Chapitre 1 -- La fille du silence

Par Capella
Notes de l’auteur : Cette histoire est le one shot se déroulant dans le même univers qu'une saga que je prépare en 4 volumes. De fait, il s'agit d'un univers de 4 volumes réduit en 1 seul, ce qui peut être passablement complexe sur certains points. Si vous m'honorez de la lecture de plusieurs de mes chapitres, surtout, dites-moi si un élément n'est pas clair ou pas assez développé dans ce récit.

Si parler était facile, chanter l’était davantage. Il suffisait d’entrouvrir la bouche, de laisser son cœur marquer un, deux battements, et à sa voix, l’on offrait des ailes, celle d’un héron fendant les cieux, celle d’une chauve-souris filant entourée du noir. Alors, le son s’échappait d’entre ses lèvres, et l’on chantait !

Pour cette raison, Emily était la honte de son père, de sa famille, de sa maison, de toutes les Terres de Ré. Car elle ne savait pas chanter. Si seulement son mal n’affectait que sa capacité à formuler des mots intelligibles, elle aurait pu trouver sa place. Si seulement elle s'était contentée d'être hermétique au son, et seulement cela, là encore, pourquoi pas. Mais ne jamais avoir appris le chant, à défaut ne pas l'entendre, c’était la ligne à ne jamais franchir.

Forcée de se tenir loin de la musique, saisir une épée était toutefois dans ses cordes. De ce qu’elle en savait, les combats étaient violents ; plus encore que l’arrestation d’un criminel ou d’un voleur en fuite, qui ne lui avait encore jamais vraiment retourné l’estomac, s’entendait. Les cris s’entremêlaient, les plaintes, les supplications, les agonies, les bruits du fer. Elle entendait tant de récits sur les sons qui vibraient au sein des terrains ensanglantés !

Pour Emily cependant, c’étaient les expressions du visage, qui lui remuaient l’estomac. Les yeux écarquillés quand le sang giclait, le regard terrifié quand, de l’autre côté de son épée, la sensation de chair était prégnante. Elle qui n’avait connu que de courts duels, elle n’osait imaginer le nombre de ces yeux qui la fixeraient en s’éteignant, dans un champ de bataille. Au bout du compte, peu importait comment l’on vivait la chose, ôter une vie était toujours un drôle de spectacle.

Devant elle, un chevalier fondait avec une hache qu’il serrait entre ses doigts. Son imposante lame était colorée des teintes du vermeil, tandis que des notes noires la parcouraient. Membre de la maison Mesurr, à fortiori celle de la branche des guitares, il s’était spécialisé à faire couler le sang dans la fontaine qu’étaient les Hommes, le rendant ainsi capable de matérialiser des armes mélodiques en ouvrant la bouche et… chantant, puisque cela portait ce nom.

Ainsi, cet homme-là entreprenait, sinon de reproduire l’expérience, du moins de mettre la jeune femme en fuite en déroute. Il s’élançait, mettait un pied devant l’autre, ses pas foulaient le sol marbré du palais, sa poitrine se soulevait à un rythme régulier, mais à la vision de ce spectacle ne s’ajoutait qu’un silence coutumier.

Emily garda son épée serrée dans sa paume et se jeta en avant. Elle échangea quelques coups et fit de son mieux pour rester sur la défensive. D’une part, ce garde ne vivait que dans l’optique de protéger le Roi de l’immense et seul royaume de ce monde. Il était plus fort qu’elle, elle ne gagnerait rien à tenter de vaincre. Se tacher de sang pourrait en prime lui porter préjudice. D’un pas habile, Emily fit choquer sa lame contre celle de son duelliste, ses longs cheveux roux, parsemés de reflets roses, venant parfois lui gêner la vue. Ne s’en souciant guère, elle continua d’agiter son épée de cuivre couleur vanille, sans parvenir à faire changer la situation, sinon qu’elle perdit peu à peu du terrain.

Cela étant, du temps, au moins, elle en gagnait, et lorsqu’elle en récolta suffisamment, une créature hissée sur six mètres de haut planta l’une de ses longues pattes articulées dans la chair et venait croquer à pleines dents dans la nuque de sa victime, sortant une jolie part de peau de sa bouchée. Les six pattes archéennes qui hissaient le corps se prirent d’agitation pendant que le visage humain aux innombrables dents semblait cracher quelque chose avec dégoût, tirant dans son affolement quelques mouvements de cheveux noirs attachés en une queue de cheval.

Emily lui adressa un signe de tête pressé, pointant le couloir de la main.

Je me doute que tu n’aimes pas beaucoup le goût de la chair humaine, mais s’il te plaît, nous n’avons pas le temps, le pressa-t-elle en son for intérieur. La créature fila alors au bout du couloir et s’échappa en brisant la vitre de son corps aussi imposant qu’Emily le trouvait dégoutant. Elle n’aurait heureusement pas à le regarder trop longtemps.

Délestée d’un obstacle, la jeune femme reprit sa course en remontant le sillage de l’araignée géante. Elle sauta à travers la fenêtre brisée, atterrissant dans l’herbe et venant sans attendre se dissimuler dans un buisson. Dedans, Armand s’y trouvait caché, sa poitrine se soulevant à un rythme saccadé sous l’effort qu’il avait fourni. Il passa une main dans ses cheveux noirs et refaisant sa queue de cheval d’où s’étaient enfuies quelques mèches, révélant un peu plus de sa peau halée qui brilla au soleil. Sur sa joue, et tachant son vêtement en quelques gouttes, du sang. Emily lui adressa un sourire ; elle le préférait assurément avec deux jambes.

