En fouillant un peu mes playlists de chansons que j’écoute et accumule depuis le début de ma primaire, je me suis créé sans le vouloir beaucoup de madeleines de Proust. Des morceaux qui, dès que je les entends, me renvoient dans une autre époque, me rendant assez nostalgique. Et comme il me faut un peu de motivation pour me remettre à toutes sortes de projets, autant être productif sur ce qui me trotte en tête. Si vous vous ennuyez chez vous, si vous avez envie de penser à autre chose, décrocher de vos réflexions, je vous invite. Voyagez avec moi dans des petits bouts de mémoire, des capsules temporelles en musique. Revisiter tout ça, pour tout dire, me fait plaisir. C’est un peu comme si je rangeai mon grenier. Ainsi donc, je commence ; A Place Where You Belong, de Bullet for my Valentine.
J’avais 14 ans. J’étais en troisième, dans mon collège rural perdu en campagne, et surtout, en ce début d’été, je découvrais pour la première fois de ma vie les relations amoureuses. Ce garçon venait régulièrement chez moi en vélo passer l’après-midi. Souvent, il apportait sa guitare et il jouait des musiques de Skyrim. Quelques fois, on profitait du grand jardin de mes parents pour discuter dans l’herbe au soleil. On pouvait également regarder des films, s’amuser sur ma Wii. Tout était très tranquille ; à l’époque, le temps semblait couler avec innocence entre nous. J’avais beau avoir beaucoup de problèmes dans ma tête, j’étais très heureux. Avec lui, j’avais un véritable sentiment d’apaisement comme je n’en avais jamais ressenti auparavant. On pouvait passer des après-midis entières dans ma chambre, allongé l’un contre l’autre, à dormir serré sur un lit pour une seule personne. Et, pour moi tout du moins, ça me suffisait. Je me sentais, pour la première fois de ma vie, appartenir à quelque chose, à un endroit, à quelqu’un. On a créé, avec ce garçon, dans ma petite chambre remplie de peluches, une véritable bulle qui me permettait enfin de trouver le sommeil.
Il avait beau jouer de la guitare, c’était moi le métalleux des deux. Je venais de découvrir grâce à un très bon ami le groupe Bullet for my Valentine, un groupe qui crie tout autant qu’il parle d’amour. J’étais assez fier de les apprécier, car ils répondaient étrangement très bien à mes besoins de hurler. J’étais comme un enfant capable de trouver du goût dans les épinards ; j’écoutais cette musique "de sauvage" et je l’aimais sincèrement. J’avais l’impression de posséder quelque chose d’incroyable, qui m’était réservé. Cette musique n’ouvrait son cœur que pour moi seul, les autres y restaient hermétiques. Ainsi, je revendiquais, assez naïvement, ma passion pour le metal, peut-être un peu exagérée à l’époque.
Dans ma chambre d’ado, la lumière passait particulièrement bien par la porte-fenêtre qui donnait directement sur l’extérieur. Ce garçon s’en servait très souvent pour rentrer chez moi sans avoir à saluer mes parents. Nous bénéficions grâce à elle des lueurs du soleil tout en restant enfermés pendant les vacances. Et cette chambre, en plus d’un lit et d’un bureau, contenait surtout un lecteur de disque avec des enceintes, sur lequel je pouvais brancher mon iPod. Après quelques heures à somnoler, je me suis installé par terre avec ce garçon, et j’ai tiré profit de ce moment pour mettre du metal. Pas trop fort, pour que mes parents ne viennent pas, mais assez pour qu’il l’écoute avec attention. Voulant le convertir aux épinards, j’avais choisi A Place Where You Belong ; assez lente, plutôt douce, mais avec quand même un peu de scream pour qu’il comprenne en quoi c’était différent de tout ce qu’il avait pu entendre jusque-là.
Je m’étais allongé sur le parquet, pas très loin de lui. On avait écouté la chanson en silence. Il avait juste fait une remarque sur le fait que la musique avait beau être alanguie, elle était déjà difficilement appréciable pour quelqu’un qui n’avait jamais écouté de metal de sa vie. Puis, il s’était tu. Je ne sais plus s’il l’avait aimé. Nous n’en avons jamais véritablement parlé par la suite. Néanmoins, je lui en ai fait découvrir d’autres après elle ; The Last Fight, Tears Don’t Fall, Forever and Always… Les classiques de ce groupe à l’époque. Je ne crois pas qu’il ait vraiment été converti par le metal-core de Bullet for my Valentine, mais il m’aimait assez pour y prêter de l’attention.
