La toxine était une paumée. Elle souffrait autant que l’homme qu’elle aimait. Elle avait eu une enfance aussi malheureuse que la sienne. Elle avait connu la solitude, la négligence, la colère, la haine, la peine. Elle était née dans le désordre et avait grandi dans le trouble. Toute sa vie, elle avait survécu par elle-même. Avait conçu ses douleurs et ses remèdes. Et lorsqu’on lui parlait de son enfance, lorsqu’on lui montrait les yeux pleurants de la compassion, elle cachait toutes ses fêlures derrière sa fierté. Elle riait. Se moquait. S’insurgeait. On la trouvait provocante, insolente, impertinente.
Le paumé savait tout ça. Il connaissait ses peines, ses douleurs, et la façon dont elle les soignait. Il avait trouvé chez elle du courage. De l’intelligence. Il avait été séduit, autant par ce qu’elle était que parce qu’elle prétendait être. Il l’aimait avec honnêteté. Il aimait son audace comme ses troubles. Ses mots crus, comme ses caresses.
Le paumé et la toxine souffraient. Autant l’un que l’autre. Mais ils s’aimaient. Autant l’un que l’autre. Comme un moyen de soulager quelques peines. Ou de souffrir ensemble.