J’ai l’impression de dormir. Mes yeux sont ouverts, mais mon corps reste figé ; je ne suis même pas certaine d’être un corps. Le noir se déploie autour de moi comme un voile ne me laisse rien apercevoir. Une musique dansante filtre à peine, des ombres mouvantes galopent le long des murs. Plus je pense, plus le décor s’éclaircit. Je ne vois toujours rien, et pourtant je sens. Il y a quelque chose ici de familier. Les murs d’un couloir étroit, rugueux, anciens. Ils doivent être pleins d’échardes. La musique, qui revient toujours, fait vibrer et trembler les murs de ma pauvre maison. Je sens ses fondations vrombir. On dirait qu’au sous-sol, la fête se déroule bien : pas un seul éclat de voix ne retentit, mais je sais que si j’y allais, je m’amuserais. J’oublierais. J’oublierais ce monstre qui se terre là-haut. On m’a toujours dit que c’était un monstre, que je ne devais pas me laisser aller à lui, qu’il me contrôlerait, que ce n’était pas naturel. Pourtant, je le sens du fond de mon âme : ce monstre, il ne me veut pas de mal. Je l’ai toujours remisé là-haut parce qu’on m’a dit que je le devais, comme on m’a toujours dit de ne pas me battre, de ne pas croire en moi. Comme on m’a toujours dit que je devais être belle, et comme on m’a sans cesse rappelé que je ne l’étais et ne le serai jamais.
Alors me voilà, en milliers de petits morceaux, à essayer de rassembler les pièces dans le bon ordre sans trop me couper. Me voilà, à essayer de comprendre pourquoi, pourquoi on m’a tant détesté. À essayer de m’aimer, ne serait-ce qu’un peu. A essayer de comprendre pourquoi je valais si peu, comparée à lui. Si nous sommes nés égaux, pourquoi ne le sommes-nous plus ?
Dîtes-moi pourquoi je souffre tant. Pourquoi le monstre doit-il rester au grenier. Je le sens gronder, grogner. Parfois, il attaque la trappe, essaie de m’attraper. Depuis toujours je résiste, je lui dis qu’il exagère, que c’est comme ça. Qu’il n’y a rien à faire.
La nuit dernière, j’ai monté les escaliers. Je voulais savoir pourquoi j’avais si peur. La trappe était à peine fermée, je n’ai eu qu’à souffler dessus. Il n’y avait pas un bruit, là-haut, pas même un petit souffle. Et alors je le vois. Lui que j’avais tant craint et désiré, le monstre qui m’habitait depuis des années, celui que j’ai toujours repousser : il était là, plus immense que jamais, nourri d’avoir été enfermé. Des yeux d’océan, les poings serrés. La réponse à mes questions.
Brûle ce monde qui t’a fait tant de mal, anéantis ces idées qui ont décrété que tu n’étais pas capable. S'ils veulent te brûler, fais-les flamber dans un feu de colère et de joie autour duquel tu danseras.
Petit com' pour te dire que j'aime beaucoup :D C'est super bien écrit, mystérieux, puissant. Ça fait du bien de pouvoir se délecter d'un texte court mais marquant ^^
Petit bémol sur la dernière phrase que je trouve un peu trop longue, par rapport au rythme moyen du reste. Je l'aurais vu plus style chute.
Sinon, c'est savoureux, merci pour ce beau texte^^ (et son message :D)
Merci beaucou^p pour ton p'tit commentaire :3 J'ai un peu changé la dernière phrase (et quelques autres bricoles), je ne sais pas si c'est mieux ?
Mmmh, je trouve ça mieux, mais pour moi il devrait y avoir une pause après la dix-neuvième syllabe (joie), afin de pouvoir alléger la phrase.
Mmmh, je trouve ça mieux, mais pour moi il devrait y avoir une pause après la dix-neuvième syllabe (joie), afin de pouvoir alléger la phrase.
J'aime "comme on m'a toujours dit que je devais être belle"... les cases, quel fléau !
Attention seulement, c'est "pourquoi le monstre doit-il restER au grenier", sinon ça pique un peu l’œil.
Au plaisir d'en lire davantage.
Ohlala, oui, cette faute est tellement laide, merci !
Et merci aussi d'avoir pris le temps de commenter :3