On ne va jamais arriver à l’heure. C’est ce que je n’arrête pas de penser depuis que je suis montée dans la voiture de Camille. Si j’arrive en retard, je ne sais pas ce qu’il va advenir de moi, le volley-ball c’est sacré dans mon entourage. Je tape du pied contre la moquette en écrasant les paquets de gâteaux vides. Si je lui dis encore une fois d’accélérer, je pense qu’elle va me jeter sur la route.
- Calme-toi, tu martyrises le sol de ma voiture, dit-elle en posant sa main sur mon genou pour stopper ses mouvements.
- Ta voi-quoi ? je raille en lui tapant la main.
- Voiture, le truc où tu es assise qui a un moteur et quatre roues. Tu ne connais pas ce terme ?
- Si, mais j’aurais plutôt utiliser le terme débarras, épave, poubelle, pour décrire cet habitacle.
- On ne critique pas Philibert ! C’est mon plus fervent serviteur !
- Je ne le critique pas, je partage mon avis sur la propreté plus qu’absente chez Philibert et ça c’est de ta faute. Regarde aucune remarque sur le bruit du moteur qui fait flipper dès que tu t’arrêtes à un feu ou même le voyant qui clignote sur le tableau de bord et si je sais un truc sur les voitures c’est que quand ça clignote ce n’est pas bon signe.
- Je mange quand je stresse et souvent c’est en voiture ! Et là tu me stresses et je n’ai rien à me mettre sous la dent.
Je la connais par cœur, c’est pour cela que j’ai toujours une sucette goût Coca-Cola dans mon sac, juste au cas où. Je la sors, enlève l’emballage et lui tends. Sans aucune hésitation, elle la prend et pousse un soupir de soulagement lorsque le goût touche ses papilles.
- Je me sens revivre !
Un sourire se dessine sur ses lèvres.
- Qu’est-ce que tu ferais sans moi ?
- Je ne stresserai pas pour arriver à un match de volley !
- Ball. On dit volley-ball, si tu le disais devant mon père ou Weno tu ne serais plus de ce monde. J’ai assez de self-contrôle pour ne pas t’étrangler…
- C’est surtout que tu t’en fiches, tu aimes par procuration. Mais c’est vrai que le coach et le capitaine de l’équipe ne devraient pas apprécier ces termes. Comment va ton chéri depuis la dernière fois ?
- Je n’appelle pas mon père mon chéri, ce serait chelou lui dis-je en l’écoutant à moitié et en fixant mon téléphone.
Je n’ai pas eu de réponse, depuis que je suis montée dans la voiture, de Léonard et ça ne fait qu’amplifier mon irritation. J’active et désactive la 4G de mon portable, espérant voir s’afficher un message me disant qu’il accepte mes excuses et que l’on peut rester ami. Camille ne fait pas attention à moi, elle est concentrée sur la route et surtout à comment éviter tous les étudiants qui surviennent de tous les côtés. C’est vraiment un mauvais plan de venir ici en retard, on a une chance sur deux de renverser des gens. Lorsqu’elle tire sur le frein à main dans un bruit strident, je sens mon téléphone vibrer, je regarde les premiers mots et je le balance sur le sol comme s’il me brûlait.
- Qu’est-ce qui se passe encore ? On va être à l’heure, me dit-elle en tapotant le tableau de bord. 21h12… On est large, tu as même le temps d’aller voir Mimi.
- Merde, merde, merde… Je n’ai que ce mot à la bouche, comme si tout mon vocabulaire c’était envolé.
- Quoi ?
Je me baisse et ramasse mon téléphone pour lui montrer la preuve du crime. Je le lui tends, la laissant réagir.
- Oh, je comprends mieux. Tu ne veux pas…
- Nope !
- Mais, tu n’arrêtes pas de dire que tu veux être…
- Nope !
- Tu n’aimerais pas tenter juste pour voir ?
- Je ne veux pas sortir avec Léonard ! Je savais que je n’aurais pas dû lui parler…
Je me gratte la tête, signe de mon stress et de mon agacement.
- Il était tout seul, personne ne lui parlait dans la classe, ça me faisait mal au cœur… Je ne voulais pas qu’il s’imagine des trucs. Raaaaaah, je suis censée faire quoi maintenant ?
- Arrêtez de vouloir résoudre les problèmes du monde entier et te mettre par la même occasion dans la merde ?
Elle sort sa sucette à moitié mangée et me désigne avec d’un air entendu. Je répondrais plus tard à son message. Je sors de la voiture et claque la porte. Le brouhaha des étudiants me pousse à plisser les yeux, je n’aime pas réellement la foule et surtout le bruit qui va avec. Camille toque à la fenêtre passager pour attirer mon attention puis la baisse.
