Le père Gatien s’éveilla bien avant l’aube.
Depuis plusieurs nuits, il souffrait du froid qui amplifiait ses rhumatismes à l’approche de l’hiver. La fine couverture de toile jetée sur sa paillasse ne lui offrait qu’une protection dérisoire. Il s’étira en pestant contre les affres de la vieillesse et se dirigea d’un pas claudiquant vers une bassine près de sa cheminée. Il raviva les braises de son foyer à l’aide d’un tisonnier et posa le lourd récipient de cuivre dessus. L’eau ne tarda pas à se réchauffer et il y plongea deux linges pour les imbiber. Avec le premier, il massa ses articulations gonflées et poussa un soupir de soulagement en sentant la chaleur se répandre dans son corps. Le second servit à remplacer le tissu humide qui isolait le contour de sa fenêtre.
Ce matin-là, il devait se rendre à Tord-la-Falaise pour sonner l'Eveil. Beor le forestier avait sollicité sa présence pour consacrer le prénom de son nouveau-né. Ensuite, le père Gatien avait rendez-vous chez Grenn le pêcheur pour bénir son fils Liam avant sa première virée en mer. L'après-midi, il ferait classe aux autres enfants du village et partagerait le repas du soir avec les habitants.
Le vieillard poussa un soupir fatigué.
Un coup d’œil à l’extérieur lui apprit qu’il devait se hâter. Une demi-lieue séparait sa syndoma du village de Tord-la-Falaise, et il n’avait plus les jambes de ses vingt ans. Avec d’infinies précautions, le vieil homme rangea son bréviaire dans un coffre reliquaire au côté de ses autres trésors. Il y avait là une coupe en argent offerte par ses ouailles pour fêter son investiture ; une effigie de Rajeena l’Immortelle dont il se servait pour protéger les femmes enceintes pendant leur accouchement, et une authentique écaille de Grisécaille confiée par maître Hobb l'été passé. Il enveloppa le tout dans un drap de soie et verrouilla son coffret avant de le glisser dans sa cachette habituelle. Puis il attrapa sa canne en noisetier, ses clochettes en étain et quitta sa demeure.
Il frissonna. Devant sa porte, la nature s’était parée d’un fin manteau de givre blanc.
Tandis qu’il descendait la colline de sa démarche hésitante, il aperçut sur la route en contrebas le flambeau d’une torche. À la lueur de celle-ci, il reconnut son fidèle galurin qu’il avait jadis offert à Roch le mercenaire. Gatien se réjouit du retour de son ami dans la région. Le spadassin l’avait escorté à plusieurs reprises pour des séminaires de la congrégation. En dépit de son apparence rustre, il s’agissait d’un homme cultivé et intelligent doté d’une foi sincère. Il s’apprêtait à le héler lorsqu’il repéra deux silhouettes qui le filaient discrètement dans les ténèbres. Un mauvais pressentiment saisit le vieux doyen et il se ravisa. L’homme et la femme étaient à coup sûr des enchanteurs, il percevait une aura shâatique très nette autour d’eux. Intrigué, il décida de les suivre sans se faire repérer. Hélas, il ne pouvait soutenir leur rythme de marche et se retrouva rapidement distancé. Leurs traces s’enfonçaient dans la pinède en direction du phare de Boel.
Que devait-il faire ? Retourner à Vitarive pour prévenir le Guet ? Le père Gatien détestait les mages, mais ne pouvait se résoudre à les dénoncer. De plus, il ne voulait pas causer de tort à son ami mercenaire. Il choisit donc de poursuivre sa route dans l’espoir d’atteindre Tord-la-Falaise avant le lever du jour.
Un quart de lieue plus loin, il assista à un deuxième phénomène étrange.
