Chap 3

Melinda crispa le visage lorsque le médecin retira le clou de sa main. Avec un sourire l'homme en blouse blanche annonça :
« On va faire une radio par sécurité, mais au vu du peu de saignement et de l'état de votre main, la perforation a évité les os, les nerfs et les veines. Vous avez eu beaucoup de chance, vous devriez vous en remettre pleinement en quelques semaines.
- Merci. » répondit-elle par automatise.
En réalité, elle n'avait qu'une envie, guérir sa plaie et rentrer. Ce n'était pas un simple clou qui allait mettre sa santé en danger. Enfin cela demeurait aussi une chance, indirectement. Pour pouvoir se procurer du sang légalement, une simple prise de sang permettait de mettre à jour une maladie semblable à une leucémie. C'était un symptôme courant chez les vampires qui ne s'était pas alimenté depuis presque un an, comme elle. Avec le temps et le développement de la science moderne, la condition vampire avait pu être étudié en détails. Sans surprise, tous leurs pouvoirs découlaient directement de leur sang, qui s'appauvrissait lors de leurs utilisations. Elle aimait nommé ce phénomène, l'hyper régénération cellulaire. Inversement, en l'absence de sang, il était possible de mettre son corps en hibernation et de récupérer des forces lentement.  Toutes les légendes à propos de son peuple avaient pour certaines des similitudes étonnamment proches de la réalité. A cause de ça, elle soupçonnait que l'écrivain de Dracula, avait côtoyé ses semblables pour mettre tant de détails sur les vampires, cela ne pouvait pas être qu'une coïncidence.
La voix du médecin la ramena à la réalité.
« Inutile de vous inquiétez mademoiselle, même la cicatrice devrait être minime.
- À vrai dire... docteur, je me sens un peu fragile en ce moment... si c'était plus... grave que cela, dit-elle presque... larmoyante.
- Si cela vous inquiètes vraiment, on peut faire un bilan sanguin complet. Parfois, il ne s'agit que d'une simple carence en vitamines. Tâchez de ne pas trop vous en faire. Une infirmière va venir faire la prise de sang. »
Le médecin lui accorda un sourire amical avant de sortir du box de consultation. Melinda s'allongea et soupira pleinement. Le prochain rendez-vous serait difficile, enfin, elle devrait jouer la surprise, la peur, afin de paraître crédible dans son futur rôle de malade. Elle regarda sa main et celle-ci avait été entouré d'un épais bandage qui lui garantirait le meilleur rétablissement possible. Comme elle n'avait pas encore passé la radio, il valait mieux qu'elle ne soigne pas sa plaie pour le moment, les choses seraient alors trop suspectes. Dans le pire des cas, il lui serait toujours possible de contacter un vampire appartenant à l'administration qui réglerait le problème en supprimant tous les documents, les radios et elle devrait alors s'abstenir de faire de vague le temps de quitter le pays. Dans sa jeunesse, elle avait dû recourir à de telles services, mais à présent qu'elle approchait des trois siècles d'existence, elle était assez assagie pour voir la situation dans son ensemble.

*

Bastien attendait à bord de sa voiture, rongé par une inquiétude et un culpabilité qui ne faisait que grandir. Pourquoi n'avait-il pas prit la peine de mieux ranger les choses, c'était clairement sa faute si sa colocataire s'était blessée. Bon sang, si le clou avait fait de dégâts et qu'elle en gardait des séquelles à vie... Il blêmit davantage alors qu'on frappa à sa fenêtre. Il sursauta et manqua la crise cardiaque tellement la peur le marqua l'espace d'un instant. Melinda était devant la voiture, avec un sourire, elle lui fit signe de baisser la vitre. Reprenant ses esprits, il ouvrit la portière et sortit.
« Alors, tu vas bien ? Qu'on dit les médecins ? Je suis vraiment désolé, c'est ma faute...
- Il n'y a aucune problème Bastien. Et ta faute, tu veux dire que tu m'a poussé ?
- Non, mais tu vois ce que je veux dire.
- Je suis tombée et je me suis blessée comme une grande. Le médecin m'a dit que tout allait bien et que le clou n'avait percé que la chair. Je n'en garderai même pas une cicatrice, d'ici quelques mois ma main serait comme neuve et ma convalescence sera rapide. Maintenant que tout est clair, détends-toi. Rentrons, cela a prit un temps fou et j'ai envie de manger un bout et de dormir
- D'accord... » admit-il en allant lui ouvrir la portière.
Elle leva les yeux au ciel, mais il fit mine de ne pas l'avoir remarqué. Il était bien trop gêné par la situation. Elle était blessé et c'est lui qui était réconforté. C'était le monde à l'envers.
Bastien roula tranquillement pour le retour, la pression retomba doucement et il sentit la fatigue l'assaillir brutalement. Heureusement, ils furent vite à destination et laissant le repas de côté, ils dormirent quelques heures.

*

En se réveillant, Melinda regarda sa main et les événements de la nuit lui revinrent en tête. Au moins, elle n'avait pas emménagé chez quelqu'un de dangereux, au contraire. Elle attendrait une semaine avant de guérir correctement sa plaie dans la main. Pour le sang, si tout se passait bien, son bilan complet révélerait son sois-disant problème de santé et elle pourrait prétendre à une transfusion. Bien que la méthode d'assimilation changeait, cela fonctionnait tout de même.
Elle regarda par la fenêtre et constata que le jour était encore levé. Parfait, elle allait pouvoir profiter d'un peu de luminosité. Elle sortit de la chambre, traversa quelques pièces et atteint la cuisine. Elle se remplit un verre d'eau et s'installa sur les marches devant la cour de la maison. Elle se laissa réchauffer par le soleil et but quelques gorgées. Un silence apaisait régnait autour d'elle. Vivre en campagne était plus agréable qu'elle ne l'aurait pensé. Cela faisait bien quatre-vingt ans qu'elle restait en ville. C'était plus facile d'y passer inaperçu, surtout lors de la transition de sa nouvelle identité. Elle glissa sur le côté et s'allongea en travers d'une marche. Ce n'était pas aussi confortable qu'un lit ou une chaise pliante, mais elle se sentait en vacances.

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