« Et maintenant, qu’envisages-tu ? »

Cela, il l’avait demandé non pas de sa bouche, mais de ses mains. Après un signe de tête, Emily lui renvoyait quelques gestes :

« Nous nous rendons aux Jardins du Sommeil. Elle est ma seule porte de sortie, désormais. » Elle usait de doigts, d’une main, parfois des deux, ainsi que de positions de bras pour faire passer ses mots. À sa réponse, Armand porta une main à son menton, puis, acquiesça.

« Armand, ça va aller pour te cacher ? »

Il considéra un instant son vêtement taché, plissant les yeux, méditant un moment.

« Ce sont mes pattes qui ont pris le plus clair du sang, il faut dire. Mais tu as raison. » Il retira son manteau pendant qu’Emily se léchait le pouce pour lui essuyer la joue. Tous deux se levèrent alors, et le jeune homme pour guide, son manteau sous le bras, ils quittèrent doucement le palais.

Tandis qu’elle le suivait, elle souriait, prenant plaisir à sentir toute l’adrénaline quitter son corps après la rude bataille livrée. La fuite de son chez-soi, le vent du dehors caressant sa peau sensible, les rayons du soleil frappant contre elle, aussi chaude que la main d’Armand, à croire que ce garçon était bronzé car il était descendu de l’astre diurne. Tout cela l’exaltait au plus haut point.

Un instant, le garçon l’arrêta, laissant passer un duo de nobles qui se promenait au sein des jardins royaux, et aussitôt passé qu’Armand lui intima à avancer.

Quand ils quittèrent le château en passant par les murailles, les immeubles de cuivre vanille s’étalaient à perte de vue, les passants bordant les rues comme un banc de poissons dans sa mer. Sous le soleil de midi, la ville était passablement animée.

Emily monta la capuche de son long manteau noir et avança sur les talons de celui qui n’avait pas besoin de se cacher pour être ignoré, esclave de son état. Un œil passif aurait deviné sans mal qu’Armand, de par son appartenance à la maison Opéra, était le soumis d’un membre de la maison Ré. Un œil plus attentif aurait pu assimiler ce garçon comme celui de la princesse en fuite, mais rares devaient être ceux qui retenaient le visage des membres de cette maison.

Un moment, ils se contentèrent d’évoluer entre les passants, les immeubles et les boutiques, ignorant les regards qu’on adressait parfois à celle qui, en plein printemps mourant, se vêtait d’une sombre capuche sur manteau. Au bout de nombreuses minutes, Armand finit par se retourner pour signer, posant son manteau sur son épaule pour ne pas embarrasser ses mouvements.

« Tu peux tenir jusqu’aux Jardins du Sommeil, ou tu as besoin de manger quelque chose, Emi ? Je peux passer en vitesse t’acheter de quoi te remplir l’estomac.

— Je ne vais pas mourir de faim pour si peu, andouille. »

Pourtant, le jeune homme arbora une moue peinée. S’il trouvait dommage qu’elle ne prît pas la peine d’une pause repas alors même qu’elle fuyait le palais royal, elle ne pouvait rien pour lui. Accélérant la cadence, elle s’approcha assez près pour pouvoir lui offrir une chiquenaude sur le front.

« D’accord, d’accord, j’ai compris », abdiqua-t-il avec un petit sourire sur les lèvres.

Pendant qu’ils marchaient, Emily leva la tête au plafond : leur destination. Dans cette cité établie sous terre, le soleil passait par une grande strie creusée dans la grotte, de l’ouest à l’est, simplement en l’honneur de l’étoile chauffante. Il pouvait ainsi illuminer le château qui s’éloignait derrière eux, ainsi que le beau million d’habitants qui peuplait la ville de Moderato ; les nombreuses lumières de la ville se chargeraient du reste. Mais si, sous leurs pieds, c’était une ville de bâtiments montant – le Moderato-bas –, au-dessus, les immeubles étaient des stalactites menaçant de tomber sur leur tête, tandis qu’une longue-vue leur permettrait d’admirer les habitants du Moderato-haut en pleine vie, marchant la tête en bas. Reliant les deux sections, des cuves roses étaient construites à intervalles réguliers pour marquer le passage d’une gravité à l’autre.

Cela faisait longtemps que je n’étais pas sortie du palais, songea Emily, un doux sourire sur le visage. La ville m’avait manquée.

Ils entrèrent à l’intérieur du nuage de cuivre, un grand bâtiment donnant entrée sur une salle des pas perdus. La foule se pressait, sortant et entrant et se dirigeant vers les nombreux couloirs des lieux. Emily prit l’un d’entre eux et dépassa les passants alignés sans s’embarrasser de se mettre en queue de fil, aussi courte fut-elle, pour se tenir directement devant l’homme chargé de contrôler le nuage. Il s’agissait en fait d’un ascenseur, assez conséquent pour tenir une cinquantaine de personnes en un seul voyage – il était même équipé de bancs pour le border et d’une fontaine à eau au centre. Un levier le faisait monter, puis redescendre.

Le commis ouvrit la bouche, commençant à prononcer des mots, mais se figeant aussitôt qu’il remarqua Armand. Cela leur épargna une réponse à formuler, Emily en venant directement aux faits :

« La princesse vous somme de me faire monter en priorité », ordonna-t-elle en rabattant sa capuche pour se révéler.

Bien sûr, il ne répondit pas à ses gestes. Il fallut attendre qu’Armand fît bouger ses lèvres pour que l’homme écarquilla les yeux. Il se pencha en avant, se frottant les mains, le rictus rendu nerveux. Armand signa.

« En gros, il a dit que c’était bon. »

Naturellement, la fuite de la jeune femme ne pourrait jamais se faire savoir aussi vite. Oh, pour informer la population, la radio finirait bien par cracher, comme Armand le lui avait décrit, ses petits sons cuivrés très jolis à l’oreille – bien dommage que tu ne puisses en profiter d’ailleurs, Emily ! lui avait-il dit de son grand sourire moqueur.

Ils étaient toutefois déjà dans l’ascenseur, le commis les laissait passer, les grilles se fermaient, et la cage montait. Rien n’allait plus pouvoir leur faire perdre de temps, désormais.

L’ascenseur monta le long de la cuve beige, rejoignant tous les autres du bâtiment dans un seul et même tuyau, unité parmi la centaine qui parcourait la ville. Ce fut une fois la cuve sortie du bâtiment que les murs devenaient de verre, de telle sorte que l’on pouvait admirer les deux sections de la cité.

Assise sur son siège avec la cinquantaine de passagers, Emily se pencha sur le petit support qui se tenait collé au verre, et toucha une clé rectangulaire. Se délitant en quatre morceaux distincts, ces derniers formèrent un écran carré sur lequel des inscriptions étaient visibles.

« Que cherches-tu ? demanda Armand, se baissant sur elle.

— Où on pourrait fuir, si le Cor du Sommeil ne veut pas de nous. »

Sur la carte qui s’était affichée, elle fit glisser son doigt jusqu’aux chemins de leur destination. Avec deux doigts, elle rétrécit la carte pour révéler l’entièreté de la cité de Moderato, et en continuant, la carte du royaume des Terres de Ré.

« Excuse-moi, Emi, mais si le Cor ne veut pas de nous, tu retournes au château sans avoir eu le temps de protester.

— Oh, cela va de soi. Je parle pour l’instant où je fuirai une fois encore.

— Ah, bah oui. Évidemment. »

Au milieu de l’ascension, la cage d’ascenseur pivota tout en douceur, une horrible sensation de chute libre s’immisçant en elle pendant que la gravité s’inversait. La cage finit de se retourner, et le décor identique parut presque dire qu’il ne s’était en fait rien produit, n’eut été la strie qui était passée du plafond au sol, et la petite nausée qui asticotait la jeune femme.

Au bout d’un moment à compulser la carte des lieux, elle arriva à destination.

Elle quitta le nuage de cuivre pour regagner la ville. Tous les habitants dressèrent soudain la tête vers les bâtiments publics les plus proches. Les bouches s’écarquillaient, les yeux s’agrandissaient. Armand blêmissait.

« La radio ? », supposa Emily lorsque le jeune homme se tourna en sa direction.

Il eut un petit signe de tête, un sourire piteux en coin, se faisant dès lors un peu plus petit.

« Rien d’alarmant, il nous suffit de presser le pas », assura-t-elle.

De fait, ils mirent le conseil en pratique, quittant la ville au plus vite. Le Jardin du Sommeil était, fort heureusement, plus proche à pied qu’en tramway ; cela leur épargnait des contrôles potentiels à éviter.

Ils gagnèrent peu à peu des portions de ville moins habitées, des routes qui se vidaient de leurs gens, de leurs boutiques, de leurs bâtiments, jusqu’à ce sentier montant de pierres grises menant vers un coin reculé de la cité.

Quand apparurent les premières fleurs, les premières herbes émeraude, Emily eut un sourire féroce.

Et cela faisait aussi bien longtemps que je ne m’étais pas rendu dans Ses jardins.

Aux herbes s’ajoutaient des buissons, d’azalées, de sauges, de roses, d’anémones. Des bougainvillées rampaient contre des roches anciennes, brunes, et des arbres, pommiers, cerisiers, ginkos, poiriers, chênes, saules, mirabelliers, frênes, brillaient de mille et une couleurs tandis que leurs feuilles s’agitaient en une douce danse.

Et puis des sons ; du moins, c’était ce qu’Emily en savait. À Moderato, la maison prolifique, rien de moins composée de cent millions d’habitants, étaient les Instrulia, dont le Cor du Sommeil raffolait les effets. De leur chant familial, ils façonnaient un oiseau, une bulle, une méduse volante ; tous faisaient une mélodie. Un doux piano, un élégant duo entre guitare et violon ou un concert instrumental, si plusieurs Instrulia se mettaient sur le coup. En sommes, ils baignaient leur capitale d’une atmosphère agréable, et bien que la musique était interdite dans les rues, ils s’arrangeaient toujours pour magnifier les restaurants, les promenades ou les parcs. Ainsi, Emily voyait tous ces petits oiseaux couleur de vermeil fendre les cieux aux côtés de véritables volatiles, sans savoir ce que les uns comme les autres jouaient de leur bec.

À la place, la jeune femme se contenta d’observer avec les yeux, faute de pouvoir le faire autrement, et l’habitude lui permit de s’en satisfaire. À mesure qu’elle avança, son regard qui partait en tous sens, tomba sur un rideau. Un rideau de cheveux, rêches, roses foncés, tombant sur le sol, traînant en flaque de tendresse sur un mètre autour de la jeune fille à qui ils appartenaient. Ces cheveux s’agitaient parfois, signes que la propriétaire bougeait ses membres, mais dissimulée comme elle l’était, elle ne ressemblait bien qu’à une méduse de petite taille.

