Chapitre 1 : La dette envers les Raffen Shiv

Par Adexplo

Les Badlands, périphérie de Night City, 3 juillet 2080, 14h30

 

Encore une journée de merde à faire le passeur pour une bande de nomades qui ne paient pas un rond.

 

— Quelle fournaise, choom ! Tu nous as foutu quoi dans le coffre, cette Kaukaz n'a même pas la clim', putain !

 

Les routes ensablées des Badlands me donnent du fil à retordre pour conduire. En plus de ça, je dois me trimballer un colosse de plus de cent kilos qui me surveille comme si c'était moi la marchandise. Dans quelle merde je me suis encore foutu.

 

— Ferme-la ! Si t'es dans cette situation c'est uniquement de ta faute. Pauvre con, tu crois que ton cracheur allait servir pour braquer un convoi nomade ? T'es encore chanceux qu'on t'ait pas direct collé une bastos dans le crâne.

 

Des sirènes commencent à retentir à mesure qu'ils se rapprochent du Sunset Motel. Raze garde le pied sur l'accélérateur. La voiture semble trembler même en roulant sur une route stable. Il ne fait aucun doute que la marchandise dans le coffre est réveillée.

 

— PUTAIN RAZE Y A UNE THORTON DU NCPD QUI NOUS SUIT, FONCE !

 

— TU CROIS QUE JE FAIS QUOI ? MON PIED EST SUR L'ACCÉLÉRATEUR ! ENVOIE-LEUR DES BASTOS !

 

Dinas donne une gifle à Raze, le genre de gifle qu'on donnerait à quelqu'un pour le réveiller d'une grosse sieste ; une gifle venant de ce colosse, ça fait très mal. Le mouvement soudain de la voiture, qui fait des zigzags pendant quelques secondes, en témoigne.

 

— T'ES CON OU QUOI ? SI JE LEUR TIRE DESSUS C'EST PAS LE NCPD QU'ON AURA DERRIÈRE NOUS MAIS LA PUTAIN DE MAX TAC !

 

Raze tourne subitement le volant, fonçant à toute allure vers le canyon ; son regard est déterminé, il refuse de passer la nuit en prison.

 

— ACCROCHE-TOI, ON VA SAUTER DANS LE PETIT CANYON, LA KAUKAZ SERA FOUTUE, MAIS AU MOINS ON SERA SÛRS QUE CE SOIR ON NE PASSERA PAS LA NUIT EN PRISON !

 

— BORDEL DE MERDE, ON A LE DIRECTEUR DES FINANCES DE BIOTECHNICA ! S'IL CRÈVE C'EST FOUTU POUR LA RANÇON !

 

Raze fonce dans le canyon, les pneus laissant une traînée de sable derrière eux. Les deux sont entraînés dans une chute libre d'environ vingt mètres, la marchandise dans le coffre.

 

— OH BORDEL !

 

La voiture s'est plantée dans le sol rocheux, le pare-choc avant complètement détruit et une épaisse fumée s'échappant du moteur, alors que la Thorton du NCPD se rapproche du bord du canyon pour analyser et savoir où est passée la Kaukaz qui a fait un refus d'obtempérer.

 

Les deux hommes ouvrent difficilement leurs portières avant de marcher en boitant vers le coffre.

 

— Raze, si le directeur a fait un trait plat, t'es un homme mort.

 

Raze prend cette menace au sérieux et espère au fond de lui qu'il soit encore en vie. Son rythme cardiaque s'accélère à mesure que le coffre s'ouvre.

 

— Eh du con ! Réveille-toi ! Dinas envoie des petites claques sur la joue de l'homme visiblement inconscient.

 

— Faut que je me branche à son biomoniteur, surveille que personne n'arrive ! Dinas donne son cracheur à Raze pendant qu'il branche la liaison perso au cou de l'homme.

 

Après quelques minutes, Dinas se tourne vers Raze, le teint pâle.

 

— Ce... ce... ce con, il a un abonnement Trauma Team Premium !

 

Oh bordel de merde, ils seront là d'une minute à l'autre, faut que je me barre d'ici discrétos, il est hors de question que je tombe avec ce con.

 

— Tu sais quoi, on se calme, on va le balancer quelque part et se barrer. Je dois aller pisser, surveille-le.

 

Le bruit des moteurs d'une navette se fait entendre alors que Raze s'éloigne de l'autre côté, faisant mine d'aller pisser. Une fois hors de la vue de Dinas, il se barre en courant le plus rapidement possible.

 

Au bout d'une minute, des coups de feu retentissent et la voix de Dinas se fait entendre.

 

— À L'AIDE, RAZE ! Sa voix est coupée par le son d'un coup de feu.

