Chapitre 10 : Des parents qu'on aimerait avoir

Notes de l’auteur : Bonjour !<br /><br />Bien. Shishoune, elle a dit que la livraison d'aujourd'hui n'est en rien le torchon auquel je pensais. Donc, si Shishoune le dit, c'est plus rassurant pour la créatrice du torchon en question, "en l'occurence, moi" (pour reprendre les paroles de Benji).<br />Merci énormément Shishoune (ma Bêta de Première Qualité et que j'use à petite quantité, pour ceux qui savent pas).<br /><br />Donc, me voilà un peu plus motivée pour publier aujourd'hui ce fameux torchon, qui j'espère, saura combler au moins l'attente de tous ces mois sans mes comédiens un peu fous-fous. C'est juste histoire d'en apprendre un peu plus sur les parents de Ludivine. Et l'extra...c'était par auto-obligation.
Bonne lecture !

 

 

Chapitre Dix : Des parents qu’on aimerait avoir

 

 

Comment avait-elle pu se montrer si naïve ? Comment avait-elle pu penser que son père était sérieux lorsqu’il lui avait demandé de revenir dans sa ville natale ? Elle avait refusé, bien évidemment, mais Jeff fut celui qui avait tenu tête le plus longtemps et qui remporta la victoire, ainsi que la venue de sa fille.

 

- Arrête de faire la gueule, Lulu. J’aime pas ça.

 

Le TGV fonçait à grande vitesse vers Arles, et Ludivine, la joue désespérément collée à la vitre tremblante, préférait observer le paysage plutôt que de répondre à son parrain.

 

- Ça va… Deux semaines, c’est pas la mort ! Tu ne vas quand même pas pleurer parce que Xavier est resté à Paris ?! Tu le reverras vite.

- Il me manque.

- Ça fait une heure qu’on est parti !

- Et alors ?! riposta sèchement Ludivine, en dardant aussitôt son regard furieux sur Romain.

- Et alors, c’est ridicule.

- Toi-même.

- Et tu me parles sur un autre ton, s’il te plait.

- Je fais ce que je veux.

- Pas avant le 31 août. Je te rappelle que tu es encore sous ma responsabilité. Et enlève tes pieds de la banquette.

 

La petite blonde s’exécuta mollement et soupira fort, de façon à ce que son parrain l’entende bien. Au lieu de s’énerver davantage, il se rapprocha d’elle et l’enlaça tendrement.

 

- Ça passe très vite, deux semaines, tu sais. La dernière fois, tu n’avais pas été aussi triste de rentrer chez toi.

- C’est parce que je n’étais pas aussi proche de lui.

- Ah ? Pourtant, il me semble que vous sortiez déjà ensemble. Qu’est-ce qui a changé ?

- Il y a que je ne suis plus Baby Lulu quand je suis loin de mon Xavier. C’est tout, répondit la jeune fille, mystérieuse.

 

 

 

 

Romain avait fait promettre à Ludivine de dissimuler sa méchante humeur devant ses parents, qui seraient probablement peinés si elle se montrait si triste et désagréable envers eux. La petite blonde, ne pouvant tenir une telle promesse dans ce contexte, avait répliqué qu’elle ferait de son mieux. Ce ne fut pas pour autant que l’ambiance tendue se dissipa, et lorsqu’ils arrivèrent à la gare d’Arles, le silence régnait entre le parrain et sa filleule. Le domicile de la famille Dodero n’étant pas si loin, ils marchèrent sans un mot, droit devant eux.

 

Vingt minutes plus tard, Ludivine et Romain s’arrêtèrent devant un portail en fer forgé qui donnait accès à une modeste mais mignonne petite villa. C’était un endroit calme et paisible situé à la sortie d’Arles, dans un petit coin de campagne. Peu de voitures circulaient et il y avait seulement une petite épicerie, un marchand de journaux et une école élémentaire où Mathis était scolarisé. C’était l’endroit idéal pour Éva Maël qui, justement, venait de sortir de sa maison pour se précipiter sur sa fille.

 

- Ludivine !

 

La petite blonde eut beau se forcer de tenir sa promesse, elle n’y arriva point et ne rendit pas l’étreinte à sa mère. Elle essaya pourtant de lui sourire, mais là encore, elle échoua et resta de marbre.

 

- Qu’est-ce que je suis contente de te revoir, ma chérie ! Et toi, Romain, ça va ? Le voyage, pas trop fatigant ?

- Ta fille est toujours aussi chiante. Mais à part ça, tout baigne.

 

L’intéressée jeta un regard noir à son parrain, ce qui eut pour effet de faire rire Éva Maël plus qu’autre chose. D’un commun accord, ils rentrèrent ensemble dans la villa. À peine eurent-ils franchi le seuil, qu’une mini-tornade blonde fonça vers Ludivine.

 

- Lulu ! T’es enfin là ! Tu m’as manqué ! s’écria Mathis, le petit frère de la comédienne.

 

C’était la seule personne que la jeune fille était heureuse de retrouver. Son premier (maigre) sourire lui fut d’ailleurs adressé. Non pas que Ludivine n’aimât pas ses parents, loin de là, elle leur en voulait seulement de l’avoir arrachée aux bras de Xavier…sans lui avoir laissé le choix.

 

- Ludivine…appela une voix grave, si douce que chaque mot prononcé était un véritable plaisir pour les oreilles.

 

La petite blonde releva la tête et se sépara à contrecœur du corps de Mathis. Son père, Jeff, se tenait debout, appuyé contre l’encadrement donnant sur la cuisine, et la scrutait avec beaucoup d’attention. Il s’échappait de l’homme quelque chose qui décourageait toute personne voulant se dresser contre lui. Ludivine pensait que c’était la majesté.

 

- C’est bon de te revoir parmi nous, lança simplement Jeff en la serrant dans ses bras, avant de rajouter : je suis ravi que tu sois là.

 

En temps normal, Ludivine aurait apprécié ce geste, mais elle résista à la tentation d’embrasser son père. Quelque chose en elle lui conseillait de se révolter.

 

- Pas moi !

 

Toute la famille sursauta. Le premier réflexe d’Éva fut de fermer la porte, pendant que le visage de son mari virait au rouge.

 

- Je te demande pardon, Ludivine ?

- Pourquoi, moi, je suis obligée de venir quand Maman est là, alors qu’avant, elle ne venait jamais alors que je l’attendais toute l’année ?! Et qui te dit que j’avais envie de redescendre ici pour deux semaines d’abord ?! Moi, je n’ai pas d’ordres à recevoir de…

 

Elle s’arrêta aussitôt, après s’être rendue compte que c’était à son père qu’elle parlait, et qu’il pouvait lui ordonner quoique ce soit tant qu’elle n’avait pas 18 ans. Cette injustice la rendit muette et les robinets de ses yeux s’ouvrirent légèrement.

 

- T’as pas le droit de me faire ça…brailla la comédienne.

- Ben voyons ! se moqua son père, essayant tant bien que mal de dissimuler sa colère. Tu connais le chemin de ta chambre.

 

Ludivine ne répondit pas et s’éloigna avec dignité vers l’escalier menant à son repaire. Arrivée au seuil du premier étage, elle hurla pour briser le silence tombé sur la famille.

 

- J’en ai marre !

- Boucle-la ! rugit Jeff.

 

La porte de la chambre claqua et les murs vibrèrent si fort que Mathis en eut des frissons dans le dos. Romain tentait de dissimuler un rire ironique, et Jeff était sur le point d’exploser.

 

- Je vais aller lui toucher deux mots…grogna le père de la petite blonde, en remontant les manches de sa chemise.

 

Cependant, il ne gravit pas l’escalier, car sa femme lui avait barré le passage. À cet instant même, il sut qu’il ne pourrait pas confier le fond de sa pensée à sa fille. Éva avait toujours été du côté de Ludivine, et si elle décidait qu’elle ne méritait pas d’être grondée, ce n’était pas son mari qui allait s’y opposer.

 

- Tu sais ce que c’est, Jean-François, lança-t-elle sérieusement.

 

Et quand elle l’appelait par son véritable prénom, il savait qu’elle ne plaisantait pas du tout et qu’il ferait mieux de s’assagir.

 

- Mais quand même, riposta l’intéressé, refuser de voir sa propre famille pour…

- Tu sais ce que c’est, répéta Éva, les mains sur les hanches.

- Je sais, mais ce n’est pas pour ça que…

- J’ai fait aussi la gueule à mes parents pendant des mois pour la même raison, et juste pour tes beaux yeux.

- Arrête Éva, c’était il y a longtemps.

- C’était quand j’avais l’âge de Ludivine.

- Oui, mais nous deux, c’est pas pareil, c’est…

- Ah bon ? C’est pas pareil ? s’énerva la jeune femme, dont le ton montait de plus en plus.

- Jeff, tu ferais mieux de fermer ta gueule si tu ne tiens pas à ce qu’elle te foute à la porte, conseilla Romain, hilare.

- Écoute ton meilleur ami, chéri, il est moins con que toi !

 

Avant qu’elle ne s’enflammât dangereusement et ne mît le feu à la villa, Jeff eut tôt fait d’enlacer Éva Maël et de déposer un rapide baiser sur son front.

 

- Okay, okay, t’emballes pas ! Et si t’allais parler à ta fille, hein ?

- Ta fille, tu veux dire ?

- Vous voulez que je vous commande un notaire à domicile pour le divorce express ? ironisa Romain. De toute façon, vous pourrez toujours vous remarier dans l’après-midi. On est samedi.

- Je retire ce que j’ai dit Jeff, ton meilleur ami est deux fois plus con que toi.

 

Sans un mot de plus, elle s’élança vers le premier étage, laissant ainsi seuls Jeff, Mathis et Romain. La chambre de Ludivine était la première porte à droite du couloir. Sa mère ne prit pas la peine de frapper et entra en silence.

 

La pièce était plongée dans la pénombre ; la comédienne avait pris soin de rabattre les rideaux. Son sac était posé contre son bureau, et les vêtements qu’il contenait dispersés un peu partout sur la moquette. Ludivine était étendue en pleurs sur son lit douillet, le visage enfoui contre une dizaine de pulls, ceux de Xavier. Elle avait pensé à tous les emporter pour avoir l’impression qu’il était là, avec elle.

 

Éva s’approcha timidement de sa fille et s’assit à ses côtés. Voir sa fille dans un pareil état lui brisait le cœur, et elle employa de gros efforts pour la réconforter. Quand la petite blonde eut reçu sa dose nécessaire de bisous et câlins pour se remettre de ses émotions, elle put à nouveau parler et se confier à sa mère.

 

- Je ne l’aime plus, Papa. Il est méchant avec moi.

- Tu dis ça parce que tu lui en veux, Ludivine. Ne sois pas trop dure avec lui, tu sais que tu lui manques beaucoup quand tu n’es pas là.

- C’est pas une raison pour me séparer de mon Xavier.

- Deux semaines, Lulu. C’est rien. Tu ne connais rien à la distance. Tu savais que j’ai déjà été séparée de ton père pendant neuf mois, alors que j’avais à peine vingt ans et que je voulais passer tout ce temps-là dans ses bras ?

