Belle plante (nouvelle, partie 1/4)

Notes de l’auteur : cette nouvelle comporte des scènes susceptibles de choquer. Nous avons tenté d’en repérer les principales thématiques sensibles ci-dessous. Attention : la liste suivante peut bien entendu divulguer certaines surprises contenues dans l'intrigue.

Thèmes sensibles : cadavres, emprisonnement, gros mots (insultes), gore (descriptions de blessures), gros mots (insultes genrées), harcèlement sexuel, horreur corporelle, meurtre, sang, violences physiques.

Au milieu de ces pots de jonquilles, je me sens chez moi. Mes fleurs ont éclos tôt, cette année ! Sans doute se pressaient-elles de me rencontrer ? À moins qu’il ne faille remercier ces carrés de verre bombé que j’ai fait installer au-dessus de la serre… Quel jaune éclatant sur ces pétales ! « Boutons d’or géants », voilà ce que j’aurais dû inscrire sur l’étiquette. Je n’y vois aucune de ces strates verdâtres et maladives qu’on retrouve parfois dans la nature… ou, dieux merci, chez mes concurrents. On ne rivalise pas si facilement avec moi, Narcisse Sceau, le meilleur fleuriste de Brumât… ou du monde, qui sait ? Aucun botaniste de ma connaissance n’arrive à cultiver cette couleur triomphale et décadente.

Clic !

J’aime ce bruit. Mon couteau, aussi aiguisé qu’un scalpel, a tranché chaque plant de cette jarre. Toujours sabrer les fleurs identiques d’un seul mouvement, c’est la précision qui s’impose pour les meilleurs bouquets. Ma main gantée, toujours serrée sur les tiges, fait choir ce trophée vers un vase. Y patientent déjà les autres fleurs que j’ai choisies : là des tulipes aux teintes chaudes, ici des scabieuses en dégradé blanc et bleu… et pour les encadrer, quelques feuilles d’acacia. L’art floral, ce n’est jamais qu’un ballet statique où les danseuses restent des semaines entières sur la pointe des pieds… On y oriente les artistes au sein d’une scène creuse. Aujourd’hui j’y dessine un coucher de soleil, sur mer d’huile.

Mon spectacle, chaos organisé, prend forme tandis que je fredonne les formules interdites… D'ailleurs je sens déjà sous mes doigts l’amorce d’une impulsion électrique, d’une chaleur nouvelle : Carchariliague, mon démon intérieur et invisible, s’est réveillé au quart de tour pour enchanter mon œuvre. J’ose croire que mon âme est devenue un écrin douillet pour lui, qu’il apprécie cette symbiose. Ma chair est son scaphandre… Dans la dimension parallèle dont il est originaire, il n’y a rien à toucher, à sentir ; les limbes de l’Astral constituent une prison sinistre pour les déités comme lui. Sans démon pour l’alimenter, un mage ne peut lancer le moindre sort ; sans mage pour l’accueillir, un démon ne peut rien accomplir dans le monde physique. À mesure que notre relation s’est développée, mes pouvoirs ont grandi… C’est cet être végétal qui m’a permis d’acquérir, dans le milieu des sorciers, mon titre : le Florilège.

Quelques coups de ciseaux supplémentaires pour élaguer les bourgeons disgracieux, et tout est prêt. Le grésillement dans mes paumes s’accentue… Sitôt que je m’éloigne du bouquet, l’influence de Carchariliague remonte sous ma peau. À travers cette caresse intérieure, je sens aussi le frémissement des jonquilles, leur inclinaison languissante… Comme si elles imploraient mes petits soins. Mais c’est assez. Je ne devrais pas leur accorder trop d’attention : elles finiraient par la prendre pour acquise.

Muni de ce bouquet, je quitte l’atelier en prenant garde à bien refermer derrière moi… puis j’entonne :

« Voilà, fini ! Ça fera quatre roseilles, camarade. »

L'homme de l’autre côté du comptoir s’éponge le front d’un air soucieux. Tout en fouillant les poches de son pardessus, il ronchonne :

« Ah… Déjà ! Bon sang, où ai-je mis ce portefeuille ? Excuse-moi, camarade Sceau… J'ai un de ces maux de crâne !

— C'est à cause des jonquilles. Leur odeur est légèrement narcotique, sais-tu ?