 

— Il y a un autre suspect mais on n'a pas le temps, faut qu'on transporte le client dans une clinique en urgence.

 

Sunset Motel [Badlands], 3 juillet 2080, 19h50

 

Raze marche, complètement épuisé, sortant enfin du canyon et se dirigeant vers ce qui semble être le Sunset Motel. En même temps, dans ce désert de déchets et de cactus, il est compliqué de rater un motel.

 

Il suffisait de lever les yeux vers Night City pour remarquer les hologrammes publicitaires qui s'élevaient à des kilomètres dans le ciel. Difficile de se perdre.

 

La seule fois où je remercie ce putain de capitalisme corpo.

 

Il finit par arriver sur le parking avant de monter les escaliers métalliques menant au bar, alors que sur le parking les junkies et les épaves de voitures se comptent par dizaines. Il finit par ouvrir la porte menant directement dans un bar dont la décoration rapporte un peu plus de chaleur humaine, contrastant avec la déchetterie qu'est ce motel.

 

— Bonjour monsieur, vous désirez boire quelque chose ? lui demande le barman.

 

— Non, j'aimerais une chambre pour cette nuit, je suis un peu à sec alors mettez-moi la moins chère.

 

— Très bien, ça vous fera 50 eddies.

 

Raze pointe son index vers le barman, transférant ses 50 derniers eddies alors que le chargement du transfert s'affiche dans ses optiques Kiroshi.

 

— Votre chambre est la numéro 025.

 

Il part sans dire un mot, marchant dans les couloirs extérieurs miteux du Sunset Motel et redescendant les escaliers. En rentrant dans sa chambre, on trouve l'état typique de toute chambre de motel dans les Badlands : des cafards se cachant de la lumière, du sang sur les murs, un support de télé cassé, un lit sans matelas et une odeur de tabac froid.

 

Raze ne pouvait se contenter que de ça pour se reposer. Il essaie tant bien que mal de s'endormir ; la position de la chambre au rez-de-chaussée le force à entendre les disputes à l'extérieur sur le parking. Les rideaux métalliques fermés l'ont plongé dans l'obscurité.

 

Sunset Motel [Badlands], 3 juillet 2080, 23h50

 

Quelqu'un semble toquer brutalement à la porte. Le bruit résonne dans toute la pièce. Raze n'est pas endormi mais ne semble pas résolu à ouvrir la porte après les événements de la veille.

 

— Ouvre cette porte, on doit causer toi et moi ! crie une voix à l'extérieur.

 

Raze prend le cracheur que Dinas lui avait donné plus tôt dans la journée et se tient de l'autre côté de la pièce, caché derrière un meuble décoratif, craignant que l'ouverture de la porte soit forcée. Les bruits de coups contre la porte continuent de résonner.

 

— OUVRE CETTE PORTE PUTAIN, JE SAIS QUE T'ES LÀ ! T'ES FOUTU PUTAIN, DINAS EST MORT PAR TA FAUTE ! LE BARMAN M'A DIT T'AVOIR LOUÉ CETTE CHAMBRE !

 

La porte finit par s'ouvrir ; l'homme à l'extérieur a visiblement forcé l'entrée. Raze reste caché à l'autre bout de la pièce, tenant son cracheur.

 

— T'es où ? Montre-toi et je te ferai aucun mal.

 

Raze voit l'homme qui se tient de l'autre côté de la pièce, fouillant sous le lit. Vu ses habits, ça ne fait aucun doute, c'est un Raffen Shiv.

 

Alors que le Raffen Shiv passe devant la table où Raze est caché sans le remarquer, se rendant dans la salle de bain pour la fouiller, Raze se lève et enlève la sécurité du cracheur avant de le pointer sur la nuque de l'homme.

 

— Joue pas au héros et file-moi ton cracheur et les clés de ta caisse ! crie Raze, en pointant son arme sur l'homme de dos.

 

Le nomade fait passer son arme derrière son dos, permettant à Raze de la récupérer ainsi que les clés de sa Thorton.

 

— T'es foutu petit, tu vas peut-être te barrer mais tu pourras plus jamais sortir de Night City sans tomber sur nous. On va détruire ta réputation auprès des fixers de toute la région !

 

Raze prend le cracheur et les clés, pousse le nomade dans la salle de bain avant de courir en direction de la Thorton garée sur le parking et tente de la démarrer.

 

— Allez, démarre, démarre putain.

 

La voiture finit par démarrer. Raze voit dans le rétroviseur le Raffen sortir de la chambre, un autre cracheur à la main.

 

Trop tard pour le nomade : il est déjà engagé sur l'autoroute menant à Night City.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez