Romdath resta coi devant le mur d'eau qui se dressait devant le Drark.
— Allons, allons. Ce n'est que de la flotte salée. Tu es trop émotif.
— Arrête ça Shardo!
Le pirate se tut mais son sourire narquois était aussi expressif que les mots qu'il aurait pu prononcer.
— Le capitaine du Drark est une tête.
Le mur s'écroula et la Mer des Soupirs se révéla. Shardo prit la parole, son équipage était réuni sur le pont principal, des chuchotements montaient créant un léger brouhaha, presque agréable.
— A partir de maintenant, tout se fait par murmure de bouche à oreille. Le premier qui parle à voix haute mourra, de toute façon tout le monde mourra avec lui.
Les pirates se jetèrent des regards inquiets et effrayés.
— Les gars je vous ai laissé le choix.
Le capitaine eut un sourire méchant.
— Maintenant la ferme!!!!!!
Le bateau s'engagea sur la Mer des Soupirs. Le silence régnait comme un roi sur son trône, seuls les craquements du bois et les grincements des cordages polluaient la sérénité apparente. Romdath s'approcha de Dalfer et leva la tête d'Alina jusqu'à frôler l'oreille du capitaine.
— Un long chemin nous attend.
— Depuis que je t'ai rencontré Tête, tout me parait long.
— La récompense sera à la hauteur de l'attente.
— Je l'espère. J'ai déjà perdu une main et mon second.
— Je suis sincèrement désolé pour ta main. Je voulais juste te faire lâcher ton sabre. Buté comme tu es, tu as continué à le tenir. Pourquoi as tu fait ça?
— Je vais te raconter une histoire Tête. Même si tu as l'air de tout savoir, peut-être que tu ne la connais pas. C'est l'histoire d'un enfant. Innocent comme ils le sont tous au début. Avec une mère et un père mais l'un des parents ne méritait vraiment pas de l'être. Un jour, le mauvais père, enfermé dans son éternelle ivresse, frappa sa femme. Le petit garçon tenta de la défendre mais il n'était pas assez fort. Alors il tint la main de sa mère fort, très fort, tellement fort qu'il la tenait encore quand elle mourut à ses côtés. Personne ne put détacher les petits doigts agrippé à sa maman. Son père dut couper le poignet de son épouse pour enlever le corps qui pourrissait. Le petit gars ne lâcha pas la main de sa maman pendant une semaine. Il ne mangea ni ne but pendant plusieurs jours. Puis un matin il se leva et quitta la maison. Depuis il ne plie devant personne, ne lâche jamais rien quitte à supporter l'insoutenable et n'a plus jamais versé une larme sur quiconque.
Les murmures de Shardo semblèrent alourdir le silence déjà pesant sur la Mer des Soupirs.
— Je suis désolé.
— Ne le sois pas Tête. Je ne serais pas devenu ce que je suis aujourd'hui sans ça.
— Peut-être serait tu devenu autre chose.
— Je ne regrette rien.
— C'est faux.Tu regrettes ne pas avoir tué ton père.
Shardo sourit.
— Je suis heureux de ne pas t'avoir tué tout de suite Tête. Tu avais raison, plus on attend pour réaliser ses désirs, plus le plaisir est grand. Je te tuerai donc le plus tard possible dans cette aventure. Un cri retentit soudain dans le calme artificiel de la Mer des Soupirs.
Alina écarquilla les yeux.
— Non, non, non, non. Pas ça!
Une ombre colossale glissa sans bruit sous le Drark et les eaux bouillonnèrent.
— Si tu veux réaliser tes désirs, tue moi tout de suite Shardo car nous allons tous mourir.