- Non ?!  s’écria la petite blonde, choquée.

- Sans rire. Je le voyais un week-end par mois, parce qu’il faisait le déplacement lui-même. J’étais à New York à l’époque. C’était dur, Lulu, je sais ce que tu ressens. Mais là, estime-toi chanceuse…c’est juste deux semaines.

 

La comédienne hocha la tête, tandis que sa mère arborait un sourire gêné.

 

- Ton père t’aime tellement, Ludivine, que ce serait lui faire du mal de le faire souffrir en refusant de le voir. Et, lui, il a toujours été là depuis ta naissance. Tout le monde n’a pas ce mérite-là. Moi la première. Alors par pitié, ne lui en veut pas.

 

Éva Maël balaya d’un geste la tristesse gravée sur son visage et jeta un regard pétillant d’impatience à sa fille.

 

- Allez, parle-moi de Xavier.

 

 

 

 

- Nom, prénom, âge, casier judiciaire, quartier de Paris, école suivie, fréquentations, ordonna Jeff en s’asseyant à la table de la cuisine. Je veux tout savoir sur ce Xavier.

- Tu sais déjà tout, souligna Romain, exaspéré. Et quel casier judiciaire ? Xavier n’est pas connu des services de police.

- Ludivine m’a déjà fait le coup en sortant avec un délinquant.

- Oui, mais bon, si tu regardes la tête du délinquant en question et celle de Xavier, tu remarqueras une légère différence. Et puis d’abord, l’ex de Lulu ne fumait que des cigarettes.

- Et alors ? répliqua Jeff, de mauvaise foi.

- Il est gentil, Xavier, récita Mathis. C’est Lulu qui me l’a dit.

 

Les grognements du père s’amplifièrent et Romain félicita le petit frère de Ludivine pour sa bonne action.

 

- Tu devrais ne pas croire à tout ce que te dit ta sœur, lança Jeff en se servant un pastis bien frais. La dernière fois qu’elle t’a aidé en maths, tu t’es récolté un deux sur dix.

- Et bien, on a qu’à adopter Xavier, comme ça, ton fils sera le premier de la classe.

- Ben voyons ! Et puis encore ? Faut pas sortir de Polytechnique et aider mon fils en maths pour monter dans mon estime ! ironisa le père de Ludivine, sans savoir qu’il tapait dans le mille. J’attends bien plus que ça.

- Mais Jeff, quoique tu penses, Xavier sort de Polytechnique.

 

Jeff s’étrangla avec son pastis si bien que Mathis s’affola et tapota du mieux qu’il put sur le dos de son père. Il toussota un peu et sembla reprendre ses esprits. Il planta son regard dans celui de Romain et le fixa gravement. C’était impossible. Si Xavier sortait de Polytechnique, Ludivine le lui aurait certainement dit.

 

- Non. Arrête tes conneries, Romain.

- Je te jure ! Tu ne savais pas ?

- Je sais qu’il est soi-disant intelligent, mais il ne sort pas de Polytechnique.

- Et pourquoi pas ?

- Parce que les polytechniciens n’existent pas dans l’entourage de Ludivine. Et puis, c’est rare d’en voir, en général. Et d’abord, il ne peut pas être dans cette école, puisqu’il est dans la classe de Benji. Ah, ça t’en bouche un coin, hein ?

- N’empêche, s’il n’avait pas convaincu Lulu de prendre le train en partance pour Arles, elle serait bien volontiers restée à Paris, crois-moi. Tu dois à Xavier la présence de ta fille, Jeff.

- Gnagnagna…

 

Au même moment, Éva fit son apparition dans la cuisine, rayonnante comme à son habitude. La discussion avec sa fille venait de se terminer, et s’était apparemment très bien passée. Jeff, piqué par la curiosité, attendait avec une impatience mal contenue le compte-rendu de sa femme.

 

- Lulu ne va pas tarder à descendre, dit-elle seulement au plus grand désespoir de son mari. Et Jeff, évite de faire des boulettes pour une fois

- Moi ? Mais je n’ai jamais rien fait !

- Genre…répliquèrent Mathis et Romain à l’unisson.

 

Comme promis à sa mère, Ludivine décida de montrer son petit nez parsemé de tâches de rousseurs. Elle flottait dans un pull de Xavier, et se demandait vraisemblablement si elle devait se jeter dans les bras de son père ou pas. En tout cas, pas sans avoir grignoté quelque chose d’abord.

 

- Espèce de goinfre, lança Jeff en voyant sa fille farfouiller dans un petit placard.

- Je mange quand je suis contrariée !

- T’as une vie de pacha et tu trouves le moyen d’être contrariée ?

- Oui, déjà parce que y’a plus de cookies ! Et ensuite, parce que tu es méchant avec moi.

 

Elle posa sa boîte de biscuits sur la table, et s’assit sur les genoux de son père, droite comme une règle.

 

- Mais bon, comme je suis très gentille et que je t’aime quand même, je te pardonne. Mais, en retour, je veux que tu fasses le plein de cookies. Et si tu achètes des chamallows, je te ferais un câlin.

 

Voyant la tête de Jeff, Éva et Romain ne purent s’empêcher d’éclater de rire.

 

- Alors, toujours content d’avoir retrouvé ta fille ?

 

La petite blonde les regarda sans comprendre, avant de coller un bisou sur la joue de son père et les miettes du biscuit qui allaient avec.

 

 

 

 

Durant les trois jours qui suivirent, Ludivine prit peu à peu l’habitude de revivre avec ses parents et son petit frère. Sa relation avec son père était au beau fixe, et Éva constatait parfois avec amertume que la jeune fille était bien plus proche de Jeff qu’elle ne l’était avec elle. Elle parlait tellement de Xavier, que ses parents regrettaient que ce dernier ne soit pas là pour la faire taire.

 

Mathis avait trouvé une nouvelle joie de vivre : sa sœur l’aidait à faire ses devoirs, et il était au moins certain d’avoir de bonnes notes en français, anglais et histoire. Pour ce qui était des maths, entre autre, c’était son père qui se chargeait de l’aide aux devoirs, Ludivine étant trop mauvaise pour expliquer les fractions simples à son petit frère.

 

Enfin, Mathis adorait sa sœur, parce qu’il était très facile de la battre à la Wii.

 

- Game over Lulu ! Après une minute de jeu ! Un record ! Tu sais que je t’adore ?!

 

 

 

 

Claire n’en revenait pas ! Elle en avait même perdu l’usage de la parole ! Éva Maël était là, devant elle (devant elle, mon dieu, c’était incroyable !), en train de discuter tranquillement avec Benjamin à propos des devoirs de Ludivine.

 

- Donc, ça, c’est du travail personnel à la maison. Et à part apprendre son texte pour le spectacle, c’est tout ce qu’elle doit faire ?

- Non. Il y a aussi un court-métrage sur le sujet de son choix.

- Un court-métrage ? Mais Benji, Lulu est comédienne, pas réalisatrice !

- Éva, je t’en prie, ne commence pas. Le Programme, c’est le Programme.

- Oh oui, excuse-moi, je l’oubliais, ton Programme, ironisa la maman de Ludivine.

 

Assise sur le parquet, la Section A (presque au complet) observait Éva Maël se chamailler avec leur professeur. Claire la trouvait si naturelle et si jolie. Elle était tellement envahie par son état de béatitude qu’elle n’entendait plus Mathilde lui raconter sa dernière coloration de cheveux.

 

En effet, Mathilde allait chez le coiffeur toutes les trois semaines, et depuis hier, elle arborait un carré plongeant d’une couleur bleu pâle. Ludivine allait probablement avoir un choc émotionnel à son retour à Paris, mais Mathilde se fichait des impressions des autres. Cela rentrait dans sa logique.

 

Éva et Benjamin papotaient toujours entre eux, lorsque Xavier fit une interruption bruyante dans la salle de répétition, et tout le monde reporta son attention sur lui.

 

- Putain, Emma ! Ne commence pas à me casser les couilles maintenant, je ne suis pas d’humeur ! rugit le comédien, alors que la blonde le suivait en colère.

- Tu m’avais promis que tu m’aiderais !

- Fais pas chier !

 

Évidemment, si le jeune homme avait noté bien avant la présence d’Éva Maël, il ne se serait pas montré aussi vulgaire et ne se serait pas laissé tomber près d’Aline aussi légèrement qu’un sac de patates. Il ruminait dans sa barbe naissante ; il ne s’était pas rasé depuis que Ludivine était partie. Benjamin semblait frustré ou honteux, personne n’aurait su dire exactement.

 

- Xavier, tu connais la discrétion ?

 

L’intéressé allait répondre sèchement mais son regard croisa celui d’Éva Maël, et il comprit aussitôt qu’il avait commis une énorme gaffe en se conduisant comme un malotru devant elle. Il aurait donné n’importe quoi pour disparaître sous terre immédiatement.

 

Le jeune homme avait pourtant eu du mal à la reconnaître, car elle ne ressemblait en rien à la femme qu’il avait admirée sur tant de photos. Non, Éva Maël ne portait pas des talons-aiguilles, elle était aussi petite que Ludivine, elle ne se maquillait pas vraiment, et elle portait la jeunesse et la bonne humeur sur son visage. Cela était bien suffisant.

 

- Xavier ? répéta-t-elle. Xavier ?! Le Xavier de ma fille ?!

- Euh…je…balbutia le comédien, alors que tous les élèves l’observaient avec curiosité.

- Oui, le Xavier de ta fille, confirma Benjamin d’un air lassé.

- Oh !

 

Le visage fendu en deux, elle se rua sur lui pour lui coller deux grosses bises sur les joues. Ensuite, elle releva le jeune homme penaud et le pomponna comme s’il s’agissait de son propre fils.

 

- Toi et moi, faut qu’on cause ! lança-t-elle en lui adressant un adorable clin d’œil.

 

 

 

 

- Tu as quoi ?! s’étrangla Ludivine, en lâchant aussitôt la manette de la Wii appartenant à Mathis.

 

Son petit frère en profita pour mener la partie à son avantage. Très vite, « Game over Lulu » apparut sur l’écran de la télévision. La petite blonde s’en soucia comme d’une guigne. Elle s’était inquiétée toute la journée sur l’absence anormale de sa mère (il ne fallait pas quinze heures pour faire les courses !), et voilà que celle-ci lui annonça tranquillement qu’elle était partie à Paris. Paris, bon sang ! Son père avait été très probablement dans la confidence, et ne lui avait rien dit !

 

- J’ai vu ton Xavier à Paris. Je suis allée remettre le chèque de ton école à Benji, ainsi que récupérer tes devoirs, et je l’ai croisé. Dis donc, c’est un mec qui sait se faire remarquer, tu ne trouves pas ?

- Tu es allée à Paris sans moi ?! Et tu as vu mon Xavier sans moi ?! brailla de plus en plus fort la comédienne, scandalisée.

- Quand tu auras fini de faire du fla-fla, j’aurai quelque chose à te donner de sa part, lança malicieusement Éva.

 

Aussitôt dit, aussitôt fait. Les larmes de crocodile disparurent du visage de Ludivine, et ses yeux s’illuminèrent de milles feux.

