4. Séparation (2)

Notes de l’auteur : Pour les personnes qui m'ont lues avant le 10.10, j'ai fait quelques modification au niveau des chapitres, donc ce n'en est pas un nouveau chapitre, il est simplement recoupé ^^

Le trajet jusqu’à Verdeau s’avéra étouffant et les jumeaux furent ravis de retrouver l’auberge où Turg devait les retrouver. La tenancière dut les prendre pour plus jeunes qu’ils ne l’étaient, car elle leur offrit une des deux boissons, pour le plaisir de Nessan qui étouffa les grommèlements de Kalan. Le jeune Sombre n’eut pas le temps de ressasser cet affront, car Turg les rejoignit. Il leur offrit de quoi manger bien que l’heure soit matinale avant de prendre leur départ. Les jumeaux échangèrent un rapide coup d’œil, partageant le sentiment que Turg les nourrissait comme pour engraisser un animal dont on voudrait se repaitre. Bien que l’idée les dérangeât, les deux frères n’allaient pas se priver de profiter des moyens du magouilleur.

Après leurs échanges de banalités autour d’une table entourée d’Elfes de toute races, Turg les mena à l’extérieur du bourg et Kalan eut enfin l’impression de pouvoir respirer. Contrôler ses pensées en permanence était éreintant et la sensation d’être épié par les Hypnotiques oppressante. Dès que le brouhaha de la cité fut remplacé par le courant puissant de la Tèbre écrasant ses eaux contre les roches, Nessan demanda :

— Alors, comment on traverse ce fleuve ?

— Pas ici en tout cas, assura Turg.

— Où alors ?

Kalan sentit une pointe d’agacement chez son frère que ce dernier savait bien cacher, mais pas à son propre jumeau.

— Dans une auberge plus au nord qui sert de relais aux marchands, gardes et voyageurs en tout genre qui veulent rejoindre Verdeau.

— Pardon ? s’écria Kalan, bien moins imperturbable que Nessan. Avec des gardes ?

— Plus c’est sous leur nez, plus ça passe ! Mon ami qui tient l’auberge fait passer des Elfes depuis de nombreuses années sans jamais se faire prendre. Vous verrez ! C’est un vieux Sombre bourru de confiance.

Kalan grogna, mais Nessan lui posa une main apaisante sur l’épaule. Ils n’avaient pas le choix, autant qu’ils suivent Turg sans dispute.

*

Ahia s’était sentie un peu déboussolée lorsqu’elle n’avait plus senti l’aura de ses amis et de sa famille. Elle avait hésité à rebrousser chemin, mais à quoi bon ? Kalan devait partir de son côté et sans lui, elle ne pouvait plus espérer voiler ce sentiment étouffant de solitude. Sa différence avait toujours fait rire son ami, pas comme une moquerie, mais plutôt comme si c’était à chaque fois une merveilleuse surprise. Cette différence bien plus vaste qu’il ne le pensait et qui faisait d’Ahia l’être le plus esseulé et le plus incompris de ce monde. Seule Choya avait une idée de qui elle était et elle n’avait pu que l’encourager à quitter Montet et à suivre son instinct. Elle n’avait donc plus à se poser de question mais à aller de l’avant comme Kalan et Nessan.

Ahia espérait qu’il ne leur arriverait rien, elle avait même hésité à les accompagner, aucune frontière ne pouvant la contenir, mais l’idée de rejoindre Réonde la terrifiait. Et puis elle avait cette chose en elle, cet instinct qui la poussait à entreprendre un autre voyage. Elle avait constaté que les Elfes, les Sombres en tout cas, n’étaient pas entièrement dirigé par cette intuition primordiale qui, elle, la guidait dans ses décisions. Kalan y était parfois plus sensible que les autres, mais ce n’était rien en comparaison d’Ahia. Peut-être que son enfance parmi les loups y était pour quelque chose car elle avait dû apprendre à agir différemment durant sa vie à Montet. Ce qui était le comble quand on pensait qu’elle avait décidé de suivre Géolde uniquement par écoute de cet instinct !