Mais cet instant-là et cette musique en particulier, se sont cristallisés dans ma mémoire. Ce moment, cette après-midi de presque été où l’on ne faisait rien, allongé par terre l’un à côté de l’autre, à juste écouter une chanson triste. Car oui, cette chanson parle de quelqu’un qui découvre le suicide d’un ami très cher à ses yeux. Mais je crois qu’à l’époque la seule chose que j’étais capable d’en comprendre était le titre, « une place qui t’appartient ».
Car en finalité, cette musique m’a bien créé un endroit pour moi, un espace qui m’appartient, ce jour-là. Assez involontairement, sans préméditation, j’ai aimé ce moment plus qu’aucun autre. Cet instant où je pouvais faire découvrir à la personne que j’aimais des œuvres qui me hantaient, sans qu’il se moque, sans qu’il critique, sans qu’il s’en aille. Sa bienveillance, son silence, sa patience envers l’adolescent stupide que j’étais sont restés gravés dans mon cœur avec ce souvenir d’un soleil reflété par la porte-fenêtre que je regardais depuis le sol de ma chambre.
Bien sûr, ce n’est pas grand-chose ; rien d’une véritable importance. Mais désormais, quand j’entends cette chanson, je ne peux que voir deux ados maladroits dans une chambre trop petite, allongés par terre sans même se toucher. Je me rappelle les débuts, cette époque où tout débordait dans mes sentiments et que tout était à découvrir, à creuser. Ce moment où j’étais fou de joie rien qu’à l’idée qu’un garçon si particulier puisse rester avec moi, juste avec moi, même pour le temps d’une courte après-midi.
Et ce sentiment, dans sa forme la plus simpliste, est impérissable. Avec les années, j’ai un peu oublié Bullet for My Valentine, considéré trop souvent comme un groupe pour adolescente emo-gothique. Mais je ne peux pas oublier que trop de leurs chansons ont vivement marqué ma vie d’une sensibilité qui leur est propre, tant et si bien que d’autres ont fait et feront peut-être l’objet d’autres Musiques Capsules
le commentaire de "ce garçon" en lisant cette capsule fut simplement de m'envoyer une capture d'écran d'une de ses playlist.... ou cette musique figurait encore ! Comme quoi, y a des choses qui changent pas x)
Merci à toi d'avoir pris le temps de lire et d'écrire un retour, ça me fait très plaisir ! :)
L'idée de la capsule musicale est très bonne. Je vais en profiter pour un peu enrichir ma faible culture musicale ^^
Raconter des souvenirs en étant bercé par une musique doit être une expérience d'écriture sympathique.
C'est agréable à lire, juste la bonne longueur.
Merci pour ce moment,
Bien à toi !
J'ai beaucoup aimé ton texte !
Voilà !
Bien à toi !
~ Le dit ami qui t'a fait découvrir ces épinards aux riffs endiablés sur un fond de scream
Donc bravo, je file lire la suite ;)
PS : Fais tout de même une relecture attentive, quelques fautes (oublis de "s", en général) traînent dans le résumé et dans ce chapitre. C'est la seule critique que j'ai à faire ;)
Faire une relecture fait partie des choses que je dois faire mais dont j'avoue que j'ai une légère flemme... T-T Mais c'est noté, je le sais, comme j'écris vite je laisse passer pas mal d'erreurs !
Hésite pas à faire quelque chose dans le même style, perso moi je lirai, c'est quand même au final assez personnel donc je suis sûr que fait par quelqu'un d'autre que moi ça peut être très différent et très intéressant :D Après ce texte là il date d'a peu près l'année dernière, c'était le début du premier confinement et je faisais pas mal de ménage virtuel dans ma musique ^^
("J’étais comme un enfant capable d’aimer des épinards" - adorable)
Je me sens pas trop de le commenter, j'aurais l'impression de rentrer dans cette petite chambre. Mais je voulais quand même te remercier de nous partager cette musique et ce souvenir, vraiment. <3