14. Le front

Notes de l’auteur : Heyo ! Ça faisait longtemps^^' je m'excuse pour cette pause de publication intempestive, j'ai été rattrapée par l'IRL... Je compte reprendre la publication hebdomadaire de manière plus régulière, alors n'hésitez pas à me faire par de vos retours !

Katy observait Johann qui était courbé près d’elle. Il arborait un teint verdâtre qui n’augurait rien de bon. Le mal des transports était un vrai handicap quand on était soldat, étant donné que la plupart des batailles ne se faisaient pas à pied, mais dans des véhicules.

Presque six mois avaient passé depuis le début de l’entraînement militaire de Katy, elle allait enfin passer une étape décisive de son apprentissage : un exercice sur le terrain.

Seuls les meilleurs des nouvelles recrues avaient été autorisées à aller sur le front. Hormis elle et Johann, seulement dix autres personnes avaient été sélectionnées, dont le meneur du trio qui harcelait l’Amaryen.

Dans l’espace exigu du char qui les transportait, elle pouvait sans mal étudier les visages tendus de ses camarades.

La mission qui leur était dévolue ne les envoyait pas en première ligne, mais le risque de mourir était bien présent. Nombreux étaient ceux qui appréhendaient cet exercice. Après tout, ce serait leur première véritable expérience de la guerre.

Katy, quant à elle, attendait impatiemment leur arrivée sur le champ de bataille.

 

___

 

Lorsqu’ils entendirent la première explosion venant du front, la plupart des futurs soldats se tassèrent dans leur coin.

D’autres détonations suivirent bientôt, un véritable concert.

Le char s’arrêta, les recrues descendirent dans l’appréhension de ce qu’il allait se passer.

La première  chose que vit Katy en sortant du véhicule fut les fumées qui s’élevaient vers le ciel, cachant le théâtre des combats.

Rien n’avait changé, ce paysage de désolation était le même que celui qu’elle voyait depuis sa fenêtre, au manoir, à des milliers de kilomètres de là.

Partout, le sol était éventré, éviscéré, mutilé. Çà et là gisait des cadavres tantôt carbonisés, parfois éparpillés en plusieurs endroits et des carcasses désossées de machines diverses. Les odeurs de putréfaction et de soufre empoisonnaient l’air et piquaient les yeux tandis que des explosions déchiraient les tympans à intervalles irréguliers.

Près de la jeune fille, Johann semblait avoir oublié sa nausée, sa figure décomposée avait pris une teinte particulièrement pâle.

— Quelle horreur… murmura-t-il.

Briggs fit entrer ses protégés à l’intérieur d’une petite cabane.

— Votre mission est simple, dit-il d’une voix dure, vous devez rejoindre le camp avancé qui se trouve tout près des combats pour ravitailler les pauvres bougres qui se battent en ce moment même. Vous avez peu de chance de croiser un soldat ennemi, en revanche les bombes tombent comme de la pluie aux alentours du camp, vous devez vous en remettre à votre bonne étoile. L’autre difficulté est le terrain. Comme vous l’avez vu, il est très accidenté, même avec les Chevaux de Fer que nous allons vous fournir, il est difficile de se déplacer. Votre but est d’arriver à destination sains et saufs le plus vite possible et de rebrousser chemin. Vous ferez autant d’aller-retour que nécessaire pour amener tout le ravitaillement qui se trouve derrière moi. Attention à ceux qui pensent traîner en route pour avoir moins de travail : vous aurez beaucoup plus de chances qu’une bombe vous tombe sur la tête.

Son regard acéré balaya les jeunes gens qui se tenaient en face de lui

— Une dernière chose : si vous voulez abandonner, c’est maintenant. Après cela vous serez considérés comme faisant partie intégrante de l’armée. Si vous vous débinez maintenant, le métier de soldat vous sera à jamais interdit et vous pourrez aller planter des patates loin des combats. Un volontaire ?

