Ch.°01 : Le Crève-Espoir

Par CHOECR
Notes de l’auteur : Ce chapitre a été retravaillé pour une meilleure cohérence.

L’odeur d’humidité imprégnait mon odorat tandis que je sortais de ma petite salle de bain. J’entendais en arrière plan le journal matinal. Je remarquai ce matin que le sujet traité était encore une fois à propos du Sançonge qui s'était révélé près d'Assise en Italie. Je ne fus que peu surpris sachant que depuis plusieurs semaines tous les journaux nationaux en parlaient.

... un commerçant nous fait part de ses interrogations quant à l'exercice de son activité, reportage de Julie Trange et Christophe Minut. Dans cette aggloméra...

« Toujours le même sujet. Il faudrait qu’ils passent à autre chose... »

J'éteignais mon ordinateur et prenais mon téléphone pour le ranger dans ma poche. Je me préparais rapidement sans rien oublier. Je regardai mon sac ventral et ma besace. Mes provisions étaient en quantité suffisante. Mon Foyer était en parfait état et mon identification à jour. Je me saisis de ma dague que j’avais aiguisée la veille et la rangeais dans son étui que je portais à la jambe. J’enfilais mes protections qui étaient toutes bien usées mais fonctionnelles. J’attachais ensuite mon fourreau et y rangeai mon épée longue éclairante. Cette épée était généralement surnommée ‘bougie’. J’harnachais ensuite solidement mon sac ventral et ma besace. Tout était en ordre. Je parti donc vers le Sançonge de mon quartier.

La porte NºF21 de ma chambre grinça lentement avant de claquer bruyamment. Ce son sourd résonna dans le couloir. Je faisais face à l'escalier et au six étages qui m'attendait. Je dévalais à vive allure les six étages. Perdu dans mes pensées, j’en oubliais presque de longer les murs extérieurs de la cage d’escalier afin d’éviter le milieu creux, friable et abîmé des marches. J’ouvris par automatisme les deux portes qui me séparaient de l’extérieur. Je sortis de mon perchoir et me retrouvai dehors. Il faisait froid. Deux degrés Celsius tout au plus. J’eus l’impression de rencontrer immédiatement des aiguilles acérées venant irriter chacune de mes extrémités. Je sentis également un léger pincement au creux de mes narines. Ce froid m’accompagnait depuis longtemps, partout. Il s’infiltrait dans les maigres isolations de mes trois derniers lieux de vie. Cette sensation d'engourdissement qui m’était si familière me rappelait le chemin que j'avais parcouru pour me retrouver ici aujourd’hui. Cela faisait maintenant dix mois que j’étais installé ici. Dans ce quartier si singulier qui connut un boom économique et où tout s'y développa rapidement. Des tours hautes et serrées sortirent de terre pour loger toute la peuplade. Leur large ombre recouvrait les environs d’une aura maussade et intimidante. Les fines rues s’élançaient, zigzaguaient entre les pieds de ces géantes et souffraient de leur obscurité. Menues et humides elles n’avaient que pour seul éclairage des petits luminaires que le chef-lieu avait jugé bon d’installer. Ces fines rues n’étaient néanmoins que peu hostiles et reflétaient l’apparente tranquillité du quartier. Jugé ordinaire, ce dernier voyait en son sein exister une toute autre ambiance. Une effervescence sans nom régnait autour du Sançonge du quartier, le Crève-Espoir. Certaines personnes dirent que ce nom proviendrait des échecs qui advinrent lorsque la dangerosité du Crève-Espoir fut mal évaluée. « Encadrer» comme disent les bureaucrates. Ce nom résonna pendant longtemps comme un avertissement pour ceux qui voudraient s’y aventurer sans préparation. Pour ma part, je trouvais ce nom mal choisi au vu des vocations qu'il a suscité.

Je continuais ma marche dans cette rue adjacente avant d’entrer sur l’artère principale. En y mettant un pied, je constatai qu'elle était déserte. Pas un seul souffle de vie ne pouvait être perçu. Un lourd silence se faisait entendre. Il fut uniquement brisé par le son de mes pas qui retentissait sur le pavage sale et irrégulier. J’entrais alors silencieusement sur l’avenue Isolde Voss. Cette avenue était le centre névralgique de la ville. Cela ne se reflétait pas au nombre de passants qui étaient ce matin là plus que discrets, mais au travers des nombreux commerces qui s’y trouvaient. Ces commerces, appelés Comptoirs des Sans-Lumière faisaient tourner l’économie. Les vives couleurs de leurs enseignes lumineuses éclaboussaient le gris terne du bitume.

