L’adresse de la banque trouvée, ils entrèrent ensemble et saluèrent l'agent de sécurité posté à l'intérieur. Le hall d'attente était très grand et dépourvu de décoration superflue. Mathias se dirigea alors d'un pas sûr vers le premier des quatre guichets. Un homme en costume noir, protégé par une vitre, y était assis. Les cheveux entièrement gris, lunettes sur le nez, il ne leva pas la tête de son écran. Les jeunes gens patientèrent ainsi quelques secondes devant lui avant qu’il ne leur adresse la parole, toujours sans lever les yeux.
— Je vous demande un peu de patience Monsieur Omnès, se contenta-t-il de dire.
— Vous connaissez mon nom ?
L'employé de banque ne répondit pas.
— Suivez-moi, ordonna-t-il enfin.
Le guichetier se leva et ouvrit la porte permettant aux clients d'accéder à l'arrière de la banque. Maïwenn et Mathias entrèrent avec méfiance et il referma avec soin derrière eux.
— Plus un mot à présent, dit l'homme d'un ton autoritaire.
Plusieurs box de bureaux et portes de sécurité plus tard, ils arrivèrent dans un long couloir épuré, très éclairé, au fond duquel se trouvaient les coffres.
— Pierre m'avait prévenu que vous viendriez. Je m'appelle Joffrey Donwell, lança l'homme à Mathias.
— Comment savait-il ? Et comment m'avez-vous reconnu ?
Joffrey esquissa un sourire.
— J'avais une description physique de madame Deniel.
— Pierre me connaît ? s’étonna-t-elle.
— Victor lui avait dit que s’il avait un problème, il ferait appel à un enquêteur et Pierre m'a donné des instructions à votre intention. Il savait que quelque chose se tramait contre lui.
— Que vous a-t-il dit exactement ? demanda Mathias.
— Que vous et madame Deniel viendriez chercher le contenu de son coffre. Il m'a aussi demandé de vous conduire chez lui. Vous aurez besoin d’un objet qu’il a laissé là-bas, m’a-t-il dit. Je dois aussi vous mettre en garde. Beaucoup connaissent l’existence de cette maison, elle est sûrement surveillée par les Varlarc'h de Richard.
— Richard ? Attendez une minute, vous connaissez Richard ? Vous êtes aussi un Guide ?
Joffrey jeta un œil interrogateur à Mathias, puis, sans répondre, il ouvrit la porte blindée en face d’eux.
— Je n'ai pas eu le temps de tout lui expliquer, se justifia Mathias avant de pénétrer dans la grande pièce remplie de petits tiroirs coffres.
— Tout le monde est surpris que je ne sois pas au courant. Vous êtes pourtant censé être une société secrète, se moqua Maïwenn en suivant Mathias à l'intérieur.
Joffrey referma la porte derrière eux et se mit à la recherche du coffre de Pierre.
— Vous auriez tout de même dû en savoir un peu plus madame, rétorqua Donwell en lançant à Mathias un regard désapprobateur.
— Je sais, je sais, vous n'êtes pas le premier à me faire la réflexion, mais nous n'avions pas le temps d'entrer dans les détails. J'aurais aimé vous y voir. De toute façon, Richard avait déjà commencé les offensives contre sa famille. Mais, je vous en prie, expliquez-lui en détails tout ce qu’elle risque, histoire qu'elle soit un peu plus angoissée.
Donwell s'arrêta de chercher, se tourna vers Maïwenn d'un air inquiet puis retira ses lunettes, plongeant ainsi ses petits yeux noirs dans ceux de la jeune fille.
— Richard s'en est pris à votre famille ? Cela veut dire qu'il est au courant de vos projets ?
— Mon père est en prison, ma mère me pense folle et je suis probablement recherchée par la police à l’heure qu’il est, mais je ne sais pas s'il est au courant de nos projets, désolée.
— Effectivement, vous n'avez plus d'autre choix. Pour être concis, Richard s'est marié avec la sœur du chef de Grande Bretagne, j'ai donc eu de nombreuses occasions de le côtoyer. Je n'ai jamais pu le prouver, mais je le soupçonne d'avoir détourné de l'argent. Lorsque j'ai rencontré Pierre pour la première fois, j'ai remarqué qu'il n'avait rien à voir avec Richard et nous avons tout de suite sympathisé. Au nom de notre longue amitié, j'ai accepté de vous aider, mais j'ai déjà le sentiment d'être surveillé. Nous devons faire vite.... Voici son coffre.
Il le retira de l’emplacement pour que Mathias puisse y introduire la clé. À l'intérieur, se trouvaient plusieurs liasses de billets en livre et en euros qu'il s'empressa de cacher dans son sac pendant que Maïwenn se saisissait de la mini-cassette se trouvant au fond.
— Utiliser une clé USB aurait été trop simple bien sûr. Au moins maintenant nous savons pourquoi nous devons aller chez Pierre. Je suppose qu'il y a le magnétophone qui va avec.
— Vous avez raison, il faut savoir positiver. J'ai demandé à Liam, mon fils, de vous conduire là-bas et de vous trouver une chambre pour la nuit. Il doit vous attendre dehors. Encore une fois, vous devez être prudents, les alliés de Richard sont probablement déjà au courant de votre arrivée.
Il les raccompagna ensuite jusqu'au hall d’entrée, mais en sortant, le banquier saisit le bras de Mathias et l’attira légèrement en retrait. Maïwenn, quant à elle, sortit de la banque.
— Je suis désolé pour Victor mais beaucoup disent ici que son casque est une menace pour nous les Guides et qu’il l’a bien cherché.
— Je sais. Beaucoup sont contre, mais cela ne justifie en rien le meurtre d’un chef.
— Non bien sûr que non. Je m’interroge tout de même … Êtes-vous sûr que madame Deniel n’ait rien à voir avec sa mort ?
— On ne peut être sûr de rien pour l’instant.
Mathias écourta leur conversation, car il ne pouvait pas lui révéler qu’il soupçonnait d’autres Guides, pas encore. En sortant, il salua de nouveau l'agent de sécurité, qui l’ignora. Quelques secondes plus tard, ce dernier fumait une cigarette à l’extérieur du bâtiment. De là où il était, il observait Maïwenn et Mathias montant dans un pick-up. Il saisit son téléphone.
— C'est moi. Préviens Kenneth qu'ils viennent de partir. Je n'ai pas vu ce qui s'est passé, mais c'est Joffrey Donwell qui les a reçus et je viens de les voir monter dans la voiture de son fils. Demande-lui ce que je dois faire et rappelle-moi.
Puis, l'agent de sécurité reprit son poste.