 

- Maman ! Donne-le-moi ! supplia la petite blonde, agenouillée devant sa mère en moins d’une seconde.

- Le mot magique ?

- S’il te plait ma Maman que j’adore et que j’aime plus que tout au monde ! brama l’intéressée.

- Qu’est-ce que c’est bon à entendre…soupira Éva, en lui tendant un sac en plastique.

 

 

 

 

Le soir, à l’heure du souper, Jeff n’en menait pas large, et pulvérisait du regard le nouveau pull que Ludivine portait avec fierté.

 

- Pourquoi tu grognes encore, mon chéri ?

- Parce que tout le monde rencontre ce mec, sauf moi !

- Papa, il est jaloux.

- Pas du tout. C’est juste que je ne comprends pas pourquoi vous bavez toutes dès que vous parlez de Xavier.

- Il est si charmant…expliqua rêveusement Éva.

- Mon Xavier, c’est le meilleur… Je me languis de le revoir pour lui faire plein de bisous.

- C’est bon, Ludivine, n’en rajoute pas, railla Jeff.

 

 

 

 

La fin de la première semaine s’écoula lentement. Ludivine comptait les heures qui la séparaient de son retour à Paris. On ne pouvait pas dire qu’elle délaissait Xavier ; au contraire, elle s’appliquait bien à l’appeler six fois par jour. Ses appels étaient même rythmés aux repas et casse-croûtes de la journée : petit-déjeuner, collation de dix heures (ou plus tard, selon l’heure à laquelle elle se réveillait), déjeuner, goûter, dîner, et en-cas de la nuit. L’en-cas de la nuit était celui que Xavier appréciait le moins, parce que la petite blonde lui téléphonait vers quatre heures du matin…et c’était toujours difficile à supporter.

 

Seulement voilà. Depuis quelques jours, Ludivine s’était rendue compte que quelque chose ne tournait pas rond dans sa famille. Son père semblait nerveux, et renvoyait Mathis à ses devoirs lorsque celui-ci essayait de dire quelque chose à sa sœur. Éva Maël, enfin, jetait des coups d’œil incessants à sa fille et affichait constamment un sourire mystérieux.

 

« Ça y est… Ils divorcent pour de bon ! » pensa la comédienne, terrifiée.

 

- Ludivine, tu veux bien venir voir ? appela sa mère depuis la cuisine où elle préparait une tarte aux cerises.

 

« Ils vont me l’annoncer, ils vont vraiment divorcer cette fois-ci… ».

 

Elle s’exécuta sans motivation et laissa tomber le synopsis de son court-métrage.

 

- Tu peux aller m’acheter un bon kilo de cerises, s’il te plait, Lulu ?

- Quand ?

- Maintenant.

- Mais je ne peux pas ! Je dois rappeler mon Xavier !

 

Ledit Xavier qui, au passage, ne répondait plus depuis l’en-cas de la nuit, aux alentours de trois heures du matin… Ludivine trouvait normal de s’inquiéter, mais sa mère se fichait bien que Xavier prît sa douche ou rattrapât sa nuit écourtée.

 

- Tu le rappelleras au retour de l’épicerie.

- Mais Maman ! protesta la comédienne.

- Ludivine, tu vas acheter ces cerises, oui ou merde ?! s’énerva la jeune femme.

- Mais…

- Ludivine, tu as entendu ta mère ? tonna Jeff.

 

Sans un mot, la jeune fille saisit la monnaie que sa mère avait laissée sur la table pour cet effet, et quitta la villa en claquant la porte.

 

- Pouh…j’ai vu le moment où on n’arrivait pas à s’en dépèguer ! soupira la mère de la petite blonde. Tu crois qu’elle va m’en vouloir ?

- Pas pour longtemps, sourit son mari.

 

Pendant ce temps, Ludivine jurait sur le chemin de l’épicerie, et maudissait ses parents d’être si cruels envers elle. Le marchand l’accueillit avec une joie apparente, ravi de la revoir après plusieurs mois d’absence. Elle ne lui accorda qu’une maigre attention, et ne donna aucune nouvelle de ses parents qu’il lui réclamait.

 

Au retour, elle traîna sur le trottoir, n’ayant pas la moindre envie de faire face à la mauvaise humeur de ses parents. Un coup de vent passa à côté d’elle, un jeune homme aussi, et très vite, Ludivine s’aperçut qu’il lui avait volé son sac de cerises.

 

- Mes cerises ! Rends-moi mes cerises ! Espèce de chacal ! beugla Ludivine en le poursuivant, alors qu’il était déjà loin.

- Mais naturellement, répondit poliment son voleur, qui n’était pas si inconnu que ça, puisqu’il s’agissait de Xavier.

 

Quand il stoppa sa course pour se tourner vers elle, la petite blonde lui rendra dedans, aussi fort qu’un bélier défonçant une porte. Elle reconnut son petit-ami juste avant de l’insulter de « chacal à fromage ».

 

- Oh ! Mon Xavier ! hurla la comédienne, de joie cette fois-ci, en se jetant à son cou pour l’embrasser.

- Lui-même.

- Mais qu’est-ce que tu fais là ?!

- Tes parents m’ont invité, et m’ont offert le voyage.

- Ah bon ?

- Oui.

- Ils sont gentils, mon Papa et ma Maman.

 

Toutes ses rancunes envers eux s’étaient envolées et elle comprit finalement que s’ils l’avaient envoyé en corvée de course, c’était pour intercepter le comédien sur le chemin. Pas de quoi en faire un drame donc.

 

 

 

 

Jeff jubilait. Il avait enfin en face de lui le fameux Xavier, adulé par sa femme, tant adoré par sa fille, et si respecté par son meilleur ami. Et le père de Ludivine devait bien avouer que le comédien ne ressemblait pas à un délinquant dont la principale activité serait de brûler les voitures.

 

- Ludivine, s’il te plait… J’aimerais dire bonjour à tes parents…si tu me lâches, bien sûr.

 

La petite blonde s’exécuta aussi rapidement qu’elle le put, un peu gênée de paraître accro devant sa famille. Éva fut la première à saluer Xavier, avec une joie apparente de le savoir là, dans leur villa familiale. Elle l’embrassa sur les deux joues avant de lui demander s’il allait bien. Réponse positive bien que légèrement timide. La belle assurance du comédien s’était envolée sous la pression du regard perçant et examinateur de Jeff.

 

- Xavier, voici mon fils Mathis, et mon mari Jean-François.

- Jeff, répliqua l’intéressé, irrité. Jeff. Jean-François, ça fait ringard. Tandis que Jeff, ça fait american comme ton Jay qui te court après depuis dix ans.

- Ah l’amour…ironisa Éva Maël.

- Moi, je l’aime bien, Jay, fit alors Ludivine.

- Moi aussi, ajouta Mathis. Il m’offre plein de cadeaux quand il vient.

- Je vous interdis de pactiser avec l’ennemi. Il essaie de vous amadouer pour avoir la mère et les enfants dans le même panier. Enfin, on n’est pas là pour débattre sur cet enfoiré de première, grogna Jeff en tendant la main au petit-ami de sa fille. Enchanté Xavier. Il était temps que je fasse ta connaissance, parce qu’elles m’ont trop saoulé, les deux là… Au fait, Éva, ça sent le cramé. Ce ne serait pas ta tarte, par hasard ?

- Merde !

 

Son épouse détala comme un lapin vers la cuisine, terrifiée à l’idée de faire manger un bout de charbon à Xavier pour le dessert.

 

- Elle est aussi douée en cuisine que Ludivine, raconta Jeff au comédien.

- On est mal barrés alors.

 

La jeune fille, absolument pas vexée, observa son père offrir un sourire sincère à son petit-ami. Aucun doute là-dessus : une complicité venait de naître. C’était du rapide.

 

 

 

 

C’est la chaîne-hifi qui réveilla Xavier, le lendemain matin. Lentement, il émergea de son doux sommeil, et plaqua ses mains sur ses oreilles sans retenir une grimace. Était-il possible qu’un appareil de ce genre puisse atteindre un volume pareil ?

 

« Laisse-moi t’aimer ! Rien qu’une nuit… »

 

- Laisse-moi ! Rien qu’une nuit ! hurlèrent en cœur Éva et Jeff, dans la cuisine.

 

« Faire avec toi, le plus grand de tous les voyages… »

 

- Laisse-mooooi… Laisse-moi t’aimeeeer !

 

Xavier jeta un œil désespéré à Ludivine, que rien ne pouvait réveiller. Elle affichait un léger sourire, et le jeune homme fut surpris de l’entendre marmonner quelques mots qui ressemblaient vaguement à la chanson qui résonnait dans toute la villa.

 

- Plus beau…plus long…des voyages… Nanana… Laisse…

- Et ben… Quelle famille ! souffla le comédien, déboussolé.

 

Ce ne serait certainement pas sa propre mère qui chanterait à tue-tête dans la cuisine ! Sa famille n’avait jamais été aussi joyeuse que celle de Ludivine. Elena était trop pessimiste pour faire autre chose que ses mots croisés, et il n’y avait pas de jeune enfant comme Mathis pour « rafraîchir » le reste de la famille de Xavier.

 

Il se leva en silence pour ne pas réveiller Ludivine, et quitta la pièce à pas de loup. La porte de la chambre de Mathis était grande ouverte, et la pièce silencieuse. Xavier eut une pensée pour le garçon, qui se trouvait en ce moment-même à l’école.

 

Arrivé à la cuisine, il découvrit les parents de Ludivine, étroitement enlacés dans un slow romantique, et qui s’arrachaient les cordes vocales sur la chanson qui l’avait réveillé.

 

- Hey, déjà levé ? Bien dormi ? s’enquirent les parents de Ludivine qui s’arrêtèrent quand ils l’eurent aperçu.

- Oui, répondit-il en s’asseyant mollement à la table.

 

Il s’étira sans retenir un bâillement, pendant qu’Éva s’empressait de lui servir son petit-déjeuner. Elle en profita pour déposer un baiser sur son front, comme elle l’aurait fait avec Mathis ou Ludivine. Ce geste parut surprendre le jeune homme, mais il ne fit aucune remarque sur ce sujet.

 

Durant les jours qui suivirent, Xavier apprit à mieux connaître la famille de Ludivine, et vice versa. Il se rendait utile avec tout le monde, et Mathis avait trouvé en lui un adversaire redoutable à la Wii, ce qui le changeait de sa sœur. Redoutable, mais certainement pas imbattable. En effet, le comédien, qui gagnait très souvent contre Pierrick, se faisait maintenant marcher sur les pieds par un jeune garçon de neuf ans… Et ce n’était pas forcément pour lui plaire. Cependant, il était un excellent prof, et depuis lundi, la maîtresse de Mathis s’étonnait de la forte hausse de ses notes en maths. Il était capable de refaire ses exercices seul et sans erreurs, et raflait tous les points sur son passage.