Ce sol crasseux et délavé sur lequel je marchais, était l’une des rares choses qui m’était familière. Qu’importe le temps ou l’heure. Le même gris. La même froideur. La même aura. Seules de faibles lumières venaient briser cette monochromie. Le clignotement des diverses enseignes lumineuses transmettait un souffle de vie. Alternant du vert au bleu. Du bleu au violet. Du violet au rouge. Toujours selon un paterne uniforme que tous connaissaient par cœur. Ces enseignes étaient présentes sur toute la longueur de l’avenue, longue d’environ deux kilomètres. Elles prenaient vie hâtivement, dès six heures du matin jusqu’à tard le soir, selon les affaires. Il n’était pas rare que j’entrevis certaines enseignes ouvertes jusqu’à une à deux heures du lendemain. Ainsi fonctionnaient ces Comptoirs des Sans-Lumières ou CSL comme tous les appelaient. Au fil des mois, je pus identifier les meilleurs CSL et pris rapidement mes habitudes. À quelques centaines de mètres de mon perchoir se trouvait le Will-o-wisp, une charmante enseigne à taille plus humaine tenue par un dénommé Hans. C’est ici que je faisais mes achats car les prix étaient amicalement diminués. En contrepartie, je lui revendais la majorité de mes trouvailles. J'obtenais principalement des plantes et des petits minéraux qui étaient fortement utilisés pour de l’artisanat sommaire. Ainsi fonctionnaient ces Comptoirs qui tenaient à bout de bras l’économie de ce lieu. Tout juste immiscé dans cette dite avenue, je m’étonnais de voir le Will-o-wisp fermé.

« J’y passerai ce soir pour voir si tout va bien ».

En même temps que je marmonnais cela, je me rendis compte que toute l’avenue était incroyablement calme.

« Étrange… Ils sont pas du genre à tirer au flanc ».

Seuls quelques Joueurs téméraires étaient dehors, assis ici et là dans cette extrémité de l’avenue. À force, je reconnaissais quelques silhouettes qui étaient, pour la plupart, amochées par cette réalité si impitoyable. J’avançais petit à petit vers l’épicentre qu’était le Crève-Espoir.

Il se trouvait au milieu d’une place carrée vidée de toute chose hormis de lui même. Autour de ce Sançonge orbitait une coursive en pierre comme on pouvait en voir dans les grandes capitales.

Les CSL de grande envergure s’arrachaient les places alignées avec le piédestal central qui servait de fondation au Crève-Espoir. Entre ferveur marchande aux abords et le calme olympien dès le premier pied posé sur l’esplanade, ce lieu faisait cohabiter les opposés. Outre son caractère dichotomique, cet endroit était connu pour son facteur d’harmonisation. Ici, tout Joueurs qu’importe leur âge, leur motivation ou leur histoire cohabitaient. Ayant continué ma marche, j’arrivais proche de la coursive. Je décidais d’en faire le tour et d’observer le lieu. Je souhaitais trouver la raison de ce calme inhabituel sur l’avenue Voss. Comme d’habitude, les CSL étaient ouverts et déjà rapidement bondés. Je remarquai cependant, après avoir parcouru le premier segment de la coursive, un large attroupement. Un attroupement tel que les Sentinelles avaient du mal à contenir l’effervescence. Entre tout ce chahut j’aperçus brièvement une pancarte manuscrite d’un jaune marqué, collée en haut de l’entrée : « Au rabais ! » .

« Ne poussez pas ! » « Dépêchez-vous ! » « Il y a assez de stock pour tous le monde ! Gardez votre calme ! » « Retouche moi et ça va mal finir ! » « Laissez-moi passer, il faut que je sorte ! »

Un brouhaha sans nom résonnait sur les pierres de la coursive. L’attroupement était une masse informe, un tourbillon de corps pressés, un chaos vibrant. Des lourds pas se firent entendre au loin. Des Sentinelles en renforts se firent dépêcher sur place, calmant ainsi la situation. Je décidais également de m’immiscer dans la foule espérant faire une bonne affaire. Après une dizaine de minutes d’attente qui furent, pour le moins, mouvementées, j’entrais au Lumières!. Ce CSL était à lui seul un centre commercial. Je fus immédiatement frappé par les trois étages organisés en U avec pléthore de produits comme je n’en avait rarement vu.