— Ah bon ? Ça ne m'enchante guère. Tu comptes filer à ma femme la migraine ? »

Je feins d’ignorer cette insolence. Lorsque ce type s’est aventuré dans mon établissement, quelques minutes plus tôt, j’ai vite compris qu’il n’avait jamais acheté de fleurs de sa vie. L’archétype du mari négligent… Pas étonnant que son épouse l’ait fichu dehors !

« Les tulipes sont parfaites pour les messages d'amour, continué-je poliment. Et les jonquilles symbolisent l'affection. Quant aux scabieuses, elles ajoutent une pointe de tristesse... Crois-moi, ce mélange subtil convaincra ton épouse de te laisser revenir à la maison ! L'acacia est, après tout, la promesse d'une construction nouvelle et mutuellement bénéfique… Ta conjointe te reprendra sitôt que tu mettras à nu tes sentiments, camarade ! Je te le garantis.

— Mouais, murmure-t-il cette fois-ci avec davantage d’aménité. Espérons. »

J’esquisse un sourire moqueur alors qu’il s’en va par la porte cochère… Ce pauvre bougre me prend sans doute encore pour un charlatan. Pourtant il n’aurait jamais visité cette boutique, encore moins confié les détails de sa vie privée à un inconnu, s'il n'avait pas prêté l’oreille aux rumeurs qui entourent le Florilège. Aux dires de la bonne société, mes bouquets aux humeurs enivrantes auraient le don « d’adoucir les mœurs » des demoiselles qui les reçoivent. On ne compte plus les mégères apprivoisées, de manière inattendue, par mes arrangements… Bien sûr, personne ne se risque à parler ouvertement de sorcellerie. Ce serait illégal. Les fleurs de Narcisse Sceau sont plus jolies, plus parfumées et par conséquent plus persuasives, voilà tout… Mauvaises langues, que vont-elles imaginer ?

D’un soupir satisfait, je me retourne vers le grand miroir d’os accroché derrière le comptoir. Mon reflet n’a rien à me reprocher, pas même un cheveu de travers sur ma coupe à partie latérale. La trentaine a été clémente à mon égard. Je la préfère largement à mes plus jeunes années, car j’y ai acquis cette assurance, ce naturel qu’il faut pour plaire en douceur, laisser opérer le charme. Et puis, j’ai quand même soigné mon décor. Mes récents succès l’embaument aussi puissamment que les lilas que j’y ai plantés… Avec ses carrelages en mosaïques, son plafond peint de scènes bucoliques, on le compare plus volontiers au jardin d’hiver d’un palais qu’à une humble échoppe des faubourgs. Depuis que j’ai acheté cette redingote sur mesure, mes clients fortunés me traitent comme l’un des leurs.

L’immense glace agrandit l’espace. Sa surface me donne l’opportunité d’embrasser du regard le reste du magasin, d’un œil discret. Rose, mon assistante, compte les présentoirs vides pour vérifier l’interminable facture d’un agent de pompes funèbres. Une vingtaine de bourgeois, bouche bée, encombre face à elle l’allée des topiaires. La petite doit s’adosser au mur pour s’y faufiler… Malmort, c’est qu’on commence à se sentir à l’étroit ici ! À peine un an que je me suis installé, mais je songe déjà à déménager dans un immeuble plus grand… La ville de Brumât souffre, ces derniers mois, d’une fièvre florale. On n’achète plus seulement mes créations pour leur qualité esthétique, ni même pour leurs supposés effets hypnotiques : celles-ci sont devenues un signe extérieur de richesse. Le risque serait bien entendu qu’elles en deviennent vulgaires, à force de se répandre parmi les classes moyennes… Peut-être devrais-je augmenter les prix ?

Ding-ding !

Le carillon de l’entrée vient d’annoncer un client. Rose n’en a pas fini avec son croque-mort… Alors je remets mes changements de tarifs à plus tard, et je m’avance, digne et droit, vers ce nouveau venu : un homme effilé comme un rasoir. Il pleut à torrent de l’autre côté de la vitrine ; pourtant son manteau sombre et ample est resté sec, de même que ses souliers vernis… À en croire sa rosette, c’est un haut-fonctionnaire : il est venu en fiacre et un serviteur l’attend au-dehors, armé d’un parapluie sur le boulevard des Brâmes. Pas le genre de péquenaud qui regarde à la dépense, donc. Je le salue de ma voix la plus enjôleuse :

« Bienvenue à la Bourdonnière ! En quoi pouvons-nous t’être utile, camarade ?

