Chapitre 10

Notes de l’auteur : Hello !
On continue avec les chapitres qui ne me donnent pas satisfactio. En même temps, les moments pivots des histoires me posent toujours problème ... n'hésitez pas à me faire vos retours sur le chapitre !

Et pour me motiver à avancer, j'ai décidé d'avoir pour objectif de soumettre Petite Magie (ouiii le titre définitif sera probablemet celui-là) au concours Rageot de cette année (deadline fin août).
Juste je ne sais toujours pas quelle version proposer XD avec Eden en fille ? Ou Eden en garçon ?
Bonne lecture !

A partir de là, le harcèlement devint insupportable...

Les nuées recommencèrent, accompagnées cette fois de trucs beaucoup plus pénibles, comme des sorts de culbutes ciblés vers mes jambes, des coups « accidentels » dans mon sac à dos ou dans mes livres, des élèves s'écartant de moi à la cantine, le mot haga tagué discrètement pour être pile dans mon champ de vision lorsque je m'installais à mes places habituelles en classe...

Mais aussi d'autres joyeusetés, allant de l'insulte soufflée à mon oreille dans la cohue des changements de classes à la diffusion de toutes les captures vidéos embarrassantes de ma personne ayant été prises ces deux dernières années, en passant par disparition pure et simple de certaines de mes affaires...

Et tout ça, malgré le signalement que j'en fis aux professeuroresses, et leur promesse d'intervenir....

Iels le firent hein, intervenir, mais... ça ne changea pas grand chose.

A part que les attaques se firent plus sournoises, et finirent même par viser Amari, puisqu'elle s'entêtait à m'accompagner au maximum entre les cours. Si elle en profita pour augmenter ses connaissances en amulettes et sortilèges de protections (qu'elle grava pour moi sur un bracelet en bois, et pour elle, sur sa jambe, avec un sort pour nous permettre de communiquer en cas de besoin) j'en vins personnellement à redouter de sortir de ma chambre. Tellement que je finis par prendre le risque de tester un sort de téléportation que je ne maîtrisais pas encore très bien, afin de pouvoir aller directement de mon balcon aux salles de cours, et ainsi éviter de mettre les pieds dans les couloirs de l'établissement.

Cette décision m'épargna un bon paquet d'ennuis, jusqu'à ce qu'an élève fasse exploser un sort odorant sur mon sac à dos, en pleine classe. Le sort, repoussé par celui de bouclier jadis posé par Lassa'h, rebondit pour aller s'ancrer dans le mur de la salle, inondant cette dernière d'une odeur si putride que le professeur en charge du cours fut forcé de faire évacuer.

Cela incita lea directeurice à refaire une allocution concernant l'interdiction d'agression au sein de l'école, sans résultats, là aussi...

Autant vous dire que je passais une semaine particulièrement atroce.

Au point que j'envisageais sincèrement d'en parler à mes parentes. Et à demander mon retrait de l'école.

Cependant, à mes yeux, le pire fut atteins le vendredi soir, deux semaines plus tard, juste avant le week-end où je devais rentrer chez moi.

Après une cession particulièrement pénible du Projet B (où bizarrement, sa petite magie se manifesta enfin de façon satisfaisante), j'entendis Lassa'h demander à la professoresse Huamaní s'iel pouvait changer de binôme pour être avec Arën plutôt qu'avec moi.

Il n'y avait plus que nous dans la salle, j'étais en train de ranger mes affaires, je ne pouvais pas ne pas l'entendre. J'avais attendu exprès que touste le monde ai quitté la salle pour avoir l'opportunité de lui parler seul à seul.e... parce que je n'avais pas perdu espoir d'arriver à obtenir des explications. : après tout nos résultats en duo étaient très bons, quoi qu'aient pu en dire les autres ! On était même celui qui performait le plus ! Et à la base, on s'entendait bien...

L'entendre demander à ce qu'on ne travaille plus ensemble, alors même que tout ce bazar avait commencé JUSTEMENT parce qu'iel voulait se rapprocher de moi... Ça me blessa bien plus profondément que je ne m'y attendais.

Tellement que j'eus l'impression que quelqu'an venait de me frapper à la poitrine.

J'y portais machinalement ma main, inconscient du fait qu'une larme s'était échappé de mon œil, et je me mis soudainement à avoir envie d'être en colère. Profondément en colère.

Parce que c'était injuste.