Armand s’arrêta soudain, se tournant vers Emily.

« Le Cor du Sommeil est heureux de voir la princesse, en ce jour ensoleillé », signa-t-il.

Emily plissa les yeux, eut un signe de tête et marcha plus vite vers Aria, l’un des quatre Cors des Terres de Ré. Elle posa genou sur l’herbe, planta son épée dans la terre pour se libérer les mains et les agita :

« Cor du Sommeil. Moi, Emily Anna de la maison Ré, fille d’Adamantite Charles Ré, héritière légitime du trône, réclame votre soutien. » Elle termina son geste de façon sèche, ses yeux perçants adressés à ceux, dissimulés, de la jeune fille pendant qu’Armand rapporta ce qu’elle venait de dire de sa voix.

« Que me vaut cette demande ? lui répondit alors le jeune homme.

— J’ai annoncé, publiquement, que je serais héritière des Terres de Ré, et mon père a dépêché des troupes pour me récupérer. Il désire me voir revenir sur ma déclaration. »

Aria ne répondit pas tout de suite, à en juger par l’immobilité d’Armand. À la place, elle se pencha pour recouvrir de ses mains, ses cheveux suivant le moment, l’une de ses fleurs, s’occupant de la terre à côté de laquelle elle reposait en gestes délicats. Le jeune homme finit par se redresser pour signer.

« Votre père n’est pas l’homme que je verrai vous faire du mal.

— M’interdire le trône en est une façon, pourtant. »

Quand elle retira sa main, aux côtés de la fleur se trouvait un fin renflement après qu’elle eut planté une nouvelle graine de dahlia aux côtés de son grand frère déjà vigoureux. Elle demeura assise, le regard rivé sur l’herbe.

« Je vois, prononça-t-elle. Néanmoins, je ne vois pas de quelle façon je peux vous être utile.

— J’ai une réponse à cette question, soyez sans crainte. Tout ce que je vous demande, mon Cor, ce n’est en vérité que du temps, pour le moment. Si vous annoncez m’avoir sous votre protection, mon père le Roi ne pourra s’en prendre à moi, il sera forcé d’attendre que la décision des trois autres Cors outrepasse la vôtre. Mais à ce moment-là, j’aurais eu le temps d’agir. Avec votre aide ou non, cela dépendra de jusqu’à quel point vous désirez me suivre.

— Je comprends. Vous souhaitez du temps. Mais à la fin, où vous mènera ce temps… »

Quand le silence devint important, Emily passa d’Aria à Armand, attendant quelque chose. Elle vit alors le garçon en train d’écarquiller les yeux, incliner la tête sur le côté, porter une main à ses lèvres, avant d’adresser un regard hésitant à sa maîtresse.

« Quoi ? le pressa-t-elle.

— Ce n’est pas très pertinent…

— Ce sont les paroles d’un Cor, Armand. »

Après un moment de méditation, ses lèvres prirent la forme d’un soupir. Il lui traduit :

« Saviez-vous, princesse, que mes fleurs sont toutes plantées et entretenues à la main ? Alors que les Ré ont inventé d’innombrables machineries pour m’assister, je les ai toutes refusées. J’aime prendre soin des fleurs de moi-même, car autrement, je pourrais m’ennuyer. »

Emily signa une réponse de politesse qu’Armand rapporta avec un petit sourire, lequel signifiait qu’il avait bien deviné l’inquiétude d’Emily ; celle de penser que le Cor venait de changer de sujet, simplement car le précédent ne l’intéressait en rien. Le jeune homme adressa néanmoins un regard soutenu à l’amas de cheveux en plein jardinage, ayant soudain l’air de boire ses paroles avec un formidable sérieux. La princesse les attendit avec intérêt.

« De toutes les fleurs dont j’ai donné naissance, ce fut autant que j’ai vu mourir. Tout finit par mourir. Vous n’y êtes pas exclue, princesse. Pourquoi se battre, si à la fin, vous n’êtes point ?

— Mon Cor, une Reine ne saurait mourir. »

Quand Armand prononça ces mots, le Cor du Sommeil se figea. Posément, son visage voilé se tourna vers elle. Même de l’autre côté de ses cheveux, Emily sentait un regard faire d’elle sa proie. Aria porta une main lente à son visage, et d’un mouvement gracieux du doigt, sépara les mèches de ses cheveux pour ne révéler qu’un seul de ses yeux. Améthyste, effilé comme un couteau, il était si mauvais que cela en devenait malséant pour un visage si jeune. Après un sourire révélant une canine proéminente, elle retira ses doigts, rabattant ses cheveux sur son visage.

« Une Reine ne saurait mourir ? signa Armand avec une expression d’ironie, rapportant celle contenue dans la voix de leur interlocutrice.

— Tout à fait, répondit Emily tout en hochant vigoureusement de la tête. Au contraire, elle s’assure de hanter même ceux qui ne l’ont jamais connue. » Face au silence d’Aria, Emily vite juste de poursuivre. « Et vous, je vous hanterai toute votre immortalité, vous pouvez en être assurée. »

L’herbe s’agita, les cheveux ondulèrent. Quand les secondes se firent trop longues, Emily et Armand s’échangèrent un regard perplexe, peu certain que ce mutisme fût bon signe.