 

Jeff s’était lui aussi attaché à Xavier, mais d’une façon bien différente. Ils discutaient souvent ensemble, au sujet de choses qui n’intéressaient aucun autre membre de la famille. Ils pouvaient ainsi parler trois heures sans s’arrêter de sujets d’actualité ou de culture générale. Xavier avait appris que Jeff avait été sopraniste dans sa jeunesse jusqu’à ce que sa voix ne mue, et bien que l’intéressé n’en parlât jamais, le comédien n’avait pas de mal à l’imaginer dans une chorale. Le jeune homme n’avait pas pu faire l’impasse sur sa solide discrétion et sur la bienveillance qu’il portait à sa famille. En effet, Jean-François se cachait presque pour écrire, pour embrasser sa femme tendrement, ou pour être affectueux avec sa fille.

 

Enfin, Éva aimait Xavier comme son propre fils. C’était aussi simple que cela.

 

- Hum Xavier…c’est vrai que tu as fait Polytechnique ? demanda Jeff, un beau matin.

- Non, pourquoi ?

- Alors Ludivine nous a raconté n’importe quoi. Pour pas changer.

- J’ai juste passé le concours.

- Et tu l’as raté ?

- Non. Je l’ai réussi. Mais bon…voilà quoi.

 

Les parents de Ludivine virent aussitôt à quoi il faisait allusion, et s’accordèrent cinq minutes de réflexion. La petite blonde marmonna quelque chose d’incompréhensible, mais qui ressemblait vaguement à « c’est un comédien ».

 

- Tu voulais vraiment aller là-bas ? voulut savoir Éva.

- Ouais. J’avais envie d’être ingénieur. Ou quelque chose dans le genre.

- Mais Xavier, ce n’est pas perdu, non ? Si tu arrives à faire des économies, et si on t’aide…

- Non ! s’écria le jeune homme. Vous ne m’aiderez pas à financer mes études, point barre !

- Ben voyons, tu n’y arriveras jamais seul, se moqua Jeff, tu n’as pas une limite d’âge pour l’inscription ?

- Si. Après 22 ans, c’est foutu.

- Même avec une dérogation ?

- Après 22 ans, c’est foutu, répéta le comédien. De toute façon, j’ai laissé tomber cette voie depuis longtemps.

- Oui, parce que mon Xavier, il est comédien, s’exclama Ludivine.

- Je pense que…commença Éva Maël.

- Et il se débrouille très bien au théâtre mon Xavier…

- Je dois connaître des personnes qui m’en diront plus sur les bourses accordées et sur l’inscription…

- Et mon Xavier, c’est le meilleur de l’école, il est très bien sans les maths…

- Bien, Xavier, compte sur moi, je vais me renseigner dès aujourd’hui.

- Nous, les comédiens, dans le théâtre nous sommes nés, dans le théâtre nous resterons…

- Merci Éva.

- Pas vrai, mon Xavier, que jouer c’est comme le vertige ?

- Mais je t’en prie mon chou, si tu veux aller à Polytechnique, je ferai tout mon possible pour t’aider.

- Le théâtre, c’est ce qu’il y a de mieux au monde, pas vrai mon Xa…

- Ludivine, boucle-la, lança Jeff, surpassé.

 

Le petite blonde piqua du nez et, vexée, se leva pour aller bouder dans sa chambre. Et peut-être pleurer. Elle jugerait selon son moral une fois allongée sur son lit. Xavier la regarda s’éloigner, légèrement affligé.

 

- Elle n’aime pas le changement, expliqua Jeff au jeune homme. Elle a énormément de mal à s’habituer aux nouveautés. Il lui faut toujours un certain temps d’adaptation.

 

En effet, ce n’est qu’une heure plus tard que la jeune fille redescendit après une longue méditation et une séance de pleurs. Elle déposa un bisou sur la joue de son père, avant d’aller s’asseoir sur les genoux de Xavier pour lui faire un câlin. Elle le pardonna d’avoir trop de projets.

 

- Mais tu ne m’enlèveras pas de la tête l’idée que tu es comédien !

 

Ses parents sourirent en cachette, avant de s’activer sur les dernières tâches de la matinée. Éva se proposa d’aller chercher Mathis à l’école, pour éviter de faire la cuisine, qui était pour elle une véritable corvée.

 

- Qu’est-ce qu’on mange à midi ? demanda Ludivine, quand sa mère fut partie.

- Barbecue.

- Mmmh…miam-miam, commenta la petite blonde, tout en se léchant les lèvres avec le petit bout de sa langue rose.

- C’est ton premier barbec’, Xavier ? voulut savoir Jeff.

- Oui.

- Alors, je vais t’apprendre.

 

Ce dernier accepta volontiers, et bien qu’il ne le montra pas, il était ravi que le père de Ludivine lui montrât comment faire. Il en était même un peu ému, car c’était le genre de chose qu’un père apprenait à son fils. Comme Xavier n’avait pas de père au sens figuré, ce n’était pas une personne comme Jeff qui avait l’habitude de veiller sur lui.

 

Ils sortirent sur la terrasse pour préparer le barbecue. Ludivine resta malgré elle à l’intérieur, prise par le scénario de son court-métrage qu’elle avait beaucoup de mal à écrire.

 

- Que penses-tu de notre petite famille ? demanda Jeff, en faisant craquer une allumette.

- Elle est super. Je crois même que je vous envie un peu…

 

Sur le moment, Xavier ne comprit pas pourquoi Jeff souriait tristement, sans détacher son regard du feu. Il avait même peur d’avoir dit quelque chose de blessant et culpabilisait légèrement.

 

- Tu sais, Xavier, il ne faut pas se fier aux apparences. Ça n’a pas toujours été comme ça. Tu arrives durant une période calme. Ludivine fait ses études à Paris, donc elle n’est pas souvent à la maison. Éva n’est pas très occupée en ce moment, donc l’ambiance n’est pas vraiment tendue. Bref, pour le moment, c’est presque le bonheur.

- Presque ?

- Oh il y a eu et il y aura toujours des petits trucs… Le mois dernier, un petit voyou a volé la voiture d’Éva. Elle était en crise, je ne te raconte pas. Vas-y, essaie de la calmer quand elle s’énerve… Mais ça, ce n’est vraiment rien comparé au jour où nous avons divorcé, Éva et moi, tellement ça n’allait plus.

- Non !

 

Xavier avait crié sans s’en rendre compte. Comment un couple si parfait, une icône de l’amour passionné comme Jeff et Éva, avait pu divorcer ? Les apparences…, disait le père de Ludivine.

 

- Mais comment ça se fait ? Vous vous êtes remariés ? Et pourquoi vous…

- Du calme, s’exclama l’intéressée, qui trouvait la situation amusante. Du calme, je vais tout t’expliquer !

 

Xavier se ressaisit tout en attisant le feu du barbecue. Il était impatient mais Jeff prenait tout son temps pour lui raconter les faits.

 

- Je crois que nous avons toujours eu des problèmes… Déjà, quand on a commencé à sortir ensemble à l’âge de 14 ans, ça n’allait pas, parce qu’on ne supportait pas la distance qui nous séparait. Notre histoire n’était pas vraiment faite pour durer mais…va savoir pourquoi, elle a duré assez longtemps pour qu’on se marie et qu’on ait deux enfants. Quand elle avait entre 18 et 21 ans, Éva était appelée ailleurs, et n’était donc presque jamais là. Bon, on se prenait pas trop la tête avec ça, parce qu’on n’était pas encore assez responsables… Et on était que deux, donc les choses étaient plus simples. Et puis, Éva a eu Ludivine. Elle avait seulement 22 ans.

- Ah, je vois déjà, fit Xavier. Un bébé dans un début de carrière…dur à gérer.

- Dur à gérer ? Tu l’as dit ! Pourtant, Éva a fait une pause, je t’assure. On s’est occupés tous les deux de Ludivine mais… Il faut se nourrir, Xavier, tu comprends ? Elle n’a pas pu rester en « congés » une éternité. Donc, Éva bossait, et moi, comme je bossais à la maison, en général, je m’occupais aussi de Ludivine. Tout ça, pour te dire, Xavier, que lorsque Ludivine nous a fait sa crise d’adolescence avec un peu de retard, elle reprochait essentiellement à sa mère de n’être jamais là. Ça se passait très mal à la maison, et Éva en a pris un sacré coup. Un peu avant ça, Mathis est arrivé, donc Ludivine a bien vu que sa mère s’occupait de lui, et… En fait, Éva a tiré l’expérience de son premier enfant, et elle s’est montrée beaucoup plus attentive avec Mathis qu’elle ne l’a été avec sa sœur.

- Vous avez divorcés à cause de Ludivine ?

- Non. Disons que la crise d’adolescence de Ludivine nous stressait, et Éva et moi, on n’arrêtait pas de s’engueuler. Et puis un jour, on en a eu marre, on a décidé de divorcer. Mathis n’avait pas vraiment réalisé, il était trop jeune pour comprendre. Mais Ludivine l’a très mal pris. La situation a empiré.

- C’est bizarre mais...je n’arrive pas à imaginer Lulu en train de faire culpabiliser Éva…

- Elle l’a fait, je te jure. Elle lui faisait des reproches ouvertement…et parfois, c’était méchant. Pourtant, elle aime énormément sa mère, mais disons qu’elle-même était blessée par son absence…

- Et pour finir, vous avez vraiment divorcés ? Comment vous avez renoué ?

- Devant le jugement de divorce. Ni Éva, ni moi n’avons pu signer. Au dernier moment, on a renoncé, et on s’est bien marrés devant le notaire.

 

Stupéfait, Xavier observa Jeff éclater de rire tout seul. Le père de Ludivine riait tellement qu’il en arrivait même à essuyer les larmes qui perlaient à ses yeux.

 

- Ah, Xavier, la tête que tu tires ! Mais cette situation était tellement drôle…on n’a pas pu s’empêcher de rigoler. Non, mais quand on y repense, on se dit « Toi et moi ? Divorcés ? »…mais c’est impossible, Xavier. Après toutes ses années, on ne pouvait pas en arriver là… Il y a eu de très mauvais moments, c’est vrai mais…de très bons moments aussi, et c’est ensemble qu’on les a passés. Et puis, en fait, au fond de nous, on s’aimait encore. Et ça nous emmerdait de divorcer. C’était aussi très orgueilleux.

- Vous êtes absolument incroyables ! soupira le comédien. Franchement, je n’ai jamais vu un couple se péter de rire devant un notaire pour leur divorce !

- Éva et moi, on est sur la même longueur d’onde… On est du genre à se foutre de la gueule des autres. C’est pour ça que ça dure entre nous.

- C’est…disons…original. Et Ludivine ?

- Ben figure-toi que dès qu’elle a su qu’on ne divorçait pas, elle s’est calmée, s’est excusée et est restée dans les jupes de sa mère pendant deux semaines !

- Ça ne m’étonne pas.

- C’est Ludivine, cherche pas.

 

L’intéressée montra d’ailleurs le bout de son nez, lassée de ne pas arriver à en découdre avec son court-métrage. Jeff devina sans difficultés, au vu de sa façon de s’approcher et de son air innocent, qu’elle allait lui réclamer quelque chose.

 

- Papa, j’ai faim !

- Oui.

- Ben…j’ai faim.

- Et alors ?