Un hululement lui fit lever les yeux vers le ciel, et il manqua de s’étrangler en y découvrant le plus beau rapace qu’il n’ait jamais vu. Il s’agissait d’un hibou d’une envergure stupéfiante, dont le plumage sombre luisait d’une aura bleutée sous la lune. L’animal décrivit des cercles au-dessus de la pinède, s’éloigna vers le vieux phare avant de plonger subitement entre les arbres. Quelques instants plus tard, deux cavaliers déboulèrent en provenance de la forêt sur la route, lançant leurs montures au triple galop. Gatien eut tout juste le temps de s’abriter derrière un buisson pour éviter d’être piétiné par leurs grands étalons pâles. Un frisson désagréable le glaça jusqu’à la nuque. Ces animaux n’avaient rien de coursiers ordinaires. Quelque chose d’anormal se tramait dans les parages, son instinct lui hurlait de s’enfuir jusqu’à la syndoma pour s’y enfermer à double-tour. Mais il avait donné sa parole à Beor, et il était déjà en retard pour sonner l’Eveil. Maugréant contre ses jambes raides, il reprit sa marche claudicante vers le village.
Une autre surprise l’attendait près du vieux phare.
En arrivant au pied de l’ancienne tour à feu, il croisa l’aubergiste des Trois Couronnes. Oriendo avançait seul sur le chemin, un sourire triste sur le visage. Il tenait dans sa main un médaillon ciselé qu’il se hâta de dissimuler sous sa cape. Malgré cette précaution, le vieux doyen perçut une aura shâatique considérable qui émanait de ce bijou. À n’en pas douter, il renfermait dans sa gemme d'éclat un puissant sortilège.
« Cirin’Del en Salaadem, mon père, le salua Oriendo de sa voix grave.
- Que la bénédiction de Ran accompagne tes pas, mon fils. C’est une heure bien tardive pour errer dans les campagnes.
- J’aime marcher la nuit quand le monde se repose. Le silence m’aide à réfléchir. »
Gatien haussa un sourcil intrigué. C’était la première fois qu’il croisait Cirin’Del sur la route de Tord-la-Falaise avant l’aube. La vieille tour à feu, avec son allure sinistre au sommet d’un escarpement balayé par le vent, n’offrait pas le meilleur endroit pour méditer. En revanche, c’était un lieu parfait pour se recueillir.
« C’est ici que repose votre épouse, n’est-ce pas ? demanda-t-il avec sollicitude.
Oriendo se perdit un moment dans la contemplation de la Mer du Soir.
- Anthéa aimait voir les navires qui voguaient à l’horizon, déclara-t-il. J’ai offert son corps au Dieu Noyé au pied de ces falaises. Elle était originaire des îles de Mor-Anketh, vous savez. C’était une fille de l'océan.
Gatien hocha la tête avec compassion.
- Une horrible mort que la fièvre putrescane, commenta-t-il. Je n’ose imaginer les tourments qu’elle a soufferts. Voulez-vous que je prononce une bénédiction pour apaiser son âme ?
Cirin’Del serra le médaillon sous sa cape et jeta un regard inquiet par-dessus son épaule.
- Une autre fois, mon père. Je suis pressé, je dois retourner à Vitarive pour préparer l’ouverture de l’auberge. »
Un bruissement d’ailes attira l’attention du religieux vers un hêtre proche : il faillit se mordre la langue en y découvrant le hibou de la pinède. De près, l’animal était encore plus saisissant. Son plumage brun foncé était comme auréolé d’un halo bleu saphir. Il vint se percher sur l’épaule d’Oriendo et lui pinça le lobe de l’oreille.
« Quel oiseau magnifique ! s'extasia Gatien en le contemplant.
Cirin’Del lui sourit.
- Cœur-de-Nuit est un compagnon de longue date. Il appartenait à une amie très chère qui vient juste de m'en faire cadeau. »
Il se tut un instant, observant le trait de côte en direction de Tord-la-Falaise. Une étrange lueur brillait dans ses yeux céladon.