— Bonjour, opine l’homme en inclinant son chapeau de velours. Je cherche, hélas ! un présent pour une créature aussi exigeante que sublime… Une femme de la bonne société qui possède déjà tout ce qu’il y a de plus cher. Pour demain, si possible.

— Tu ne trouveras rien de plus luxueux ailleurs, camarade… Ni de plus luxuriant. Nous avons de quoi percer les murailles des esprits récalcitrants, et subjuguer les amantes les plus désabusées. Suis-moi, je t’en prie ! »

Je lui montre mes plus magnifiques orchidées. Mais l’homme se pince le nez et, loin d’admirer le raffinement de leurs corolles immaculées, s’agace :

« Non, non, vraiment pas ! Je lui ai déjà offert ce genre de fleurs, et elle me les a renvoyées à chaque fois… J’aurais tout aussi bien pu lui envoyer des choux blancs !

— C’est pourtant un cadeau du meilleur goût, m’étonné-je. Quel motif a bien pu avancer ta mie, pour refuser le témoignage d’une telle délicatesse ?

— Tu te montres bien curieux, s’assombrit soudain mon gaillard.

— C’est que la Bourdonnière s’adapte aux besoins de ses hôtes, insisté-je d’un air faussement contrit. Si je t’ai paru indiscret, j’en suis désolé… Mais si tu désires un bouquet sur mesure, composé spécialement pour convaincre ta belle, il me faut des détails. »

Le notable me foudroie du regard, mais il en faut plus pour m’impressionner. C’est tout le temps pareil : les tombeurs de Brumât savent très bien quel genre de produits on vend ici… mais, dès que j’ose parler concrètement de leurs effets secondaires, ils se découvrent des scrupules de dernière minute. Il faut garder patience, ferrer la ligne de pêche avec fermeté. Je laisse donc passer un ange entre nous, sans ciller, le temps que ce gros poisson assume sa décision.

À ce moment Rose, enfin libérée, profite du silence pour s’avancer vers nous d’un air timide. Ses boucles blondes, sa peau crème brûlée parfument un peu plus l’atmosphère capiteuse de la pièce tandis qu’elle me tend son porte-document et me demande :

« Camarade-Maître… Ils veulent recommander la même chose pour le mois prochain. Pour la commémoration des soldats morts au champ d’honneur… Cent-trente couronnes mortuaires ! Je ne peux pas signer ça toute seule. Est-ce qu’on a les réserves ?

— Bien sûr. Montre-moi ça. »

Je sors de ma poche une paire de bésicles, baisse mes yeux vers le carnet ; par-dessus mes verres en demi-lune, cependant, je ne manque pas d’épier mes interlocuteurs. La colère du galant a laissé place à une expression d’avidité. À en juger la mine effarouchée de Rose, je parierais mille roseilles qu’il a reluqué un peu trop longtemps sa poitrine. Non pas que je le lui reproche ; deux gros pamplemousses au milieu de toute cette flore, cela se repère vite. J’ai bien fait d’acheter à mon employée cette robe à décolleté plongeant…

Ma lecture achevée, j’agrippe le porte-plume accroché au calepin et griffonne mon accord. Rose me reprend aussitôt le bordereau, trop contente d’échapper aux œillades baladeuses du client ; mais je n’en ai pas fini avec elle… Cependant que je lui agrippe le bras, elle grimace.

« Rose, la tancé-je. Je t’ai déjà dit de retirer tes gants lorsque tu es en boutique !

— Il y avait du terreau renversé sur les étagères, se défend-t-elle d’une petite voix.

— Eh bien ! Tu les as nettoyées, tes étagères, non ? »

Je sens un frisson dans son avant-bras. Elle s’exécute… Ses mains se défont des épaisses protections de jardinage, révèlent des doigts fins et délicats. Ma poigne se relâche, glisse avec douceur vers le poignet et s’en saisit pour le hisser à hauteur d’yeux du notable. Je le prends à parti :

« Vois ! De si ravissantes menottes, ce serait dommage de les cacher… D’autant que j’ai payé la manucure !