- N’oublie pas ça et ne fais pas l’autruche ! Heureusement que tu es là ! Tu me rejoins à l’intérieur ?
Je prends mon téléphone qu’elle me tend et le range dans ma poche arrière droite.
- Plus tard, je suis trop en avance, ça ne va pas avec mon image.
Je ne peux m’empêcher de sourire et de lever les yeux au ciel, et je marche en me fredonnant un rythme dans ma tête jusqu’à l’entrée du gymnase. Ce soir joue Les Wolves aka les meilleurs joueurs de volley-ball de toute la France. Je ne dis pas ça parce que le coach est mon père et que mon meilleur ami est le capitaine. Ils sont vraiment doués, c’est pour cela que j’assiste à tous leurs matchs. J’adore les voir s’activer, réfléchir à une stratégie et donner tout ce qu’ils ont pour marquer chaque point. Si je le voulais j’aurais pu rejoindre l’équipe féminine de notre université, mais ce n’est pas pour moi, je ne suis pas assez douée, je préfère rester à l’observation. Je pousse la grande porte et évite les groupies qui ont mis les répliques des maillots des garçons de l’équipe. Je ne comprends pas comment on peut encore faire ça de nos jours. Quand tu es la copine d’un des joueurs très bien, mais sinon non c’est étrange. Ça ne me viendrait jamais à l’esprit de mettre le maillot d’une personne dont je ne suis pas amoureuse.
Je connais ce gymnase comme ma poche, je pourrais me repérer les yeux fermés même si je ne vais pas tenter l’expérience tout de suite, il y a trop de monde dans lequel je pourrais foncer. J’ai passé toute mon enfance / adolescence dans ces locaux, dès que je terminais les cours mon père venait me chercher et m’amenait sur son lieu de travail. Je restais alors à côté de lui que ce soit dans son bureau où il analysait les anciens matchs, ses joueurs et surtout les adversaires. Je connais tout sur le volley-ball de A à Z, je pourrais facilement remplacer mon père sur le terrain. Mais ce serait beaucoup trop difficile pour les garçons : mon père est leur héros et l’essence qui leur permet de démarrer.
Je me dirige vers la petite porte en bois située à gauche, sans prendre la peine de toquer, je rentre. Personne, je fais le tour du bureau en bois, débordant de papier en tout genre et me laisse tomber sur la chaise. Sans aucune retenue, je prends une pile puis commence à feuilleter les documents tout en posant mes pieds sur les papiers restants sur la surface. Je fredonne un air qui me prend la tête depuis ce matin, je savais que je n’aurais pas dû regarder des TikTok alors que je venais de me réveiller. Je décide de le faire sortir une bonne fois pour toutes en me mettant à chanter le passage aussi fort que je peux tout en lisant les analyses de mon père sur les derniers matchs : “Chrissy wake up ! I don’t like this ! Chrissy wakkeeeee uuuuuuuup ! Hey, helloooooo ! Time to wake up, time to wake up …”
- Je vois que tu n’es pas gênée ! Je bondis et manque de faire tomber ma chaise en arrière.
- Mon cœur, j’ai failli avoir un arrêt cardiaque ‘pa !
- C’est vrai que je devrais toquer pour rentrer dans mon propre bureau, princesse. Tu viens encourager ton vieux père pour son nouveau match ? dit-il pendant que je me lève pour lui laisser la place.
Sans un mot, il s’installe et prend les papiers que j’inspectais juste avant.
- Les Deltas sont bons… Tu penses qu’on peut les battre ?
- Mes gars sont les meilleurs bien entendu surtout avec tous les entrainements que nous avons réalisés, la préparation mentale, il n’y a pas de raison.
Je le regarde et je souris lorsque je vois qu’il porte son t-shirt de volley-ball fétiche. Il est bleu complètement délavé et avec des trous rapiécés d’un peu partout, au centre un ballon de volley-ball trône fièrement avec un loup au-dessus. Il ne le porte que lorsqu’il y a un match important et qu’il pense qu’il aura besoin d’un peu de chance.
- Et si tu mettais ta casquette de coach sur le côté et que tu me disais honnêtement ton ressenti ?
Il tourne sa casquette pour que la visière se retrouve à 90°.
- Tout va bien se passer, on fera tout ce qui est notre possible pour remporter le match et continuer à être sur le terrain.
Je me glisse derrière lui et pose mon menton sur sa tête et regarde les formes qu’il dessine sur son tableau effaçable. On reste comme ça pendant plusieurs minutes.