« Prenez garde si vous approchez de ce village, mon père. Des renégats de l’Esperial ont été aperçus dans la région. Vous êtes un homme bon, et je m’en voudrais s’il devait vous arriver malheur. »
Sur ces paroles énigmatiques, il tourna les talons et disparut dans l’obscurité. Gatien essaya de le retenir, mais l’aubergiste et son rapace s’étaient volatilisés. Perplexe, le vieux doyen resta un long moment figé sur place, écoutant le bruit des vagues qui s’écrasaient sur les rochers. Foudre de Ran, à quoi pouvaient bien rimer tous ces mystères ? Oriendo venait de partir en direction de Cormarin, mais n’avait-il pas déclaré rentrer à son auberge ? Et quel était le sens de sa mise en garde ? Quelque chose dans le comportement de Cirin’Del ne plaisait pas au vieux prêtre. Pour la seconde fois ce matin-là, un sinistre pressentiment l’envahit. Devait-il renoncer à se rendre chez Beor et Grenn ?
Une faible lumière à l’horizon le sortit de sa torpeur. L’astre solaire caressait de ses premiers rayons les eaux sombres de la Mer du Soir. Le vent agita ses clochettes et Gatien prit sa décision. Il n’avait jamais été aussi en retard pour sonner l’Eveil. S’il ne se hâtait pas, les habitants de Tord-la-Falaise entreraient dans l'hiver sans la bénédiction de Ran. Il tituba plus qu’il ne courut le long de la route, appuyé sur sa vieille canne en bois. La première demeure à visiter était celle de maître Hobb, située en amont du village. Gatien contourna l’atelier du forgeron et se rendit devant sa porte, prêt à tambouriner et à faire tinter ses carilles.
Un hurlement de terreur l’en empêcha.
Une formidable déflagration secoua la maison de Hobb et fit trembler les murs de sa forge. Plusieurs ardoises se détachèrent du toit et se fracassèrent aux pieds du Vénéré. Par les flammes de Xyron, que se passait-il encore ? Gatien risqua un coup d’œil à travers la fenêtre, priant tout le panthéon divin pour que le jeune Day et son père ne soient pas en danger.
Ce qu’il vit alors le remplit d’effroi.
Là, au centre de la pièce, une créature de cauchemar à la peau cadavérique et aux cheveux de cendre invoquait le pouvoir des Sept Enfers. Ses bras et ses mains se couvraient d’arabesques rougeoyantes, et un torrent de feu noir se formait autour d’elle. De l’autre côté de la table, Roch An’Keln essayait tant bien que mal de protéger Hobb et son fils. Avec horreur, Gatien le vit déchirer les coutures de son chapeau, brandir quelque chose entre ses mains et se jeter dans le tourbillon de flammes. Le vieux doyen recula en criant et tomba à la renverse. Affolé, il conjura le sigil de Ran dans son esprit pour se protéger de la sorcière. Puis une pensée affreuse le traversa.
Roch allait mourir par sa faute.
Il n’avait pas sonné l’Eveil avant le lever du jour. À cause de lui, les Hurleurs de Xyron venaient prendre en tribut les âmes de tous les habitants de cette maison. Pris de panique, il songea à l’avertissement d’Oriendo et son cœur martela encore plus fort à l’intérieur de sa poitrine. Que n’avait-il vu les signes ! Les cavaliers sur leurs chevaux pâles étaient un sinistre présage, et cet oiseau nimbé de lumière devait être un messager de Ran pour le prévenir du danger !
Malgré ses jambes flageolantes, le vieux doyen s’efforça de se remettre debout. Il ne pouvait plus rien pour le forgeron et son ami, mais il était encore temps de sauver les âmes des autres villageois. Soufflant et crachant, il dévala la colline à toute vitesse en direction du hameau de pêcheurs. Lorsqu’enfin il foula les pavés de la rue du Bord-de-l’Irn, il était trempé de sueur dans son épaisse chasuble.
Tout était silencieux et calme.
Tord-la-Falaise lui apparut nimbé d’un léger brouillard et plongé dans un sommeil paisible. Plié en deux pour reprendre sa respiration, le père Gatien savoura la douceur de ce moment de repos. Il avait réussi.
