Bloody Mary 8

Par Dédé

Walnut Grove – 30 octobre 2012

 

Sans plus attendre, Will démarra sa Ferrari. Il était resté bien trop longtemps dans ce lieu sordide.

— Ne. Pars. Pas.

Cette voix rauque, sortie de nulle part, le terrifia au point qu’il s’arrête et coupe le contact. Il n’avait avancé que de quelques mètres. Mais, quelque chose l’empêchait de continuer. Il sentit comme une présence dans le véhicule. Personne n’était assis sur le siège passager à côté de lui, ni même à l’arrière. Pourtant, il n’avait pas rêvé. Il avait bien entendu cette voix.

— Reste. Là.

Une ombre plana derrière lui. Il la voyait. Cette silhouette floue qui se dessinait lentement. Il mit quelques secondes avant de reconnaître l’apparence de Steve.

— S… St… Steve ? Comment t’as fait ça ? Tu… Tu… T’étais pas là… Com… Comment…

Le sourire de Steve s’agrandit considérablement.

— Je. Ne. Suis. Pas. Steve.

Will ne réagit pas. Il cherche à comprendre. Le puzzle dans son cerveau refuse de s’assembler. Par conséquent, son esprit raisonnable prit le dessus. Sa peur s’évapora. Il y avait forcément une explication logique à tous ces événements. Et, il venait de la trouver :

— Non mais j’ai compris… Vous êtes tous dans le coup. Vous vouliez vous venger car j’ai menti au sujet de ma soirée d’anniversaire. C’est moi qui ai dragué Darlene, pas l’inverse. C’était pas la peine d’en arriver à un plan aussi foireux. Me faire flipper pour avouer, vraiment ?

Il ne pouvait pas s’expliquer comment Steve avait fait pour apparaître à l’intérieur du véhicule, comme par enchantement. C’était forcément une plaisanterie de mauvais goût. Tout ce qu’il avait vu depuis le début de la soirée devait être faux. Son esprit s’en persuada : Amanda voulait l’effrayer à l’intérieur de la demeure, Steve avait simulé une disparition, Justin un état post-traumatique. Même Darlene avait bien joué le jeu en répétant ces menaces effrayantes. Il se sentait vraiment naïf d’être tombé dans le panneau…

— Tu. Fais. Bien. D’avoir. Peur, gronde la terrible voix qui s’échappe de la bouche de Steve.

Will se retenait de rire du mieux possible. Imaginer Steve en esprit démoniaque était au-dessus de ses forces.

— Je. Te. Conseille. D’arrêter. De. Te. Foutre. De. Moi. Ou. Tu. Mourras.

L’orage gronde sans prévenir. L’amant d’Amanda éclata de rire. C’était plus fort que lui.

— Steve, s’il te plaît, descends de ma bagnole. La blague a assez duré. On sait très bien tous les deux que tu ne ferais pas de mal à une mouche.

« Steve » claqua des doigts. Will ne parvint plus à respirer. Il étouffait. L’air lui manquait sans qu’il ne soit capable d’en expliquer la raison. Son cœur battait la chamade. La panique s’empara de lui. Steve ne bougea pas. Il riait silencieusement. Il le narguait avec un regard hautain. Comme s’il voulait prouver quelque chose. C’était dingue mais Will savait que c’était Steve qui venait de s’en prendre à lui.

Après quelques secondes, l’esprit claqua des doigts à nouveau. Le conducteur en profita pour respirer bruyamment et reprendre son souffle. Ses mains tremblèrent, ses jambes également. Il avait des sueurs froides.

Non, ce n’était pas un coup monté… Cette chose qui se tenait près de lui n’était pas Steve. Cette chose, elle n’était pas normale.

— Enfin. Tu. As. Compris.

— Vous… Vous… Vous n’êtes pas... Steve. Vous n’êtes pas Steve...

Le sourire sur le visage de l’étudiant apparut de nouveau dans ses grandes largeurs.

— Que… Que… Que voulez-vous ?

— La. Justice. Will.

« Steve » se lança dans un éclat de rire démoniaque. Il sentait la peur dans le regard de sa victime. Il adorait se perdre dans des regards aussi terrifiés que le sien.

— Qu… Quelle justice ?

— Tu. Causes. Du. Tort. Aux. Femmes. Que. Tu. Séduis.

— Qu’est-ce que… vous… en savez ?

— Je. Sais. Tout.

L’esprit démoniaque s’approcha dangereusement de lui. Un frisson lui parcourut tout le corps. Il avait envie de hurler. Mais, la peur le tétanisait.

— Tu. Vas. Me. Dire. Que. Je. Mens ?

— Non… Oui… Euh… Je n’ai causé de tort à… personne.

Les sourcils de « Steve » montrèrent toute leur perplexité face à de tel propos.

— Darlene. Amanda. Et. Bien. D’autres. Encore.

— C’est faux, c’est faux !

Will était au bord de l’hyperventilation. Il voulait s’extraire de la voiture mais les deux portières à l’avant étaient bloquées.

— Donc. Je. Mens ?

L’esprit ne prêtait pas attention aux tentatives de fuite de sa proie. Ses yeux devinrent si ronds et si blancs qu’ils en éclairaient l’intérieur de la Ferrari.

— Euh…

— Oui. Ou. Non ? Je. Veux. Une. Réponse.

— Euh… Oui…

Le sourire de « Steve » devint sévère, dur. Ses traits le rendirent impitoyable. Il claqua des doigts à nouveau. Le cou de Will se tordit dans un craquement assourdissant. Son corps percuta le tableau de bord.

— Mauvaise réponse…

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