Je ressentais au travers de l’éclairage, du sol soigné et de la riche décoration, toute la culture de l’ostentatoire dont ce CSL avait hérité des plus grandes marques de ce monde. Chaque étage possédait une utilité qui lui était propre. Au rez-de-chaussé, des points de ventes où l’enseigne rachetait les trouvailles des Joueurs. Aux étages se trouvaient les articles que l’enseigne vendait. Les consommables au premier, les armes et protections au second et les objets de grande valeur comme les Souvenirs au troisième. Sachant que je ne pouvait rien m’acheter au second et dernier étage, c’était naturellement que je me dirigeais au premier. Contre toute attente, cet étage n’était que peu comblé. Tout au plus une trentaine de Joueurs. Marchant d’un pas feutré entre rayons et étales, mon regard se posait sur des fioles. Soldés à hauteur de cinquante pourcents, ces fioles, ou plutôt leur contenu, me seraient d’une grande utilité. Elles augmentaient les défenses passives - physique et magique - d’un demi point durant trente minutes.Voyant que le lot de six potions coûtais 300 euros ou 4.2 Unités même soldées, je réfléchissais à deux fois avant de m’en saisir. C’est à ce moment ci que je repensais fortement aux théories d’optimisation de la célèbre Joueuse Han Min-Ji. Elle prônait notamment l’importance des statistiques ‘passives’. Surtout que dans ce cas-ci, ces potions augmenteraient mes défenses de près de 50%. Ayant cela à l’esprit, je me résolus à en acheter. Je me saisi d’une fiole, vérifiant si la forme convenait à mon porte potion de ma besace. Une fois cela fait, je pris mes six potions, rendis hommage à mon compte en banque et me déplaçai en direction du rez-de-chaussé. En m’approchant du large escalier circulaire, j’entendis de l’agitation à l’étage supérieur et décidai d’aller assouvir ma curiosité. À chaque marche gravie, j’entendais plus distinctement les discussions et les chuchotements.

« Elle doit au moins coûter dans les 5000 unités » « Mais si c’est lui, c’est sûr » « Il est encore plus impressionnant en vrai. » « Tch… Il peut pas s’empêcher d’être toujours accompagnée de groupies »

Je voyais en arrivant à l’étage un Joueur d’une vingtaine d’année qui dégageait une certaine prestance qui ne laissaient pas indifférente la foule qui l’observait. Je n’avais pas connaissance de ce Joueur qui devait être relativement nouveau et qui, au vu de la propreté et de la qualité de son équipement, ne devait pas avoir de problème financier. Quoiqu’il en soit je profitais d’être monter jusqu’ici pour observer les articles proposés. Je m’arrêtais devant la partie de l’étage où des gants étaient exposés. J’essayais d’en trouver en deçà de cent-cinquante unités. Malgré tous les efforts que j’employai dans la recherche d’une paire de remplacement, je ne pus trouver des gants adéquats. Je trouvais cependant des gants à deux cent-trente unités soldés à quarante pourcents. Ce qui représentait environ trois mois de gain. Ils étaient renforcés avec du cuir d’Haṁsa et il était indiqué sur la fiche descriptive qu'ils augmentaient <le multiplicateur> de dextérité de 0,05 et octroyaient deux pourcents de dégâts aquatique. Je m’asseyais pour ouvrir mon Statut afin de vérifier le gain hypothétique que ces gants me fourniraient. M’étant assis, je saisissais avec mon pouce et mon index gauche, ma malléole interne et externe droite.

« Statut » Murmurais-je.

Ainsi ma fenêtre de Statut s’ouvrit. Je pouvais ici y observer ma ‘Clarté’ plus généralement appelée ‘niveau’, mes statistiques et multiplicateurs entre autres choses. Toutes les informations qui pouvaient être utile à mon évolution et à ma survie étaient rassemblées dans cette fenêtre. D’un noir ébène, elle distinguait mon présent de mon futur. Ma survie de mon trépas.

