Chapitre 12 : Le journal

Notes de l’auteur : Hello !
Petit "warning" avant de commencer : je compte faire une pause dans l'écriture d'Amélia Moonfall. J'ai un million de projets dans la tête et j'ai besoin de temps pour y mettre de l'ordre et pouvoir retourner à Amélia tranquillement.

Alors, bonne lecture !

PS : je ne suis vraiment pas sûre de moi concernant ce chapitre, alors n'hésitez pas à laisser des commentaires, je les lis tous, même si je ne réponds pas à certains (parfois je ne sais juste pas quoi dire ^^') et ils m'aident vraiment beaucoup. Merci d'avance !

PPS : navrée si vous trouvez le chapitre un peu long, mais je n'avais vraiment pas la foi de le couper en deux ^^'

[Chapitre relu]

Après un repas plutôt animé où Luvenia ne cessa de pester contre Théodora Gossen avant de rire des exploits d’Azura lors de sa séance de peinture, Amélia s’enferma dans sa chambre. La découverte de ce pendentif dans sa poche n’avait pas arrêté de la hanter durant toute la soirée et elle brûlait d’en découvrir l’origine. La jeune fille était persuadée d’avoir déjà vu le symbole qui y été gravé quelque part… mais où ?

Tout de suite après avoir retrouvé sa chambre, elle s’était mise à fouiller dans ses livres. Le fait de découvrir l’identité de son mystérieux sauveur ne faisait qu’encourager Amélia dans ses recherches. Elle n’avait pas oublié ce regard à l’étrange teinte turquoise, et rêvait de le revoir.

Après plus d’une heure à retourner sa bibliothèque et les nombreux ouvrages qu’elle possédait, l’adolescente commença à désespérer. Fouiller dans la bibliothèque du manoir était inutile. Il était bien trop tard et elle craignait de se faire surprendre, surtout par sa mère. Comment lui expliquer, alors, ce qu’elle pouvait bien faire au milieu des livres d’histoire ? Jamais Azura n’avalerait un mensonge aussi grotesque que le soudain et vivace intérêt de sa fille pour l’histoire d’Osha…

Amélia soupira. Elle s’apprêtait à ranger le désordre qu’elle avait mis quand son regard fut attiré par un livre abandonné dans un coin. Curieuse, et ayant visiblement épuisé ses autres options, elle s’en empara.

Les grandes familles d’Osha et leur histoire

Voilà qui tombait à pic.

Amélia feuilleta son livre avec un intérêt renouvelé. Ce vieux manuel était un cadeau de son premier précepteur, un vieil humain qui lui avait appris à lire et à écrire. Passionné d’histoire, il avait été le premier à lui raconter celle d’Aurora. Il avait fini par partir, contraint de quitter Riverfield pour retrouver sa famille à Crytsalburn, la capitale humaine. Mais, avant de s’en aller et pour s’excuser de son départ précipité, il lui avait offert ce livre des familles d’Osha. Il lui avait fait promettre de ne pas en parler à sa mère, qui, il n’en doutait pas, aurait tôt fait de le lui confisquer pour d’obscures raisons. Alors, évidement, Amélia s’était fait une joie de l’accepter et de le cacher.

Pourtant, et à bien y réfléchir, elle n’y avait encore jamais jeté un œil. Tout de suite après l’avoir ramené au manoir et caché dans un coin, elle était partie jouer avec son frère. Puis, le temps passant, Azura s’était montré de plus en plus oppressante avec ses obligations auxquelles elle conviait constamment Amélia. Le peu de temps libre qu’elle arrivait à avoir, elle le passait avec son frère. Alors, tout naturellement, elle avait fini par l’oublier.

Et voilà qu’aujourd’hui, alors qu’elle se trouvait dans une impasse, il lui tombait presque du ciel. Amélia se mordit la lèvre en le voyant et remercia silencieusement ce vieux bonhomme fantasque qu’avait été son professeur.