Ah… Ce qu’elle peut être déprimante, celle-là, songea la princesse en se levant. Elle avança vers le Cor, contourna la masse capillaire de cette jeune fille pour se tenir devant elle, et s’assit, cette fois, sur les genoux. Sans qu’elle n’eût rien à dire, approcher avait suffi pour délier la langue de son interlocutrice, car déjà, Armand se précipitait vers elle pour se mettre bien en vue.

« Vous souhaitez donner autant d’importance à votre nom que celui de feu Emery Do ? »

Cette question eut au moins le mérite de tirer un sourire à la princesse. « Oui, pourquoi pas ? Certes, l’on aurait du mal à croire que je serais en mesure de faire aussi stupéfiant que l’homme qui a façonné ce monde, mais maintenant que les Ré sont au pouvoir, nous devons bien mériter le droit de nous asseoir là où l’Aventurier s’est assis jadis. Mon nom sera aussi… non, bien plus parlant que le sien. »

Si proche d’elle, il arriva parfois à Emily de découvrir les yeux de la jeune fille quand un mouvement éloigna les mèches de son visage. Son regard était, de façon morbide, constamment rivé sur le sien. Se dire que, peut-être, Aria n’avait pas détaché ses prunelles de sa personne depuis son arrivée lui fit glisser un frisson le long du dos.

« Vous êtes une princesse orgueilleuse », dit-elle. L’expression confuse sur le visage d’Armand traduisait qu’il n’avait pas réussi à déceler si des accents d’ironie affleuraient au travers des propos du Cor ou non.

Emily eut un rictus infatué. « Je suis seulement Emily Ré. L’on essaie de me brider par la voix, mais de tous les souverains des Terres de Ré, et même de Do avant elles, aucun ne fut plus beau, plus travailleur et plus digne de son trône que moi. La seule excuse que l’on a pour me jalouser repose sur le fait que nos vénérables Chants m’ont fait naître sans voix pour vanter ma perfection au monde. »

Le menton levé et le regard brillant d’orgueil, la princesse considéra Aria qui passa sa main sur un lycoris. Les pétales commençaient à mourir, tandis qu’autour de lui, les autres de son espèce étaient grands, forts, jolis, rutilants. Délicatement, le Cor l’arracha, le faisant tourner entre son pouce et son index.

« Quand vous me le dites ainsi, je suis tentée de vous croire. Mais ce lycoris était beau, à l’origine. Aussi rouge que les autres, et maintenant… Oui, princesse, à la fin, lorsque vous ne serez plus, et que je vous retiendrais comme la Reine immortelle dont le nom traversa les âges, que me restera-t-il, sinon pleurer votre absence ?

— Je présume que vous parlez d’expérience. L’aventurier Emery Do était cher à votre cœur, à tous. »

Emily détourna le regard un instant, le perdant vers les fougères qui s’agitaient, les arbres qui remuaient parfois. Les végétaux la saluaient-ils de cette façon ? Lui parleraient-elles en prime, si elle avait eu la capacité de déceler les langages ?

« Si l’Aventurier a laissé en vous un sourire, c’est que son nom mérite de vous être immortel, reprit-elle. Si chaque fois que vous pensez à lui, vous êtes prise de joie, de fierté ou d’amusement, alors, non content d’avoir réussi sa vie, il aura sublimé sa mort. »

Emily se leva délicatement. Aria était assez maligne pour comprendre en quoi elle ne ferait pas moins bien que celui qui avait posé des foyers, des familles et des rois sur ce monde autrefois désert – tout ça, en faisant de sa mort une fierté pour ceux qui pouvaient encore prononcer son nom ! –, aussi n’avait-elle pas besoin de le préciser, songea-t-elle.

« J’aimerais juste savoir une chose. Pour quelle raison votre frère n’en serait-il pas capable, lui ? demanda Aria.

— Car c’est moi qui vais changer le monde ! Pour rembourser la dette que je vous dois. Votre aide, en échange de quoi je deviens la plus grande Reine de ces terres. N’est-ce pas ce que nous avons convenu ? »

Quand ces mots lui parvinrent, elle vit les épaules de la jeune fille se secouer, passant même une main entre sa chevelure pour s’essuyer les yeux. De par ce geste, elle permit à Emily de deviner un sourire et des lèvres mouvantes. Attendant ses mots avec impatience, la princesse attendit en souriant, mais son interprète répondit absent.

Quand elle vit de côté Armand avoir un mouvement de recul, Emily découvrit la scène avec un temps de retard. Des hommes armés étaient entrés dans les jardins, approchant de l’esclave Opéra et de sa princesse Ré d’une marche lente. Pour guider ces nouveaux venus, le chef des armées royales et son visage sévère et austère : Harold de la maison Mi. Main derrière le dos, son regard rubis adressé aux fuyards, il ne prit même pas la peine de les mettre à l’aise par un sourire pendant qu’il levait les mains.

« Princesse, il est l’heure de rentrer », signa-t-il.

Emily serra la mâchoire. Son épée était plus proche des soldats que d’Armand. Quelle cruche de l’avoir laissée là ! Elle serra les poings, se demandant s’ils suffiraient à les vaincre. Après tout, les Mesurr de la branche des guitares, si confiants de leurs prouesses guerrières, ne se revêtaient jamais d’armure. Des phalanges dans le nez demeurait une méthode qui avait plus que fait ses preuves pour étourdir un homme.