Mon Statut affichait <DEX : 2.6    x1.13     2.93>

« Je serai à 3.06 de Dextérité avec ces gants »

Pour un Joueur de mon ampleur, avoir plus de 3 en Dextérité était plus que suffisant. Les meilleurs Joueurs étaient aux dernières nouvelles à 5.4 sans multiplicateur. Je lâchai ma malléole, fermant de fait mon Statut et me relevai. En y pensant, s’asseoir pour se tenir la malléole aurait fait de moi un dérangé il y a de ça à peine trois ans. C’était désormais un geste aussi banal que d’avoir une main dans une poche. Rien que dans mon champs de vision, je voyais quatre Joueurs se prêter à la même activité que moi. Je réajustai mes protections et notamment mon plastron qui s’était déplacé lorsque que je m’assis. Une fois de plus je me dirigeais vers l’escalier circulaire. Je me faufilais dans l’attroupement qui avait grandi de façon substantielle depuis lors. Tous observaient le jeune Joueur. Loin d’être timide, il semblait fortement apprécier l’attention que la foule portait sur lui. Surtout celle de la gente féminine. J’haussai les épaules en souriant et je me frayai un chemin parmi la foule.

« Excusez-moi. Pardon… Merci bien ».

En descendant les escaliers j’observais en surplomb l’intérieur du CSL. Le bruit des discussions et des pas couplés aux va-et-vient des personnes me firent réaliser que le monde avait changé. Les humains s’étaient une énième fois adaptés aux difficultés rencontrées. Les Sançonges, le Statut, les Sans-Lumières. Tout cela faisait partie de notre quotidien. À la suite de cette réflexion je sentis une certaine satisfaction et fierté. C’est avec ses sentiments que je continuais ma marche. Une fois au rez-de-chaussé, je m’engouffrai en direction de la première caisse. Je remarquai avec stupeur que rien n’avait échappé à la richesse omniprésente du lieu. Même l’endroit d’encaissement était finement décoré. D’une teinte sombre, fait de bois et d’acier, il se démarquait néanmoins par une certaine sobriété. Je saluai l’hôtesse et lui donner mon lot de fioles.

Bip...tap...tap...tap...tap

« Comment souhaitez-vous régler ? En Unité ou en devise traditionnelle ? »

« En Unité s’il vous plaît. »

« Ça vous fera donc un total de 4.2 Unités ».

Je sortis mon téléphone, réglai et rangeai soigneusement mon achat. Je cédai ma place aux suivants et me dirigeai doucement vers la sortie qui n’avait pas désemplie depuis lors. Me frayant un chemin tout en prenant garde à ne pas briser mes précieuses fioles, je traversai la coursive et arrivai sur l’esplanade. Loin de l’animation que je venais de quitter, se dresser devant moi tout le sérieux du monde. Les grandes horloges, au centre de chaque coursive m’indiquaient l’heure. Il était alors huit heures dix du matin. Des silhouettes tordues s’amoncelaient ici et là, autour du Crève-Espoir. Tantôt debout. Tantôt assises. La condensation émise par les conversations des divers groupes s’exhalait en volutes blanchâtres, se perdant dans l’immensité du ciel gris.

« Eh toi ! Le gaillard ! On cherche quelques membres pour combler notre groupe. Au vu de ton équipement tu dois être un épéiste. T’es intéressé ? »

J’agitai rapidement les yeux de gauche à droite pour observer cet homme et son groupe. Ce groupe était composé d’un lancier, d’un pisteur, d’une militaire qui semblait être médecin, d’une épéiste et de l’ours qui venait de m’aborder, un tank. Au vu de leur composition, ils semblaient s'aventurer jusqu'à la deuxième strate du Sançonge.

« Je vais devoir refuser. Je vais rester dans la première strate »

« … Je vois. Au plaisir de collaborer la prochaine fois. Si tu changes d’avis n’hésite pas à revenir vers moi.»