Personne ne répondit, tous les muscles étaient contractés.

— Bien ! Prenez tout ce que vous pouvez porter et allez dehors en attendant que les Chevaux arrivent.

Les apprentis s’exécutèrent dans un silence de plomb.

— J’ai failli abandonner… avoua Johann à Katy, mais je dois protéger ma famille.

Celle-ci lui jeta un bref coup d’oeil. Malgré le fait qu’elle passait la plupart du temps à l’ignorer, il persévérait à vouloir devenir son ami. Il semblait bien trop gentil pour devenir un soldat.

— Ne meurs pas, dit-elle.

Julien cligna des yeux surpris puis répondit d’une voix hésitante :

— Toi non plus.

 

___

 

Les Chevaux de Fer arrivèrent quelques minutes plus tard, tractés par un char mécanique semblable à celui qui les avait amenés sur le champ de bataille.

Katy fut plus émue qu’elle ne le pensait en voyant cette vieille invention de sa mère.

Pour palier au problème de déplacement des engins à roues, Anodetta avait créé un véhicule tout-terrain très rapide, s’inspirant du monde animal. Ainsi, les articulations de la machine étaient identiques à celle d’un chamois ou d’un cheval, selon les modèles. On l’avait donc appelé Cheval de Fer.

La jeune fille caressa l’encolure de sa monture comme si c’était un véritable animal. Elle ne se rappelait plus le jour où sa mère lui avait montré le premier prototype, elle était trop jeune à l’époque.

Imitant ses camarades, elle monta sur le véhicule et le mit en marche. Manoeuvrer les Chevaux de Fer était compliqué, alors une grande partie de leurs heures d’entraînement avait porté sur le pilotage de ces machines.

Briggs donna enfin le signal du départ, les apprentis s’élancèrent. Ils avaient chacun reçu un plan qui leur indiquait la direction à prendre pour rejoindre le camp avancé.

Les bombes pleuvaient autour d’eux, heureusement, aucun ne fut touché.

Ils pénétrèrent dans un épais rideau de fumée, et Katy ne voyait plus la plupart des autres recrues. Au loin, elle entendit des cris et des cliquettements, ils s’approchaient du lieu des combats.

S’orienter était difficile, mais elle parvint à trouver son chemin.

Quelques minutes après son départ, elle atteignit son objectif.

Le camp en question était en réalité plusieurs petits bunkers reliés les uns aux autres par des tunnels souterrains. À moitié enterrés dans le sol torturé, ils étaient entourés d’une forêt de canons qui semblaient jaillir du sol.

Désormais, seul Johann l’accompagnait, elle avait perdu les autres de vue.

Ils arrivèrent à une petite porte blindée donnant sur le bunker de stockage.

— Mot de passe, fit une voix sans timbre dans un amplificateur de son.

— Grenadine.

Elle savait que, grâce à un réseau complexe de miroirs, les soldats restés à l’intérieur pouvaient voir ce qui se passait aux alentours.

La porte s’ouvrit, un homme en uniforme apparut. Il était vêtu de la tenue noire de la Résistance ainsi que de l’armure rétractable que Théodorus et le professeur Écuyer avait mis au point. Il avait de gros cernes sous les yeux et une barbe de quelques jours. Son regard était terne.

— Ravitaillement ?

Elle hocha la tête.

Le soldat sortit en fermant soigneusement la porte et prit leurs affaires.

— Vous pouvez y aller, les congédia-t-il.

Ils firent un bref salut avant de rebrousser le chemin, croisant beaucoup de leurs camarades.

Ils firent ainsi ensemble deux aller-retour entre la cabane et le camp avancé.

Mais alors qu’ils entamaient leur troisième voyage, une bombe atterrit tout près de Katy.

L’onde de choc la propulsa à terre.

