Madame Sonenfled, j’ai peur que nos installations ne soient pas très confortables. Nous sommes un petit groupe stationné ici.

— Ne vous inquiétez pas pour ça, répondit-elle avec un sourire chaleureux. Nous nous adapterons.

Pour la première fois, Altarius sourit.

— Venez, alors.

Les deux groupes traversèrent la prairie jusqu’à la pyramide ocre qui dominait le paysage. Le chemin fut rapide, Trevor ayant réussi à poser la navette à un endroit bien plus proche que la première fois. Lorsqu’ils entrèrent dans la pénombre fraiche de la construction, le reste de la population les attendait. Immobiles et nerveux, ils rivaient leurs yeux fatigués sur les nouveaux venus.

— Voici mon peuple, les présenta Altarius.

Allegra les considéra un à un en souriant.

— Je serai très heureuse de faire votre connaissance, assura-t-elle à la cantonade.

Des murmures retentirent ; quelques sourires timides éclairèrent certains visages, mais la plupart restaient défiants. Trevor avait raconté à Allegra l’histoire de ces réfugiés, lui dévoilant par la même occasion son secret. Elle les comprenait.

— Retournez à vos occupations, lança Altarius d’un ton autoritaire.

Aussitôt, le groupe se dispersa. Il se tourna vers Allegra et lui indiqua une zone occupée par une table de fortune et des chaises.

— Je présume qu’avant de commencer les réparations vous voulez que nous parvenions à un accord, commença Altarius, à peine furent-ils installés.

— À vrai dire, répondit Allegra. Je pense que le docteur Davian devrait se mettre au travail immédiatement. Je vous avoue que si cette installation possède une antenne, cela nous permettrait de contacter la station. La radio de la navette ne peut pas traverser l’atmosphère de la planète.

Un rictus traversa le visage hâlé et marqué d’Altarius. Il se raidit.

— Je comprends votre méfiance, intervint Altarius. Vous craignez que nous fassions venir l’Église ici. Nous n’avons aucun intérêt à ce que cela arrive ; ils n’apprécieraient pas trop ce que nous faisons sur la station. Au contraire, je pense que ce serait à votre avantage d’avoir une liaison directe avec nous, pour nos futures relations.

— Nos relations ?

— Nous avons besoin de ressources, que nous ne pouvons plus avoir depuis que nous sommes coupés de notre planète d’origine, reprit Allegra. Vous avez besoin de notre expertise, pour réactiver les installations fondatrices. Nous pouvons nous aider mutuellement.

Altarius resta silencieux et pensif pendant de longues minutes. Puis, il soupira.

— Nos ingénieurs pensent qu’un système de communication existe, mais nous n’avons pas réussi à le réactiver de manière optimale. Si vos scientifiques en sont capables, qu’ils essaient.

Allegra hocha la tête. Aussitôt, Neal et Richard quittèrent leurs sièges.

— Elleia, accompagne-les, fit-il.

La femme au regard froid hocha la tête. Les deux hommes partirent à sa suite. Trevor les regarda disparaitre derrière une cloison. Un frisson d’inquiétude le parcourut. Il aurait voulu les accompagner pour garder un œil sur eux. Pourtant, il retint sa pulsion. S’il voulait que cette alliance fonctionne, il devait faire preuve d’un minimum de confiance.

Lorsque la voix de Neal retentit dans son communicateur, il sourit. Devinant que son amant s’inquièterait, l’intelligent jeune homme avait activé leur canal. Il écouta d’une oreille les échanges entre le scientifique et son guide, pendant qu’Allegra et Altarius discutaient âprement.

 

 

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