Malheureusement, Amélia eut beau fouillé parmi les pages jaunies, elle ne trouva rien qui ne ressemble de près ou de loin au blason gravé au dos du pendentif, pas plus que l’inscription qui l’accompagnait. Sorcière, vampire, sylphe, elfe, loup-garou, ondine, même les familles de sirènes y avaient été répertoriés ! Mais rien…

Rien sur les fées.

Les fées ?

En regardant plus attentivement, Amélia se rendit compte qu’il n’y avait vraiment rien sur le peuple féerique dans son livre. Tout juste quelques lignes à la fin, expliquant rapidement qu’il n’y avait aucune information à donner. Pas un chapitre, pas une note sur une grande famille de fée – et Amélia savait qu’il y en avait eu.

La jeune fille fronça les sourcils, perplexe, et alla regarder la date d’édition du livre.

 

27 juillet de l’an 1881, dynastie Lerouge

 

Évidemment, songea-t-elle sombrement en refermant l’ouvrage.

An 1881 de la dynastie Lerouge, seulement deux ans après la mort soudaine de Barthélémy Lerouge. Tout le monde connaissait l’histoire. Cet homme, ce sorcier, était à l’origine de tout. C’était lui qui avait banni les fées un siècle plus tôt, reniant jusqu’à leur existence avant de vouloir s’attaquer aux humains.

Une rumeur avait couru peu après sa mort. On disait que la reine des fées, dont Barthélémy Lerouge avait fait assassiner toute la famille, avait jeté une malédiction sur le roi, provoquant la soudaine apparition de cette maladie incurable qui l’avait emporté en quelques jours. Ce n’était qu’une rumeur, rapidement rependu après l’exécution de la reine sur la place publique. Des paroles qu’elle avait proféré contre le seigneur et dont les mots avaient marqué les esprits. Mais auxquels personne n’avait donné d’importance.

Amélia ne fut pas surprise. L’ouvrage avait été publié deux ans après leur disparition. Il n’était pas étonnant de ne pas trouver trace de leurs plus anciennes familles. Toutes ces informations avaient dû être emportées par les dernières survivantes du massacre qui avait suivi l’exécution des souverains féeriques.

L’adolescente soupira. Vu la vieillesse de l’ouvrage et l’amour que portait son ancien précepteur pour l’histoire, elle avait espéré que son livre fut plus ancien. Quelle déception !

Son regard vagabonda un moment sur les livres de sa bibliothèque avant de se poser sur l’un d’eux. La grande Histoire d’Osha. Elle tendit une main vers lui et le volume vola vers elle avant d’atterrir dans sa paume. La pensée de M. George lui faisant remarquer que la magie rendait les sorciers paresseux la fit sourire. Elle repoussa l’image du vieil homme de son esprit et posa l’ouvrage devant elle avant d’en observer la couverture ouvragée.

L’adolescente l’ouvrit au chapitre – si fin – des fées et commença à le feuilleter. De toute façon, elle n’avait plus rien à perdre !

Amélia trouvait dommage qu’en si peu de temps, une civilisation entière ait pu disparaître des livres d’histoires. La grande Histoire d’Osha comptait à peine une dizaine de pages consacrées aux fées alors qu’il y en avait des centaines rien que pour les vampires. De la civilisation des fées, il ne restait pas grand-chose, et la jeune fille doutait qu’un jour elles partagent leurs dernières connaissances avec les sorcières, pas après tout ce qu’elles avaient vécues et leur situation actuelle.

Nouveau soupire. Amélia tourna la page et s’arrêta devant une illustration du premier couple royale féerique, l’un des très rares vestiges de leur histoire. Le dessin, fait à l’aquarelle, était de toute beauté. On pouvait y voir une femme splendide dressé au côté d’un homme tout aussi beau. Titania d’Avalon, reine des fées, était grande, voluptueuse dans son drapée immaculé. Elle avait de longs cheveux aux boucles rousses coiffés d’une couronne de fleur, un teint de porcelaine, de grands yeux verts… et dans son dos, d’immenses ailes de papillon colorées. Son époux, Obéron, était plus petit, mais tout aussi beau. Des traits fins, un nez droit et des yeux bleus en amande. Il était habillé aussi simplement que sa reine, une couronne de ronce parant ses cheveux blonds alors que des ailes de libellules reposaient dans son dos.

