25. L'arbre

Syssoï avait décroché les doigts féminins qui enserraient, déformaient le tissu de son tee-shirt. Cependant, ce ne fut que pour les conserver captifs des siens tandis qu’il guidait la jeune femme sur les pas de Laetitia ouvrant la marche. Parfaitement stable sur ses pieds, Astrée suivait la petite procession sans qu'on n’ait à l'y forcer. Certes, elle était toujours un peu sonnée, mais ce n'était pas un quelconque état de choc qui la maintenait au silence. C'était plutôt l'hyperactivité de son cerveau. En plus de la myriade d'interrogations qui se bousculait, elle s'évertuait à trouver une explication convenable à sa réaction disproportionnée, une explication à fournir à la jeune guide, afin qu'elle ne mette pas un terme à cette visite alors qu'Astrée n'avait pas encore eu le temps de poser la moindre question.

— Je suis sincèrement désolée pour tout à l’heure. J'espère ne pas avoir abîmé votre costume, finit-elle par dire après un dédale de petites pièces et autres couloirs qu'ils venaient de traverser pour accéder à l'air libre. Tradition familiale oblige, je déteste les Caumont et tout ce qui s'y rattache.

Une excuse valable si l'on tenait compte de l'histoire d'Aelis, si tant est que ce soit autre chose qu'une simple légende, ou pire encore, juste un rêve étrange. Aveuglée par l'aura de Syssoï, qu’elle appelait désormais « Olympe » ou simplement peu regardante, la guide se satisfit de cette explication, et s'empressa même de la rassurer d'une moue qui se voulait compréhensive.

— Nous ne devrions pas nous trouver ici, mais ça me permet de vous offrir un point de vue inédit. Regardez, on peut voir jusqu'à Beynac.

À flanc de mur, la petite cour dans laquelle ils se trouvaient dominait, effectivement, le chemin qu'ils avaient emprunté pour entrer. Située au sommet d’une tourelle, le trio avait bravé la barrière qui en interdisait l’accès, et s’abrutissait, désormais, de la perspective majestueuse sur le château de Beynac de l'autre côté de la Dordogne. Une situation dont profita Laetitia pour reprendre son historique, et évoquer les relations conflictuelles entre Castelnaud et sa grande rivale, Beynac.

— Je sais, c'est chez moi, souffla Astrée en quittant la main masculine pour se rapprocher du bord de la petite tour.

— Oh, vous êtes de Beynac ?

— Je suis une Beynac, corrigea-t-elle les yeux rivés sur ce qui aurait dû être son héritage. Le château et les terres appartenaient à mes ancêtres.

— Vraiment ? s'extasia l'autre, visiblement ravie de cette révélation. Vous savez qu'il existe une anecdote concernant l'origine de cette rivalité ?

— Autre que la guerre de cent ans ?

Syssoï, jusqu'à présent silencieux, récupéra l'attention de la guide, tandis qu’il approchait le bord à son tour. Après un rapide coup d'œil vers le vide que l’absence de rambarde rendait inquiétant, il attrapa le poignet féminin pour obliger sa propriétaire à réinstaurer une distance de sécurité. 

— Evidemment, l'un des châteaux était français et l'autre anglais, ça n'aidait pas. Mais au tout début du conflit, ils s’en accommodaient. Durant les trêves, ils cherchaient même à se rapprocher, à s'allier. Jusqu’à ce que, dit-on, le seigneur de Beynac offre une de ses filles au seigneur de Castelnaud.

— Que s’est-il passé ?

— Elle a été tuée, répondit Astrée à la place de la guide.

— Vous connaissez cette histoire ?

— Seulement les grandes lignes. Hélix a été envoyée à Castelnaud pour son futur mariage avec Guillaume de Caumont, jusqu'à ce qu'elle prenne la fuite et qu'elle se fasse tuer avant d'atteindre la liberté.

Occupée à chercher à se défaire de cette main qui n’avait de cesse de revenir coloniser son poignet pour la retenir au centre de la fortification, Astrée récitait ce qu’elle avait appris la veille. 

— En effet. Mais elle ne fuyait pas seule, reprit la jeune guide dans un sourire énigmatique. On dit que la promise prenait la poudre d'escampette avec son amant, un jeune chevalier de la cour.

— Son amant... Oui, ça fait sens, réfléchit Astrée à voix haute.

Elle repensa à ses deux rêves dont elle conservait le souvenir. Elle s'était sentie, ou plutôt Aelis s'était sentie amoureuse dans les bras de... de celui qui la tuerait ensuite ? Voilà qu'elle était un peu plus perdue, encore. Ce qui ne l’empêcha pas de donner une tape sur cette main récidiviste qui revint à la charge en agrippant une bretelle de débardeur, cette fois. 

— Oui, enfin pas dans le sens que l'on donne aujourd'hui à ce mot, poursuivait la guide. Disons que les histoires d'amour de l’époque…

— On connait l’amour courtois, l’ensag, tout ça, la coupa Astrée, peu encline à se farcir une nouvelle leçon sur le sujet. Veux-tu bien arrêter ça ?

Cette dernière exclamation s’adressait à Syssoï alors qu’elle cherchait à se libérer de son emprise pour la énième fois. 

— Non, grogna-t-il en récupérant son poignet.

— Lâche-moi sinon je… grinça-t-elle, mâchoires et poings serrés.

— Sinon quoi ? voulut-il savoir armé de ce discret sourire qui la surplombait.

Prodigieusement agaçant. 

— Ne t’approche pas du vide, reprit-il, catégorique en l’obligeant à se retourner pour faire, à nouveau, face à cette guide qui ne cessait de les interroger du regard.