Les années passant, ou peut-être en devenant adulte, cette boussole interne s’était mise à s’agiter. Sa mère adoptive était tombée des nues et avait protesté avant d’accepter son annonce : elle partait entreprendre sa propre aventure. Géolde, lui qui l’avait trouvée dans les bois et qui connaissait une partie de son secret, avait accepté plus facilement la nouvelle, comme s’il l’attendait.

Ahia avait décidé de faire le tour de la Ligne, afin d’observer comment la maladie affectait les autres villages et elle avait constaté avec regret que certains d’entre eux étaient encore plus gravement touché que Montet. C’était cette exploration qui l’avait menée jusqu’à l’étonnant groupe d’Elfes qu’elle observait actuellement. Une Cornide, un Sombre et un Hypnotique qui ne portaient pourtant pas la tenue de la garde observaient les abords de la Ligne en pleine forêt. Que faisaient un groupe mixte dans la Ceinture ? Est-ce que ces Elfes se cachaient ? Leur présence était-elle liée aux maladies qui touchaient la végétation ? Les champs des Sombres n’étaient en effet pas les seuls touchés par le malheur, la forêt aussi pourrissait.

— C’est encore pire que je ne l’imaginais, constata la Cornide.

Et Ahia sentit un regret particulièrement amer chez cette dernière.

— J’ai peur que la Ceinture soit ravagée d’ici quelques années, approuva l’Hypnotique accroupi près d’une plante putride. Mais il y a… Ah bon sang, Holl me crie dans le crâne, attends.

Il s’interrompit puis se redressa, l’œil alerte. Ahia remarqua alors la taille impressionnante de sa marque frontale et barricada son esprit.

— Qu’est-ce qu’il y a ? s’enquit le Sombre, un énorme colosse.

— Nous ne sommes pas seuls, murmura l’Hypnotique. Holl s’excite sur son histoire d’Essentiel, il dit qu’on serait à côté.

— Ça fait longtemps qu’il ne s’est plus enthousiasmé là-dessus.

— Tu trouves ?! Il n’y a plus que moi qui ai le droit à son délire, apparemment… Il y a quelqu'un ? demanda-t-il plus fort.

Puis il marcha à pas prudents, en zigzaguant légèrement. Ahia était bien cachée, elle n’avait rien à craindre. Pourtant lorsque l’Hypnotique ne fut qu’à quelques pas d’elle et qu’il demanda de se montrer, elle préféra s’enfuir. Qui étaient ces Elfes ? Elle se posait encore la question quand elle franchit la Ligne, imprudence qu’elle ne s’était jamais permise jusqu’à ce jour. Mais le groupe mystérieux ne l’intéressa bientôt plus, car le centre de la Zone lui apparut. Jamais elle n’avait vu quoi que ce soit d’aussi effroyable.

*

Sous un soleil de plomb, Kalan, Nessan et leur guide marchèrent plusieurs heures pour rejoindre l’auberge. À peine passèrent-ils la porte, qu’ils se laissèrent glisser sur le sol frais, poussant un soupir de soulagement. Les larges murs de pierres et les volets extérieurs de la bâtisse avaient préservé l’habitacle de la chaleur estivale.

— Vous comptez rester assis par terre comme des loques ? À quoi servent mes tables et mes bancs à votre avis ? ronchonna une voix au fond de la pièce.

Kalan plissa les yeux, mais ne distingua rien, ses pupilles peinant à suivre le changement brusque de luminosité. La silhouette d’un Elfe sortit peu à peu de l’obscurité. Un Sombre d’une septantaine d’années, les cheveux argentés coiffés en catogan, la peau mouchetée de taches, vint à leur rencontre.

— Bon alors ? Vous êtes cassés ? railla-t-il.

« Voici donc l’ami bourru de Turg », pensa Kalan.

— Frères Enflammé et Moudugenou, voici Boyld, vieil ami et aubergiste bien connu dans la région pour son caractère et ses ratatouilles, présenta Turg.