Amélia les trouvait splendides. Un peu intimidants avec leur regard froid, presque glacial, mais magnifiques.

Beaucoup d’histoires circulaient sur eux. On disait, par exemple, qu’ils étaient capables de magie et d’enchantement, notamment avec les plantes. Un pouvoir perdu au fil des âges, mais qui se manifestait encore aujourd’hui par un lien étroit entre les fées et la nature.

Amélia aurait adoré en apprendre plus sur cette culture disparue.

La sorcière referma son livre et le rangea avant de reporter son regard sur le médaillon. Elle observa longuement la gravure au devant. La rose était splendide. Et les ronces étaient si réaliste qu’Amélia avait l’impression que, si elle passait un doigt dessus, elle se piquerait.

Pas de doute, pensa-t-elle, ce pendentif vient d’une très ancienne famille de fée.

Un léger sourire ébaucha les lèvres de la jeune fille. Elle n’avait certes pas trouvé de réponse à sa question, mais elle avait compris quelque chose de presque aussi intéressant. Le sens du symbole, cette fleur entourée par cette couronne d’épines. En redécouvrant l’illustration des souverains féeriques d’antan, Amélia avait compris.

La rose pour Titania. La ronce pour Obéron.

Ainsi les fées gardaient en mémoire leurs premiers roi et reine.

Mais cette conclusion, bien que très poétique, ne put repousser bien longtemps la déception qui la hantait.

– On dirait qu’il ne me reste plus qu’à aller me coucher, soupira Amélia en jetant un dernier coup d’œil à sa bibliothèque.

 

Les lumières éteintes, confortablement installée dans son lit, Amélia commençait à somnoler quand quelques coups furent frappés à la porte. Elle se redressa dans ses couvertures, un peu alanguie par le sommeil et lança un « entrez » quelque peu grognon. Qui pouvait donc la déranger maintenant ? Elle qui ne rêvait plus que de dormir depuis qu’elle était rentré de sa catastrophique sortie dans le Quartier des Fées…

La porte s’ouvrit sur un M. George un peu embarrassé. D’un signe de la main, elle le pria d’entrer et le majordome s’exécuta.

– Pardonnez-moi de vous déranger si tard, mademoiselle, s’excusa-t-il. Mais je devais vous remettre ceci.

Amélia tendit le cou alors qu’il lui tendait un plateau d’argent où reposait, soigneusement plié, un exemplaire du journal Le Messager.

Très connu pour ses articles de faits divers, Le Messager était aussi un journal d’information locale relatant absolument tout ce qu’il se passait dans la capitale. Rien n’échappait jamais au Messager. Mais, en cas d’événement fâcheux, mieux valait se retrouver en première page de celui-ci plutôt que du magazine à scandale Les fous des folles. Ce dernier n’avait pas son pareil pour déformer la réalité et ne s’en privait guère. Ses articles provoquaient d’ailleurs plus de remous que les faits dont ils étaient inspirés.

Amélia posa un regard perplexe sur le vieil homme et réprima un bâillement. Il se racla la gorge.

– Le jeune maître m’a demandé de vous remettre ceci. Peut-être cela pourra-t-il vous aider dans vos recherches. Je vous prie de m’excuser, mademoiselle, reprit-t-il penaud, j’aurai dû vous le remettre plus tôt dans la matinée, mais cela m’est sorti de l’esprit.

Amélia le considéra avec pitié.

– J’imagine que la bataille de nourriture qui a suivi mon départ n’a pas aidé, sourit-elle d’un air contrit.

– Effectivement, lui répondit-il sombrement.