- Je peux grignoter un petit quelque chose ?

- Non. Sinon tu ne vas rien avaler à midi.

- On mange quand ?

 

Son père n’eut pas eu le temps de répondre car sa femme et son fils étaient de retour, et venaient d’apparaître sur la terrasse.

 

- Alors, Papa, quand c’est qu’on mange ? répéta Ludivine, impatiente.

- Oui, c’est vrai ça, Jeff… Quand est-ce qu’on mange ? approuva Éva, après l’avoir embrassé avec discrétion. C’est pas pour dire…mais je commence à avoir un peu faim, moi aussi.

 

Xavier n’aurait su dire si Jeff était agacé, mais dans tous les cas, celui-ci n’hésita pas une seconde à balancer sa femme et sa fille dans la piscine. Elles ne comprirent pas tout de suite comment elles s’étaient retrouvées si vite dans l’eau, mais quand elles refirent surface, leurs yeux se tournèrent instinctivement vers Jeff. Éva s’était aussitôt mise à l’insulter de tous les noms, et Ludivine, tremblante de froid, répétait « chacal à fromage » sans s’arrêter.

 

- Les pauvres…compatit Xavier. C’est pas gentil pour elles.

- Ah ouais ? railla le père de la comédienne, légèrement irrité.

 

Et Xavier rejoignit malgré lui Éva et Ludivine dans la piscine. Il n’insulta pas Jeff, mais le regard assassin qu’il lui lança aurait pu remplacer tous les jurons du monde. Il eut à peine le temps de prendre une bouffée d’air, que la mère et la fille se jetèrent à son cou. Sa tête disparut à nouveau dans l’eau.

 

- Il coule ! Il coule ! s’affola la petite blonde, tandis qu’il réapparaissait essoufflé.

- Normal que je coule… ! Vous vous appuyez…sur moi ! s’exclama Xavier, avant de s’enfoncer sous l’eau une nouvelle fois.

- On n’a pas pied, expliqua Éva au jeune homme quand il refit surface.

- Moi non plus, je vous signale !

 

Mathis semblait les plaindre, mais il n’osa dire un mot réconfortant, sachant très bien que son père n’hésiterait pas à l’envoyer lui aussi par-dessus bord.

 

- Je suis de ton côté, Papa.

- T’as raison, fiston.

- Et bien moi, je t’aime plus ! brailla Ludivine, qui se servait de Xavier comme barque pour rejoindre les escaliers de la piscine.

- Ça fait 17 ans que tu rabâches la même chose, Lulu, ce serait bien de penser à changer de disque !

 

 

 

 

Il ne restait plus qu’une journée pour Xavier et Ludivine à passer auprès de Jeff, Éva et Mathis. Après une matinée « baignade improvisée », suivie d’un délicieux barbecue, la famille avait décidé de s’amuser à un jeu de société.

 

Ainsi, Xavier contrôla toute la partie de Monopoly, mais Éva refusa de céder son hôtel placé sur les Champs-Élysées. Ludivine resta durant tout le jeu en prison, et fut dispensée de passer par la case départ (et ne toucha donc pas les 2 000 euros promis). Mathis, vite ruiné, avait fini par faire équipe avec son père, mais ils ne gagnèrent pas contre Xavier, qui dévorait toutes les cases sur lesquelles il s’arrêtait.

 

La partie dura jusqu’au soir, et se termina avec Éva qui chantait le Jerk comme une furie, et Ludivine qui avait décidé de rompre (une nouvelle fois) avec son petit-ami. Elle revint vite sur sa décision lorsqu’il lui offrit tous ses billets de banque et ses hôtels.

 

Après dîner, ils regardèrent la télévision en famille et participèrent à un test de QI. Ludivine, perdue depuis longtemps dans ces questions trop rapides et trop difficiles pour elle, avait recopié sur Xavier. À l’annonce des résultats, elle était ravie d’avoir le même QI que lui, soit approximativement 142.

 

- Non mais ne rêve pas Ludivine, tu n’as pas 142 de QI, lança Jeff. Tu dois tourner autour de 85-90.

- C’est bien 90 de quotient intellectuel ? voulut savoir la petite blonde, inquiète.

- Sachant que la moyenne, c’est 100, et que Einstein avait plus de 160, on va considérer que c’est un bon résultat.

- Et 142, c’est bien ?

- C’est supérieur à la moyenne.

- Et ben moi, je préfère avoir 142 que 90. Tiens, d’abord, je vais envoyer un texto à Pierrot pour lui dire.

 

Au message « J’ai 142 de QI », Pierrick eut tôt fait de répondre « C’est quoi ces conneries ? ». D’un air boudeur, Ludivine décida d’aller grignoter avant d’aller se coucher.

 

- Attends, tu ne vas pas manger à onze heures du soir ! s’exclama son père, abasourdi.

- Je mange quand je suis contrariée. Et là, Pierrot, il m’a contrariée.

 

Quand elle ressortit de la cuisine, un cookie coincé entre les dents, Xavier eut tôt fait de l’apostropher avec un soupçon de diabolisme.

 

- Dis ma Lulu, que penses-tu de bêta plus, de bêta moins et de la radioactivité en général ? demanda le jeune homme, en se baissant vers elle.

 

Elle leva la tête, les yeux ronds comme des soucoupes, n’ayant compris aucun traitre mot qu’il venait de prononcer.

 

- Gné ? fit-elle, en mordillant le petit bout de biscuit qui se trouvait dans sa bouche.

 

Il sourit, amusé, et pencha le visage vers le biscuit qu’il déroba avec ses dents, aussi rapide qu’un aigle. Ludivine, trop stupéfaite pour réagir, resta les bras ballants face à son ravisseur. Ce dernier détala comme un lapin, bien content de son vilain tour.

 

- Ah ! hurla la petite blonde, quand elle eut pris conscience de cette triste réalité. On m’a volé mon biscuit ! Au secours !

- Oh, du calme ! s’énerva Jeff. Mathis est couché !

 

Ludivine offrit un sourire innocent à son père, et partit à la recherche du comédien. Hélas, elle eut beau le trouver, il n’avait fait qu’une bouchée du cookie en question. Et c’était le dernier du paquet…

 

- Puisque tu es méchant avec moi, je vais au dodo…et je vais fermer la porte à clé, comme ça, tu ne pourras pas rentrer, et ce sera bien fait pour toi.

 

Elle disparut à l’étage, ferma la porte derrière elle, et Xavier n’entendit pas la clef tourner dans la serrure. Évidemment. Elle l’attendait pour lui faire sa fête, il le savait. Restait à prier pour que Mathis eût un lourd sommeil cette nuit.

 

- Tu devrais aller te coucher, toi aussi, conseilla Éva, en s’éclipsant de la cuisine. Votre train part assez tôt demain, et il faudra vous lever de bonne heure.

- Oui Maman, répondit Xavier, tout sourire, en s’exécutant docilement.

 

Il lui fit la bise, et monta l’escalier à la suite de Ludivine. Elle fit demi-tour vers le salon, et s’installa sur le canapé aux côtés de son mari.

 

- Il m’a appelée Maman…soupira-t-elle d’un air rêveur.

- Laisse tomber Éva.

 

Elle le regarda sans comprendre. Pourtant, Jeff y voyait très clair, lui.

 

- Il n’est pas ton fils.

- C’est comme si, répliqua la jeune femme, pète-sec.

- Non Éva. Xavier a déjà une mère, et ce n’est pas toi. C’est tout.

- M’en fout, grogna l’intéressée avec une mauvaise foi évidente.

 

Éva croisa les bras, adoptant l’air buté que Jeff connaissait si bien. Il n’arriverait pas à la contredire et à lui faire entrer autre chose dans la tête. Il le savait, alors il resta silencieux et souriant.

 

- Tant pis si c’est pas mon fils. Je l’aime quand même.

 

« L’amour d’une mère, c’est comme l’air : c’est tellement banal qu’on ne le remarque même pas. Jusqu’à ce qu’on en manque ».

 

 

Extra Trois : La Section A fait son Festival !

 

 

Aussi bizarre que cela pût paraître, les filles étaient toujours malades en avion. En effet, dans l’Airbus qui amenait la Section A à Nice, Emma avait fait un malaise, Claire et Mathilde avaient vomi leur petit-déjeuner, et Ludivine avait été à deux doigts de les imiter. Elles étaient toutes pâles comme des cadavres ; sauf Aline, dont le blanc était la couleur naturelle, et Ludivine qui avait conservé un teint verdâtre durant le vol.

 

Une heure après avoir quitté Paris, la Section A descendit de l’avion jusqu’à la salle où elle pourrait récupérer ses bagages. Armés de leurs lunettes de soleil, les comédiens marchaient avec classe et assurance, avec un petit air supérieur bien à eux. Seul Xavier, assez maladroit avec les habitudes de la Jet-Set, contrastait avec les autres par sa « normalité ».

 

- Quelqu’un peut m’expliquer ce que le clochard fout avec nous ? demanda Emma.

- Le clochard est juste là pour t’emmerder, répliqua Xavier, avant de lancer un regard de reproche à Ludivine.

 

Depuis que la petite blonde s’était mise en tête d’aider Emma, cette dernière s’effaçait de moins en moins, mais ses piques étaient toujours aussi nombreuses.

 

- C’est l’école qui finance le voyage de Xavier, expliqua Benjamin.

- Si je comprends bien, il faut toucher le RMI pour ne pas payer le séjour à Cannes, c’est ça ?

- Boucle-la Emma, lança sèchement Aline.

 

Il n’en fallut pas plus à Emma pour se taire car elle savait que la jeune femme ne plaisantait jamais sur ce genre de choses, et qu’elle pouvait mettre à exécution toutes les menaces du monde.

 

- La mer, la mer, la mer, la mer, je veux voir la mer ! s’impatienta Xavier, sentant l’ambiance tendue.

- Ça y est, il va encore nous saouler avec sa mer…soupira Simon.

- Je vais enfin la voir, je vais me baigner, je…

- Ferme-la ! s’écria la Section A à l’unisson.

- Pff, vous alors ! Vous n’êtes pas solidaires !

 

C’était un bus qui devait conduire les comédiens à Cannes, à l’occasion de la 61ème édition du Festival international du film, mais leur arrivée avait été retardée d’une demi-heure. La ponctualité n’ayant jamais été le point fort de la troupe, et cette fois-ci ne changea pas des bonnes vieilles habitudes.

 

Et pour cause ! Une gourmande bien connue des services secrets de Madame Suzette obligeait le chauffeur à s’arrêter régulièrement. En effet, le trajet tombait pile pour la collation de dix heures programmée par Ludivine, et les tartines de pain accompagnées de Nutella n’étaient pas pour plaire au conducteur. Il avait beau la sermonner durement et supplier Benjamin de confisquer le pot de pâte à tartiner (une édition limitée de 3 kilos, en plus), la petite blonde trouvait toujours quelque chose à se mettre sous la dent et susceptible de salir le bus.