« Ses ratatouilles ? J’imagine mal ce vieux grincheux préparer des petits plats », jugea Kalan.

— Frères Enflammé et Moudugenou, qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre, grommela l’aubergiste.

 Turg fut le premier à se relever. Kalan réalisa qu’ils étaient toujours assis par terre et sauta sur ses pieds. Il se serait volontiers fait une rapide toilette.

— Merci pour votre accueil, Boyld, aubergiste de caractère et cuisinier hors pair. Avez-vous un coin d’eau pour se rafraichir ? questionna-t-il d’un ton narquois.

Boyld tiqua, mais répondit :

— Je ne suis pas sûr d’avoir moins bon caractère que toi, jeune impétueux ! Pour les bains, il n’y a que les chambres réservées aux gardes qui en possèdent, mais il y a une fontaine dans l’arrière-cour qui fera l’affaire.

Kalan le remercia avant de filer, suivi par Nessan qui s’excusa auprès de Boyld pour les manières de son jumeau. Arrivés dans l’arrière-cour, ils enlevèrent leurs chemises sales pour plonger leur torse nu dans l’eau fraiche. Les deux frères avaient les mêmes marques longues et pointues sur le corps. Elles couraient sur leur peau exactement aux mêmes endroits, ce qui ne pouvait arriver que chez des jumeaux. Ils profitèrent de laver leurs chemises et les étendirent au soleil. Là, les bras plongés dans l’eau fraiche, à l’ombre des arbres, les frères attendirent quelques instants que leurs vêtements passent de l’état détrempé à humide. Nessan semblait somnoler, la tête posée sur son épaule. Pourtant, il finit par s’exprimer :

— Je me demande ce qui nous attend. 

— Il n’y a qu’un moyen de le savoir, j’imagine, répondit Kalan.

Nessan opina. Il n’avait pas envie que ce moment s’achève. La fontaine, les arbres, le bruit des oiseaux, celui de la Tèbre un peu plus loin, la présence de son frère, il voulait faire perdurer ce moment de paix encore des heures. Kalan lui serra l’épaule.

— On a bien profité et on aura d’autres moments de calme à l’avenir, mais on ne peut pas rester ici toute la journée. Tu es prêt ?

Il était rare que ce soit lui qui apaise son jumeau. Cependant, il connaissait le besoin de tranquillité de Nessan. Son frère était plus en peine que lui lorsqu’il fallait se faire balloter d’un endroit à l’autre. Il hocha la tête.

— Tu as raison, Kal. Tu sais, je suis content qu’on soit tous les deux.

Ils plongèrent encore une fois la tête dans l’eau puis secouèrent leurs cheveux qui reprirent leur droit de se dresser fièrement et chaotiquement sur leur crâne. Après avoir enfilé leur chemise, ils rejoignirent Turg et Boyld à l’intérieur. Là, l’aubergiste leur servit en ronchonnant un sirop maison délicieux. Leurs sacs avaient déjà été rangés et Turg leur exposa la suite du programme.

— Nous avons pris le temps de clarifier le déroulement de ce qui va suivre avec Boyld. Comme vous pouvez le constater, nous sommes seuls pour l’instant. Cette auberge est un point de passage avant de rejoindre Verdeau car les villages au nord sont assez nombreux et éloignés du bourg. Les gardes de la Ceinture ou de la Zone y font donc souvent étape pour la nuit, ce n’est pas pour rien que nous sommes arrivés en pleine journée. Vous allez pouvoir vous restaurer et vous reposer avant la traversée. Ce sera surement l’étape la moins appréciable du trajet. Dans votre chambre, une trappe au sol s’ouvre sur une cave. Derrière l’armoire qui s’y trouve se cache un long passage souterrain. Un très long passage. Il a été creusé par une bande d’Elfes il y a des années, avec l’accord de Boyld qui tenait déjà l’auberge à l’époque. Ce tunnel passe sous la Tèbre, il faut deux jours de marche pour le traverser et il n’est pas éclairé, sachez-le.

— Deux jours ?! Dans le noir absolu ? s’exclamèrent Nessan et Kalan d’une même voix.

