Apocalypse

Par Arline

"Dans l'ombre de la troisième guerre mondiale, l'aveuglement des nations condamne la lumière de la civilisation humaine à décliner dans les abysses de l'histoire."

[Époque: 2040 - Terre en péril] 

Vers 2040, nous nous trouvions face à une Terre délabrée, sa situation ne cessant de se dégrader. La population mondiale, dépassant les dix milliards d'habitants, subissait des épidémies d'une ampleur mondiale à une vitesse effrayante, laissant peu de répit à nos chercheurs pour trouver des vaccins efficaces. Les catastrophes naturelles, amplifiées par le réchauffement climatique, s'intensifiaient chaque année. L'air était devenu si pollué que chaque hiver, nos villes étaient enveloppées d'un épais smog, s'ajoutant aux tempêtes incessantes et d'une violence sans précédent qui sévissaient toute l'année.

L'approvisionnement en ressources naturelles devenait un défi croissant. Notre agriculture était confrontée à des épisodes répétés de sécheresse, de tempêtes et d'inondations, conduisant à de mauvaises récoltes année après année et créant de graves difficultés pour nourrir nos populations. L'accès à l'eau potable était encore plus critique. La pollution des réserves d'eau était devenue incontrôlable. On aurait pu espérer que le dessalement de l'eau de mer puisse apporter une solution, mais la pollution des océans rendait ce processus extrêmement difficile, nous empêchant de produire suffisamment d'eau potable. Cette pollution avait également dévasté les écosystèmes aquatiques, entraînant la disparition de nombreuses espèces, y compris celles que nous pêchions pour nous nourrir.

[Époque: 2043 - Nouvelles Alliances pour la survie] 

Nos gouvernements, confrontés à la pénurie et aux catastrophes, avaient commencé à former des coalitions.  La Russie, la Chine, la Mongolie et le Kazakhstan s'étaient unis pour mutualiser leurs infrastructures et exploiter les ressources naturelles sur leurs territoires respectifs, en les partageant selon les besoins des nations membres.  Le conseil de la coalition prenait en charge la logistique globale pour assurer une répartition équitable.  Pour maintenir cette équité, une force armée conjointe avait été mise en place pour protéger les convois logistiques. 

Cette approche collective de gestion des ressources s'avérait efficace et plus avantageuse pour les membres de la coalition par rapport à une action individuelle. Trois ans après sa fondation, constatant l'efficacité de la mutualisation des infrastructures industrielles et des ressources, d'autres pays du continent asiatique avaient décidé de rejoindre la Coalition Russo-asiatique. Ainsi, l'Inde, la Birmanie, la Thaïlande, le Vietnam, le Népal et le Kirghizistan avaient intégré la coalition, consolidant son influence. En parallèle, plusieurs autres nations à travers le monde avaient emboîté le pas de la Coalition Russo-Asiatique en formant des alliances similaires.

Les Coalitions du Grand Afrique, de l'Orient, de l'Amérique du Sud et du Pacifique, englobant le Canada, l'Australie, le Japon et les îles du Pacifique, et celle de l'Atlantique Nord, regroupant le Groenland, l'Islande, l'Irlande et la Norvège, avaient vu le jour. De son côté, l'Union Européenne avait renforcé ses membres en intégrant les pays d'Europe non affiliés à la Russie, incluant la Turquie, qui avait choisi de ne pas rejoindre la Coalition de l'Orient, et en réintégrant le Royaume-Uni.

[Époque: 2058 - Guerre des Ressources]

En 2058, les tensions étaient montées entre les différentes alliances, alors que certaines régions du monde devenaient inhabitables et inexploitables en raison de la pollution et des bouleversements climatiques. Des escalades de violences s’en étaient suivies, alors que nous nous disputions les maigres ressources des territoires frontaliers ainsi que le contrôle des zones contestées. La situation avait rapidement dégénéré et les affrontements s'étaient propagés sur toute la planète, chacun cherchant à s'approprier les ressources de son voisin. Ainsi avait débuté la troisième guerre mondiale, bien que nous évitions de l'appeler ainsi, préférant le terme de Guerre des Ressources.

En peu de temps, la guerre avait atteint un niveau de cruauté inégalé, surpassant les pires horreurs de notre histoire. Les conventions internationales avaient été foulées aux pieds, avec l'apparition de redoutables armes de nouvelle génération sur les champs de bataille. Parmi celles-ci figuraient les drones de combat autonomes, capables de mener des opérations militaires sans intervention humaine. Ces drones de classe Sentinelle, Valkyrie et Titan incarnaient le cauchemar des populations civiles.