— Charmante, approuve le légat d’un claquement de langue. Vraiment charmante. »

Rose, l’air mortifié, hoche la tête puis repart travailler ailleurs. Comme l’atmosphère s’est détendue, j’en profite pour reprendre :

« Je ne m’étendrai pas sur ta vie privée. La maison Sceau sait rester discrète, camarade… Camarade de quel nom, d’ailleurs ? »

Sa rigueur polaire a fondu. En lui faisant admirer la chair veloutée de mon assistante, j’ai montré patte blanche : nous autres mâles, nous nous devons une assistance mutuelle et sacrée. Le notable, gêné comme un adolescent, finit par m’avouer :

« Rondeau… Daphnis Rondeau.

— Il me semble avoir déjà entendu ce nom…

— C’est probable. J’ai récemment été élu député de Greleigne, dans la Ferprise. »

Aux notes chuintantes de son accent, je sens pourtant qu’il est né à Brumât. Il n’avait sûrement jamais mis les pieds chez ces Grelins, avant sa campagne électorale. Sûrement un cadre loyal au parti du chancelier, placardisé par celui-ci pour garder un œil sur les culs-terreux… Je sais de quoi je parle ! Depuis des années, je tente avec un succès limité de ravaler au fond de ma gorge les tonalités provinciales de Virgade. Le berceau des Sceau, ce trou perdu qui m’a vu naître au fin fond de la Cargue…

« Ah ! Toutes mes excuses pour cette oubliance, camarade-député.

— Ce n’est rien, soupire Rondeau d’un air tristounet. Ma circonscription est très éloignée… Je ne suis que de passage à la capitale.

— Malheureusement. »

Cette visite-éclair à Brumât, c’est son dernier contact avec la civilisation avant longtemps… Alors, il a voulu marquer son départ sur quelque chose de positif, conclure une amourette. Je lui fais part de ma compassion :

« Décidément, tu t’es épris d’une femme cruelle… T’humilier ainsi, alors que tu ne sais même pas quand tu pourras la revoir !

— Je me suis montré, disons… un peu insistant lorsque je lui ai fait la cour, suppose Rondeau. Peut-être s’est-elle sentie… étouffée, dans la précipitation.

— Ce n’est pas forcément une mauvaise chose… Cette persévérance démontre aussi la profondeur de tes sentiments.

— Certes. Mais cette… mijaurée a exigé que je m’éloigne d’elle, et m’a défendu de reparaître à sa vue. Au point d’ordonner à ses serviteurs de me repousser. Les joyaux que je lui ai offerts pour lui demander pardon m’ont tous été renvoyés, se plaint le dignitaire.

— Classique. Elle cherche à te provoquer, c’est évident… Le cerveau féminin aime à élaborer ce genre de mises à l’épreuve.

— Peut-être, mais en attendant, elle ruine ma réputation avec ses extravagances… Crois-le ou non, camarade, mais elle a même menacé d’impliquer la Sûreté Riveraine !

— Menaces en l’air. Les femmes ont toujours tendance à exagérer, tu le sais bien.

— Celle-là doit être folle ! Jamais je n’aurais cru subir pareil dédain… Avec tout ce que j’ai fait pour elle ! »

Ce n’est pas tous les jours qu’un homme puissant manifeste une telle détresse. Pour cacher mon amusement, je triture les feuilles du rhododendron à notre droite… Cet imbécile semble totalement inconscient du cercle vicieux dans lequel il s’est enfermé : plus il s’accroche servilement, plus il inspire le dégoût… Un bouquet enchanté par mes soins pourrait-il triompher d’une telle exaspération ? Cette question titille ma curiosité. Je devrais expliquer à Rondeau que l’amour n’est qu’un lopin de terre qu’on cultive, qu’il faut parfois le mettre en jachère pour en renouveler la fécondité. Mais quel bénéfice en tirerais-je ? Je suis après tout le Florilège, un homme de défis : j’aimerais savoir jusqu’où peuvent aller mes pouvoirs. Si mon œuvre parvenait à faire fléchir la volonté de cette chipie, si elle aidait ce pauvre hère à reconquérir sa flamme, ce serait là une percée majeure dans le domaine de l’envoûtement. Je pourrais alors, en toute bonne foi, me proclamer le plus puissant magicien au monde. Aussi, je chuchote :

« Tu as bien fait de venir ici, camarade… Foi de Florilège, pour t’aider dans ta quête, j’ai bien mieux que des fleurs à t’offrir ! Mais, de grâce… n’en parlons pas ici. »

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Rouky
Posté le 27/03/2025
Bonjour !

