Chapitre 1

7:00

— Réveille-toi mon chaton…Le réveil a sonné, je murmure dans un baiser sur la joue chaude de mon fils. Il me répond par un grognement et en tournant vers moi sa tête qu’il allonge exagérément, pensant surement que cette déformation lui permettrait de décoller ses paupières…Sans succès. Je souris. Mon petit bébé devenu grand…

Pas question d’être en retard ce matin ! Le lancement a lieu dans 5h. Soraya me détesterait de retarder la prise de relais. J’avoue que la tension qui montait petit à petit depuis plusieurs mois est désormais à son paroxysme. « Tu es toujours cool toi… » n’arrête pas de me répéter Erwan. Ce n’est pas vrai, je ne suis qu’angoisse en réalité, et sur à peu près tous les domaines de ma vie… Mais je sais bien faire semblant.

La réussite de la réaction nous permettrait de prouver à grande échelle que nous avons une solution fiable pour refroidir l’atmosphère. Depuis 10 ans, nous bossons tous sur ce projet d’arrache-pied ! Nous avons tout creusé, tout imaginé, tout évalué, tout modélisé…ou presque. Maintenant place à l’heure de vérité.

— Louloute dépêche-toi ! Je lui cris alors que je rejoins la cuisine pour préparer son petit déjeuner.

Un long coup de klaxon retenti au dehors me faisant sursauter ! Merde, une tache sur mon chemisier…Je jette un œil par la fenêtre pour apercevoir Tahar qui enlève son casque et me fait signe de le rejoindre. Mince, qu’est-ce qu’il se passe…

— Louloute, tu en es où ?

— Je suis en train de lire…

— Concentre-toi mon chat, tu dois t’habiller !

— Oups, j’avais oublié…

— Dépêche-toi, je vais devoir partir !

— Nan !

— Tom ! Je ne te demande pas ton avis…

— Pourquoi ?

— Je dois aller travailler mon chat…C’est comme ça !

— Mais c’est pas l’heure…

— Oui mais il y a mon collègue devant la maison…Et ça, ça veut dire qu’on a besoin de moi !

Ça m’étonnerait que Tahar soit venu pour me faire une déclaration à 7h38 du matin, non, quelque chose cloche…

Je me dépêche de sortir pour le rejoindre, lui, sa belle gueule et sa moto. Il me regarde avec un drôle d’air avant d’éclater de rire :

— Rassure-moi, tu ne comptes pas aller au QG avec ça sur la tête ?

Je passe une main dans mes cheveux pour m’apercevoir que la serviette Mickey est toujours là. Je l’arrache d’un geste brusque, libérant ma tignasse brune, encore humide.

— Qu’est-ce que tu fais là ? Il y a un souci ?

— Tu me manquais... me répond-t-il du tac au tac, en restant à me dévisager silencieux.

Je laisse échapper un ricanement.

— Ah oui ? C’est nouveau ça ! Arrête ton char, qu’est-ce qui ne va pas ?

Il pose les mains sur le cœur, et avec un grand sourire, mime une explosion. Il est bête, diablement magnifique, mais bête ! Je ne peux m’empêcher de sourire en levant les yeux au ciel. Ça ne doit pas être grave s'il prend le temps de me taquiner ! Je fais alors volte-face pour rejoindre mon fils d’un pas rapide en lui lançant :

— À tout à l’heure, je me dépêche !

— Non, non, tu viens avec moi ! Me répond-il d’une voix ferme en descendant de la moto.

Je me retourne de nouveau pour voir sa mine redevenue sérieuse.

— Le mari d’Alice est à l’hôpital, il a fait une crise cardiaque hier soir. Erwan a veillé toute la nuit, et Soraya a raté son avion. Il ne reste que toi pour assurer le check d’avant lancement qui commence dans très exactement… Il remonte sa manche et jette un coup d’œil à sa montre...15 minutes !

— C’est une blague ?

Il me fait non de la tête…Je ne suis psychologiquement pas prête ! Merde, merde, merde !

— Ok, je dois déposer mon fils à la garderie et je te rejoins au plus vite…

De nouveau, il fait non de la tête.

— Hello, hello ! Je suis là ! Je ne suis pas en retard ! Me lance la voix d’Ayleen qui arrive en courant, jetant un regard entendu à Tahar.

— Je m’occupe de Tom, vas-y !

— Mais je…

Tahar attrape un casque supplémentaire dans le coffre de sa moto et vient se poster devant moi. Il repousse consciencieusement mes cheveux mouillés derrière mes oreilles puis passe délicatement le casque sur la tête. Merde, c’est hyper sensuel et intime comme geste…

— Bonne journée maman ! Me lance Tom, la main dans celle d’Ayleen alors qu’ils nous rejoignent, me tendant mon sac.

— Ok ! Vous faites chier ! Je serre Tom dans mes bras.

— Bonne journée mon ange ! Je t’aime !

Je rejoins alors Tahar qui m’attend, le casque sur la tête, le moteur en route. Je m’installe à l’arrière de la moto, pose les mains sur sa taille, et commence à sérieusement flipper.

— Prête ?

— Oui, allons-y !