Elle retomba sur le sol avec violence et dû lutter contre elle-même pour ne pas s’évanouir. Ses oreilles bourdonnaient comme si une armée d’abeilles les avaient envahies. Elle tâtonna à la recherche de son Cheval, espérant remonter en selle.Mais la bombe avait fait exploser sa patte avant droite et il était inutilisable. La jeune fille pesta intérieurement, elle récupéra les sacs de ravitaillement et prit la direction de la cabane.

— Katy !!! entendit-elle crier par-delà les détonations et les bourdonnements.

C’était Johann, il paraissait affolé.

Quel idiot, pensa-t-elle, si un soldat amaryen l’entend, il est mort.

Consciente des risques qu’il encourait, elle décida de le rejoindre, se guidant au son de sa voix.

Quand il la vit enfin apparaître dans un nuage de fumée, son visage s’éclaira.

— Katy ! J’ai cru que tu étais morte !

Il descendit de sa monture pour la serrer dans ses bras.

Elle le repoussa immédiatement, ce n’était vraiment pas le moment de se laisser aller.

— Qu’est-ce que tu fais ?! le sermonna-t-elle.

Il rougit.

— Je suis désolé, mais j’étais si inqui….

Avant même qu’il n’ait fini sa phrase, elle se jeta sur lui et le plaqua par terre tandis qu’au-dessus d’eux retentissait une rafale de tirs.

La jeune fille se redressa. Comme elle le craignait, les cris de son camarade avait attiré un soldat ennemi. L’uniforme vert déchiré et tâché de sang, ses yeux roulaient dans leur orbite de façon désordonnée. Il brandit de nouveau son arme et tira.

Katy évita les balles explosives, mais Johann roula sur le côté une seconde trop tard. Le projectile explosa près de son bras, projetant un nuage d’éclats dans sa chair. Il poussa un cri de douleur.

Profitant d’un bref intervalle entre deux salves, la jeune fille tira sur l’ennemi une petite balle remplie d’un acide spécial, nouveau cadeau de Théodorus. Le soldat hurla quand la bille déversa au contact de son visage l’acide qui commença à lui ronger la peau. C’en était fini de lui.

Elle se précipita sur Johann, dont le bras en lambeau pendait misérablement. Il perdait beaucoup de sang, la jeune fille savait qu’il risquait de mourir très vite. Elle lui fit un garrot de fortune, réfléchissant à toute vitesse.

Malheureusement, elle ne pouvait pas le transporter lui et le ravitaillement, ce serait beaucoup de trop lourd pour elle ou pour le Cheval de Fer du jeune garçon. Il fallait faire un choix.

Briggs n’apprécierait pas qu’elle abandonne sa mission, mais elle ne pouvait pas abandonner Johann.

— Pars, murmura celui-ci, tu vas te faire tuer si tu restes ici… ne t’en fais pas pour moi, je peux attendre.

Elle le considéra avec colère.

— Ne me fais de l’héroïsme mal placé !

Elle sangla le blessé comme elle put sur le Cheval de Fer, et ignorant ses protestations, elle quitta le champ de bataille.

 

 

___

 

Briggs l’observait d’un regard ténébreux. Depuis qu’elle avait ramené Johann, il s’était contenté de ses explications sans faire de commentaires, mais sa mine orageuse n’était pas bon signe. Katy savait qu’il attendrait leur retour au QG pour la punir, elle pria pour que sa sanction ne soit qu’un de ces exercices physiques qu’il donnait habituellement.

Hormis Johann, seule une autre recrue manquait à l’appel dans le char qui les ramenait. En effet, le jeune homme absent avait été tué par une bombe pendant l’exercice sous les yeux de ses camarades. Recroquevillés dans le fourgon, la plupart des apprentis fixant leurs pieds, les larmes aux yeux.

Johann, lui, avait été ramené par une ambulance militaire et devait déjà être arrivé à l’hôpital.

Le char s’arrêta après un trajet éprouvant pour Katy comme pour ses camarades. Un à un, ils rejoignirent leurs quartiers, la tête basse.