Parce que c'était gratuit.

Parce que ça faisait un mal de chien et que j'avais pas demandé à ce que ça arrive.

Parce que j'avais passé plusieurs semaines abominables pour rien.

Il se peut que la pièce ai tremblé quand j'ai reculé brusquement ma chaise pour me lever. Il n'est pas impossible non plus qu'une quantité désagréable de poussière soit tombée sur Lassa'h à ce moment là1, et que l'odeur de forsythia ai empli la salle de cours en même temps qu'une manifestation plus forte de ma rancœur.

Assez forte pour que Lassa'h et la professoresse la perçoivent et se tournent vers moi, dérangé.es par le fumet de vesse-de-loup, la surprise affichée sur leurs visages.

Je supprimais mon sort d'enregistrement d'un geste, fourrais rageusement mes affaires dans mon sac, puis inspirait à fond avant de relever la tête pour les fixer. Iel voulait un autre binôme ? Eh bien soit. Après tout, il n'y avait aucunes raisons pour que je supporte plus longtemps son attitude de ces dernières semaine. Je pris la parole :

- Je suis d'accord professoresse. Il est clair que Lassa'h n'a plus besoin de mon aide (je fermais mon sac d'un geste brusque) et qu'Arën patine avec Léna. Avec ce changement, vous pourrez vérifier, en comparant ses résultats et l'évolution de Léna avec moi, si c'est mon influence qui a fait évoluer la petite magie de Lassa'h, ou si ce sont les exercices en eux-même.

L'expression de la professoresse s'éclaira, tandis que celle de man anciäne binôme s'assombrit.

- Eden...

- Économise ta salive Lassa'h. J'ai dis que j'étais d'accord.

La sangle de mon sac à dos me cisailla l'épaule quand je le jetais dessus. J'avais le cœur au bord des lèvres. Et une inexplicable envie de fondre en larmes. Ravalant ces dernières, j'enchaînais :

- Est-ce que ça vous va professoresse ?

- Eden.

- Puisque c'est votre volonté à toustes les deux, ça ne me pose pas de problèmes. Vous passerez me voir à mon bureau demain à 18h Monsieur Erlhich, pour que nous établissions ensemble un protocole de mesure. L'orientation d'étude que vous proposez est prévue pour le second semestre, mais votre travail avec mademoiselle Sorel pourra nous servir de test.

- Merci professoresse. Bonne soirée à vous deux.

- Eden attends-moi s'il te plaît. Je veux t'expliquer.

J'ignorais la demande. Je veux bien que certaines personnes aient des lacunes sociales, et que celles de Lassa'h pouvaient parfois être abyssales, mais ça ne veut pas non plus dire que j'avais à l'excuser tout le temps. Je me fichais de ses explications, de ses motivations. J'avais mal. J'étais passé pour un cron. On m'avait utilisé et j'avais été assez stupide pour penser que cette utilisation était de l'intérêt sincère.

Voire même pour commencer à faire confiance.

Je franchis la porte de la classe en me faisant la remarque ironique que finalement, je venais d'inaugurer le club des 0%.

Celui des gens ni en crush, ni en admiration pour l’élève lea plus doué.e de l'école.

J'ouvrais mon carnet de sorts à la recherche de celui de téléportation lorsqu'une main gantée se posa sur mon épaule.

- Eden. Je t'ai demandé de m'attendre.

Je fermais les yeux, très fort, trois secondes, pour essayer de me calmer. De ne pas exploser. En vains. D'une dérobade brusque, je me libérais du contact, et m'éloignais de deux pas, sans lui adresser un regard, concentré sur la recherche de ma page.

- J'ai entendu. Et j'ai pas le temps. Si tu as des questions, demande à ton nouveau binôme.

Je senti plus que ne vis Lassa'h se positionner devant moi. L'odeur de sa magie flotta entre nous, accompagnée d'une fragrance de menthe que je n'avais jamais perçu auparavant. Mon carnet de sorts s'ouvrit enfin sur la bonne formule.

- Je veux juste te parler.

Oh. Lea. Cron.ne.

Sérieusement ?

Je coinçais mon pouce dans la reliure pour ne pas perdre ma page, et levais les yeux vers ellui.

- Oh vraiment ? Ça change de ces dernières semaines.

L'agressivité de mon ton lea fit reculer un peu, une expression blessée sur le visage.

Ce qui acheva de me mettre hors de moi.