— Vous formez une bien étrange fratrie, disait-elle justement, la tête légèrement penchée sur le côté comme pour mieux les étudier. Si vous avez le vertige, Olympe, je peux vous offrir la mienne, de main.

— Oui, Olimp, va donc prendre la main de Laetitia, ricana Astrée.

Un grognement plus tard, il relâchait toute emprise, croisait les bras contre son torse et détournait le regard des deux femmes. Visiblement déçue, la guide laissa son regard errer en direction de l’homme avant de se ressaisir dans un soupir à fendre l’âme.

— Où en étions-nous ? Ah oui ! L’amour courtois. Votre aïeule se serait, dit-on, véritablement éprise de ce chevalier qui n'était ni de son rang, ni de sa condition. Partagée entre devoir et sentiments, elle aurait tenu toute une année ainsi, sans rien offrir de plus que ce que les usages autorisaient. Néanmoins, la pauvre fille finira séquestrée au Castel. On dit que Nompar, de plus en plus jaloux, la fit enfermer dans sa chambre toutes les nuits, et se faisait rapporter chacun de ses faits et gestes durant les journées. Sous un microscope permanent, elle vivait non plus en tant que future dame de Castelnaud, mais en véritable prisonnière de ces hauts murs. 

— Nompar ? N’était-ce pas Guillaume, son fils, qu’elle devait épouser ? la coupa Astrée.

— Guillaume n’avait que douze ans, tout au plus, je doute qu’il se soit intéressé à la chose. C’était son père, Nompar, qui avait arrangé cette union et qui ne supportait pas que la donzelle puisse faire affront à sa famille. La pauvre n'avait même plus l'autorisation de descendre au village sans escorte. Alors, elle écrivit à son père, le suppliant de mettre un terme à cet accord, l'implorant de la laisser rentrer chez eux, ou dans les Ordres.

— Elle écrivit à son père ? Comment savez-vous tout ça ? l’interrompit, à nouveau, Astrée.

— Les lettres. Enfin, certaines des lettres. Nompar faisait détourner son courrier. Quelques-unes lui ont vraisemblablement échappé, mais pour les autres, elles ont été conservées dans les archives du château.

— Peut-on les voir ?

— J'ai bien peur que non. Elles appartiennent à l'actuel propriétaire du château.

— N'est-ce pas à l'Etat ?

— Non, il s'agit d'un propriétaire privé qui, par intérêt pour l'Histoire et l'éducation, l'a fait ouvrir au public. Une personne très secrète qui tient sincèrement à son anonymat. J'aimerais vous aider, mais moi-même je n'ai pas pu consulter les lettres. Je n'ai fait qu'en entendre parler.

— Mais si les lettres étaient interceptées, reprit Syssoï qui, bien qu’en retrait, ne perdait pas une miette du récit. Alors Beynac ne les a jamais reçues ?

— Ils avaient dû mettre au point un système de correspondance officieux, je suppose, réfléchissait Laetitia, sa main torturant son menton. Une fuite avait été organisée. Ils devaient fuir Castelnaud ensemble, et traverser la Dordogne pour rejoindre Beynac. Le frère d'Hélix les attendait sur la rive mais ne les a jamais vu arriver. Elle a été tuée durant sa fuite.

— Tout ça à cause d’une simple danse, murmura Astrée pour elle-même

— Exactement ! s’enthousiasma la guide. Mais juste sous le nez de Nompar et de la cour toute entière.

— Et ils allaient la tuer pour ça, poursuivait la petite baronne, toujours plus lugubre. 

— Alors oui, mais non. Nompar ne pouvait pas se permettre une guerre ouverte avec les Seigneurs de Beynac. C'est le chevalier que l’on allait supplicier. Et c'est parce que sa vie à lui était menacée que votre ancêtre a décidé de prendre la fuite. N’est-ce pas romantique ?

Romantique, elle n’en était pas certaine, mais tragique, assurément. Et perturbant également.

— Ça n'a aucun sens, murmura Astrée en se tournant vers le chemin de ronde, au-dessus d'eux.

— Quoiqu'il en soit, elle fut tuée et enterrée à la hâte. Beynac réclama le corps, mais c'était trop tard. Et on dit que c'est à partir de cet instant que les rivaux sont devenus ennemis mortels, conclut-elle en jetant un coup d'œil à sa montre avant de paniquer légèrement. Désolée de vous abandonner ainsi, mais je suis déjà en retard pour mon prochain groupe. J'en ai pour quarante-cinq minutes, si vous voulez m'attendre...

Ce dernier point ne s'adressait qu'à Syssoï vers lequel elle dirigeait son sourire en biais. Un sourire qu'il n'observa qu'une petite fraction de seconde, avant de se retourner vers Astrée comme si c'était à elle de répondre. Cette dernière, les yeux toujours rivés sur le chemin de ronde, reporta immédiatement son attention sur la guide.

— Attendez ! Lorsque j’ai parlé en ancien français, tout à l’heure… J’ai dit quoi, au juste ?

— Vous ne le savez pas ? s’interrogea la guide qui marchait à reculons. Il n’existe pas vraiment de traduction littérale, et je ne suis pas experte mais… Quelque chose comme « plus jamais. » peut-être ?

— Exact ! rétorqua Astrée dans un sourire crispé. Ça m'était sorti de la tête. 

— Vous êtes définitivement très étrange.

Mais Astrée ne lui prêtait plus aucune attention. Elle avait reporté son regard sur le chemin de ronde, et ne vit pas la guide s’éclipser. Tout comme elle ne perçut la présence de Syssoï que lorsqu'il se plaça entre elle et l'objet de sa fixation, emplissant brusquement la totalité de son champ de vision et de son attention.

— Ça n'a absolument aucun sens, répéta-t-elle, pour lui cette fois.

— Quoi donc ? Idéaliser cette fuite ? Romantiser le suicide ?  

— Je ne te parle pas de ça ! le coupa-t-elle, agacée. Le suicide n’était pas la fuite. Le suicide, c’était de rester ! Parce que, crois-moi sur parole, c'était bien loin d'être gentiment platonique entre eux d'après mes rêves… Et justement, ça non plus n'a pas le moindre sens. 

Elle se décala pour retourner à sa fixation du chemin en surplomb. 

— Il faut qu'on grimpe là-haut, reprit-elle. T'as toujours le plan ?

— Il faut emprunter cette tour, dit-il après avoir déplié la carte. Mais je ne crois pas que ce soit autorisé au public.

La jeune femme souleva un sourcil de surprise. Depuis quand avait-il besoin d'autorisation ? Ils avaient tué son aïeule. Ils lui devaient bien ça. Alors, après avoir repassé la barrière et franchi l'imposante porte de pierre, elle se retourna vers lui, et d'un simple regard, le mit au défi de la suivre. 


 

*


Le chemin était plus étroit que dans son souvenir. D’un côté, la cour intérieure du château, quelques mètres plus bas. De l’autre, le vide et une vue irréelle de celui de Beynac. 

— Si proche et pourtant si loin, souffla la jeune femme qui avançait prudemment entre les deux murets lui atteignant péniblement la hanche.

Derrière elle, la tour carrée ne présentait plus qu'un étage supplémentaire, celui dont dépassait le nez des canons en direction de l’extérieur. Et sur la pointe du toit gris, ce même odieux pavillon qui flottait encore. Les lions d'or sur fond bleu. Celui qu'elle avait haï. Du moins Aelis, et non elle-même, bien que la frontière entre les deux ne soit plus que de l'ordre d'un fin fil oscillant au gré du temps. À pas hésitants, elle emprunta ce même chemin qu'elle avait parcouru dans ses songes. C'était différent en plein jour et sans les jupes pour entraver chacun de ses mouvements. Pourtant son cœur, lui, battait d'un même crescendo que celui d'Aelis, animé de ce même sentiment d'urgence, de cette même peur viscérale.

— Astrée, allons-nous en, tentait l’homme dans son dos. 

De sa main il essayait de se saisir d'un poignet qui s’éclipsait encore.

— Non ! J'ai besoin de comprendre, poursuivait-elle en avançant toujours plus, progressant vers la scène d'un lointain crime.

Elle le distança encore une fois, échappant à cette main qu'il venait de déposer sur son épaule.

— Qu’y a-t-il encore à comprendre ? Tu voulais vérifier que cette histoire s'ancrait bien dans un fait historique, c'est chose faite, rentrons. Nous n'avons plus rien à apprendre de ce lieu. 

— Je ? Je voulais ? s’indigna-t-elle, se retournant pour lui faire face. Parce que toi, tu ne nourrissais absolument aucune curiosité vis-à-vis de ça, peut-être ? Avec tes prises de notes sur ton petit carnet et tes interrogatoires musclés ? Laisse-moi rire !

— D’accord, nous voulions, admit-il plus dans une tentative désespérée de la ramener au calme que de véritablement rendre les armes. 

— Quelque chose m'échappe encore, s'agaçait-elle toujours, son regard balayant l’espace entre la tour carrée et le chemin de ronde. Tu n'as pas toutes les données... 

Elle s'interrompit d’elle-même. Son regard venait d’accrocher l’arbre unique au centre de la cour du château. Isolé, désolé, il ressemblait à une anomalie au milieu de ce carré de verdure. Et il oscillait étrangement. 

D’abord, Astrée imagina que sa myopie lui jouait des tours. Mais, lorsqu’elle se rapprocha du muret pour observer plus attentivement le chétif végétal, elle remarqua les feuilles qui lui tapissaient les racines. Août s’annonçait à peine, pourtant. L’automne ne serait pas sur le Périgord avant quelques mois encore. 

Ses paupières se plissèrent davantage, ses doigts se crispèrent contre la pierre rugueuse, et elle vit cette feuille unique et solitaire. Cette feuille orangée qui dansa contre l’herbe un instant, avant de décoller et virevolter le long du tronc noueux. Fascinée, Astrée ne la quitta pas des yeux, trouvant une forme de poésie dans le refus de cette feuille de s’avouer vaincue.

— Tu as vu ça ? interrogea-t-elle son compagnon tandis que la feuille achevait sa danse contre la branche qu’elle avait, jadis, quittée. 

Astrée n’eut le temps d’entendre ni d’attendre sa réponse car, brusquement, le ballet reprit de plus belle. Une feuille. Deux feuilles. Trois feuilles. Une multitude de feuilles qui, brutalement, cherchaient à remonter le temps. En une poignée de secondes, l’arbre retrouva sa prestance. Un clignement de paupière plus tard, les feuilles avaient fleuri. L’instant d’après, l’arbre était brun, puis nu. Les saisons défilaient sur ce végétal aussi rapidement que le coeur battait furieusement dans la cage thoracique de la jeune femme. Tremblante, elle chercha à fuir cette vision et reporta son regard au loin. Mais dans le ciel, l’astre zigzaguait. A la manière des balles rebondissantes de son enfance, il semblait incontrôlable, et ricochait sans relâche contre la ligne d’horizon. 

— Syssoï ! appela-t-elle en tendant la main vers cette forme qui, tout à l’heure encore, était lui. 