Quand Harold fit un pas, Emily et Armand reculèrent d’un autre.

« Éloignez-vous ! », fit-elle de ses mains.

Il ne répondit pas, mais comme il continua d’avancer, elle supposa que ses propos n’avaient pas été assez émouvants pour le faire changer d’avis.

Elle jeta un regard au garçon qui l’accompagnait. S’il s’en prenait à un membre du conseil du Roi, Armand serait inévitablement exécuté pour trahison, ou quelque chose qui s’approchait d’une fin loin d’être heureuse pour eux.

Alors, Aria, Cor du Sommeil, se leva. Son rideau capillaire brillant sous les coups du soleil gagna en hauteur, comme une méduse prenant son envol au sein de son océan fleuri. La petite forme de l’adolescente se tint debout, et en gestes toujours aussi lents, tel un engrenage qu’il ne fallait surtout pas brusquer, elle se tourna vers le chef des armés et de ses troupes. Un pas après l’autre, elle avança. Lorsque seulement elle dépassa Armand, elle s’arrêta.

Il y eut un silence. Harold se rembrunit soudain. Les soldats rangèrent tout à coup leur arme. Le visage d’Armand s’illumina.

Alors, la princesse Emily porta une main à sa poitrine, expirant un peu plus d’air que de coutume, soulagée.

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SinnaraAstaroth
Posté le 16/05/2024
Bonjour,

Je découvre ton histoire avec plaisir et ravissement, et surtout, je pense avoir détecté l’influence de Hollow Knight sur ton univers, ce que m’a confirmé ta photo de profil, et sache que je suis une fan incontestée de ce jeu et de cet univers qui m’a fait vivre énormément d’émotions (et de rage), et c’est quelque chose que je retrouve un peu à travers ton écriture.

Sur la forme, tu as un très beau style, très poétique, par moment on visualise très bien les scènes, mais par d’autre, je trouve certaines phrases un peu trop lourdes, on perd en action et en clarté, ça casse le rythme, et la scène est plus confuse (celle de l’araignée notamment j’ai dû lire plusieurs fois pour comprendre ce qu’il se passait parce que c’était trop imagé).

Il y a quelques petites erreurs assez marginales comme « archéen » au lieu de « arachnéen », dans une phrase aussi tu as mis « de plus » au début et « au demeurant » à la fin, ce qui est redondant. Je n’ai pas tout relevé, mais c’est les deux occurrences qui m’ont marquée.

Les éléments descriptifs sont disséminés au fil de la narration et mêlés à l’action ce qui est bien, ça rend la progression plus naturelle et on découvre peu à peu des choses sur les personnages et leur environnement.

Sur le fond, outre l’influence de Hollow Knight, je trouve vraiment l’univers très original avec ces références aux instruments de musique. On comprend tout de suite le problème de l’héroïne et pourquoi elle n’a pas sa place dans ce monde. Par contre, il y a une chose qui m’a interpellée, c’est le fait que dans ton résumé tu dis qu’elle est sourde (elle est née sans ouïe), mais tu parles de sa voix au début du chapitre et du fait qu’elle ne peut pas chanter. Or, les deux ne sont pas forcément liés. On peut être sourd, muet ou sourd-muet. Donc au début je pensais qu’elle était juste muette, puis après on comprend qu’elle est aussi sourde, mais ce n’est pas très clair, mais il faut juste savoir que la surdité n’induit pas forcément le mutisme, et que donc une personne sourde pourrait être capable de chanter.

Comme je connais l’univers de Hollow Knight et l’esthétisme particulier du jeu, je me figure bien les lieux (l’ascenseur, la radio, le palais, même les personnages qui ne sont pas humains et qui ont un design très particulier, je les visualise vraiment comme les personnages du jeu, donc plus comme des sortes d’insectes humanoïdes, mais avec la dimension instrumentale en plus), mais par contre c’est vrai que pour des lecteurs qui ne sont pas du tout familier avec cet univers et ce style, ça peut sembler très confus de se figurer les lieux et les personnages, leur apparence, etc.

Pour conclure, je dirais qu’il y a beaucoup de bonnes idées, un bon niveau d’écriture, mais attention à ne pas en faire trop, à ne pas basculer dans un style trop ampoulé, à faire du style pour faire du style, car ajoute de la lourdeur qui nuit à la compréhension de l’histoire. On se retrouve mis à distance des personnages et de l’histoire, on a plus de mal à se sentir impliqués parce qu’on est trop occupé à essayer de comprendre le sens des phrases pour vivre les mots.
Capella
Posté le 17/05/2024
Très marrant le parallèle sur Hollow knight car j'avoue que c'est très intéressant de voir comme un fan lit ça ! En l'occurrence, y a que le côté "je veux un lore super cool comme Hollow knight !" que j'ai mis dans mon histoire, mais au bout du compte, c'est vrai que par voie de conséquence, c'est toute l'histoire qui le devient... Très intéressant vraiment !

Pour les descriptions lourdes en effet je vais mettre la dernière version de ce chapitre que j'ai dû arranger pour l'édition, qui, je trouve, coule de façon un peu plus fluide et logique (en plus d'avoir supprimé les fautes que tu mentionnes tiens).

Merci pour ton retour, il est bon à prendre en note, et oui, mon style est parfois chiant pour ça mais en même temps j'aime bien utiliser des mots relous par-ci par-là... Je vais faire au mieux pour rendre ça correct
Anya_Lumpa
Posté le 02/05/2024
Je débarque dans ton univers et il me paraissait juste de te laisser un petit commentaire.