D'où se permettait-iel d'avoir l'air blessé.e par ma remarque ?!

- Je veux juste t'expliquer...

- Trop tard. Je me fiche de ton explication. Tu as eu ce que tu voulais, très bien. Fout-moi la paix maintenant.

- Je ne veux pas que tu te fâches, je

Je levais la main pour l'interrompre. Excédé. De nouveau au bord des larmes. La colère bouillonnant si fort dans mon ventre que j'avais l'impression de faire tanguer le plancher.

- Je. Ne. Veux. Pas. T'entendre. Ça suffit. J'en ai marre. J'en chie depuis des semaines à cause du projet, et à cause de toi. T'es avec Arën, parfait. Maintenant oublie moi.

Et je frappais ma main sur mon carnet, interrompant définitivement la conversation en activant le sort qui me téléporta directement dans la sécurité de ma chambre.

Je n'en sorti pas du week-end, le rendez-vous que j'avais hâtivement accepté avec la Professoresse m'empêchant de rentrer chez moi, à la grande contrariété de Mams, qui me fit savoir par sortilège que si je ne rentrais pas le week-end suivant, elle me ferait sortir de force du programme scolaire.

Ce qui bien évidement me fit fondre en larmes.

Je dû lutter très fort pour ne pas répondre « viens me chercher maintenant », car je savais qu'elle l'aurait fait. Et... et que oui, à ce moment là, j'étais encore trop sous le choc et pas totalement désillusionné par ce qui me tombais sur le coin de la greule pour reconnaître que j'étais à bout.

Et que je n'aurais jamais dû laisser les choses aller aussi loin sans en parler à ma famille.

Mais bon.

Adolescence, vous vous souvenez ?

On aime bien garder notre indépendance, et on apprécie moyennement de devoir aller demander de l'aide... surtout si on risque de se prendre un « je te l'avais bien dit » de la part nos tuteurices.

Mais surtout... on en parle pas assez de l'état de sidération dans lequel vous met une situation de harcèlement. A posteriori, on est capable de cibler les moments où on aurait dû réagir, où il aurait été logique de dire non ou de tirer la sonnette d'alarme. Mais sur le moment, on est comme la grenouille dans la casserole : lentement en train de cuire et incapable de se rendre compte que l'eau est en train de devenir bouillante2...

Ce week-end là, je fus sauvé de la famine par la magie de l'école qui fit apparaître de quoi me nourrir directement sur mon bureau3, et des contacts sociaux par une Amari remontée comme une pendule lorsqu'elle fut mise au courant de ce qu'il s'était passé. D'autant qu'à ma grande consternation, la porte de Lassa'h n'avait pas disparue de notre salon. Tout au plus, les bords s'étaient-ils un peu brouillés, mais pas suffisamment pour l'empêcher d'entrer. Lorsqu'iel la franchit le samedi matin, je me claquemurais dans ma chambre et jetais un sort de silence sur le battant pour ne pas risquer d'entendre sa voix.

De ce que j'en sais, iel ne parvint pas jusqu'à cette dernière : Amari y a veillé et gagné une extinction de voix.

Vraiment, je la mérite pas.

Le lundi suivant, je décidais de sécher mes cours.

Ouais.

C'est vous dire à quel point j'étais sans dessus dessous.

C'était la première fois depuis le début de ma scolarité que ça arrivait, évidement : comme je vous l'ai dis, rater des cours dans cette école, c'était l'équivalent de prendre le risque de rendre une copie blanche à un partiel vous demandant de définir le culot. Surtout ceux spécialisés, qui sont irrattrapables.

Mais la simple idée de sortir ce matin là me ficha le cœur en l'air, me pliant douloureusement en deux sur les toilettes pendant plusieurs minutes. Il me fallut le reste de la journée pour me préparer mentalement au cours du soir, où j'allais revoir Lassa'h dans le cadre du Projet B.

Sincèrement, je n'avais pas envie d'y aller.

Cependant Léna, l'ancienne binôme d'Arën n'avait rien à voir dans nos histoires, et il était hors de question qu'elle paie les pots cassés par d'autres. Profitant du fait que toustes les élèves étaient en cours ou en étude, je m'aventurais dans les couloirs de l'école, trop fatigué pour utiliser le sort qui m'avais télé-transporté toute la semaine.