Tout autour d’elle, le monde à rebours s’accélérait. Elle perdit pied, vacilla, et chuta sur le sol en même temps que la nuit qui mit fin à la course folle du soleil. Les fesses contre la pierre rugueuse, elle n’était plus seule. Les ombres l’acculaient. D’abord une, puis deux, puis des dizaines. Indistinctes, elles ne faisaient que passer, éclats chatoyants dans cette nuit à la lune aussi hyperactive que l’avait été le soleil avant elle. 

— Syssoï… gémit-elle à nouveau, la gorge nouée, la respiration anarchique.

Les ombres ralentissaient. Parfois, elle distinguait un visage avant qu’il ne disparaisse dans la frénésie. Elles dépassaient Astrée sans la voir, la traversaient comme si c’était elle, l’ombre, finalement. Elles ralentirent encore et encore. Elles prenaient forme. Forme humaine. Des hommes essentiellement. Parfois quelques rares femmes. « Madame ! » gloussait l’une d’elles, justement, dissimulant son rire chevalin derrière un éventail. « Taisez-vous, Bertille ! Cette godiche ne méritait guère mieux. » répondait le visage teinté de blanc aux joues outrageusement fardées de rouge vif. « Les colonies, tout de même, madame ! Pauvre Eugénie. » Les hautes coiffes piquées de plumes grotesques s’évaporèrent tout aussitôt. 

Les ombres oscillaient entre valses frénétiques et danses lentes. Astrée semblait assister à quelques morceaux de vies et d’époques diverses, sélectionnés par une invisible main. La nausée lui montait le long de la trachée en même temps que ce cri de panique qu’elle ne parvenait plus à contenir. Un cri qui s’écrasa contre une paume masculine. Elle s’apprêtait à paniquer plus encore, lorsque les picotements salvateurs se firent ressentir contre ses lèvres.

— Chut, lui intimait-il. Ils vont t’entendre.

Qui ? Qui allait l’entendre ? Parlait-il des ombres ? Ou bien des touristes ? Dans quel monde était-il ? A quel monde appartenait-il ? Plus tôt, il n’avait été qu’une forme indistincte à quelques mètres d’elle. Un vestige du monde qu’elle quittait. A présent qu’en était-il ? Ramassée contre lui, elle voulait le voir, et releva le nez en direction de ce visage flou. L’affolement manqua de la submerger avant qu’elle ne réalise que des larmes lui troublaient la vue. Elle pleurait. Depuis quand ? D’un revers de main elle sécha un œil, puis l’autre, et tenta à nouveau. Parfaitement net, il regardait droit devant lui. Que voyait-il ? 

Un bruit de pas précipités attira l’attention d’Astrée dans la même direction que lui. La lune était bien haute dans le ciel, et surtout parfaitement immobile, lorsque la cape sombre passa si vite qu’elle fouetta le visage d’Astrée dans le mouvement. Toujours au sol, Syssoï la ramena un peu plus contre lui. 

— Halte-là ! hurla-t-on sur leur droite. 

Astrée perçut l’éclat de l’acier d’une flèche dont on armait l’arbalète depuis la haute tourelle, et comprit. Sur sa gauche, la cape se retourna si vivement que la capuche glissa et libéra une cascade d’ondulations en pagaille. Et ce visage. Son visage. Un visage commun à trois femmes. Aelis, la statue de la cour, et elle-même. 

Le film se déroula par anticipation dans l’esprit de la jeune femme. Elle le connaissait par cœur. Le soldat de la tourelle à droite allait tirer. Aelis allait s’interposer. Et l’autre homme sur la gauche serait sauvé.

Dans un sursaut incontrôlé, Astrée souhaita interrompre l’inévitable. Elle chercha à s’extraire de ces bras qui l’agrippaient, l’enveloppaient, et la ramenaient avec force contre leur propriétaire. Dans un hoquet de terreur, elle assista, impuissante, à la chute d’Aelis. La tête de cette dernière roula contre le sol dur et froid, et leurs regards se rencontrèrent. Le sang, en minces filets, zigzaguait entre les pierres, et se répandait à mesure qu'il quittait ce petit corps en même temps que la vie. Juste là. Astrée sentit les larmes se faufiler entre ses cils pour venir s’écraser contre cette main qui lui comprimait toujours la bouche. Des larmes qu'elle offrait à une femme qui n'était plus que poussières depuis sept siècles. 

Et pourtant elle était là. Astrée aurait pu jurer qu’elle la voyait aussi. Qu’elle lui souriait aussi. Les lèvres de la mourante tremblotèrent un instant, s’efforçant de former un mot, un son. «  Fuyez… » expira-t-elle finalement, tandis que l’écho des pas se démultipliait alentour. Le soldat allait arriver, Astrée le savait. Elle l’avait rêvé. Il allait se pencher au-dessus d’Aelis et cette dernière découvrirait les traits de son meurtrier. 

Syssoï ne lui en laissa pas le temps. D’un mouvement preste, il les releva tous deux et la tracta dans la direction opposée. « Halte-là ! » entendit-elle à nouveau dans son dos à la différence de son rêve, réalisa-t-elle. Le soldat n’avait pas eu besoin de crier deux fois puisque personne ne prenait la fuite. Aelis était à l’agonie, et l’homme que le soldat s’apprêtait à tuer se précipitait vers elle.  Et Syssoï qui lui ordonnait de courir en resserrant ses doigts autour des siens. Alors elle réalisa. Il y avait bien des fuyards. Syssoï et elle. Ainsi le soldat les voyait ?