Je suis fan de ton univers et admirative devant l'imagination dans laquelle tu puises pour construire tout ça. Vraiment, j'adore et j'ai hâte de découvrir cette richesse et cette profondeur dont la suite de la lecture ne manquera pas, j'en suis certaine. Tes personnages sont prometteurs et j'ai hâte de voir leur développement, en particulier Aria, très intriguante !

En revanche, si je peux me permettre, prends garde aux temps de conjugaison et aux phrases trop longues. Tu mélanges parfois plusieurs temps du passé en une phrase et cela peut être perturbant à la lecture.
Aussi, Aria est-elle une jeune fille ou un jeune homme, ou les deux à la fois ? Dans tous les cas, une explication plus claire serait peut-être bienvenue...

Par rapport à l'apparition de l'araignée géante, je dirais que le paragraphe est peut-être un peu trop précipité. On passe en quelques mots d'un combat âpre à l'intervention d'une bestiole et à la résolution du "problème", c'est trop rapide et honnêtement pas assez clair. J'ai dû relire plusieurs fois pour comprendre. Par contre, c'est une sacrée entrée en matière pour Armand, trop cool !

Je ne sais pas si mon commentaire pourra t'aider, il ne s'agit que de mon avis subjectif :)
En tout cas, bravo!
Capella
Posté le 02/05/2024
Nom d'un silence ce commentaire me gonfle la poitrine d'orgueil. Pas plus tard qu'hier soir, j'étais à me dire qu'il fallait absolument que s'agissant de la saga qui se déroulera dans cet univers, j'y aille à fond, je mette les curseurs au maximum pour que je sois sûr que les gens aiment mon univers... Au chapitre 1 du one shot, tu me dis que c'est déjà le cas, sérieusement, je suis très fier de l'apprendre (ça m'empêchera pas de pousser l'extravagance pour le reste, m'enfin bon, haha).
Merci pour tes critiques, je les notes. Je ne répondrais pas à toutes, car la plupart c'est juste "bah oui, t'as raison, je vais faire gaffe/rajouter un détail !", et je me permet de dire que mon dieu, l'apparition de cette araignée fait couler de l'encre. J'ai du mal à la rendre clair. J'ai besoin que ça soit soudain : "araignée ? Armand ? on enchaîne ? Eh ben ok on enchaîne alors !", mais sans que ce soit frustrant... Enfin, je finirai bien par y arriver c'est sûr !

Encore merci pour le commentaire !!
Daichi
Posté le 26/04/2024
Dans l'ensemble, un excellent chapitre. Heureux de voir un style très cinéma débarquer dans tes écrits, et c'est plutôt bien fait pour une première fois ! Mais tout est vraiment sympa à lire, et sans hésitation je lis un chapitre 2 avec un début comme ça.

Le passage au début, où tu décris la guerre comme n’étant que des visages se tordant de douleur, c'était incroyable. Même si sans lire le résumé c'est assez difficile de comprendre du premier coup qu'elle est sourde, d'après moi.
Par contre ouais, tu parles de guerre, du coup au début j’pensais que c’était une bataille, une invasion, que sais-je. J’ai mis du temps à comprendre que c’étaient des gardes du palais. La créature qui débarque de nulle-part ne m'a pas aidé non plus ! J’étais perdu, moi qui connaît pourtant ton univers, alors imagine un nouveau lecteur.


Un autre gros défaut serait la description des tuyaux et du nuage (+son trajet), et le manque de « prudence » des deux protagonistes à certains égards.

J'ai peiné à comprendre le principe du nuage et des "cuves" (j'ai compris très tard qu'il s'agissait de tuyaux), et la description était assez maladroite. Le fait de préciser que la ville est visible depuis la cuve, oui, c'est logique, c'est du verre...

Pour les personnages : Emily est incroyable !!! Vaniteuse, insupportable, presque méchante. Mais on sent qu’on va vite s’attacher à elle, et je valide ce genre de caractérisation.
Il manque encore une vraie relation avec Armand, autre que « je suis son esclave ». Mais j’ose espérer que ça arrivera plus tard. J’parle pas d’amour, mais de juste comprendre leur relation (après, ça peut aussi être de l’amour – héritière x esclave, c’est sympa).

J’adore Aria, très glauque tout en étant sublime. La mise en scène du dialogue est cinéma et évidemment je valide. Il y a une comparaison aux fleurs et j’aime bien (aka mon Victor et ses comparaisons à la musique). Non, vraiment, GG, continue sur cette voie !

Ah dernier détail : jusqu’ici le fait qu’elle soit sourde ne dérange en rien le lecteur ! Je n'ai pas été perdu un seul instant. Bon signe donc !
Capella
Posté le 26/04/2024
Bon signe c'est le cas de le dire ! Normalement j'ai modifié avec ce que t'as dit même si bon l'araignée reste pas assez clair donc je dois changer ça
Daichi
Posté le 26/04/2024
Ah c'est une araignée ? Ouais faut CARREMENT amélioré car même à ma deuxième lecture je n'avais toujours pas capté xD
Cléooo
Posté le 26/04/2024
Bonjour Capella! J'espère que tu vas bien, je suis venue découvrir une de tes histoires aujourd'hui :)

Alors je te fais mes remontées en deux temps, sur la forme, et sur le fond.

