Ne sachant où aller, les pas de Sol l’ont mené chez Clément. Lorsque celui-ci ouvre la porte il découvre Sol livide et tremblant, des cernes profondes sous les yeux.
Merde, qu’est-ce qui lui arrive. Le jeune homme appelle aussitôt Eric son compagnon et fait entrer Sol. Une fois assis, il rassemble ses esprits. Il a soif et réclame un verre.
-Je ne sais pas si c’est vraiment une bonne idée…Commence Clément.
Sol Soupire.
-Donne-moi à boire putain !
Eric lance un regard inquiet à son compagnon, les poings légèrement crispés.
Une fois le whiskey dans sa main, Sol commence son récit. Il raconte : sa mère à l’hôpital à cause de son ex beau-père, comment il est allé la voir puis il est allé casser la gueule de cet enfoiré avant de s’enfuir.
-Tu as fait ça ?! S’exclame Eric
-Apparemment…je n’en ai aucun souvenir. Seulement les images prises de moi à l’hôpital avant d’aller lui éclater la gueule. J’aurais aimé m’en souvenir crois-moi. Si tu voyais l’état de ma mère…
-Ton ex beau –père ? Patrick ? C’est lui qui…commençe Clém.
-Oui c’est lui coupe Sol d’un air sombre.
Clément connait Sol depuis longtemps, sans lui trouver d’excuses, ses travers les plus sombres trouvent leurs origines dans sa jeunesse malheureuse. Eric fronce les sourcils, cette histoire ne tient pas debout. Comment Sol a-t-il pu sortir du commissariat ? Il prend Clément à part dans la cuisine et lui propose d’appeler la police.
- Absolument pas ! S’indigne Clément. Il a besoin d’aide. J’ai déjà vu ça.
Clément retourne auprès de Sol et s’accroupi à côté de lui. Celui-ci lève son verre et boit une longue gorgée de whiskey.
- Est-ce que…murmure Clément doucement. Est-ce que c’est comme la dernière fois, Sol ?
Sol lève la tête et le dévisage sans comprendre tout de suite.
- C’est pas la première fois…tu vois ce que je veux dire ?
Est-ce que c’est comme la dernière fois ? Comme cette période sombre de sa vie où il s’était lentement enfoncé jusqu’à se faire interner pour calmer ses délires paranoïaques ? Sol triture machinalement les cicatrices qui courent le long de ses bras, habilement recouvertes par les tatouages. Il repense à Patrick, au visage tuméfié de sa mère, à Kali et au corps sans vie de Coralie. Est-il en train de replonger ? Est-ce qu’il déraille ?
- Non, répond-il. Non il n’y a aucune raison pour que ce soit ça.
Clément jette un œil au verre presque vide.
- T’en es sûr ?
- Certain, c’est surement un gros malentendu. J’aurais pas dû te mêler à ça. Il secoue la tête
Sol se ressaisit et se redresse, il sent le regard perçant d’Eric dans son dos. Clément lui propose de rester dormir ici mais Sol refuse. Il se compose une voix sûre et un visage serein.
- Tout va bien, j’irai à l’hôpital demain, essayer d’éclaircir tout ça. Et nous on se voit à la répétition ! Lance-t-il d’un ton faussement enjoué, en se dirigeant vers la porte.
Clément n’est pas convaincu mais son ami semble avoir repris ses esprits. Alors il le laisse partir.
Sur le chemin du retour, Sol se reproche d’être allé chez Clément. Ce n’est pourtant pas dans ses habitudes d’aller pleurnicher chez les autres. Il n’aurait pas dû mêler Clément et Eric à ses histoires. Il n’a besoin de personne. Il a peut-être passé Patrick à tabac mais vu le passif de cet homme, il serait difficile de reprocher à Sol d’avoir agi sous le coup de la colère. Il inspire profondément. L’air frais de la nuit calme son esprit. C’est alors qu’une mélodie s’immisce dans sa tête. Il l’entend si clairement. Comme si quelqu’un avait allumé la radio. Il se sent alors empli d’une énergie presque inépuisable et accélère le pas pour rentrer.
Arrivé chez lui, Sol saisit sa guitare et se met à composer.
Le lendemain en répétition, Sarah en voyant entrer Sol s’exclame :
-Mon dieu tu as une sale gueule !
- Je te remercie Sarah, tout le monde n’est pas doté de ta beauté naturelle.
- Je reformule : tu as l’air très fatigué ! reprend-elle.
-J’ai passé la nuit à composer, j’espère que vous êtes prêts, il va y avoir du boulot…
Sol commence à s’installer et à brancher sa guitare. Au bout de la pièce, derrière sa batterie, Clément essaie d’attraper son regard mais Sol semble délibérément l’éviter.
Tout le monde s’installe pour écouter les compositions. En réalisant que Sol a créé pas moins de 6 nouveaux morceaux en une nuit, Sarah a un sifflement d’admiration.
-C’est incroyable ! Comment as-tu pu faire tout ça en une seule nuit ? Et c’est pas n’importe quoi, ces morceaux sont géniaux ! Il faut vite qu’on les joue à notre prochaine date dans trois semaines ! Et qu’on trouve un bassiste pour remplacer Dan.
- 3 semaines ? Vous êtes fous, s’indigne Clément, je vous signale que certains d’entre nous ont un travail à coté et pas forcément le temps de bosser tout ça en si peu de temps.
- T’en fais pas, marmonne Sol, si tu bosses bien, bientôt t’auras plus besoin de boulot à côté.