Astrée ne détacha son regard du gisant d’Aelis et du menaçant soldat que lorsque son épaule, dans sa course, heurta un obstacle. Pas un véritable obstacle, non. Un homme. Un homme qu’elle dépassa à vive allure. Une ombre aux yeux d’acier. Syssoï ? Elle aurait juré que c’était lui qu’elle venait de bousculer. Pourtant elle sentait sa main contre la sienne. Elle ressentait le picotement électrique. Elle entendait sa voix qui ne cessait de psalmodier « Cours ! » en la trainant dans son sillage. Comment était-ce possible ?

Pourtant, c’était également son regard surpris qu’elle percevait à l’opposé. C’était ses traits déformés par l’incompréhension qu’elle contemplait tandis qu’elle était tractée au loin. Comment Syssoï pouvait être à la fois devant elle et derrière elle ? Le sosie du Russe qu’elle observait arborait la chasuble des chevaliers sous sa lourde cape. Et elle comprit enfin... Olimp ? 

Ce dernier la fixa encore un instant, un instant hors du temps, avant de se retourner et se précipiter vers la future dépouille d’Aelis. Le soldat à l’arbalète était encore bien loin lorsque le chevalier arborant trois lions sur fond bleu se pencha sur le corps de la mourante, lorsqu’il arracha la flèche meurtrière de son sein. Astrée observa les grandes mains ensanglantées venir chercher le visage inerte, le caresser, le souiller, et son visage à lui se déformer sous l'effet de la colère, de la terreur, de l’impuissance.

Prisonnière de cette scène morbide, elle voulait connaître la suite, être témoin de la fin. Mais bientôt, emportée par ce bras tout puissant, elle quitta le chemin de ronde pour l’intérieur de l’une des tourelles, et les perdit de vue. Son attention se reporta sur le danseur qui la devançait et l’attirait dans cet escalier en colimaçon séculaire. Qu’avait-il vu ? Qu’avait-il su ? Il la força à dévaler les volées de marches creusées par les ans, et lorsqu’ils débouchèrent dans la cour, quelque trois étages plus bas, il faisait plein jour. L’arbre avait, à nouveau toutes ses feuilles, et les touristes en grappes suivaient une Laetitia tout sourire. Que venait-il de se passer ? 

Elle ne fut capable que d'un gémissement plaintif. C'est tout ce qui s'échappa d'entre ses lèvres alors que les larmes, de plus en plus nombreuses, roulaient sur ses joues pour venir s'écraser contre sa bouche. Le regard ne parvenant à se fixer sur un élément précis du décor, elle sentait le souffle lui manquer, puis s'emballer. Il fallait qu'elle parvienne à se calmer, à se raisonner. Mais bientôt, des bras vinrent l'entourer, et ses paupières s'abaissèrent lorsqu'un torse se cogna contre sa joue. Et au milieu du bourdonnement de ses oreilles, une voix, qui lui répétait que tout était fini, que tout irait bien désormais, qu'elle n'avait rien à craindre. Sa voix rauque et tendue.

Des affirmations tellement mensongères qu'elles firent renaître une colère sourde en elle, remontant des profondeurs de son être. Elle ravageait tout sur son passage, repoussait craintes, angoisse, tristesse, choc, pour ne plus animer son corps que de colère, une colère froide, une colère impérieuse, une colère disproportionnée. Une colère qui explosa sur l'autre. D'abord un coup, puis un autre, puis encore un autre, et un autre, jusqu'à ce qu'il relâche son étreinte et recule de lui-même.

— Rien n'est fini ! hurla-t-elle, la hargne déformant ses traits. Rien du tout ! Et rien ne sera fini tant que je ne saurais pas qui tu es ! Pourquoi tu me fais subir ça ? Comment tu peux être là, devant moi, tout en ayant été à ce même endroit il y a sept siècles ? J’vais devenir folle ! Sors de ma vie ! Fous-moi la paix ! Mais dégage, bordel !

Hors d'elle, elle hurlait, criait, renforçait la distance entre eux en reculant progressivement en direction du parc. Elle attirait tous les regards à la ronde à force de hurlement, mais n’en avait qu’à peine conscience. Elle avait perdu toute maîtrise. Impassible, Syssoï n'avançait pas. Il la laissait partir, subissait cris et accusations sans un mot, sans un geste, sans la moindre réaction si ce n'est un infime sourire à peine perceptible. Un sourire qu'elle ne vit pas puisqu'elle lui avait tourné le dos et, à toutes jambes, fuyait vers la Dordogne. Cette même Dordogne qu’Aelis avait rêvé d’atteindre, cette nuit-là.



 

*



Que venait-il de se passer ? Avait-elle rêvé en plein jour ? Perdait-elle la raison ? Les membres fébriles elle avait laissé le temps s’égrainer, filer et défiler au rythme de ses pas qui s’enfonçaient sur la rive. Chaque bruit forçait un sursaut. Chaque mouvement dans son champ de vision réanimait cette terreur de voir l'expérience se reproduire. Où s’arrêtait la réalité ? Où débutait la folie ? Après ce qui lui sembla être une éternité, elle avait échoué sur le sol, face à l'eau, l'esprit en vrac. Et lui, qu’avait-il vu ? Il l’avait empêché de crier, l’avait extrait de force de cette prison du passé. Mais y avait-il été avec elle ? Il aurait pu, tout aussi bien, l’empêcher de se donner en spectacle au milieu d’une flopée de touristes depuis une zone à l’accès totalement interdit. Alors elle n’aurait été qu’une psychotique bataillant contre des fantômes. 