Les Sentinelles étaient de petits drones biomimétiques rapides et furtifs, utilisés pour des missions d'assassinat de cibles stratégiques par empoisonnement, mais aussi pour des missions de reconnaissance et d'espionnage derrière les lignes ennemies. Les Valkyries, de taille moyenne, constituaient la pointe de l'infanterie militaire, avec leurs modèles humanoïdes équipés de fusils électromagnétiques dernier cri.

Les Titans terrestres, véritables colosses d'acier d'une trentaine de mètres, étaient équipés de six canons électromagnétiques à longue portée, des lances missiles à tête chercheuse pour des frappes chirurgicales, ainsi que deux ogives tactiques. Les modèles aériens des Titans se présentaient sous la forme d'énormes aéronefs d’une centaine de mètres. Ils étaient équipés de quatre canons électromagnétiques à longue portée, de missiles hypersoniques, et de cinq ogives nucléaires stratégiques. De plus, ils avaient la capacité stratégique de déployer un essaim composé d'une centaine de chasseurs Valkyrie, ce qui leur conférait une domination aérienne indiscutable. Quant aux Titans aquatiques, ils se présentaient comme d'imposants navires submersibles, atteignant jusqu'à quatre cents mètres de long. Leur arsenal impressionnant comprenait dix canons électromagnétiques à longue portée, des torpilles intelligentes, ainsi que des lances-missiles à tête chercheuse. En raison de leur taille imposante, ils étaient en mesure de transporter dans leurs soutes des milliers de drones Valkyries et Sentinelles, adaptés à tous les types de terrains et prêts à être déployés pour des missions spécialisées. Les Titans étaient alimentés par des réacteurs nucléaires, rendant inutiles les ravitaillements de carburants pendant toute leur durée de service.

Tous les drones étaient équipés pour la guerre électronique, ce qui leur permettait d'infiltrer les réseaux civils et militaires pour les compromettre. De plus, des missiles et des torpilles errants, chargés d'agents biologiques ou d'ogives nucléaires, parcouraient discrètement les cieux et les océans. Chaque puissance disposait d'un stock important de ces nouvelles armes. Les villes dévastées par ces armes terrifiantes étaient devenues inhabitables. Les radiations et les agents pathogènes tuaient toutes personnes qui pénétraient dans ces zones. De plus, certaines coalitions préféraient une politique de la terre brûlée plutôt que de laisser leurs ennemis s'emparer de leurs territoires et ressources. Cette troisième guerre mondiale avait fait sombrer l'humanité dans un abîme de destruction, où la technologie militaire avait atteint des sommets terrifiants.

[Époque: 2083 - Survivre à l'Après-Guerre]

Vingt-cinq ans après le début des conflits, les affrontements avaient considérablement diminué, bien qu'ils n'étaient pas complètement stoppés. Chacun se contentait de défendre ses ressources. En effet, les gisements de minerais étaient pratiquement épuisés, rendant difficile la fabrication de nouvelles armes. De plus, notre espèce devait faire face aux conséquences du réchauffement climatique, combinées aux ravages de la guerre. Les dommages causés à la biosphère terrestre avaient atteint un point de non-retour, déclenchant un emballement climatique planétaire.

Des catastrophes environnementales se produisaient aux quatre coins de la planète. La montée des eaux s'accélérait, tandis que d'immenses ouragans radioactifs ravageaient tout sur leur passage. Des tremblements de terre et des raz-de-marée incessants secouaient la planète. Le supervolcan Toba, en Indonésie, était entré en éruption, déversant une quantité ininterrompue de lave et de cendres qui obscurcissait le ciel et plongeait la planète dans la pénombre et entraînant une baisse des températures. La couche d'ozone était en lambeaux. Les zones habitables et cultivables reculaient à une vitesse vertigineuse, submergées par les eaux, les cendres ou irradiées par le passage de tempêtes radioactives. Toute personne exposée à cet environnement mortel sans une protection adéquate était condamnée à une mort lente et douloureuse. Des extinctions massives se produisaient partout dans le monde. Nous avions renommé cette guerre l'Apocalypse.

[Époque: 2087 - Naissance d’un nouvel ordre]

À la suite de la fin de la guerre, les familles fortunées, les gouvernements et les multinationales avaient secrètement entrepris la construction d’abris souterrains ultra-modernes et autosuffisants, équipés des technologies les plus innovantes en matière de préservation d'environnements clos régulés. Ils étaient conçus pour abriter des populations humaines pendant une durée indéterminée. Cette nouvelle élite s'était nommée les Grandes Familles, les Cercles Gouvernants et les Corporations.