J'ai dévoré cette première partie de ton histoire ! Les scènes mettent bien dans l'ambiance, on s'imagine y être tant les descriptions et les actions sont fluides et bien écrites. On croirait presque regarder une série et non plus lire une histoire ! Tu manies parfaitement les phrases, et c'est agréable de te lire ! :-)
Arnault Sarment
Posté le 27/03/2025
Merci @Rouky, c'est super que le style te plaise... J'essaye de rendre ça attrayant. :-)
Le Diable
Posté le 15/11/2024
Quant à MOI, l’explication „c’est le démon“ me convient parfaitement !

Par l’odeur de soufre et de tubéreuse alléché, je me suis précipité pour lire ce texte. J’en ai profité pour saluer mon collègue Carchariliague et compter avec lui les inversions du sujet. Nous en avons relevé pas moins d’une trentaine, dont des perles telles que "tancé-je", "ruminé-je", "pesté-je", "m’agacé-je", "beuglé-je" et "l’invectivé-je" ! Votre plume ressuscite les subtilités de la langue française et je m’attendais à trouver des lupanars et de la fange plutôt que du bordel et de la merde à Viannerval. Je vous suggère de remplacer ces vulgarités trop modernes qui jurent avec vos tournures désuètes par des exclamations du genre "nom d’un sabbat!", "Corne de bouc!" ou tout simplement "Diable!"

Pour finir en beauté je vais profiter de votre séjour en prison pour rendre visite à la petite fleuriste avec ses seins de pamplemousse et ses joues de crocus..
Arnault Sarment
Posté le 15/11/2024
Jamais je n'oserais employer en vain votre nom, voyons ! Quant aux inversions de sujet, j'y vois à un joli image à l'inversion que vous faites de belles valeurs morales, tel un pentagramme retourné. Merci en tous les cas pour ce passage remarqué et si sulfureux, Votre Ignominie !
JeannieC.
Posté le 08/11/2024
Salutations, Arnault !
Tout d'abord bienvenue sur PA, parce qu'il me semble qu'on ne s'est encore jamais croisés. Et je m'étonne de ne pas avoir atterri plus tôt sur tes histoires parce que franchement, j'ai beaucoup aimé ce que je viens de lire !
Chapeau pour ton écriture ciselée, ce souci que tu prends à immerger dans l'ambiance florale tout en faisant monter l'inquiétude, le soin apporté aux dialogues aussi. J'apprécie du reste comment la narration laisse deviner les tempéraments - l'assurance arrogante du narrateur, puis comment il s'impose à qui le côtoie... jusqu'au drame final où il se trouve puni tout en ayant fait ce mal.

Vraiment, il semble qu'on ait des thématiques communes <3 J'aime les ambiances "à l'ancienne" (enfin, je ne sais pas à quelle époque se passe ton texte, mais perso j'imagine quelque chose à la XIXe / début XXe, voire plus ancien encore), les thématiques comme la sorcellerie, et ce côté sinistre qui se dégage de cette histoire.
Il y a quelque chose d'un peu Caravagesque, avec ces fonds très noirs mais sur lesquels se détachent des fleurs éclatantes, des jeunes hommes aussi charmeurs que périlleux, et ce côté théâtral des échanges. C'est marrant, je tourne pas mal aussi autour de ce type d'écriture et je suis donc contente de lire des textes un peu dans la même veine !

Deux petits chipotages stylistiques :
> "test tordu" > à l'oreille je trouve le rapprochement des deux termes un peu malheureux, et puis "test" sonne bien moderne pour moi. "épreuve" peut-être ?
> "se repend-elle" > j'aurais plutôt mis "se repent-elle" (il me semble qu'avec un d, c'est se re-pendre)
> "— AIDE-MOI !!!" > pas du tout fan perso des lettres en capitales comme ça pour rendre un cri, et des ponctuations décuplées - je pense que tu as une écriture largement assez raffinée pour trouver d'autres façons de rendre la fureur.

Sinon, il y a certaines tournures particulièrement classes, comme "la couleur triomphale et décadente" au tout début. Et toute cette idée de sorcellerie autour des fleurs, je trouve ça super original (d'avoir pris un homme en plus, comme "sorcier").
Belle montée de la tension tout au long du récit.