D'un pas désormais plus léger, il parcourut la chaussée et l'esplanade des halles, cognant de sa crosse aux portes des maisons, repoussant au son clair de ses cristallines les serviteurs de Xyron tapis dans l’obscurité. Sur son passage, Albun le panetier alluma ses grands feux pour la fournée du matin, emplissant l’air de ses habituelles odeurs de pain chaud et d’épices. Le gras Luron déploierait bientôt son étal, impatient de couvrir ses présentoirs des meilleures prises ramenées par ses pêcheurs nocturnes. On l’entendrait jusqu'à la plage quand il commencerait sa criée matinale, mais pour l’heure le vent qui soufflait en provenance du large accompagnait seul l'apparition du soleil. La place centrale avec son vieux chêne ne résonnait pas encore des dizaines d’éclats de voix des enfants du village. C’était cet instant magique et éphémère où le temps suspendait sa course, juste avant d’emplir l’univers de vie avec fracas.
Au loin, des cavaliers parurent.
Ils étaient six, émergeant de l’ancienne route côtière qui serpentait le long des falaises. Leurs montures, côte-à-côte sous le soleil levant, allaient d’un pas rapide et imposant, soulevant à chacune de leurs amples foulées des lambeaux de brume. Devant eux se dessinait la silhouette d’un homme de forte carrure qui cheminait à pied et semblait être leur guide. Le père Gatien le reconnut au grand rapace bleuté qui le survolait d’un battement d’ailes tranquille.
Oriendo Cirin’Del.
Le vieil homme renifla avec dédain et fronça les sourcils. Son instinct ne l’avait pas trompé près de la tour en ruine. Que venait faire ici l’aubergiste des Trois Couronnes, accompagné de ces renégats en harnois de guerre ?
Une terreur sourde s’éveilla dans les entrailles du Père Gatien et un frisson qui n’avait rien à voir avec les gelées matinales remonta le long de son échine. Son instinct lui hurlait de s’enfuir à toutes jambes mais son corps refusait de lui répondre. Le vieux doyen déglutit une bile amère. Un souvenir profondément enfoui se fraya soudain un chemin dans sa mémoire. Son ami Roch l’avait prévenu au sujet de ces renégats un an plus tôt. « Des cavaliers manipulant la Shâat viendront, avait-il dit, montés sur de grands étalons pâles qui semblent chevaucher la brume. » Des hommes extrêmement dangereux. Et puis il y avait cette étrange écaille que le Hobb le forgeron lui avait confié. « Ne vous en séparez pas, avait-il ordonné. Elle appartient au maître du Clan des Sildaros. Il l’a enchantée pour pouvoir le contacter en cas d’urgence. Si vous devez vous en servir, prenez-la dans votre main et pensez très fort au nom de Galar Im’Radiel. Il saura que vous avez besoin d’aide. »
Cette foutue écaille ! Il l’avait enfermée dans le coffre de la syndoma le matin même.
Par les flammes de Xyron, que devait-il faire ?
Le tintement de ses clochettes le ramena à la réalité. Le vent s’était levé, charriant avec lui des effluves qui n’étaient pas celles du grand large. Une puanteur de mort arrivait tout droit de la route côtière et du vieux phare. Derrière les cavaliers surgirent des silhouettes inhumaines qui se déplaçaient accroupies dans la boue et revêtues de haillons. Elles étaient légion, se bousculant, piétinant, apportant avec elles cette odeur de charnier atroce qui envahissait l’air. En voyant approcher cette horde grotesque et terrifiante, la peur qui immobilisait le doyen depuis l’arrivée des renégats devint épouvante.
Des mortifères.
Gatien connaissait ces créatures. Il les avait aperçues dans de vieux ouvrages, mais jamais il n’aurait imaginé les voir un jour quitter les entrailles de la terre. Peu à peu elles gagnèrent de la vitesse, se propulsant à l’aide de leurs membres décharnés jusque dans le village. D’un bond prodigieux, l’une d’elles atteignit une fenêtre à un étage et s’y engouffra. Une famille vivait là, celle de Beor le forestier qui venait d’avoir un enfant. Les pleurs du nouveau-né se turent, remplacés par le bruit effroyable d’une bête qui se goinfrait goulûment.