Je ne croisais personne ni de véritables obstacles, juste un ou deux pièges ciblant trop vieux pour ne pas être facilement contrés, et arrivait bien trente minutes en avance dans le couloir au fond duquel se trouvait notre zone de travail. Ne me sentant absolument pas à l'aise à l'idée de rester seul et vulnérable dans cette impasse, je décidais de déjouer le simple sort de fermeture de la porte pour me glisser à l'intérieur de la pièce.

Vide, la salle paraissait presque un peu triste, comme si elle n'appréciait pas vraiment l'utilisation de son espace pour nos expériences. Comme c'était la première fois que je m'en rendais compte, je lui adressai mentalement des excuses avant de la cajoler avec ma petite magie, ce qui eu pour effet de rendre les plans de travail lustrés, les lumières un peu plus vives et les fenêtres implacablement propres... du côté de la pièce où je travaillais d'habitude. Ça m'arracha un sourire.

Profitant de ma solitude, j'errais un peu entre les postes de travail, observant tableaux récapitulatifs des expériences en cours et parcourant les notes abandonnées sur place. Je n'y trouvais rien de transcendant, en dehors du début de rédaction d'un article sur la petite magie, laissé sur le bureau de la prof. Curieux le copiais discrètement dans mon carnet de note via un sort de transfert, pour pouvoir le lire plus tard, non sans me sentir un peu coupable de le faire sans permission.

Mais bon. Ma curiosité a toujours été plus forte que mon sentiment de honte...

- Allez, quand faut y aller...

Remontant mes manches, je m'attelais au démantellage de la zone que j'utilisais auparavant avec Lassa'h. Contrairement à ce que certäns pourraient croire, ce n'était pas un acte réfléchit, ou une tentative de vengeance : je le fis sur l'impulsion du moment, parce que ça me paraissait être la juste chose à faire. Mes notes personnelles sur le cours n'avaient pas à rester disponibles pour un autre binôme, tout comme le planning établis pour nous, puisqu'il était basé sur nos forces et nos faiblesses. Je laissais bien entendu les travaux de Lassa'h en place, ainsi que ce qu'il me semblais pertinent d'abandonner derrière moi pour qu'on ne m'accuse pas de sabotage, ou de vol d'informations.

C'est un peu déprimant d'avouer qu'il me fallu moins de dix minutes pour effacer toutes traces de ma présence dans l'espace que nous avions partagé...

Lorsque la rumeur d'une foule d'élèves en approche se fit entendre, je filais m'installer là où Léna et Arën s'entraînaient jusqu'à maintenant. Alors que j'y déposais ma pile de papiers, je constatais que contrairement à moi, l'ancien binôme de Léna n'avait pas eu autant de scrupules que moi. Sa place avait été nettoyée durant le week-end, les deux bureaux, ainsi que leurs panneaux d'affichages, ne comportaient plus aucunes notes. Je fermais brièvement les yeux pour retenir mes larmes de fatigue face à cette mesquinerie.

En soit, ce n'était pas si grave : Léna et moi devions partir sur de nouvelles bases de travail, que leurs anciens résultats ne soient plus affichés ne devrait pas nous poser trop de problèmes. Et puis au pire, elle me brieferait.

Mais j'avais envie de pleurer quand même.

La porte de la salle s'ouvrit brusquement, laissant entrer notre professoresse et le flot d'élèves participant au projet. Je me fis tout petit sur mon siège, histoire qu'on m'oublie, et sursautait lorsque Léna tira vivement sa chaise pour s'y asseoir, un sourire jusqu'aux oreilles illuminant son visage. A ma grande surprise, elle m'annonça être ravie de faire maintenant équipe avec moi. De ce que je compris de l'avalanche de paroles surexcitée qui suivi cette déclaration, Arën n'avait pas été des plus pédagogue avec elle, et ses avancées étaient surtout dues à des exercices qu'elle avait copié en m'observant travailler avec Lassa'h.

Dans les faits, Léna n'était effectivement pas très douée, mais elle était volontaire, structurée et pleine de ressources. En deux cessions de travail cette semaine là, nous obtînmes des résultats qu'elle n'avait jamais même frôlé en compagnie de son précédent binôme, simplement en adaptant les exercices à sa sensibilité, et moi je lui découvrais avec plaisir une personnalité pleine d'humour, ainsi qu'une obsession plutôt mignonne pour la papeterie.