Ça a été un plaisir que de découvrir ta plume !
À une prochaine
Arnault Sarment
Posté le 09/11/2024
Bonjour @JeannieC., un grand merci pour ce message si étoffé ! J'ai raté les inscriptions de novembre mais je compte bien faire un tour sur le forum en décembre.

Mon texte se passe dans un univers de Fantasy (Viannerval) inventé par mes soins comme pour mes autres productions ! Là on est en l'An 451, l'ambiance correspondrait un peu au XVIIème siècle européen chez nous... Ma nouvelle "Une bouteille à l'amour" se passe en l'An 440 et Narcisse y fait d'ailleurs une apparition, hi hi. ^^

Tu pensais peut-être au Caravage pour la couverture mais pour référence le tableau utilisé est "Flora" de Giuseppe Arcimboldo (1589, collection privée). En revanche pour l'ambiance feutrée tu tombes pile poil, c'est tout à fait Le Caravage et je suis flatté de la comparaison.

Bien vu aussi pour le côté genré des pouvoirs de Narcisse ; c'était effectivement voulu de donner des pouvoirs connotés aussi "féminins" à un homme. La base de ce type c'est qu'il exploite et abuse les femmes donc j'avais dans l'idée qu'il avait aussi "arraché" ce type de sorcellerie, l'avait utilisé de manière indue jusqu'à ce que, fatalement, elle se retourne contre lui. Le titre provisoire de cette nouvelle était d'ailleurs "Déflorée" mais comme Narcisse n'a jamais abusé de son assistance Rose, ça ne collait pas trop au propos.

Je te remercie aussi pour tes remarques précieuses sur les élémetns stylistiques ; je vais intégrer ça dans les corrections.
Romaing
Posté le 18/10/2024
J'ai énormément aimé cette nouvelle ! L'univers comme le style d'écriture sont très riches. Est-ce le même lore que dans tes autres écrits ?
Si le lore est exclusif à cette nouvelle, j'ai seulement trouvé que le passage de la lettre de la soeur traînait un peu en longueur et m'a un peu sorti de l'histoire.

J'ai relevé quelques erreurs de frappe ou de mots en trop (oubliés à la réécriture je suppose) :

"En lui faisant admirer la chair veloutée de son assistante", ça devrait être "mon" au lieu de "son" je suppose ?
"J’ai me suis montré"
"Ce n’est pas tous les jours qu’on homme"
"contre la tradition de nos ancêtres et l’avis sorcières du clan"
"puisque les rares nouvelles que je reçois à ton sujet encore restent vagues.", "encore" me semble en trop
"j’ai toujours su à quoi s’en tenir"
"Mais la grandissime Véronique a sans doute transmis d’autre à sa fille d’autres démons"

Et une petite remarque sur la phrase "Qu’allez-vous imaginer ?", j'aurais trouvé ça plus logique formulé à la 3ème personne (comme s'il s'adressait aux clients), étant donné que Narcisse nous a déjà révélé sa magie.
Arnault Sarment
Posté le 18/10/2024
Merci pour ce commentaire détaillé, ça me fait très plaisir ! ^^ Je suis très content que tu aies apprécié la nouvelle ; pour les coquilles, je corrige ça très vite. Malgré mes réécritures, j'ai toujours eu beaucoup de mal à me relire...

Oui, tous mes écrits référencés dans la saga "Viannerval – Sagesse de Sceau" se déroulent dans le même univers (Viannerval, donc). Sceau, c'est le nom d'une famille de sorciers qui constitue son fil rouge à différentes époques : il y a toujours un membre de la lignée impliqué quelque part...

Pour le passage de la lettre d'Azalée... Oui, c'est peut-être un peu longuet et explicatif. Il faudrait que je me repenche sur ça, histoire de condenser l'exposition.
Romaing
Posté le 18/10/2024
Avec plaisir !
Sur un texte de cette longueur c'est normal de laisser passer des coquilles, il me faut un paquet de relecture pour n'en laisser passer aucune, surtout que je change souvent des détails à chaque passage.
En tout cas si les autres écrits de la saga sont de la même qualité, je vais clairement aller lire tout ça !
Arnault Sarment
Posté le 18/10/2024
Pour info je suis en train de réécrire une autre nouvelle ("Une bouteille à l'amour") où seront de nouveau mentionnés Narcisse et sa soeur Azalée. Bientôt sur Plume d'Argent !
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