Sur le fond :

Déjà, je te félicite pour le côté original de l'histoire, en traitant d'une princesse muette. Au-delà de l'histoire même, je trouve ça plutôt technique de réussir à projeter ton personnage dans un monde silencieux et je n'ai pas trouvé d'incohérence à ce sujet, donc très bien. D'autant que tout est accès sur les sons, avec ce champ lexical qui se raccroche pour beaucoup à la musique.

Maintenant, concernant l'histoire elle-même : ça démarre vite. On a un aperçu de la ville, du personnage principal et de son ressenti sur quelques unes de ses relations principales, et ça passe très bien. La relation avec Armand est très intéressante, il est sa voix et ses oreilles, et je trouve leur complémentarité plutôt bien décrite. Par contre, pour un premier chapitre (même si j'ai lu ta note et que je comprends que tu reprends un univers déjà créé) en démarrant ici je trouve qu'il y a beaucoup de noms différents vite donnés et une manière de les nommer parfois déroutante (ex : l'Opéra pour Armand, il a fallu que je revienne en arrière pour comprendre que c'était de lui qu'on parlait... Au final tu ne dis qu'une fois "Armand Opéra" avant de l'appeler "l'Opéra" et ce n'était pas encore bien ancré).

Concernant l'univers : je trouve peut-être un déséquilibre dans les descriptions. J'aurais aimé mieux voir la ville, certaines choses m'ont parues un peu floues comme le passage de l'ascenseur-nuage. Au contraire, j'ai trouvé la description des fleurs chez Aria assez longue.

Aussi, petite remarque ciblée :
"...lorsqu’elle en récolta suffisamment, une créature horrifiante, planta l’une de ses longues pattes articulées dans la chair et venait croquer à pleines dents dans la nuque de sa victime, sortant une jolie part de peau de sa bouchée. Elle repartait alors au bout du couloir et s’échappait en brisant la vitre." -> un peu étrange, cette arrivée d'une bête inconnue qui arrive et part sans qu'on en comprenne bien la raison (et la créature est assez peu décrite finalement, parce qu'à ça je n'imaginais pas du tout une araignée... Peut-être peux-tu ajouter un détail tel que "l'une de ses huit longues pattes"... qui serait plus évocateur de ta créature).


Sur la forme & quelques coquilles :

"filant entourée du noir" -> l'expression me semble curieuse. Entourée de noir peut-être ? Filant dans l'obscurité ?

"De ce qu’elle en savait, les combats étaient violents." -> donne l'impression qu'elle ne s'est jamais battu, alors que de fait, tu décris les éléments d'une bataille juste après, et ça ne semble pas être sa première.

"sinon qu’elle perdait peu à peu du terrain. Cela étant, du temps, elle en gagnait" -> ça fait un peu "oui mais non", non ? ^^

"Il retira son manteau pendant qu’Emily se lécha le pouce" -> "se léchait" pour la concordance de temps

"Sous le soleil du midi" -> de midi (sinon ça s'apparente à la région "le Midi")

"Leur fuite ne pourrait jamais se faire savoir aussi vite" -> le phrasé est un peu maladroit ici je pense. Aussi vite que quoi ? Puis un peu plus loin dans le paragraphe, le "et à cela, on lui répondait bien qu’on l’emmerdait, ce Armand." je n'ai pas bien compris non plus. Ce sont les pensées d'Emily ? Le paragraphe peut être repris je pense.

"son geste de façon sec" -> sèche

"mon père a envoyé des troupes me dépêcher pour me faire revenir sur ma déclaration" -> mon père a dépêché des troupes pour me faire revenir sur ma déclaration ? (la phrase est un peu lourde)

"la plus grande reine des ces terres" -> de ces terres

Voilà donc pour l'ensemble un premier chapitre intéressant ! Peut-être peux-tu ajouter, ne serait-ce qu'un paragraphe pour présenter les lignes générales de l'histoire (le fonctionnement de base de ce pays / royaume / empire, les familles, les Cor) pour éviter de dérouter trop le lecteur, ou au contraire distiller les éléments et les présenter un à un. Ce n'est pas non plus incompréhensible, hein, mais plutôt un surplus d'informations très rapprochés en même temps qu'une scène d'entrée plutôt forte. Le fait d'avoir lu le résumé avant de lire le chapitre m'a aidé à mieux comprendre, ceci dit, je ne crois pas qu'un résumé devrait remplacer une meilleure présentation des faits dans le roman lui-même.

J'espère que mon retour t'aura été utile !
À bientôt :)
Capella
Posté le 26/04/2024
Déjà, merci pour le compliment sur le concept original de la muette ! Je suis plutôt content de l'avoir trouvé, et savoir qu'il plaît est agréable à lire !
Concernant l'univers, disons que ouais, je vais sûrement remanier les descriptions, ajouter celles qui sont nécessaires et supprimer ce que je peux mettre plus tard. Mais dans les fait, je pense que ce sera juste du remaniage parce que le chapitre 2 et 3 étant très calme, ce sera peut-être le moment parfait pour faire beaucoup d'exposition sans que ça soit relou (bon, dans le chapitre 2 et 3 actuels, tu n'en verras pas tant que ça, donc oui, faudra que je repasse dessus).

Concernant tes détails spécifiques, rien à redire, je vais modifier tout ça pour que ce soit plus agréable en effet ! Mais oui, les éléments seront je l'espère moins confus ensuite !
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