 

Benjamin avait fini par conserver le sac de la comédienne (5 kilos de friandises) et menacé ses élèves d’un retour immédiat à Paris si l’un d’entre eux nourrissait Ludivine. À la plus grande surprise de la Section A toute entière, la jeune fille n’avait pas pleuré sa perte culinaire durant le voyage. Bien au contraire, elle avait plongé son nez dans Les Maths pour les Nuls, et plus personne ne l’avait entendue jusqu’à Cannes.

 

- Dis, mon Pierrot, tu savais que le carré pouvait annuler la racine ? Donc, racine de deux au carré, ça fait deux !

- Oui, je le sais depuis le collège, répondit Pierrick, en sautant du bus pour respirer profondément l’air chaud de Cannes.

- Ah ? Moi, ça me rappelle vaguement quelque chose, continua Ludivine, pensive.

- Peut-être que tu t’en serais souvenue si tu n’avais pas envoyé des dizaines de textos à tes petits copains en cours de maths…

- Oui, peut-être, admit-elle, avant de se tourner vers son petit-ami qui marchait en silence à ses côtés. Et toi, mon Xavier, tu savais que le carré pouvait annuler la racine ?

- Évidemment ! réagit l’intéressé, non sans lui lancer un regard rempli de reproches. Je peux même t’en dire des vertes et des pas mûres sur la racine de l’unité et son polynôme cyclotomique !

 

Ludivine leva sur lui des yeux humides, et il s’en voulut aussitôt d’avoir été dur avec elle. Elle était bien la dernière personne sur Terre à blâmer, au vu de ses gros efforts et sa grande volonté pour s’instruire dans les matières difficiles. Sa plus grande souffrance était son incapacité à comprendre quoique ce soit pourvu que cela engendre une réflexion minutieuse. Sa honte grandissait au fur et à mesure qu’elle étalait son ignorance en public, et au final, elle n’osait plus parler devant les autres.

 

Pourtant, Ludivine avait déjà essayé de travailler dur les maths quand elle était plus jeune. Ses parents s’étaient même inquiétés de ses lacunes, et lui avait fait suivre des cours particuliers. Rien à faire. Si la petite blonde connaissait par cœur ses leçons le soir, elle les oubliait toutes dès le lendemain matin. Elle n’imprimait pas. Elle n’arrivait pas à comprendre. C’est pour cela qu’elle avait acheté Les Maths pour les Nuls ; elle pensait que Xavier voudrait bien lui expliquer et lui faire retenir les bases arithmétiques importantes.

 

- Pardonne-moi, Lulu, s’excusa le jeune homme, mal à l’aise. La remarque d’Emma de tout à l’heure m’a foutu le moral à zéro.

 

En guise de réponse, Ludivine lui prit la main et la serra fort dans la sienne. Elle n’était pas rancunière.

 

- Et racine de cinq au carré, Lulu, ça donne quoi ? interrogea le comédien.

- Euh ! Euh ! Non ! paniqua la petite blonde. Attends ! Attends ! Je le savais ! Je l’ai ! Là !

 

Elle tira la langue et en désigna le petit bout rose, pour illustrer l’expression « l’avoir au bout de la langue ». Cette mimique parut plaire à Pierrick, qui s’écroula de rire sur l’épaule de Tristan. Mais la réponse ne franchissait pas la langue de la jeune fille, et bientôt, de grosses larmes couleraient si elle ne trouvait pas d’elle-même le bon résultat.

 

- 25, balança nonchalamment Aline.

- Horreur et putréfaction ! Tais-toi, Aline, arrête de dire de telles âneries, sinon je vais me suicider ! s’écria Xavier, choqué.

- Horreur et putain de fraction ! imita Pierrick. Albert, t’es folle de le poignarder dans le dos comme ça ?!

- Et bien quoi alors ? Tu demandes la racine de cinq, Xavier, c’est 25 ! Merde ! Reconnais au moins quand j’ai raison !

- Mais c’est faux ! hurla l’intéressé, rouge comme une tomate. La racine de cinq au carré, putain, Aline ! Au carré ! Lulu l’a dit tout à l’heure, le carré annule la racine ! C’est un truc de base en plus !

 

Ludivine eut alors une illumination. Ça venait de faire « tilt » dans son esprit, et la bonne réponse ne tarda pas à se faire entendre dans la ville.

 

- Cinq ! Cinq ! rugit la comédienne. Cinq ! Mon Xavier, c’est cinq !

- Correct. Un vrai petit génie cette Lulu. Aline, prends-en de la graine !

- Je t’emmerde, toi et tes maths, fut la seule réponse de la jeune femme.

 

Une demi-heure plus tard, après une longue marche sous le signe de l’arithmétique, la Section A arriva auprès d’une immense villa aux couleurs provençales. Le propriétaire, un ami de Benjamin, disposait d’assez de chambres d’ami pour pouvoir héberger les dix comédiens et avait bien voulu accepter la requête du prof.

 

- Entrez, entrez ! s’écria le quinquagénaire, en accueillant à bras ouverts ses hôtes. Ah ! Mais qui vois-je ?! Ludivine Maël !

- Dodero, corrigea la petite blonde, irritée.

- Ma chérie, comment vas-tu ? Tu te souviens de moi ?

- Vaguement.

- Roh, la dernière fois que je t’ai vue, tu avais seulement 12 ans ! Tu n’étais pas bien grande, mais qu’est-ce que tu étais rigolote avec tes petites nattes ! On aurait dit Fifi Brindacier ! C’était pour la naissance de ton frère, tu te rappelles ? Ta mère va bien ? Et Jeff ? Et Romain ? J’ai vu Éva dans le JT de 20 heures le mois dernier. Olala ! On t’a déjà dit que tu ressemblais énormément à ton père ? C’est effrayant !

- Vas-tu laisser mes pauvres graines de comédiens fleurir sous le soleil plombant, Peter ? lança Benjamin, d’humeur poétique aujourd’hui.

 

Ludivine remercia mentalement son professeur ; elle n’appréciait pas vraiment le regard dubitatif de la Section A posé sur elle à chaque fois qu’ils rencontraient quelqu’un qui la connaissait. Pourtant, les comédiens s’habituaient de plus en plus au « statut » de la petite blonde, et même Claire n’était plus intimidée face à elle.

 

Quoiqu’un peu bavard, Peter était un homme fort sympathique, qui possédait un sens développé de l’hospitalité. D’une nature chaleureuse, il n’avait pas eu de mal à se lier d’amitié avec la Section A, qui ne lassait pas d’écouter ses anecdotes.

 

- Moi, je dors avec mon Xavier, annonça Ludivine, quand arriva le moment où il fallait choisir les chambres. Dans la grande chambre qui donne sur la piscine.

- Non, celle-là, c’est la mienne, intervint Peter, flairant à plein nez l’escroquerie de la petite blonde qu’il connaissait bien.

- Et depuis quand ? répliqua la comédienne, frustrée.

- Depuis que j’habite ici, ma foi !

- Touché-coulé Lulu ! s’exclama Tristan, hilare devant le visage déçu de sa camarade.

 

La bonne humeur eut tôt fait de se dissiper lorsque Benjamin distribua aux élèves le « Programme du Séjour », et annonça qu’ils étaient à Cannes « pour travailler et non pour s’amuser ».

 

- Encore ton Programme ?! Putain, mais il commence à nous gaver ton Programme ! s’écria Pierrick, consterné.

- Que je sache, vous êtes encore bien loin des « stars » que vous rêvez d’être, et vous devez faire ce que vous demande votre professeur, en l’occurrence…

- Toi, termina la troupe d’un ton morne.

 

L’an dernier, Benjamin avait amené la précédente Section A au Festival international du Film de Marrakech, et selon les dires, les élèves s’étaient régalés. Mais voilà que les espoirs de fol amusement de la Promo 2008 s’envolaient en poussière, à cause du « stupide Programme » de leur professeur.

 

- Nous allons assistés à toutes les projections des films en compétition, commença l’intéressé. À chaque sortie de salle, vous devrez me faire un compte-rendu oral et constructif sur le fond et la forme du film.

 

Les comédiens s’échangèrent un regard désespéré. Nombre d’idées suicidaires leur traversèrent l’esprit.

 

- Ensuite, vous ferez des petits exercices d’improvisation dans Cannes.

- Dans Cannes ? répéta la Section A, sceptique.

- Voyons les enfants, intervint le souriant Peter, ne me dites pas que vous ne vous êtes jamais fait remarquer d’une façon ou d’une autre dans la rue…

 

Les élèves se tournèrent inconsciemment vers Xavier, qui se vexa par ce soudain intérêt de la part de ses camarades. Haute trahison en vue.

 

- Ça va, ne dites rien. J’y peux rien si tout le monde se tourne sur mon passage quand je parle de physique-chimie ! Et d’abord, je vous emmerde. J’estime ne pas être le seul excentrique de cette baraque. Je crois même que je suis le seul homme normal, en comparaison avec Simon qui vient en pyjama à l’école, et Mathilde avec ses cheveux qui changent de couleur toutes les semaines. Et puis, ne me dites pas que personne ne regarde Lulu quand elle porte son imperméable jaune, ni Aline quand elle s’auto-crashe contre une Smart !

 

Suite à ce monologue, la Section A dut bien s’avouer qu’elle était un peu particulière dans son genre, et que Xavier n’avait pas tout à fait tord.

 

- Évidemment, reprit Benjamin, j’espère que vous avez apporté Ondine, parce qu’il va de soi que nous allons répéter le spectacle. Je tiens à préciser qu’on bossera aussi après souper, et ce, jusqu’au dodo à 23 heures.

- Dodo à 23 heures ? répéta Ludivine, ahurie. Et mes 14 heures de sommeil quotidiennes alors ? On aura droit à des siestes ?

- Certainement pas. Et je te rappelle que la moyenne, c’est 8 heures de sommeil, Lulu, et non 14 !

- Je vais mourir ! Mon Xavier, Benji, il est méchant avec moi !

- Caprice de star, se moqua le prof. D’autres questions ?

 

 

 

 

Le troisième jour, la Section A commençait à prendre le rythme de leur nouveau quotidien. Doucement, mais sûrement. Ils ne rataient aucune diffusion des films en Compétition, mais durant les séances, certains bavardaient à voix basse ou rattrapaient leur courte nuit de sommeil (pour respecter l’anonymat, Ludivine ne sera pas citée) sans que Benjamin s’en aperçoive. À la sortie des salles, il interceptait ses dix élèves endormis pour leur demander leurs commentaires constructifs…qui ne l’étaient pas.

 

- Vos impressions ?

- Pourri.

- Naze.

- Moisi.

- Décidément, ils diffusent que des merdes à Cannes.

- Et ce n’est que le quatrième !

- De la daube.

- À chier.

- Pow…et les acteurs, n’en parlons pas !

- Dès fois, je me demande ce que je fous là…

- Dis mon Benji, c’est quand qu’on rentre ?

 

Et à chaque sortie de salle, Benjamin s’arrachait les cheveux. Venait ensuite l’heure du déjeuner. Un déjeuner plutôt rapide, car si la Section A n’était pas intéressée par les films, elle cherchait en revanche à apercevoir des « stars » du cinéma. Il leur avait été impossible d’être aux premiers rangs pour la montée des marches, mais les plus agiles d’entre eux (Tristan et Pierrick) avaient escaladé des arbres pour avoir une vue d’ensemble de l’événement quotidien.