Nous nous serrâmes la main et il retourna auprès de ses camarades qui me semblaient tous être fort aguerris.  Je faisais désormais face au Crève-Espoir. D’une circonférence d’environ trois mètres cinquante, c’était une sphère vibrante. Flottant originellement à un mètre du sol, un piédestal en pierre avait été construit pour en faciliter l’accès. Il était fait de pierre car les matériaux transformés ne semblaient pas résister aux perturbations créées par le Sançonge. Peu d’explications scientifiques avançaient la nature de ces derniers. Une vulgarisation courante mais inexacte était de dire qu'ils étaient des trous de ver, servant de pont reliant un endroit à un autre. Appelés Sançonges ou Portails, ils restaient le plus grand mystère auquel l’humanité n’eut jamais eu à faire face. En effet, lorsque les premiers Sançonges apparurent, tous les scientifiques se précipitèrent pour les étudier. Bien que des formations similaires étaient envisageable selon la relativité générale c’était là, la première fois qu’un tel phénomène pouvait être directement observé. Les Sançonges, à l’instar d’objets gravitationnels, déformaient l’environnement autour d’eux comme si l’espace était précipité en leur centre. La contraction spatiale se répercutait sur les corps, inertes et animés. À mesure que la distance avec le Sançonge s’amenuisait l’attraction se faisait de plus en plus forte. À proximité immédiate, il fallait lutter physiquement pour ne pas être aspiré. Il était donc commun d’y entrer et d’en sortir avec un certain mouvement.

Une autre caractéristique typique des Sançonges était les déformations optiques qu’ils engendraient. Ces dernières s’harmonisaient au centre de la sphère pour dépeindre un paysage unique : l’intérieur du Sançonge. Ils étaient à la fois trou noir et trou blanc. Destination et chemin. Nul ne sait réellement d’où provenaient le mot ‘Sançonge’. Il serait vraisemblablement issu du français. Bien que les mots ‘Sançonge’ et ‘Portail’ étaient interchangeables, le mot Sançonge désignait précisément la destination. Le mot ‘Portail’, désignait quant à lui la sphère reliant le Sançonge à la Terre. Le Crève-Espoir ne faisait pas figure d’exception et sa physionomie était normale. Depuis l’esplanade je pouvais observer l’intérieur du Sançonge que je connaissais maintenant très bien. La zone d’arrivée était une vallée herbacée, aux hautes cascades et aux vifs torrents. Loin du paysage terrestre, la verdure y était en majorité d’une teinte cendrée ; le liquide qui coulait à flot, d’un bleu violacé. Étant en bas des dix marches du piédestal, je commençai à ressentir l’attraction du Crève-Espoir. Je me fis arrêter par une Sentinelle qui me demanda mon identification. Cet homme d’un bon mètre quatre-vingt-dix était lourdement armé. Il portait un large bouclier décoré des armoiries du chef-lieu, une masse d’arme et une épaisse cuirasse noire. Je lui tendis mon identification. L’ayant scanné, il me la rendit.

« Bonne chasse. Puisse la Lumière vous accompagner ».

Étonné de ces paroles, c’est à ce moment-ci que je remarquai qu’il portait un pendentif luminique. Originaire de monastères asiatiques reculés, le Luminisme avait su trouver une large communauté de dévots à travers le monde. La majorité des Sentinelles appartenait au luminisme car selon leur foi, le Système et notamment le Statut relevaient de la grâce divine. Étant touchés par cette grâce, ils avaient pour obligation de s’investir dans les activités liées aux Sançonges. Je ne fus pas étonné qu’une Sentinelle soit luministe mais bien par le fait qu’il exposait ouvertement sa foi alors que la discrétion était un de leur mot d’ordre.

« Sans doute un extraverti »

Je gravis d’un pas déterminé les marches, ressentant exponentiellement l’attraction à mesure que je me rapprochais du sommet du piédestal. De profondes vibrations se faisaient sentir dans tous mon corps. L’air tremblait. Les sons s’évanouissaient. Le temps semblait s’arrêter. J’immisçai mon pied dans cette sphère. Je le vis fortement se faire déformer. Tel une paille dans un verre d’eau que l’on observerait. Puis se fut au tour de mon genou. De ma cuisse. De mon buste. Soudainement un violent fracas se fit entendre. Un son grave et sursaturé emplissait mes oreilles. Ma vue était complètement dépassée par ce qu’elle voyait. Je sentis mon corps accélérer. En chute libre. Allant à une vitesse effarante. Une fraction de seconde plus tard, j’entendis le même son déformé et j’étais là. Dans cette vallée cendrée.

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Loup pourpre
Posté le 07/08/2024
Bonjour ECHOECR,

C'est une histoire originale que tu nous présentes là. C'est un peu gamer, monde digitalisé et consumérisme décrié. Avec une touche de physique quantique avec le trou noir-Sançonge.

Hâte de voir la suite.
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