Il n'avait pas cherché à la rejoindre, pas plus qu'il n'avait cherché à la joindre. Elle avait vérifié son portable de nombreuses fois, et à chaque nouvelle vaine consultation, la frustration gagnait en intensité. De la frustration et de la peur aussi car, si elle était incapable de se plier à ce qu'elle lui avait ordonné, peut-être que lui saurait s'en satisfaire. Elle ne savait rien de lui. Chaque ébauche de confession avait dû lui être arrachée, et elles se comptaient sur les doigts d’une main. Pour tout le reste, il avait mis un point d'honneur à ne rien lui offrir, à se montrer évasif, voire énigmatique. Elle qui devait déjà se battre contre ses propres démons, était fatiguée de devoir, en plus, se battre contre lui. Contre celui qui semblait être le mieux placé pour l'aider à comprendre, l'aider à traverser tout ceci. Elle aurait voulu partir, fuir radicalement tout ça, rentrer à Paris et oublier, mais elle n'était pas certaine d'en être capable. Elle avait même la conviction que l'oubli ne serait pas au programme. Au contraire. Comment être sûre que les phénomènes n’allaient pas perdurer à Paris ? Il lui faudrait comprendre avant toute chose. Elle devait comprendre. Même s'il s'y opposait, même s'il la freinait. Elle se devait de comprendre.

Lasse, éreintée, usée, Astrée laissa son regard sombre se promener sur les eaux du fleuve. Loin, très loin des préoccupations de la jeune femme, les kayakistes passaient, indolents, les pêcheurs tendaient leurs lignes, des enfants sélectionnaient les meilleurs galets à faire ricocher. Et en face, sur la berge opposée, un homme semblait l’observer. Il était trop loin pour qu’elle puisse en jurer, mais l’allure lui parut très familière. Elle plissa des paupières, força sa myopie au retrait et laissa échapper une exclamation de surprise. Pâris ? 

Vingt mètres et un fleuve les séparaient, mais à l’orée des bois se tenait son jeune frère, épée au flanc. Le coeur d’Astrée reprit sa tachycardie. Elle leva immédiatement les yeux au ciel. Le soleil, parfaitement immobile au zénith, elle reporta son regard vers l’autre berge, une paume en visière. La vision, dissipée n’était plus, et avait emporté Pâris avec elle. 

Prise d’un nouvel élan de panique, la jeune femme quitta la rive, et cavala à toutes jambes jusqu’aux ruelles en pente. Pour la première fois de sa vie, la foule la rasséréna, et le dénivelé l’obligea à ralentir sa course. Le souffle court, elle s’immobilisa sur les hauteurs du village les poumons à l’agonie. Penchée en avant, les mains sur les cuisses, la gorge irritée, elle s’exhortait au calme. Ce ne fut qu’en relevant le nez qu’elle remarqua qu’elle venait de cracher un filet de bile sur le parvis d’une église. D’un revers de main, elle essuya ses lèvres avant de tenter de pousser la lourde porte du lieu de culte. Cette dernière résista. Si elle n’osait encore l’admettre, Astrée savait exactement ce qu’elle cherchait, ce qu’elle voulait, et perdant le peu de contrôle qui lui restait, se retrouva à tambouriner contre le bois épais à s’en abîmer les paumes. Ses poings prirent le relais, puis son front.

— C’est fermé, lança une voix dans son dos.

Dans un sursaut, Astrée cessa d’insulter la porte, et se retourna pour faire face à son interlocutrice. Une vieille femme dont les cheveux argenté se répandaient tout autour d’elle, comme une seconde peau. Elle lui souriait avec bienveillance.

— Pardon, je…

Elle quoi ? Astrée n’avait aucune excuse, aucune explication recevable. Elle perdait pied et en avait parfaitement conscience. C’était comme assister à son propre naufrage sans avoir eu la présence d’esprit d’apprendre à nager.

— Si vous voulez tant parler aux esprits, pas besoin d’une église, poursuivait la vieille femme en s’avançant vers Astrée. Ils sont tout autour de vous.

De cela, Astrée en avait un peu trop conscience, en effet, et venait de l’expérimenter à ses dépends. Cependant, elle n’avait que faire des autres. Un seul esprit l’intéressait en cet instant.

— Savez-vous de quand date cette chapelle ? demanda-t-elle, justement.

— Saint-Michel-Archange, c’est comme ça qu’on l’appelle celle-ci, répondit la bonté personnifiée en portant son regard vers le clocher. Elle a remplacé la vieille église romane qui s’y trouvait avant. On dit qu’elle abritait le démon. Alors ils ont érigé celle-ci à la place, et l’ont dédiée à Saint Michel, le chef de la milice céleste. Après tout, n’est-ce pas lui qui a combattu le dragon de l’Apocalypse ?

La petite baronne n’avait demandé qu’une date et non un cours de catéchisme, mais hypnotisée par la beauté de cette vieille femme, elle n’osait l’interrompre. 

— Désolée, je ne suis pas très…

— Pieuse ? termina la vieille femme à sa place. Ça tombe bien, moi non plus.

Dans un clin d'œil complice et bizarrement apaisant, elle ramena ses longueurs argentées vers l’arrière, dévoilant un peu mieux son visage à la peau laiteuse et des yeux sombres sur lesquels ondulaient des éclats juvéniles.

— Tout ce qui se trouvait ici avant le XVème siècle n’est plus, poursuivit-elle tout de même. Et vous ne devriez pas vous trouver ici vous-même.

Elle avait perdu un peu de son sourire, mais ses yeux nimbaient encore Astrée de bienveillance.

— Je… oui, s’entendit répondre la jeune femme. Vous avez probablement raison. 

