Après des années à recevoir la visite d’âmes égarées, Clara pensait savoir comment cela fonctionnait. Toutes avaient quelque chose à régler, un fardeau qui les empêchait de passer de l’autre côté. Parfois, il s’agissait de dénicher un héritage caché ou de dire adieu à un proche. Mais le plus souvent, les fantômes souhaitaient dénoncer un meurtre non résolu. Le fait que Clara travaille au sein de la police criminelle n’était sûrement pas une coïncidence. Entre hanter une personne lambda facilement effrayée et une inspectrice avec des contacts dans la police, les fantômes n’hésitaient pas. Généralement, ça se réglait vite : pas besoin d’enquêter longtemps quand la victime pouvait revenir d’entre les morts pour désigner son attaquant.
Malheureusement, cette nouvelle enquête paranormale lui donnait du fil à retordre. Même la façon dont la victime s’était présentée l’avait beaucoup perturbé. Alors que la plupart des fantômes profitaient des songes de Clara pour appeler à l’aide, Huguette s’était imposée en pleine journée. Après avoir fait tomber une carafe, décroché un cadre du mur, claqué deux portes et allumé la télévision (un tapage certes classique, mais insistant), le fantôme était venu lui hurler sa peine à l’oreille. Sa douleur était indéniable, mais ses plaintes ne donnaient aucun indice sur son identité ou sur la façon de la libérer de son tourment.
Pendant des semaines, Clara avait subi une litanie de pleurs quasi ininterrompue, perturbant à la fois son travail et sa vie privée. À la fin de l’été, elle avait fini par demander un arrêt de travail prolongé (elle avait bien cherché la case “harcèlement moral d’un ectoplasme” dans le formulaire, mais avait dû se résoudre à cocher “insomnies” et “épuisement moral”).
Il ne s’agissait pas de baisser les bras — il était impossible de se libérer d’une âme en peine sans l’aider —, plutôt de se concentrer sur l’essentiel : cette douleur indescriptible.
— Est-ce qu’on pourrait enfin faire connaissance ? Je ne sais même pas qui tu es. Ou étais. Moi c’est Clara, 36 ans, inspectrice et aimant à fantômes. J’aime la cannelle et le beurre salé.
Assise dans son lit, la couette remontée jusque sous le menton, Clara se tendit, espérant enfin recevoir une réponse de son compagnon invisible.
— Je ne sais pas grand-chose sur toi. Rien, en fait. Mais si je devais deviner… Quelqu’un qui adore se plaindre et geindre, sans s’expliquer ou chercher de solution, ça ressemble à un enfant de 5 ans. Je chauffe ?
Après des semaines à côtoyer le fantôme, Clara sentait bien qu’il s’agissait d’une vieille âme, une âme qui avait eu le temps de vivre des choses, bonnes ou mauvaises. Mais en le comparant à un gamin immature, elle espérait le faire réagir. Et ça fonctionna. La couette se souleva brusquement et Clara sentit un souffle froid dans son cou. Pour une fois, au milieu des pleurs et des cris se mêlaient quelques indices que le fantôme distillait au compte-gouttes. Il ne s’agissait pas vraiment de mots ou de phrases complètes, plutôt de souvenirs et d’émotions que Clara ressentait au plus profond d’elle-même. De la peur, de la colère et un amour blessé.
Friande de thrillers et de paranormal, c’est tout naturellement que je me suis dirigée vers le pitch qui t’a été imposé par le concours d’écriture et que tu as intelligemment poursuivi. Prologue et chapitre 1 sont bien construits. On a envie d’en savoir plus sur cette enquêtrice et sa larmoyante locataire !
Donc, ouais, j'adorerais en voir plus !
Le ton est léger, je n'ai pas ressenti de dureté cachée dans ces 2 chapitres par contre. Pour moi c'est très feel good comme début d'histoire, mais peut être que cela changera dans la suite.
Je vais me dépêcher de mettre les autres chapitres.