Si on excluait le malaise qui m'enserrait à chaque fois que mon regard dérivait vers mon ancienne place, ou lorsque je sentais le regard de Lassa'h ou d'Arën sur ma nuque, travailler avec elle s'avéra des plus intéressant, transformant ce qui s'annonçait un peu comme une corvée (à cause de la situation pourrie par laquelle c'était arrivé) en moments agréables, où je riais beaucoup, et elle aussi.

De façon assez satisfaisante, notre alchimie amicale inattendue contraria à la fois mes harceleureuses comme nos ex-binômes : je n'étais pas isolé au sein du projet, et le tandem Lassa'h-Arën peinait à obtenir des résultats probants. Le peu de fois où je leur accordais de l'attention, l'absence d'expression sur le visage de Lassa'h, et l'agacement sur celui d'Arën, en disait long sur leur état d'esprit. D'autant que dès la première cession suivant la demande d'échanges, la professoresse Huamaní pris en plus l'habitude de nous garder une heure de plus après chaque cession, Léna et moi, puis de nous demander de passer la voir dans son bureau plusieurs fois, pour comparer nos résultats aux précédents, et affiner le protocole concernant la seconde partie de l'expérimentation.

Le fait qu'elle accorde autant d'attention à nos avis et suggestions nous faisait nous sentir privilégiés, comme si nous étions des membres actifs de l'équipe de recherche et non pas de simples participant.es4. A vrai dire, le fait que nos noms soient mentionnés comme co-auteurice fut même évoqué une fois ou deux, ce qui nous mis en joie et nous incita à nous impliquer d'autant plus.

Mais c'était bien le seul aspect positif de mes journées.

Si l'utilisation du sort de téléportation et la présence d'Amari m'épargnaient la plupart des embuscades dans les couloirs, les insultes et attaques personnelles, elles, ne diminuaient pas.

Et l'attitude de Lassa'h envers moi devint de plus en plus blessante.

Du jour au lendemain, iel ne se contenta plus de m'ignorer... iel se mis à participer.

Oh, pas directement, non. Ni de façon vraiment active.

Mais le sort de bouclier son mon sac s'affaiblit jusqu'à disparaître.

Le sort de froid sur la gomme, que j'utilisais encore souvent pour soulager mes mal de tête, s'effaça du jour au lendemain.

L'odeur de sa petite magie me devint désagréable, comme si du durian s'était mélangé à sa fragrance.

Mais surtout, je l'entendis plusieurs fois dire à Arën qu'iel éprouvait du soulagement à ne plus être vu.e en ma compagnie, et Arën lui répondre qu'iel avait bien fait. Que c'était pour le mieux. Et ellui d'approuver d'un signe de tête, un vague air de soulagement sur le visage..

Ce genre de « petites choses » qui me tordirent les tripes presque plus fort que les haga inscrits sur le plateau de ma table de cours habituelle. Il va sans dire que je foirais une bonne partie de mes cours et expériences les jours qui suivirent. En dehors des cessions du Projet B. avec Léna, et de la compagnie d'Amari, rien ne m'intéressais et tout partait de travers, et je caressais regardait enfin en face la nécessité absolue de mettre mes parentes au courant pour qu'elles me sortent de là.

Pourtant j'adore cette école.

J'ai étudié dur pour y entrer. Pour m'y maintenir.

J'ai travaillé encore plus dur pour arriver à équilibrer mes trois pratiques magiques.

Pour ne pas oublier qui je suis et d'où je viens.

Mais rien, absolument rien, ne justifie de souffrir autant.

Et même si ça voulait dire quitter Amari, il y avait d'autres écoles dans lesquelles étudier.

Elles seraient moins bien, c'est sûr, j'y serai aussi moins libre.

Mais au moins j'y serai en sécurité.*

Je ressassais cette idée, pelotonné sur le balcon de ma chambre, lorsque je ressenti une pression sur le battant de ma porte. Comme si quelqu'an essayait de contourner le sort de blocage et de silence qui j'y avais apposé. J'en déduisis que c'était Arën ou Lassa'h, puisqu'Amari pouvait entrer, elle, et que Léna, la seule autre personne à accepter encore de m'adresser la parole, se faisait toujours annoncer par un petit origami animé.

J'en conçu une telle colère que cela me pris par surprise. Plutôt que de rester à subir la sensation d’intrusion, et trop fatigué mentalement pour m'offrir une couverture de porte avec forces cris d'orfraie pour les envoyer paître une bonne fois pour toute, je ramassais mon harnais, le fourrait dans mon sac à dos, puis lançais une « suite de Mams5 » pour gagner les jardins en contre-bas.