Elle devait rejoindre Syssoï. Ce n’était absolument pas ce que la vieille femme venait de lui dire, mais c’était la conviction profonde qui naquit au creux de ses entrailles. Instantanément. Aussi remercia-t-elle son interlocutrice, et après plus d’une heure d'errance solitaire, décida que cela avait assez duré. Sitôt qu’Astrée eut tourné à l’angle de la ruelle, l’argent d’une chevelure tourna au noir corbeau et un rire délicat ricocha contre les murs de Saint Michel.

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Morgane64
Posté le 08/08/2021
Je trouve que tu as bien géré cet épisode de faille temporelle. Je crois que j'en serais incapable. L'idée du compte à rebours à partir de l'arbre est brillante, et le reste, m'a saisi. Peut-être oui faudrait-il retravailler pour appuyer cette prise de conscience que Syssoï n'a pas tué son ancêtre, mais rien de grave. C'est bien de garder un peu de nervosité dans le récit, voire de confusion, en rappel à celles d'Astrée.
La vieille m'a l'air trop sympa pour être honnête...
Ma récolte de coquilles :
myriade d'interrogations qui se bousculait (je mettrais le pluriel)
Située au sommet d’une tourelle, le trio avait bravé (je construirais la phrase autrement, là on change de sujet)
hurlement (je mettrais le pluriel aussi)
OphelieDlc
Posté le 10/08/2021
Je ne pensais pas en être capable avant de me lancer dans cette expérience. Tu connais l'expression, hein, "Ils ne savaient pas que c'était impossible alors ils l'ont fait", bien que je ne pense pas que ce soit impossible et reste persuadée que ça peut être bien mieux fait.

Je vais retravailler profondément ce chapitre. Camille m'avait déjà prévenu, et la lecture de Notsil me l'a confirmé. Mais je vais suivre ton conseil et conserver un poil de confusion tout de même, en écho à celle d'Astrée. J'ai encore du boulot, haha !
Morgane64
Posté le 12/08/2021
Tu vas y arriver, je trouve que tu es déjà bien partie ! Sincèrement
Notsil
Posté le 26/02/2021
Coucou ! Eh bien, en effet, on apprend beaucoup beaucoup de choses dans ce chapitre :)

J'ai beaucoup aimé toutes ces petites info distillées par petites touches, et j'ai vraiment envie de savoir / comprendre tout ce qui tourne autour d'Astrée.

En tout cas, on sent que pour Astrée, sur les lieux qui la concernent, le voile entre les temporalités se déchire. Je me demande si ça aura une importance, si elle maitrisera cette "capacité" ou pas plus tard.

"Un sourire qu'elle ne vit pas puisqu'elle lui avait tourné le dos et, à toutes jambes, fuyait vers la Dordogne. Cette même Dordogne qu’Aelis avait rêvé d’atteindre, cette nuit-là."
-> Je me suis demandé s'il cherchait à modifier le passé, du coup ? Et si j'ai bien suivi, il serait le chevalier ? (mais il me semble aussi qu'il est censé être le gars qui lui a tiré dessus... va falloir que j'aille relire je dois confondre les 2 bonhommes ^^). donc ici le chevalier arrive après qu'on ait tiré sur Aelis, et Aelis cherchait à protéger une autre personne. Mais c'était pas le chevalier son amoureux ? (ou ils étaient 2 et jumeaux, soyons pragmatiques ? ^^). Ou je m'embrouille en cherchant à comprendre ^^

"Vingt mètres et un fleuve les séparaient, mais à l’orée des bois se tenait son jeune frère, épée au flanc."
-> Là j'ai hésité, voit-elle son frère du passé ou du futur ? Est-ce qu'il l'attend là est-ce qu'il est coincé dans cette boucle temporelle, est-ce pour ça qu'il n'est plus à Paris ? Est-ce qu'ils doivent rejouer la scène jusqu'à ce qu'elle aille au bout ? Est-ce qu'il faudra ça pour "libérer" son frère ? (ou au contraire, est-ce qu'elle va lui téléphoner pour savoir s'il était là et il va lui répondre que non ? ^^)

"— Si vous voulez tant parler aux esprits, pas besoin d’une église, poursuivait la vieille femme en s’avançant vers Astrée. Ils sont tout autour de vous."
-> tiens tiens tiens... les esprits de ses incarnations passées, je présume ?

Je me demande s’il Syssoï attend d’elle genre un déclic, qu’elle l’appelle par un certain prénom ou autre, bref, qu’elle fasse une démarche laissant entendre qu’elle sait.
(je suis en train de m’imaginer que ça risque de finir mal pour eux tout ça ^^)(oui je me prépare toujours au pire comme ça je suis moins déçue si ça ne finit pas bien ^^)

"— Tout ce qui se trouvait ici avant le XVème siècle n’est plus, poursuivit-elle tout de même. Et vous ne devriez pas vous trouver ici vous-même."
-> oh oh oh. Ça serait donc son incarnation précédente qui chercherait encore et toujours à comprendre / savoir ? Un peu tout qui se mélange ?

"Sitôt qu’Astrée eut tourné à l’angle de la ruelle, l’argent d’une chevelure tourna au noir corbeau et un rire délicat ricocha contre les murs de Saint Michel."
-> tiens tiens tiens… la même personne que les archives ? J’ai l’impression que cette personne ne cherche pas forcément à l’aider. Je ne la sens pas si bienveillante.

Et Syssoï en sait bien plus qu'il ne veut l'admettre. Du coup, je ne sais pas trop comment le caler. Certes techniquement il est un allié, y'a clairement un truc entre eux, et pourtant, si c'était le cas, pourquoi ne pas tout lui dire, pourquoi la laisser découvrir par elle-même ? Ou alors il piste les autres sur leurs traces ? Mais il avait l'air de ne pas bosser seul aussi...