- Ma chérie ton menton me fait mal, tu veux bien aller voir si les gars sont prêts ? Ils prennent plus de temps que l’équipe féminine pour se préparer, je ne sais pas ce qu’ils peuvent faire pour prendre autant de temps.
J’acquiesce en lui prenant sa casquette que j’enfonce sur ma tête, tout en passant ma queue de cheval dans le trou. Je sors du bureau tout en jetant un coup d’œil sur son mur souvenir, il regroupe des photos de toutes les équipes qu’il a entraînées durant ces 20 ans à l’université de Malzieu-Ville. Que ce soit avec ou sans trophée, à chaque fin d’année, un photographe vient immortaliser la nouvelle famille qu’il a réussi à créer.
Le couloir est toujours aussi bruyant, je décide de passer par un couloir interdit au public. Je ne tiens pas à rencontrer des filles qui me demanderont de les brancher avec des gars de l’équipe. Mon lieu de parenté avec le coach et mon amitié avec Weno me propulsent directement au rang de fille à qui il faut parler. Sans ça, je passerais la plupart du temps en paix et sans devoir parler à des filles qui tentent de devenir mes amies pour que je leur serve d’entremetteuse. Demande-moi directement le service sans passer par quatre chemins, ça nous fera gagner du temps et surtout je n’aurais pas l’impression d’avoir été utilisé pendant des semaines.
J’atteins la porte des vestiaires et cogne avant de hurler à moitié :
- Les gars vous avez 30 secondes pour vous habiller avant que je rentre !
Le brouhaha qui arrive à mes oreilles me montre qu’ils se pressent de terminer de mettre leur maillot. Je pourrais faire une entrée fracassante, mais je préfère préserver ma rétine et évite de voir toute une équipe à moitié nu.
- J’arrive !
Je pousse la porte en donnant un coup de pied et comme toujours, je me dirige à la place disponible à côté d’Owen et d’Elyas. Je me laisse tomber sur le banc et m’autorise à jeter des regards autour de moi. Même s’ils ont l’habitude de ma présence dans les vestiaires, il y a toujours quelques secondes de silence où ils doivent s’habituer à ma présence.
Je me laisse glisser et cale ma tête sur l’épaule d’Owen. Je ferme les yeux et me repose quelques secondes en inspirant son parfum. On pourrait croire que c’est une très mauvaise idée de faire ça dans un vestiaire, mais que nenni, c’est après le sport qu’il faut sortir le masque à gaz. A cet instant, ça ne sent que le déodorant, le stress et surtout la joie de bientôt pratiquer un sport merveilleux. Les conversations reprennent et mon entrée est rapidement oubliée. Elyas est sur son téléphone et si j’en crois les sons qui passent, il scrolle sur TikTok. Owen a quant à lui cessé tout mouvement.
- Man tu dors ? me dit-il ce qui a pour effet de me faire bouger.
- Mmmmmh.
- Tu n’es pas venue que pour dormir sur mon épaule, rassure-moi…
- Je me repose avant de devoir vous sortir de ce vestiaire par la peau des fesses parce que vous prenez trop de temps pour vous préparer. C’est toi le capitaine, tu ne devrais pas leur montrer l’exemple et les motiver à sortir ?
- Cette pause nous sert, sans le top départ du coach on va stresser dehors autant être assis tout ensemble, ça renforce la cohésion d’équipe !
- Mais bien sûr, c’est pour ça que tu es toujours torse nu ? Tu penses que ça va motiver les gars de voir à quel point on peut avoir des abdos avec ce sport ?
- Non ça ce n’est que dans l’espoir que tu arrives et que tu vois à quel point je suis musclé.
Je me redresse d’un seul coup, je sais qu’il s’agit d’une plaisanterie, il ne fait que s’amuser sur l’ambiguïté de notre amitié pour faire parler les autres. Mais je n’apprécie pas pour autant les rappels constants de notre proximité et de notre amitié fusionnelle. Je sens que mes joues s’empourprent et je me redresse aussitôt en tentant de dissimuler ma gêne avec ma casquette. Je me racle la gorge et me rappelle du rôle que l’on m’a donné.
- Parle à tes troupes, le match va bientôt commencer et papa vous veut sur le terrain.
- Il fallait le dire plus tôt.
Il se lève aussitôt et passe son t-shirt de volley-ball, le numéro 1 glisse le long de son dos et je le sens se redresser fièrement. J’adore voir son changement d’aura lorsqu’il se prépare à parler à son équipe, je ne peux que le regarder qu’avec admiration. Je détourne le regard le plus rapidement possible, mais lorsque je croise le regard de notre libéro je sais qu’il n’a pas perdu une miette de mon œillade appuyée. La voix d’Owen résonne alors, laissant place rapidement à un silence. Tout le monde sait qu’il ne vaut mieux pas l’interrompre quand il parle et surtout ne jamais lui manquer de respect, il peut-être terrifiant quand il le veut ou même sans véritablement le faire exprès. C’est dans sa nature, il ne deviendra jamais violent ni même impoli, mais il peut devenir véritablement effrayant lorsque sa patience est mise à l’épreuve.