Albun le panetier se réfugia dans son atelier et claqua la porte, le lourd verrou d’acier heurtant le chambranle. Une seconde plus tard, une dizaine de créatures à la peau couverte de terre battaient de toutes leurs forces contre l’épais panneau de bois. La porte se fracassa dans une volée d’échardes et la horde vorace se précipita à l’intérieur. La femme d’Albun hurla et, quelques instants plus tard, une goule ressortit de la paneterie avec la gueule couverte de sang.
Gatien observait le massacre, fébrile et impuissant.
C’était entièrement sa faute. Il n’avait pas sonné l’Eveil à temps. Il était leur Vénéré, le seul à connaître les mots de pouvoir pour lever une barrière autour de Tord-la-Falaise. Mais aucun son ne put franchir ses lèvres bleuies par le froid. Il assistait avec horreur au tourment des villageois, incapable d’invoquer la bénédiction de Ran pour leur venir en aide. Autour de lui, les mortifères déferlaient à vive allure, alléchées désormais par l’odeur cuivrée et capiteuse du sang.
Soudain, il sentit le remugle d’une haleine écœurante caresser sa joue.
Ils étaient là.
Six cavaliers l’observaient en silence du haut de leurs chevaux pâles. De près, on aurait pu croire à des Hurleurs sortis des enfers de Xyron. Ils paraissaient immenses sur leurs montures, bardés de leurs plastrons noirs parcourus de langues de feu. Leurs étalons eux-mêmes semblaient se mouvoir au cœur d’un linceul d’obscurité. Au pied de leurs sabots les ombres sifflaient, crépitaient comme si elles étaient animées d’une volonté propre, dansant autour des sinistres palefrois à chacune de leurs foulées.
Le père Gatien recula d’un pas fébrile.
Les yeux du premier renégat se posèrent sur lui et le transpercèrent tel un épieu de glace. Une douleur sourde le frappa au cœur comme un coup de poignard et il s’écroula à genoux dans l’herbe, s’appuyant désespérément sur sa canne pour ne pas s’effondrer face contre terre. Un spasme secoua sa lèvre inférieure, ses yeux s’écarquillèrent et sa bouche s’entrouvrit comme pour laisser échapper un cri d’agonie mais seul un filet de bave en sortit. Le cavalier pénétra au plus profond de son esprit, déchira sa conscience et s’immisça dans chacune de ses pensées, fouilla sa mémoire comme un prédateur avide de dévorer ses souvenirs. Puis une voix sépulcrale résonna dans sa tête et la douleur explosa dans le reste de son corps, comme si tous ses nerfs venaient subitement de s’embraser.
« Où est-il, suppôt de Ran ? Où avez-vous caché l’Enfant de Shâat ? »
Gatien voulut répondre, mais les mots s'étranglèrent dans sa gorge. Hélas, le renégat perdit patience. D’un souffle plus léger qu’un murmure, il prononça un mot de pouvoir. Dans un fracas tonitruant, un immense dragon de Sombrefeu apparut dans l’air et se jeta sur le pauvre doyen.
Ce chapitre esseulé est dans ma PAL depuis trop longtemps, je profite d'un creux de quelques minutes ce matin pour le lire, et de quelques minutes cet après midi pour le commenter :)
Je suis assez d'accord avec Edouard sur le début, c'est assez lent et "expositionnel", et de même, j'adhère au face à face avec Oriendo qui apporte nuance et subtilité au personnage. Ce qui m'a le plus gêné, cependant, c'est le manque d'ancrage spatial. Je m'explique : où commence-t-on, où finit-on, et quel chemin / but anime le personnage ? Pourquoi se rend-t-il donc là où il se rend, pourquoi si tôt, et pourquoi n'a-t-il pas mis le fameux bouclier d'Eveil en place (s'il devait le faire c'est normal que ça ne soit pas fait, donc pourquoi s'en veut-il ?)?
Si je prends un exemple plus concret : le père voit Roch, et envisage de lui faire signe. Il fait nuit, car nous sommes "avant l'aube", donc il a lui même une torche (il ne se ballade pas dans le noir j'imagine quand même). Il peut le voir, Roch peut le voir (sinon envisager de lui faire signe n'a pas de sens), ils sont donc proche, suffisamment pour être reconnus alors que c'est la nuit. Mais le père Gatien ne lui fait pas signe, et repart. Mais où ? Comment Roch peut ne pas le remarquer ? De même pour les cavaliers ? Sont-ils en pente ? Bref, si je voulais dessiner le parcours du père, je serai très embêté.