Bref, malgré les révélations, le mystère s'épaissit :p Peut-être que des trucs m'apparaitraient plus clairement en relisant tout d'une traite (mais le temps me manque hélas pour ça pour le moment ^^).

Toujours hâte de connaitre la suite ^^
OphelieDlc
Posté le 03/03/2021
Merci pour ce retour, surtout qu'il s'agit d'un gros chapitre avec énormément d'infos, et des passages narratifs dont je ne suis pas certaine d'être parvenue à maîtriser la complexité. J'ai eu un retour de BL qui me faisait dire que l'ensemble était trop confus. Je l'ai retravaillé, mais ton commentaire me dit que je vais devoir encore reprendre certains passages.

"-> Je me suis demandé s'il cherchait à modifier le passé, du coup ? Et si j'ai bien suivi, il serait le chevalier ? (mais il me semble aussi qu'il est censé être le gars qui lui a tiré dessus... va falloir que j'aille relire je dois confondre les 2 bonhommes ^^). donc ici le chevalier arrive après qu'on ait tiré sur Aelis, et Aelis cherchait à protéger une autre personne. Mais c'était pas le chevalier son amoureux ? (ou ils étaient 2 et jumeaux, soyons pragmatiques ? ^^). Ou je m'embrouille en cherchant à comprendre ^^" --- Alors... Durant son songe, lorsqu'Astrée rêve pour la première fois d'Aelis, elle vit cette scène. Un soldat sur la tourelle à droite, une silhouette penchée au-dessus du vide à gauche, et au milieu de ce chemin de ronde : Aelis. Le soldat sur la droite tire une flèche à destination de la silhouette. Aelis s'interpose et prend la flèche à la place de la silhouette. Quelques instants plus tard, elle voit un soldat se pencher au-dessus d'elle et en déduit qu'il s'agit de son meurtrier. Donc, le sosie de Syssoï.
Revenons au présent. Astrée déchire le voile de temporalité (j'aime beaucoup cette image ^^) et revit cette scène en étant, cette fois, spectatrice. C'est toujours la même chose, le soldat à droite sur sa tourelle, la silhouette à gauche, et Aelis au milieu. Le soldat crie "Halte-là !" et arme son arbalète. Il tire. Aelis s'interpose, prend la flèche et termine au sol. Comme dans le rêve d'Astrée. Syssoï oblige Astrée à partir. Il la relève et ils prennent la direction de la gauche... donc vers la silhouette, celui qui devait se prendre la flèche si Aelis n'était pas intervenue. C'est cette silhouette qu'Astrée bouscule. Astrée et Syssoï prennent la fuite, tandis que la silhouette, elle, tente de rejoindre Aelis. Ils se croisent et Astrée dévisage et découvre pour la première fois l'identité de la silhouette. C'est le sosie de Syssoï en habit d'homme du seigneur (aka chevalier, aka soldat). Et Astrée comprend qu'elle s'est trompée depuis le début. L'homme qui se penchait au-dessus d'Aelis dans son rêve n'était pas le soldat à la flèche (il était bien trop loin pour la rejoindre aussi rapidement), mais le soldat avec lequel elle s'apprêtait à prendre la fuite. Aka son amant. Conclusion : Syssoï n'a pas tué Astrée ce jour-là. Ou Olimp n'a pas tué Aelis.

"-> Là j'ai hésité, voit-elle son frère du passé ou du futur ? Est-ce qu'il l'attend là est-ce qu'il est coincé dans cette boucle temporelle, est-ce pour ça qu'il n'est plus à Paris ? Est-ce qu'ils doivent rejouer la scène jusqu'à ce qu'elle aille au bout ? Est-ce qu'il faudra ça pour "libérer" son frère ? (ou au contraire, est-ce qu'elle va lui téléphoner pour savoir s'il était là et il va lui répondre que non ? ^^)" --- Elle voit son frère en habit d'époque, épée au flanc. Donc, à ce stade, on ne sait pas trop si elle hallucine (après ce qu'elle vient de vivre, on peut le lui pardonner) ou si le voile se déchire à nouveau pour la laisser entrevoir un nouveau visage familier commun au présent et au passé. Peut-être aussi, n'est-ce qu'une forme de rêve éveillé. Il n'est pas rare de prêter des traits familiers aux protagonistes de nos songes. Peut-être Olimp n'avait-il pas du tout cette tête, et c'est l'imagination d'Astrée qui lui colle le visage de Syssoï.

Concernant la vieille dame sur le parvis de l'église, tes interrogations me rassurent. Je voulais que l'on comprenne bien qu'il ne s'agissait pas réellement d'une vieille dame et qu'on avait déjà croisé ce personnage auparavant. Tu évoques les archives, mais tu voulais dire la mairie, non ? Parce qu'aux archives c'est Lauretta, et elle est blonde Lauretta. Ici, j'évoque une brune aux yeux noirs. Je ne te spoile pas en te révélant que tu l'as déjà croisé deux fois. Une fois dans la salle d'attente de la mairie, et un peu plus tard le même jour, dans le bar clandestin avec Pierre.

Voilà, les deux gros points qu'il me faut retravailler, je pense.
Merci encore pour tes retours ! ;)
Notsil
Posté le 03/03/2021
Avec plaisir ! J'y vois plus clair sur les perso des remparts en effet, merci pour le rappel du placement ^^ c'est beaucoup plus clair.

Et oui en effet j'ai confondu mairie et archives (après j'ai du mal à retenir le physique des personnages en 1ère lecture en général - là le souci vient de moi ^^).
J'aime beaucoup en tout cas les trucs qui nous font douter (réel ou hallucination), genre le frère. C'est bien fait :)
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