Les harangues de la foule résonnaient à travers les planches de l’estrade, encore humides des giboulées de la nuit.
Montée dans l’urgence devant la maison du bourgmestre il y a deux lunes pour accueillir une potence de fortune, la structure s’était intégrée dans le paysage.
La Grand-Place y avait trouvé une nouvelle routine. Les mardis et jeudis, le marché s’installait avec ses odeurs d’épices et ses cages à poules. Les dimanches, le son des cloches de la Chapelle Saint-Clément y faisaient écho à celles du Palais. Les samedis, aux premières lueurs du soleil, on y pendait les oppresseurs. Des princes. Des femmes. Des nobles. Des officiers. Des enfants.
Tout ce qui, d’une façon ou d’une autre, pouvait maintenir la pression sur le Roi et son Dauphin en fuite, leur rappeler que le temps de l’oppression était révolu.
Les planches de l’estrade, récupérées dans les étables et ateliers alentours, avaient été renforcées de bois neuf, le madrier originel avait été remplacé et, à côté, trois autres avaient été érigés.
A l’arrière, une large planche avait été installée, pour que, des salons du Bourgmestre - devenu centre de commandement de la fronde - on n’ait pas vue directe sur les corps. Et depuis, sur cette planche, on archivait à coups de clous les pieds droits des pendus de sang royal et leur stigmate pourpre, une petite étiquette avec leur nom nouée à la cheville.
Ce samedi, deux pieds allaient rejoindre cette implacable collection. Les badauds se massaient depuis des heures sur la Grand-Place pour les voir monter sur l’estrade, traverser les planches jusqu’à leur petit escabeau. Chuter et convulser, sous les hourras.
Deux femmes furent tirées d’une voiture fermée, et montèrent, hagardes, sur l’estrade. La foule hurla. La plus jeune parvint à éviter une pierre. L’autre éclata en sanglots.
“On veut le Roi ! ” hurla quelqu’un d’autre, repris par la foule.
Le bourreau les plaça sous les cordes, vérifia la présence des macules, déclenchant une nouvelle vague de fureur et de détermination chez les spectateurs. Puis il glissa leurs têtes dans les boucles, contourna les escabeaux, et les poussa.
Un grand merci pour ce retour qui touche beaucoup (et motive!) Bonne lecture !
On sent l'époque dans le vocabulaire et descriptions!
J'ai toujours éprouvé un malaise quand ça concerne les pendaisons, mais en même temps ça m'attire .
J'espère pouvoir lire la suite à temps!
Bonne continuation !
Bienvenue et merci pour ton retour, contente que ça te plaise.
Je publie aussi sur un autre site, si je n'ai pas fini "à temps" (snif, j'aime PA), je mettrai un lien :)
C'est pas une fiction historique, donc ce n'est pas "la révolution" :) Mais forcément, il y a de l'inspiration...
En termes chronologiques on est plutôt sur du Moyen-âge, pas exemple je pars du principe que dans cet univers les armes à feu n'existent pas encore.
Merci pour ton commentaire et bonne lecture !