Boyld opina du chef.

— C’est exact, aucune lanterne n’est fournie. Lors des travaux, il y a eu deux accidents provoquant un incendie qui a été heureusement vite contrôlé. En revanche, pour les pauvres ouvriers, les dégâts ont laissé des séquelles, même avec l’intervention précoce de Cornides. Personne n’a jamais bien compris ce qu’il s’était passé, mais il y a certains gaz souterrains dans ce tunnel qui entrent en réaction avec les flammes.

— Il n’y a pas d’autre manière de franchir la Tèbre ? s’enquit Nessan.

— Franchir le fleuve sans mourir, sous le regard des gardes puis marcher à découvert ? Même si vous y parveniez, une fois en territoire libre, vous devriez expliquer votre venue de l’ouest : il n’y a plus de villages à proximité de la Ceinture, ils ont été désertés lorsque la Zone est devenue ce qu’elle est. La destruction des ponts, la proximité avec des traitres, le passage des troupes durant la guerre… tout le monde a fui. Non, je vous assure que le meilleur moyen de passer la frontière, c’est ce tunnel. De l’autre côté, vous tomberez dans une auberge du village Caspis. Jamila, l’Hypnotique qui tient les lieux, est une de nos complices, vous pourrez lui faire confiance. Elle vous accueillera, mais elle devra attendre le bon moment. C’est possible que vous attendiez longtemps dans le tunnel avant qu’elle vous ouvre.

— Et comment on saura qu’on est arrivés et pas coincés devant un éboulis ? On attend trois jours qu’elle vienne nous ouvrir et si ce n’est pas le cas on fait demi-tour ? s’échauffa Kalan.

— Calme mon ami ! répliqua Turg. Vous sentirez qu’il y a des barreaux contre le mur. Ils forment une échelle qui vous permettra d’accéder à l’auberge de Jamila, notre complice de l’autre côté.

Kalan n’aimait pas ce plan, mais il n’avait pas de meilleure idée. Il demanda, tentant de se rassurer :

— Combien de Sombres sont déjà passés de l’autre côté avec ce tunnel ? 

— Cela dépend de comment vous comptez. Quatre Sombres ont déjà fui la Ceinture et me paient en Indigo. Pour ce qui est du groupe à l’origine de ce tunnel, des Elfes font des allers-retours chaque année. 

— Chaque année ? Mais qui est ce groupe et qu’est-ce qu’il cherche dans la Ceinture ? s’enquit Nessan.

— Je n’ai pas de réponse à te donner. Nous avons un accord avec Jamila : nous aidons la bande d’Elfes qui fait des allers-retours sans leur poser de questions. En échange, nous pouvons faire entrer clandestinement des Ceinturiotes et aller à leur rencontre si besoin. Elle ne nous pose pas de questions et ne sait rien de notre commerce d’Indigo. J’aimerais d’ailleurs que cela reste entre nous. Je ne sais pas comment elle réagirait, c’est une Hypnotique qui semble avoir des principes indiscutables d’après les dires de Boyld. Tout ce que vous devez savoir, c’est qu’elle vous fera bon accueil et qu’il est dans l’intérêt de ces drôles d’oiseaux d’entretenir le tunnel.

Kalan croisa les bras. Quatre personnes avaient déjà fui la Ceinture. C’était peu, mais l’année dernière encore, il n’aurait même pas pensé cela possible. Et qui étaient ces Elfes qui traversaient la frontière régulièrement ? Quels étaient leurs buts ? Alors que Kalan se perdait dans ses pensées, Boyld se releva.

— Bon, la ratatouille ne va pas se préparer toute seule, ronchonna-t-il. Vous pouvez profiter de l’extérieur jusqu’en milieu d’après-midi. Ensuite, il risque d’y avoir du passage, vous devrez donc rester enfermés dans votre chambre. Je vais préparer de quoi manger. Profitez de l’air libre tant que vous le pouvez. Turg, je t’offre de quoi te restaurer avant ton retour. J’ai quelques fioles d’Indigo pour toi également.