Sinon, en petits détails :
"son fidèle galurin" : le fidèle galurin, puisque par définition du don, il n'est plus à lui !
"Il enveloppa le tout dans un drap de soie et verrouilla son coffret avant de le glisser dans sa cachette habituelle" : ici je ne comprends pas pourquoi les objets sacrés sont par défaut "prenables" et uniquement quand il part il les cache.
Je reviens sur Oriendo, il faut vraiment garder cette rencontre, elle est un point très positif !
Voilà, désolé car mon commentaire n'est pas très positif, lui, mais je réitère mon soutien pour ton projet, et j'espère que tu nous publieras la suite :):):) <3
à bientôt !
Merci de ton passage par ici ! C'est la première réécriture de ce chapitre alors c'est normal qu'il y ait encore des choses à retoucher, je prends tes remarques comme des axes de progression pour mes corrections à venir :)
Tu as sans doute raison concernant le parcours du doyen. Dans mon esprit il était clair car il emprunte le même chemin que le trio Roch - Elraza - Oriendo vers le vieux phare, la forge puis le village de Tord-la-Falaise. En fait, il marche dans leurs pas. Peut-être faudra-t-il que je reprécise davantage tout ça, ou que j'ajoute des détails sur le paysage, la route qu'il emprunte etc...
Le début est sans doute un peu expositionnel en effet - et encore, j'ai déjà réduit le pavé par rapport à la première version ^^
Je trouvais ça sympa de laisser l'occasion au lecteur de faire connaissance avec le père Gatien avant sa mort qui est tout de même assez brutale. Je verrai comment je peux alléger tout ça !
La question de la torche est en effet plus problématique. À aucun moment il ne m'était venu à l'esprit que si Gatien voit Roch, la réciproque est sans doute vraie. Il faudra que je retravaille ce passage, c'est sans doute l'élément le plus incohérent dans tout ce que tu m'as remonté. Il faut que je réfléchisse à une solution.
Très content en tout cas si le dialogue avec Oriendo fonctionne bien pour apporter de la profondeur au personnage, c'était mon principal objectif dans la réécriture de ce chapitre !
Au plaisir,
Ori
Je suis un peu mitigé sur cette nouvelle version pour deux raisons :
- Le tout début de chapitre manque un peu de rythme à mon sens, il est très introductif. Par exemple le passage où tu nous explique la routine de Gatien. Je pense qu’il gagnerait à y avoir une scène où on le voit exercer, aider des villageois, en tout cas plus en action. Après, dès qu’il y a les phénomènes étranges, on est pris dans le rythme du chapitre.
- Je n’ai pas forcément retrouvé l’horreur de ma première lecture. Le fait de savoir ce qu’il se passe joue sûrement, mais j’avais l’impression que Gatien était condamné, qu’il n’y avait aucun espoir, vu qu’il se retrouve vite acculé par les créatures et les cavaliers. J’avais l’impression qu’il avait un regard plus extérieur dans la première version qui donnait l’impression qu’il avait peut-être une chance. Et puis, j’ai trouvé que ça allait vite entre les premières créatures et la mort de Gatien. J’aurais apprécié qu’il tente quelque chose, essaye de donner l’alarme, voir même fuie pour donner l’espoir au lecteur d’une survie, et le rende plus acteur que seulement spectateur. Ça rendrait potentiellement sa fin encore plus tragique.