Mais une fois arrivé au sol, au lieu de me diriger directement vers le sanctuaire du Néré, je dirigeais mes pas vers le hall.

Peut-être parce que le vent s'était mis à souffler dans cette direction, ou parce qu'un éclat de magie avait attiré mon œil... la petite magie a sa propre façon de communiquer et d'orienter nos actes. Il lui arrive souvent de vous dévier de votre chemin initial pour vous mettre sur la route de ce dont vous allez avoir besoin, ce que vous devez faire, ou ce que vous devez voir. Quant on sait l'écouter, ça amène souvent à arriver en retard parce qu'on prend des routes détournées, mais en contrepartie, vous avez été protégé.e de quelque chose, ou vous avez appris un truc qui vous sera nécessaire dans la journée.

Étant mage de cuisine, me laisser guider sans réfléchir était comme une seconde nature.

Lorsque je pénétrais dans l'ombre du grand hall, j'eus la surprise de le trouver décoré de fond en comble : guirlandes de houx, de gui, de feuilles oranges et jaunes, mais aussi de branches de sapins, d'étoiles scintillantes et autres lumières flottante. Le voir ainsi me fit prendre conscience d'à quel point le temps avait passé. Nous étions maintenant plus proche des cérémonies d'octobre et de novembre que de celles de l'été. La plupart des élèves devaient avoir commencé à se préparer pour ces dernières, à discuter vêtements, béguins et accompagnateurices.

L'année dernière, Amari et moi avions travaillé presque trois semaines sur nos tenues, sur laquelle sa magie d'artificière avait eu des résultats époustouflants.

Mais cette année, préoccupé par le Projet B, Lassa'h, la façon dont on me traitait... j'avais complètement oublié. Et bien sûr, Amari, pour ne pas m'enfoncer, n'avait rien dit... quand je vous dis que la plupart du temps je ne la mérite pas !

Brusquement épuisé par la réalité de mon quotidien, je passais les mains dans mes cheveux, réalisant à ce moment là que je ne les avais pas tondus depuis un moment : mes mèches partaient en tous sens, comme l'herbe d'un champ que le vent aurait ébouriffé. Et à en juger par la sensation sous mes doigts, ils n'étaient pas de la première propreté. Après un reniflement discret sous mes bras, il s'avérait que le reste de ma personne aussi, avait besoin d'un bon bain.

C'était presque le plus perturbant : quand avais-je cessé de me soucier de mon hygiène ?...

Puisant dans les ressources de mon carnet de sort, je m'appliquais un rapide sort de nettoyage, juste ce qu'il fallait pour que mon odeur corporelle n'indispose pas les condisciples que je pourrais croiser : hors de question qu'un artifice trop efficace me fasse de nouveau oublier les bénéfices d'une douche.

Réalisant ensuite que j'étais planté au milieu du hall (heureusement vide) je me décalais jusqu'aux bancs installés sous le grand escalier. Un vieil artifice, probablement placé là par des élèves, permettait de donner à ce dernier les mêmes propriété qu'une vitre sans teins, et je l'activais machinalement, afin d'être sûr de pouvoir réagir si an indésirable se pointait.

Accaparant l'un des plaids plié sur le banc, je me fis un nid confortable dans lequel j'envisageais un moment de continuer à ressasser ma misère. Mais une assiette de cookies et un verre de jus d'orange, opportunément apparus près de mon harnais abandonné en vrac sur le sol, m'incitèrent plutôt à m'activer un peu.

C'est comme ça qu'après avoir mangé quelques morceaux, j'ouvris mes carnets à plat sur le banc pour travailler.

Bien sûr, comme c'était présentement le sujet qui m'occupait le plus l'esprit, les deux ouvrages s'ouvrirent sur des pages en lien avec Lassa'h : côté carnet de sort, la page avec le sortilège pour réactiver un sort temporaire, et côté carnet de note, celles prises en vrac lors notre accès à la cloche.

Un petit pincement au cœur me saisit à ce souvenir.

Il s'était passé tellement de choses depuis !

Trop, en vérité.