Les jumeaux n’attendirent pas que les deux Sombres fassent leurs échanges. Ils saluèrent et remercièrent Turg avant de rejoindre l’arrière-cour. Kalan aurait aimé se dégourdir les jambes à l’extérieur avant de rejoindre ce fameux tunnel, mais la chaleur l’en découragea. Il resta donc sagement allongé à l’ombre auprès de son frère, profitant de l’instant présent.

— On n’a pas fini d’en apprendre sur notre royaume, remarqua Nessan. J’ai l’impression d’avoir vécu dans une bulle toutes ces années et de découvrir aujourd’hui que je ne connais rien de notre monde. Il y a des personnes qui ont des objectifs qu’on est loin de comprendre.

— Oui, j’ai la même impression, admit Kalan. Je me demande si c’est ce qu’Ahia a ressenti en arrivant à Montet, elle paraissait si perdue. Peut-être que chaque région, chaque village, chaque individu possède des caractéristiques bien différentes. Et peut-être qu’on n’est pas si différents, qu’on n’a simplement pas les mêmes vies.

— Tu parles comme un vieux sage, maintenant ? se moqua Nessan.

— Disons plutôt que ma meilleure amie me paraissait très étrange et qu’en fin de compte on se ressemble beaucoup.

— C’est parce que tu es aussi étrange.

— C’est possible ! s’esclaffa Kalan. En tout cas, tu as raison, on a beaucoup de choses à découvrir. Et j’aimerais bien comprendre ce qui se trame autour de ce tunnel.

— Je doute que quelqu’un nous éclaire à ce sujet.

Les jumeaux auraient volontiers profité de discuter à l’air libre sous les arbres encore un long moment, mais Boyld vint les chercher. C’était bien trop tôt à leur goût, mais ils le suivirent et regagnèrent la chambre qui leur était dédiée. Il y avait une faible lumière et sept simples lits, collés les uns aux autres. Boyld leur montra qu’il suffisait de tirer les deux lits de droite pour libérer la trappe menant au tunnel.

— Vous allez manger ma ratatouille puis je vous conseille de dormir ici cette nuit, expliqua Boyld. Demain, je viendrai vous aider après le départ de mes potentiels hôtes. Il est possible que personne ne débarque cette nuit, mais je ne suis sûr de rien. Si nous avons de la visite, ne faites aucun bruit et ne déplacez aucun meuble tant que je ne suis pas là. Faites-vous discrets. C’est compris ?

Les jumeaux hochèrent la tête et prirent place dans leur chambre. Ils n’eurent pas à attendre longtemps que l’aubergiste leur apporte de quoi manger. Les jumeaux le remercièrent et attaquèrent leur repas. Dès la première bouchée, ils se regardèrent d’un air surpris.

— Boyld ! s’exclama Kalan. Turg n’a pas menti, c’est la meilleure ratatouille du royaume ! 

— C’est grâce aux herbes de mon jardin, se rengorgea l’aubergiste. Mangez donc et laissez votre vaisselle sur cette table, je m’en chargerai demain, dit-il avant de s’en aller.

Le plat était délicieux et copieux, les deux frères avaient rarement eu autant à manger dans une seule assiette.

— Étonnant personnage : grincheux, bourru, au centre de magouilles peu nettes, serrant la main aux gardes comme aux clandestins et un cuisinier généreux, résuma Kalan.

— En effet, il peut bien avoir tous les défauts du monde, on lui passerait tout avec ce plat. Et regarde, il nous a déjà préparé des vivres pour notre voyage ! Du pain aux tomates et des fruits secs. Je doute qu’on mange aussi bien le reste du voyage. 

— Tu as probablement raison, profitons-en. La route risque d’être longue. 

— Deux jours de tunnel, l’arrivée dans un village inconnu et interdit, cheminer durant des jours jusqu’à une grande exploitation près de la capitale sans savoir si on sera arrêté par la garde, côtoyer des Hypnotiques en gardant nos secrets… Oui, la route va être très longue, confirma Nessan d’un ton faussement joyeux.

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