 

- J’ai vu Pénélope Cruz ! s’écria Tristan à ses camarades qui étaient restés sur la terre ferme.

- Elle est comment ? voulut savoir Simon.

- Bien foutue !

- Oh…fit Xavier, émerveillé. Pénélope…mon amour !

 

D’autres avaient le cœur déchiré de ne pas avoir la chance de croiser leur idole du cinéma.

 

- Je veux voir Brad Pitt ! brailla Ludivine, en pleurs, le sixième jour. Ma Maman m’a dit qu’il était encore plus beau en vrai !

 

Par moment, Peter comprenait les crises de colère de Benjamin, qui se maudissait chaque jour d’avoir amené sa classe au Festival de Cannes.

 

- Ils ne peuvent pas rester deux minutes en place ! s’énerva le prof au bout d’une semaine.

- Qu’est-ce que tu attendais de la part de dix jeunes comédiens ?

 

 

 

 

Comme prévu par le Programme, Benjamin donnait des exercices d’improvisation à ses élèves entre deux séances de cinéma. Ainsi, les Cannois s’étonnaient de voir dans les rues une fausse Marilyn Monroe avec sa mythique robe blanche, une tentative de suicide qui s’était terminée dans un fou rire, une scène de ménage d’un couple étrange ou encore…

 

- Ludivine ! Tu crois que c’est en imitant Piaf chanter dans la rue que tu vas pouvoir rattraper ta sale note de ton court-métrage ?!

- Mon court-métrage, il était très bien ! C’est toi qui connais rien en œuvre culinaire, c’est tout ! répliqua la petite blonde, dont le film soi-disant raté était en réalité un documentaire sur la fabrication des pâtisseries.

 

La dépression de Benjamin ne s’arrêtait pas là. Il avait eu la très mauvaise idée d’organiser une rencontre entre la Section A et les élèves de l’École Régionale d’Acteurs de Cannes (la même école où Ludivine avait failli suivre sa formation). Hélas, il n’était pas sans savoir que tout comédien avait sa propre fierté, et il aurait dû se douter que les élèves partageraient entre eux une rivalité plutôt qu’autre chose. La Section A était d’ailleurs très réputée pour son orgueil, et Benjamin ne put qu’une fois de plus le constater.

 

- Pff… Vous avez vu ces ringards ? railla Pierrick.

- Aucun sens de l’humour.

- Ils ne vont pas aller loin, souligna Grégoire.

- Pauvres cons, va.

- Et qu’est-ce que leurs mecs sont moches ! C’est des tarlouzes ! rajouta Mathilde.

- Nos femmes à nous, au moins, elles sont jolies et elles ont de la poitrine !

- Le petit nabot, là, je ne peux pas le saquer…siffla Xavier, qui avait surpris l’intéressé en train de mater Aline.

- Mais c’est qu’ils se prennent pour les meilleurs du monde, en plus !

- Moi, les comédiens de l’ERAC, je ne les aime pas, décida Ludivine, et tous ses camarades l’approuvèrent d’un hochement de tête.

 

Heureusement, l’entrain que mettait la Section A dans Ondine remontait le moral de Benjamin. En effet, les comédiens travaillaient dur chaque jour, et s’investissaient à fond dans la pièce de théâtre, plus par passion que par devoir.

 

Ils arrivaient toujours à trouver un petit morceau de plage libre, et ils répétaient Ondine les pieds dans le sable. Beaucoup de passants s’arrêtaient pour regarder un peu la répétition, et parfois, certains d’entre eux restaient jusqu’à la fin pour connaître le dénouement de la pièce. Enfin, quelques personnes (que Xavier soupçonnait d’être millionnaires) leur avaient laissé un ou deux billets en guise de pourboire.

 

- Recette de la journée : cinquante-cinq euros ! lança fièrement Mathilde, lorsque la répétition fut finie.

- Et des progrès du côté d’Emma qui me laissent sur le cul, crut bon d’ajouter Benjamin.

 

 

 

 

- J’aime pas cette ville. Ça pue le bourgeois. Le seul truc de bien ici, c’est la mer.

- Ah ça… On peut dire que tu en auras profité ! se moqua Aline.

 

Xavier ne put s’empêcher de sourire. Voilà que le Festival de Cannes touchait à sa fin et la Section A allait devoir repartir vers Paris. Le moins que l’on pût dire, c’est que Xavier avait bien profité de ses dix jours au bord de la mer. Il passait tous ses moments libres, même les plus petits, dans l’eau. Et évidemment, c’était assez difficile de le faire sortir.

 

- Putain, j’ai vraiment envie de retourner à Paris comme d’aller me pendre !

- Ne t’inquiète pas, mon Xavier, on reviendra, rassura Ludivine sans lever le nez de son livre de maths.

- Et comment ? En vélo ?

- Impossible, t’es pas assez friqué pour t’en acheter un, lança Emma.

- Qui t’a dit que je te parlais, à toi ?

 

La blonde allait répliquer mais Ludivine s’interposa, visiblement lassée par tous ces innombrables échanges houleux.

 

- Emma, ce n’est pas gentil de dire ça. Je te rappelle que mon Xavier t’aide à t’améliorer et que tu lui dois en partie tes progrès.

- Je précise que je suis obligé, ajouta l’intéressé.

 

L’argument parut faire mouche, et Emma s’excusa à sa façon.

 

- Okay… Je retire. Seulement parce que t’es mignon.

 

Elle lui jeta un regard entendu et s’éloigna vers Claire et Mathilde qui parlaient de brushing. Le comédien, légèrement sonné, glissa sa main sur son front en sueur.

 

- Tu sais Lulu, dès fois, elle me fait peur… Tu crois qu’elle pourrait me violer ?

 

 

 

 

Dans l’avion qui ramena la Section A à Paris, Benjamin trouva sa classe bien étrange. Les comédiens ne parlaient guère, probablement gagnés par la nostalgie.

 

- Arrêtez de faire la gueule. Ça ne sert à rien. Je suis même sûr que certains d’entre vous retourneront à Cannes.

- Ouais, pour faire du tourisme, ironisa Claire.

- Quand je serai multimilliardaire, répondit Xavier.

- Oh je ne parlais pas de tourisme…reprit malicieusement le prof, en leur tendant un article de Nice-Matin.

 

Un gros titre attira les regards des élèves : « Cannes inspire les comédiens de Paris ». L’article était accompagné d’une photo de la Section A, les pieds nus dans le sable, prise en flagrant délit de répétition générale.

 

Le journaliste y évoquait la présence d’une école de théâtre parisienne au Festival de Cannes, soulignant que ces « débutants » (la Section A n’apprécia que très peu ce terme) qui jouaient « sur la plage devant des touristes » et qui n’avaient raté aucun film concourant pour la Palme d’Or, pourraient bien se retrouver demain sur le tapis rouge cannois.

 

- N’importe quoi ! siffla Simon.

- Et pourquoi donc ?

- C’est nul le cinéma, Benji.

- Il a raison, ajouta Ludivine. J’aime pas le cinéma.

- C’est mieux le théâtre, assura Grégoire.

 

Pierrick relut l’article attentivement, avant d’éclater de rire. Il expliqua à Benjamin qu’il voyait très mal la classe en costard-cravate et robes Chanel dans le décor de Cannes.

 

- En plus, nous connaissant, on se casserait la gueule sur l’escalier.

- Pas faux, avoua Aline, qui n’avait pas pensé à cette éventualité.

- Nous refusons totalement le développement du 7ème art. Longue vie au théâtre !

- Et tu sais quoi, mon Benji ? continua Ludivine, visiblement déterminée à défendre le théâtre jusqu’au bout.

- Vas-y.

- Moi, je ne serai jamais actrice de cinéma. Voilà.

 

La Section A s’étonna du silence de leur prof, d’autant plus que son sourire mystérieux ne décollait pas de son visage. Benjamin tourna la tête vers le hublot, et ses élèves eurent l’impression qu’il désirait dormir et qu’on le laissât dormir. Ils retournèrent donc à leurs vagues occupations (critiquer le cinéma, découper l’article de journal, vomir dans le sac prévu pour cet usage, ou draguer l’hôtesse de l’air – au choix), sans entendre le murmure de leur prof :

 

- Si tu le dis.

 

 