Ce qui fonctionne mieux :
- L’ajout d’Oriendo. C’est clairement un plus par rapport à la première version. J’ai beaucoup apprécié la première scène où il le prévient de ne pas aller au village. J’ai trouvé que les paroles d’Oriendo avaient un côté sincère quand il disait à Gatien que ce serait dommage que quelque chose de mal lui arrive, comme s’il arrivait un véritable attachement pour lui (même si évidemment pas assez pour l’épargner). Du coup, je me fais la réflexion qu’il n’est pas nécessaire que ce soit lui qui tue Gatien. On pourrait même ne pas le voir du tout pendant la scène du massacre, ou seulement en arrière plan. La scène précédente avec Gatien suffit à sous-entendre qu’il est derrière tout ça. Avant de mourir, le prêtre pourrait repenser à ses paroles et comprendre sa trahison. Je trouve que ça serait aussi cool pour le personnage d’Oriendo, qui reste jusque-là un antagoniste assez mystérieux, qui est plus dans la manipulation que la violence, je trouve que ça lui enlève un peu d’aura de se salir les mains en tuant un vieillard.
- Les éléments sur le passé d’Oriendo. Très intéressants, on devine que ça va trouver son sens par la suite, que ça permet de mieux comprendre ses motivations. Bref, très bon ajout ! J’ai aussi apprécié le fait qu’il appelle Elzara sa très bonne amie, on se demande ce qu’il pense d’elle. Est-il encore attaché à son ancienne femme ? J’ai envie de penser qu’oui.
Mes remarques :
« qui le contraignait à tout mettre par écrit, car il n'était plus capable de mémoriser les lieux et les dates de ses tournées de prêche. » je pense que tu peux couper après écrit, pour alléger sans perdre énormément d'infos intéressantes
« et il n’avait plus les jambes de ses vingt ans. Avec le recul, construire sa demeure au sommet de la colline qui surplombait Vitarive lui paraissait une très mauvaise idée. Non seulement il vivait seul à l’écart des bourgades dont il avait la charge spirituelle, mais en plus il infligeait un calvaire à ses vieux os lorsqu’il devait remonter le tertre pour célébrer l’office. » ça me paraît un peu beaucoup de phrases pour cette idée, surtout qu’elle passe à mon sens plus naturellement un peu plus tard dans le texte : « Hélas, il ne pouvait soutenir leur rythme de marche et se retrouva rapidement distancé. »
Voilà pour mon petit retour, c’est un vrai plaisir de replonger dans ton histoire !!
Waow, en voilà un commentaire détaillé et super utile ! Je ne m'attendais pas à avoir un retour si complet, merci !
Je vois ce que tu veux dire pour le début qui peut sembler lent en effet, car il passe finalement beaucoup de temps chez lui avant de se diriger vers le village et que ses ennuis commencent. Cela dit, l'ancienne version du chapitre avait un début très introductif aussi, puisqu'il s'agissait du prologue d'origine de cette histoire (bien avant celui avec le conteur).
Je vais voir pour essayer de dynamiser un peu le début en raccourcissant certains détails superflus.
C'est étonnant que tu n'aies pas retrouvé l'horreur de la première lecture, car toute la fin à partir de l'arrivée des cavaliers n'a pas du tout été modifiée, mis à part pour ajouter le dernier petit dialogue avec Oriendo.
Peut-être que tu as eu ce sentiment parce-que tu connaissais déjà la chute de chapitre, et parce que le chapitre étant plus long, la mort brutale du Vénéré donne le sentiment d'arriver plus tardivement ?
Content de voir que l'ajout d'Oriendo fonctionne, j'aime beaucoup aussi cette scène de dialogue avec Gatien au pied du phare en ruine, juste après qu'il ait volé l'Oro'luin d'Elraza. Ça renforce le poids de la mort d'Anthéa dans l'esprit du lecteur et ça permet d'échafauder de nouvelles hypothèses sur les raisons de sa trahison.
D'ailleurs je pense avec du recul que tu as raison, je vais remettre la mort de Gatien telle qu'elle était auparavant sans faire intervenir Oriendo directement. Le fait qu'il y ait le dialogue près du phare + qu'il l'aperçoive avec les cavaliers quand ils arrivent au village suffit.
Mon idée ici était de montrer un contraste entre Ori qui "se salit les mains" et Ori qui "abrège les souffrances" du vieux doyen par compassion, pour donner encore de la profondeur au personnage. Visiblement, ça ne fonctionne pas comme escompté, je vais retirer ce passage.
Au plaisir,
Ori'