— Pumbleton, tu restes ici, ordonna Briggs.

L’apprentie se tourna vers lui, prête à affronter sa colère.

— Tu as lâchement abandonné ta mission. À cause de toi, nous avons perdu tout un stock de munitions et de nourriture, et tu sais à quel point les temps sont durs, nous ne pouvons pas nous permettre le moindre gaspillage. Tu as pensé à nos hommes qui attendaient les provisions ? Ils vont devoir se rationner à cause de toi.

— Eh, Briggs.

L’imposant lieutenant se retourna avec colère vers l’imprudent qui avait osé l’interrompre et se retrouva face à Rupert et le commandant Otto. Il se mit au garde à vous, imitée par Katy.

C’était l’intendant qui avait parlé, trainant sa voix indolente entre ses lèvres craquelées.

— Il y a un problème ?

— J’allais vous faire mon rapport, répondit l’instructeur.

— Faites-le maintenant.

— Un… un apprenti a trouvé la mort pendant l’exercice, un autre a été grièvement blessé. Un sac de provisions a été perdu dans le sauvetage de ce dernier par le numéro 18 ici présente. J’ai bien sûr prévu une punition.

Otto, jusqu’alors silencieux, s’avança d’un pas, se massant mâchoire d'un air distrait.

— Hmmm, le sauvetage d’un apprenti a entrainé la perte de provisions, c’est ça ?

Briggs hocha la tête.

— La guerre nous force à faire des choix terribles, convint le commandant. À décider quelle vie a plus de valeur. Qu’en penses-tu, Rupert ?

Le rouquin fit la moue.

— Ça dépend de ce qui a été perdu exactement, du service que ça aurait pu rendre au soldats sur le front et de l’utilité de l’apprenti sauvé.

— Une réflexion bien froide, commenta Otto avec un regard plein de tristesse.

Sa main se détacha de sa mâchoire pour se poser, lourde, sur l’épaule de Katy.

— Je ne peux blâmer personne pour avoir tenté de sauver une vie. Néanmoins…

Il se tourna vers Briggs.

— Quatre tours de château devrait faire l’affaire, non ?

L’instructeur hocha la tête, le commandant pivota de nouveau la sienne vers Katy.

— Alors, qu’attendez-vous, soldat ?

La jeune fille s’ébroua et se détourna pour entamer sa course. Elle sentit sur elle le regard amusé de Rupert avant qu’elle ne disparaisse dans l'ombre du QG.

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Guimauv_royale
Posté le 20/03/2023
Coquilles
- étant donné que la plupart des batailles ne se faisaient pas à pie (faisait)
- Seuls les meilleurs des nouvelles recrues avaient été autorisées (autorisés)
- la plupart des futurs soldats se tassèrent dans leur coin. (Se tassa)
- Çà et là gisait des cadavres tantôt carbonisés (gisaient)
- gisait des cadavres tantôt carbonisés, parfois éparpillés (j’aurais remis tantôt)
- Son regard acéré balaya les jeunes gens qui se tenaient en face de lui (.)
1-
- espérant remonter en selle.Mais la bombe (manque un espace)
- ce serait beaucoup de trop lourd pour elle (pas de “de”)
- Recroquevillés dans le fourgon, la plupart des apprentis fixant leurs pieds, les larmes aux yeux. (Il n’y a pas de verbes du coup c’est bizarre)
- et se retrouva face à Rupert et le commandant Otto. (“Au” et pas ‘le’)
- se massant mâchoire d'un air distrait. (La)
- Quatre tours de château devrait faire l’affaire, non ? (Devraient)

Remarque

1- — J’ai failli abandonner… avoua Johann à Katy, mais je dois protéger ma famille. (Je trouve ça bizarre de venir vers quelqu’un comme ça et juste lui dire ça, j’aurais plutôt dit un truc du genre “abandonner est tentant)
AudreyLys
Posté le 20/03/2023
Merci !
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