Tellement que je n'avais jamais pris la peine de compiler, mettre au propre et partager mes notes avec Lassa'h. La partie rascasse de ma personnalité s'en réjouit, tandis que celle, plus loyale, se sentit mal d'avoir manqué à ma part du deal. Peut-être était-ce la raison pour laquelle tout partait à vaux-l'eau ? Parce que je n'avais pas tenu mes engagements ?...

Je secouais la tête pour chasser cette idée.

Lassa'h avait eu tout le temps du monde pour me demander ces notes. Iel ne l'avait pas fait. Je ne pouvais pas être tenu entièrement pour responsable, et Amari avait raison : je n'étais pas non plus responsable de la façon dont les autres élèves me traitaient.

Je restais un petit moment à contempler mes carnets, hésitant sur la marche à suivre, puis me décidais : une promesse était une promesse. J'allais mettre ces notes au propre, et demander à Amari de les transmettre à Lassa'h. Ensuite, je lea chasserai définitivement de mon esprit, demanderai à rentrer chez mes parentes, puis changerait d'école. Je n'avais aucuns doutes quant au fait qu'Amari et moi trouverions un moyen de rester en contact.

Rasséréné d'avoir enfin une marche à suivre claire, je me mis au travail.

En tout, il me fallut environs une heure pour compiler correctement mes notes. Et une de plus pour organiser tout ça de façon claire. Les fragments d'informations, les morceaux de sorts et les sortilèges complets, se mêlaient à des petits bouts de diagrammes, des équations et aux commentaires de Lassa'h. Entendre de nouveau sa voix grave, emprunte d'enthousiasme et de sourire plutôt que de mépris, m'avais retourné les tripes6.

Je m'étirais pour dénouer mon dos, finir les cookies et le jus d'orange, puis pris le temps de relire (quand je compile les notes, je retranscris souvent sans comprendre ce que j'écris) pour faire un dernier trie, m'étonnant du nombre d'informations relatives aux transferts magiques, aux décharges de sorts, au travail en duo, et surtout, à la petite magie que la cloche nous avait transmis. Concernant la petite magie et les décharges, il n'y avait pas grand chose de nouveau pour moi (aussi n'avais-je pas pris la peine de les noter dans mon cahier, alors que Lassa'h s'était empressé de me les dicter) mais les questions de duo et de transferts faisaient raisonner quelque chose dans ma tête.

Je fixais le vide quelques instant, dans l'espoir de laisser une chance à mon cerveau de trouver la réponse, puis claquait des doigts : le brouillon d'article sur le bureau de la professoresse Huamaní ! Lorsque j'avais survolé le document, avant de le copier dans mon carnet de notes, mes yeux avaient accrochés ce genre de termes.

La coïncidence était un peu grosse, d'autant que l'épisode de la cloche s'était passé bien avant le début du Projet B...

Peut-être était-ce une manipulation volontaire de la part du corps enseignant (après tout, toustes les élèves supposaient que les informations inscrites sur la cloche venaient d'ielleux), histoire de nous aiguiller vers le Projet B, mais l'odeur âcre qui montait à présent de mes notes m'incitait à me méfier de cette idée. Alors que je feuilletai mon carnet de note pour retrouver l'article, une légère vibration secoua le bracelet que je portais au poignet, m'indiquant qu'Amari cherchait à me joindre.

J'activais le bracelet d'une pichenette alors que l'odeur de la vesse-de-loup emplissait mes narines.

Avant que je puisse y réagir, l'éclat d'une conversation emplis l'espace sous l'escalier, raisonnant dans le hall.

« … tu ne peux pas faire ça Lassa'h !

- Je le dois, c'est la seule façon. Si personne ne lui adresse la parole, le problème sera réglé ! »

Je senti mon corps se glacer, et me surpris à prier pour être de nouveau dans un cliché de romance. Où on entend une conversation et on se méprend sur son sens.

« Comment est-ce qu'on peut être aussi débile avec un QI comme le tien ?!

- Hey !

- Non mais sérieux ! Si tu demandes à tout le monde d'ostraciser Eden, ça sera PIRE pour lui ! Tu comprends ça ?!

- … C'est peut-être pas plus mal. Ça le décidera a partir. »

Ok. Ok... je n'étais pas dans un cliché.

Difficile de se méprendre sur le sens de cette phrase.

Lassa'h voulait que je parte.

Je lâchais un timide :

- Amari ?...

Silence, à l'autre bout du bracelet.

« Tu l'as appelé ? »

La voix de Lassa'h, accusatrice. En colère.