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vefree
Posté le 10/07/2009
Crevée, choupinette ?! .... je veux bien le croire. Quelle aventure !... devrais-je dire ; quelleS aventureS !
La première dans la famille de Ludivine. Un gros morceau croustillant à souhait. Elle se montre sous ses plus beaux jours, cette famille-là. C'est vraiment très sympatique. Et la surprise que Xavier soit venu, c'était la cerise sur le gâteau. Hin hin !
Ensuite, la visite de la Section A à Cannes, ou "La compagnie des comédiens en folie". mouahaha ! Pauvre Benjamin ! .... Comment arrive-t-il à maîtriser ses uluberlus ? Et puis, un petit final plein de sous-entendus... ohoh ! Mais que mijote-t-il ?
J'ai juste une ombre au tableau à regretter dans ton histoire, c'est la répétition quasi systématique de la "petite blonde" pour désigner Ludivine. J'aurai aimé trouver un peu plus de qualificatifs divers. Sinon, j'aime toujours autant cette fiction, aussi agréable que ludique.
Merci, Clo', je continue dès demain, si je trouve le temps. Je risque d'avoir un week-end chargé.
La Ptite Clo
Posté le 10/07/2009
Dès fois aussi, je plains Benji... XD Pour la fin, il ne mijote rien. De toute façon, il ne peut rien faire de concret pour l'avenir de ses élèves, à part leur faire travailler le théâtre. Mais je pense qu'un professeur est plus apte à savoir si un élève ira loin ou pas que l'élève en question, d'où ses prognostics. Mais en effet, ça laisse annoncer des possibilités pour la suite. ;)
Il y a peu de qualificatifs pour Ludivine : "petite blonde" est celui qui la désigne le mieux, ainsi que "comédienne", et parfois "jeune fille". Bref, à réfléchir pour une éventuelle prochaine correction. ;)
Merci beaucoup à toi pour le temps que tu prends pour lire et commenter, et surtout, ne te force pas. :)
Cricri Administratrice
Posté le 03/10/2008
Tiens, changement de paysage dans ce chapitre ! Dis voir, tu t'inspires du coin où tu vis pour décrire les lieux ? :)
J'aime beaucoup l'image que tu donnes de la famille de Lulu. La mère est géniale ! Le père attachant, derrière ses manières bourrues ^^
"Enfin, Mathis adorait sa sœur, parce qu’il était très facile de la battre à la Wii." --> c'est une vague impression ou ça sent le vécu ? ^^'
"Faire du fla-fla" ? Je ne connaissais pas du tout l'expression oO Adopté !
Moooh, Xavier qui ne se rase plus en l'absence de Lulu, c'est touchant ! Mais grâce à la bienveillante parentaille, les voilà retrouvés *_* J'aime décidément beaucoup l'ambiance qui règne dans la famille de Lulu : c'est bruyant, joyeux, taquin, haut en couleur, mouvementé, chaleureux : cette ambiance chaude déborde de mon écran et s'étend à mon salon tout frisquet ^^ merci Clo ! Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce n'est pas une famille banale : j'aime beaucoup l'histoire des parents de Lulu, c'est très... je ne sais pas bien le déterminer... authentique. On a l'impression, en te lisant, que ce n'est pas une fiction, que tes personnages, leur histoire, leurs vies, existent réellement ! En tout cas, on le voudrait.
Chacal à fromage ^^ Tu as vraiment créé l'insulte du siècle ! Je sens qu'elle va faire le tour du net !
J'ai encore un sourire au lèvre depuis la réponse de Pierrot au texto de Lulu : c'est pliant XD J'adoooore Pierrick ! Franchement, tu n'as pas l'impression que tous tes personnages existent, d'une certaine façon ? :)
Note à moi-même : je m'aperçois, quand je te lis, que je suis tellement emportée par l'histoire que je ne m'attarde jamais sur la forme. Tout est si lisse, si coulant, si plaisant, que je ne m'arrête jamais en me disant : "tiens, ça c'est un peu maladroit". Jamais. Tu as une plume sobre, dans son genre (sauf pour les dialogues, là ça part dans tous les sens comme un feu d'artifice XD), et vraiment fluide.
Ah, l'extra festival de Cannes ^^ Ca ne me dépayse pas beaucoup, ça, en revanche !
"Horreur et putréfaction !" --> adopté ^^
J'adore les réactions de la section A : pauvre Benji, qui doit perdre beaucoup de cheveux au fil des chapitres ^^' <br />"- J’aime pas cette ville. Ça pue le bourgeois. Le seul truc de bien ici, c’est la mer." --> Bien résumé !!! XD<br />Marrant, tu cites le Nice-Matin ! Ca me rappelle ma maison parentale à moi, pour la peine ^^
Et voilà, j'ai fini :'( Maintenant, je vais devoir attendre gentiment la suite ! Mais dis-moi, tu as dit que Graines de Comédiens serait bientôt finie ? Tu pensais faire encore combien de chapitres ? En tout cas, de savoir que tu planches déjà sur un autre projet, histoire de ne pas nous laisser en deuil, je trouve ça enthousiasmant ! Merci clo ^^
Reponse de l'auteur: Allez, come on pour la dernière reviews ! ^^
Et voui, je me suis un peu inspirée du coin, étant donné que je connais un peu Arles même si j'y vais pas souvent. J'avais très envie de faire vivre Eva Maël et sa famille hors des grandes villes, même hors de la ville tout court, à l'abri des regards. Bon, pour reprendre ta deuxième reviews, Eva se confirme bien comme ayant plus ou moins le même caractère que sa fille, et Jeff...le véritable papa poule.
Par contre...mon propre frère ne m'a jamais dit qu'il m'adorait parce que j'étais facilement battable aux jeux-vidéos...ceci dit, il n'a pas intérêt de me le dire ne serait-ce qu'une fois, sinon je lui refais sa tête au carré. ^^
L'expression "faire du fla-fla", je l'ai trouvé dans le dico quand je cherchais un pseudo pour Flammy. Beuuh, ça lui va bien comme expression, à Flammouille non ? xD
Quant à l'histoire de Jeff et Eva...bien, ça fait des années que je l'ai en tête, sans pouvoir la rattacher à un contexte. Là, j'ai pu ; en montrant aussi les effets de cette histoire sur Ludivine, qui est plus proche de son père -présent- que de sa mère -souvent pas là. 
Malheureusement, personne n'existe dans cette histoire...à part Lionel (ça c'est officiel) et même Jeff. Jeff qui a juste mon âge en réalité, que je ne connais absolument, mais que je sais que j'en étais dingue à l'époque de la comédie musical "le Petit Prince" dans laquelle il a joué. Et puis Romain, aussi, que je m'inspire d'un copain qui s'appelle Romain (je lui ai même demandé s'il acceptait d'être le parrain de ma fille de papier, Lulu, dans la vie et dans l'écriture, il me semble qu'il a dit oui...mais si je lui en reparle aujourd'hui, je suis certaine qu'il aura absolument tout oubllié et qu'il me demandera de quoi je parle... XD). Bon après, moi aussi, j'aimerais parfois voir quelques uns de mes personnages exister... Même si c'est pas possible, je m'inspire pour l'histoire de quelques faits réels, et de quelques traits de caractère dans mon entourage...(par contre, "horreur et putréfaction", c'est tiré des Tom-Tom et Nana que j'adorais lire quand j'étais petite...cette phrase m'avait bouleversée ! xD)
Bref...voilà. Il reste en tout et pour deux chapitres, et j'aimerais bien boucler tout ça avant d'entrer en 2009. Je pense que c'est réalisable. Ensuit, j'attaquerai Polichinelle, mais mes comédiens me manqueront beaucoup beaucoup.
Enfin bon, merci énormément pour tes reviews Cricri, je suis toujours contente de t'avoir comme lectrice, et tes reviews me font toujours très plaisir.
Bien des poutoux.
Flammy
Posté le 06/09/2008
Bon, je l'ai peut-être lu en quatre fois, mais je l'ai lu ! Victoire XD Non non, c'est pas que c'était une punition de te lire, c'est juste qu'à cahque dois, j'atais obligé de couper et ça m'énervait de e pas savoir la suite xD Tu me dira, même maintenant, tant que ça ne sera pas finit, ça m'énervera de ne pas savoir la suite, et même après la fin d'ailleurs, mais moins vu que le chapitre est fini et qu'il y a plis rien à lire. Vu ? Et ba bravo parce que j'arrive à m'embrouiller moi-même --'
Je disais donc, comme d'habitude, j'aime toujours autant, et ça vlait le coup d'attendre pour lire ^^ Je l'ai déjà dit un peu sur le fofo, mais c'est toujours aussi rafraichissant et ça repose je trouve ^^ En même temps, c'est pas gniangnian, donc c'est parfait ^^ 
C'est partie sur la famille de Lulu m'a fait plaisir à lire, parce qu'avec Lulu, ce que je trouve assez bien fait, c'est que dès le début, on a tout de suite l'impression de la connaître par coeur, avec son comportement et tout ça, le seule moment où on se dit qu'il y a quelque chose de mystérieux, c'est pour sa mère quand elle veut pas montrer sa photo. Sinon, l'histoire avec son ex, je m'en doutais pas, mais ça rentre parfaitement dans le truc, pareil avec le crise d'adolescence et les problèmes avec ses parents. C'est come si en fait on le savait depuis longtemps, sans quon le sache, 'Fin c'est bizarre mon truc --' Je voulais juste dire que Lulu réserve des surprises, alors que c'est un perso qui ne le présage pas ^^ 
Sinon ensuite, pour les parents, je les adoooore ^^ Comme le dit le père, ça a pas toujours été comme ça donc faut pas s'y fier, mais rien que des moments come ça, c'est nettement mieux que les parents de Xav' XD D'ailleurs au passage, question ! C'est moi qui l'ai zappé à la lecture ou tu ne parles pas du père de Xav' ? Parce que j'en ai aucun souvenir ^^' Si c'est le cas, tu aimes bien les familles monoparentales, parce que dans "Un groupe de Rock pas comme les autres" le héros dont je ne me souviens plus du nom (honte à moi ^^") n'a que sa mère, et le Héros du Quai des orfèvres n'a aussi que sa mère, si on considère qu'il a coupé les ponts avec son père. T'aimes pas les papas ? ^^" Féministe va XD
Petite parenthèse, j'ai adoré la rencontre entre Xav et la mère à Lulu ^^ Excellent ^^
Sinon, passage à l'apparté, beaucoup aimé aussi ^^ Surtout la réaction face à Benj, nan, on veut rester des comédiens ! J'ai trouvé ça super, de monrter que c'est vraiment leur truc ^^ Canne les a intéressé, voir les acteurs aussi, mais ils aiments vraiment ce qu'ils font et ça donne une très bonne image de la classe je trouve ^^ Par contre, à mon avis, Benj image autre chose pour eux xD
Donc voilà, j'ai à peu près tout dis je pense ^^ J'attend la suite maintenant ^^ Pluchouille !
Reponse de l'auteur: Ma pauvre Flammy, je suis terrible de faire d'aussi longs chapitres sans penser à mon délicieux petit Flamby... J'espère que ça n'a pas été trop dur ! ^^"
Sinon, écoute, je suis toujours aussi contente que ça te plaise. Je voulais montrer dans ce chapitre exactement ce que tu as dit dans ta reviews : on connait bien Lulu, mais rien ne laisse prévisager qu'elle a été intolérante avec sa mère, et qu'elle a eu une période de vie plus ou moins difficile (enfin bon, les crises d'ados, c'est qu'une raison de plus pour pleurer "purer, Papa-Maman, et mes problèmes à MOI qu'est-ce que vous en faites ? hein ? vous croyez que c'est pas important, mes problèmes à MOI ?!" XD surtout quand le problème se résume au petit-copain qui s'habille en vert alors qu'on n'aime pas cette couleur...). Fin de la parenthèse ! ^^  Et aussi pour montrer l'environnement familial, avec Jeff et Eva qui forment un beau couple bien que imparfaits.
Quant à Xavier et bien...tu n'as rien sauté. Je n'ai jamais parlé de son père, et je n'en parlerai jamais, parce qu'il ne fait plus partie de la vie de Xavier. Scénario classique : le père s'est barré, laissant sa famille dans le pétrin (et Elena, avec un seul salaire pour élever deux enfants qui n'étaient pas encore ados), sans laisser de pension...bref, disparu de la vie de Xavier et Liz, qui n'apprécient pas que leur père revienne dans la conversation.
En fait, c'est exactement la même chose qu'avec Florian du groupe de rock. Ils ont le même passé (je m'en suis inspirée, tout est lié, à la base), et se ressemble beaucoup (à l'exception que l'un est intello et l'autre pas). Et puis en fait, Val', Flo et Xavier, ils ont pas de père, parce que j'aime bien leur construire une famille affaiblie par le(s) départ(s) d'une ou des parents, parce que çafrappe systèmatiquement la personnalité des personnages. Ils seront un peu plus sensibles, et donc, l'histoire prendra une autre tournure.
Pour finir l'extra...c'est que, comme Benji, je pense aussi à l'avenir de mes comédiens ! ^_^ Et à travers le prof, je leur dis "attention, tu pourrais bien finir ailleurs que sur des planches de théâtre", "attention Lulu, tu devrais fermer ta jolie bouche au lieu de dire que tu ne feras jamais de cinéma". Ce sont des beaux parleurs, mais ils seront obligés d'accepter leur avenir -que je connais- même si ça leur plait pas (de toute façon, c'est moi qui décide). Oui, je sais, je suis méchante avec eux... C'est pas sain de les torturer comme ça...
Enfin bon, réponse assez longue (XD), et je te remercie du fond du coeur ma Flamou adorée (il me semble que j'ai d'ailleurs caser l'expression "quand vous aurez fini de faire du fla-fla" pour te rendre hommage ! ;)))
Plein de biyou !
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