- Les gars, c’est le moment… Enfilez vos maillots, vérifiez vos lacets… Aujourd’hui, nous jouons contre les Deltas et il n’y a pas de raison pour qu’on ne n’en fasse pas une bouchée, notre but : ne jamais lâcher. On se bat jusqu’à ce que le ballon touche le sol.
Des applaudissements retentissent ainsi que des hurlements tels que des loups. Je souris en les voyant faire et croise le regard d’Owen qui ne cache pas son excitation. Il part par la suite dans sa routine et va parler aux membres de son équipe qui ont besoin de ses encouragements, cela est très variable en fonction des joueurs. C’est une petite attention en tendant un médicament pour lutter contre les maux de ventre, une blague pour détendre l’atmosphère ou répéter la stratégie mise en place.
comme si tout mon vocabulaire c’était envolé => s'était
Arrêtez de vouloir résoudre les problèmes => Arrêter
avec d'un air entendu => avec un air
Je répondrais plus tard à son message => répondrai
Ce soir joue les Wolves => jouent
Si je le voulais j'aurais pu => choisir entre "Si je le voulais je pourrais" ou "Si je l'avais voulu j'aurais pu"
L'anglais devrait être en italique
Je bondis et manque etc. => à la ligne, on est dans la tirade
Mon lieu de parenté => lien
et surtout je n'aurais pas l'impression d'avoir été utilisé => n'aurai, utilisée
et évite de voir => éviter
autant être assis tout ensemble => tous ensemble
que tu vois à quel point => voies
me rappelle du rôle => me rappelle le rôle (le verbe "se rappeler" est différent de "se souvenir")
je ne peux que le regarder qu'avec admiration => double "que", en supprimer un
des hurlements tels que des loups => tels des loups
Voilà, en espérant t'avoir aidée :)
J’ai entendu Haikyuu !?
J’aime beaucoup ce début d’histoire. Notamment le premier dialogue qui m’a tout de suite emportée.
Petite question : le fait que la voiture se nomme Philibert est un hommage à ce valeureux destrier dans La Belle & La Bête ?
J’ai relevé quelques erreurs légères, si ça peut t’aider :
1) « Je n’ai pas eu de réponse, depuis que je suis montée dans la voiture, de Léonard et ça ne fait qu’amplifier mon irritation. »
→ Attention à l’ordre des compléments. « Depuis que je suis montée dans la voiture » aurait davantage sa place en début de phrase ;)
2) « Je n’ai que ce mot à la bouche, comme si tout mon vocabulaire c’était envolé. »
→ Comme si tout mon vocabulaire s’était* envolé.
3) « Ce soir joue les Wolves »
→ Ce soir jouent* les Wolves. (« jouer » s’accorde avec « les Wolves »)
4) « Mon lieu de parenté avec le coach »
→ Mon lien* de parenté :)
5) « je ne peux que le regarder qu’avec admiration »
→ Il y a un « que » en trop dans cette phrase. Tu as le choix entre : « je ne peux que le regarder avec admiration » ou « je ne peux le regarder qu’avec admiration ».
Je viendrai lire la suite, ça m’intéresse beaucoup cette histoire de volley ;)
Ball.
Cette histoire de volley-ball.
XD
Je suis ravie de voir que tu as apprécié mon premier dialogue et le début de mon histoire ! J'espère que tu vas aimer la suite !
Oui c'est bien un hommage à Philibert de La Belle & La Bête, je me devais de faire un clin d'œil à se dessin animé.
Je te remercie pour toutes tes remarques, je me note tout ça pour la réécriture, cela va énormément m'aider !
Merci pour ton histoire je suis une grande fan de Haikyuu et j'aime aussi beaucoup jouer au volley et je suis trop contente de pouvoir lire une histoire comme la tienne !
Ton résumé de l'histoire et les premières scènes introductives renvoient la balle d'un bel anime de sport. J'aime beaucoup les interactions que tu as créées et la petite scène de la sucette au coca !
On sent que tu veux allier les prouesses sportives face aux aléas des relations humaines : je suis donc très intrigué pour lire la suite !
Au grand plaisir de te lire pour la suite :)
J'aime beaucoup ce début d'histoire, je suis directement dans ton histoire et je l'adore !
Je vais continuer à te lire ! :)
Bonne continuation :)