« Je t'ai dis que j'allais le faire ! Eden ? Eden tu as entendu quoi ? »

- Assez de choses je pense. Lassa'h ? Va bien te faire foutre7.

Et j'interrompis le sort de communication.

Quelque chose se déplaça dans mon esprit, et je sentis très nettement mon ex-binôme être expulsé.e de notre chambre. Je sus ensuite sans l'ombre d'un doute qu'une bibliothèque avait pris la place de sa porte, et que je n'avais pas été le seul auditeur de la scène.

Me tournant lentement vers l'escalier transparent dans mon dos, je captais les yeux bleus d'Arën, qui fixaient les marches sans pouvoir me voir, ainsi qu'une quinzaine de visages dont les expressions allaient de la gêne au sourire narquois.

Mon ancien crush, lui, cachait avec peine sa jubilation...

 

 

 

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1 Iel est très mal à l'aise lorsqu'iel porte des vêtements salis.

2 Et soyons honnêtes : j'avais dépassé le stade de la cuisson depuis longtemps à ce moment là.

3 Je vous vois venir : sans poisson. L'école est pas cruelle, ELLE.

4 A ce moment là, je ne savais pas encore quel passif partageaient Mams et la professoresses... des fois je me dis que si j'avais été un peu moins bête, et avais pris le temps de parler à Mams du harcélement, et de lui poser des questions, pleins de choses ne seraient pas arrivées.

5 Nouveau nom de la suite d'Orthis dans ma tête, depuis que je savais que c'était ma parente qui l'avait formalisée.

6 Sincèrement, il s'en était fallu de peu que j'abandonne. Mais comme je suis quelqu'un de têtu... je suis allé au bout de l'enregistrement. Deux fois.

7 Et osef les parentes qui vont m'assassiner !

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Tac
Posté le 27/07/2025
Yo !
C'est peut-être que j'étais mieux préparéo cette fois-ci mais le chapitre m'a moins perduo. Y a moins de résumés qui se perdent dans des souvenirs non linéaires, j'ai l'impression.
Un truc du précédent chapitre d'ailleurs, c'est que la question des rapports que Eden est censé faire à ses parentes est vite évacuée, je trouve. Sans même parler de la question du harcèlement.
Je trouve étonnant que Lass'ah attende d'avoir demandé à changer de binôme et que Eden s'en aille en claquant la porte pour aller s'expliquer avec lui. Même en étant pas doué niveau codes sociaux, après autant de semaines à voir Een s faire bizuter, si son idée c'est de s'éloigner le plus possible d'Eden pour que les gens le laissent tranquille, il pourrait lui dire "chuis désolé que mon plan marche pas" vite-fait pendant une expérience en binôme. Il a quand même eu la présence d'esprit, fut un temps, de lui filer un gomme magique. Donc là qu'il ne se passe strictement rien, y a un truc qui me chafouine.
Par contre, archi cool pour Léna, chuis hyper heureux pour elle et pour Eden, ce qui me fait souligner le point de mon com précédent sur la binôme d'AmarI.
J'ai l'impression de rater des trucs dans ma réflexion, mais ptete ça viendra en lisant la suite.
Ah et j'ai pas dit, à force de chercher la petite bête j'en oublie de dire que j'ai bien aimé ! J'ai bien aimé la dispute avec Lassa"h au début (malgré mes bémols susmentionnés), quand Eden arrive dans la salle et fait un tour de petite magie je trouve que c'est bienvenu comme moment, et évidemment Léna. Point bonus pour le fait de pas parler d'hygiène jusqu'au moment où il réalise qu'il s'est pas coiffé/ lavé depuis un moment, j'ai trouvé que c'était bien amené et pas artificiel, c'est qui est rarement le cas de ce que j'ai pu voir ailleurs :') by the way c'était dans l'autre chapitre, mais j'ai bien aimé le moment où Eden remet tout en question dans sa pédagogie et y passe son weekend, j'ai trouvé que c'était un moment très fort.
Plein de bisous !
VavaOmete
Posté le 09/08/2025
\^o^/ je suis joie que les seules scènes que j'ia gardé de la première mouture de ces chapitres soient celles qui te plaisent !

Tu as raison, c'est pas assez bien amené le fait que Lassa'h est en plein syndrôme stupide de chevalier blanc solitaire @_@ va falloir que je retravaille ça en amont...
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