On comptait une quarantaine de grandes familles. Parmi elles, sept se distinguaient nettement par leurs domaines d'activité indispensables à la survie dans ce monde mourant. On retrouvait les Felix, basés aux États-Unis, les Alisthair en Suisse, les Stein en Allemagne, les Yang en Chine, les Borzilov en Russie, et les Mandela en Afrique. Elles étaient les familles les plus puissantes du monde, chacune détenant le monopole dans son domaine d'expertise.

Les Corporations étaient un ensemble de plusieurs entreprises multinationales dispersées à travers le monde qui avaient décidé de mobiliser toutes leurs ressources pour construire leurs abris souterrains, destinés à accueillir leurs conseils d'administration, les employés indispensables et leurs familles.

Les Cercles Gouvernants étaient composés des dirigeants des coalitions, des présidents, des souverains, des ministres et d'autres personnalités politiques de la planète. Ces derniers avaient secrètement détourné des ressources et des fonds publics pour se construire leurs propres abris destinés à héberger leurs familles.

[Époque: 2092 - Humanité Submergée]

Le 26 août 2092, la nouvelle de l'existence des abris autonomes avait frappés la population de plein fouet. Des émeutes et des guerres civiles avaient embrasé le monde, alimentées par un sentiment de trahison envers nos dirigeants. Comment accepter que les puissants se soient réfugiés dans leurs abris souterrains alors que le monde extérieur devenait un enfer?

Les Cercles Gouvernants, conscients de la colère populaire et de la menace qu'elle représentait pour leurs refuges, avaient fini par proposer un compromis : financer la construction de villes souterraines et les inviter à y participer comme main-d'œuvre pour accélérer leur mise en service. En échange, ces nouvelles villes seraient placées sous leur autorité, une solution qui ne faisait pas l'unanimité. Cependant, face à l'urgence et acculés par la nécessité, soixante-dix pour cent d'entre nous avaient cédé à ce chantage.

Ces villes souterraines, nous les avions nommées les Néo-Villes. Elles collaboraient selon les intérêts des Cercles Gouvernants qui les contrôlaient. Leurs habitants, les Néo-Citoyens, étaient destinés à servir les élites en échange d'un abri confortable, loin de la surface devenue hostile à notre espèce. Une vingtaine de Néo-Villes avaient ainsi vu le jour : Néo-Berlin, Néo-Delhi, Néo-Moscou, Néo-Londres, Néo-Paris, et bien d'autres.

Mais tous n'avaient pas accepté ce destin. Vingt-cinq pour cent de la population mondiale, composée principalement d'indépendantistes, d'entrepreneurs, de commerçants et de défenseurs des libertés individuelles, avaient refusé de se soumettre à cette nouvelle élite. Ils s'étaient nommés la Ligue Marchande. Déterminés à prendre leur indépendance et à préserver leurs libertés, ils avaient mis en commun leurs ressources, loin d'être négligeables, pour construire d'immenses navires submersibles capables de naviguer sur tous les océans, et d'immenses villes forteresses mobiles arpentant la surface.

Les cinq pour cent restants, regroupant essentiellement des membres d'organisations illicites, des groupes radicaux, des sectes, des trafiquants, des pirates et autres criminels notoires, avaient formé de modestes convois de véhicules terrestres blindés rudimentaires, évoluant dans l'environnement toxique de la surface. Nous les appelions les Convoyeurs. Ils représentaient le bas de l'échelle sociale de notre nouvelle civilisation post-Apocalypse.

Vue de l'espace, notre si belle planète n'était plus que l'ombre d'elle-même, sa beauté d'antan sacrifiée par notre aveuglement, notre cupidité et notre arrogance. Ses couleurs vives avaient disparu, remplacées par un teint grisâtre, sa surface parcourue d'immenses tempêtes aux nuages noirs et aux éclairs perpétuels. La lumière du soleil peinait à traverser les épaisses couches nuageuses et de cendres qui la recouvraient. Avec la faible luminosité qui parvenait à la surface, le reste de la biosphère terrestre s'était rapidement effondré. C'est ainsi que le règne de notre civilisation avait touché à sa fin, laissant derrière nous les vestiges de notre bref passage sur la surface de notre monde ravagé.

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Erioux
Posté le 15/02/2025
Belle mise en contexte. J’ai hâte de voir qui seront les héros qui se déploieront sur cette toile de fond apocalyptique:) ton texte a certain point en commun avec mon livre « Fleuve de Plastique » je t’invite à le lire si tu en a envi.
Arline
Posté le 23/03/2025
Je te remercie pour ton retour et aussi pour la découverte de « Fleuve de Plastique ». Une lecture très agréable.
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