Pauvre M. George, se dit-t-elle. Il devait constamment réparer les bêtises de tout le monde au manoir. Amélia songea que cet homme était vraiment une perle. Comment diable faisait-il pour les supporter tous autant qu’ils étaient ? La jeune fille se promit de lui offrir au moins une semaine de congé, à lui et à Mme Bennett. La cuisinière en cheffe fulminait encore dans sa cuisine quand ils étaient passés à table. Et, d’après ce qu’Azriel lui avait glissé à l’oreille durant le repas, elle avait sévèrement réprimandé toutes les sorcières présentes au goûté.

Amélia aurait adoré voir la tête de Théodora Gossen alors qu’elle se faisait houspiller par la cuisinière, sa robe couverte de délices et ses cheveux défaits. Un tableau magnifique, à n’en point douter ! Malgré cela, l’adolescente ne réussit pas à s’en réjouir. Elle se sentait soudain coupable d’avoir éprouvé tant de joie en voyant Luvenia jeter la première cette délicieuse tarte au citron à la face de cette vieille harpie de Théodora. Quel gâchis…

– Ce n’est rien, finit-elle par dire en souriant au majordome. Merci M. George.

Le vieil homme sembla soulagé et s’inclina avant de lui souhaiter une bonne nuit et de prendre congé. Dès qu’il eut fermé la porte, Amélia alluma sa lampe de chevet et se plongea dans le journal. En première page, et en gros caractère, se trouvait un article sur de nouvelles morts :

 

LA MORT FRAPPE ENCORE DANS LE QUARTIER DES FÉES

 

Tôt dans la matinée de ce 13 novembre, une famille de fée a été retrouvée sans vie dans les décombres de leur maison après un incendie meurtrier. Le départ du feu n’a pas encore été identifié et des spécialistes en élémentarisme travaillent encore sur les causes et l’origine du brasier.

Accident domestique ou crime crapuleux, le mystère reste entier. L’énigmatique Tueur de Fée aurait-il changé de mode opératoire ? Que font les Premières Familles pour endiguer ces meurtres ? L’assassin serait-il un pion dans le jeu des sorcières pour garder le pouvoir ?

 

Amélia fronça les sourcils et se laissa tomber sur son lit. Elle avait beau trouver les propos du journal diffamatoire, elle commençait à se poser de sérieuses questions elle aussi. Que faisait donc son père et sa tante Nausicaa pour endiguer ces crimes ? Ils paraissaient toujours si occupés tous les deux… que pouvaient-ils bien faire de leurs journées ?

Pour la tante Luvenia, Amélia avait d’ores et déjà la réponse. Avec la recrudescence de crime en ville, le Palais de Justice n’avait pas été aussi débordé depuis des années. La jeune fille l’avait entendu parler avec Eras – qui était étudiant en droit dans son cabinet – de la hausse des délits depuis l’apparition de ce Tueur de Fée qui défrayait la chronique depuis des mois. À croire qu’avoir un tueur errant dans les rues était une raison suffisante pour s’adonner à de mauvaises actions. 

Un incendie… Non, Amélia ne pensait pas qu’il s’agissait du tueur. Et puis ça n’aurait pas de sens. Luvenia lui avait dit que les tueurs en série comme lui avaient toujours un mode opératoire, une méthodologie, et qu’ils s’y tenaient. Alors, pourquoi changer maintenant ? Ça n’avait pas de sens… Pour en avoir le cœur net, l’adolescente replongea dans le journal.

Une photo accompagnait l’article. On y voyait la maison éventrée. Il ne restait presque rien… L’article ne donnait pas d’adresse, mais il sembla à Amélia reconnaître la rue où la photo avait été prise. Elle avait dû la croiser avant de se perdre et d’arriver chez la pixie.

Un frisson lui parcouru le dos. Elle secoua la tête.

Penser à autre chose.

Amélia poursuivit sa lecture. Tournant la page, elle découvrit un nouvel article sur le Tueur de Fée. À croire qu’il ne se passe rien d’autre à Riverfield, songea-t-elle avec amertume.

Une photo de l’inspecteur O’Brien illustrait l’article. Amélia ne mit pas longtemps à comprendre qu’il s’agissait là d’un cliché prit à la dérobé. L’elfe n’avait même pas dû apercevoir le photographe avant d’entendre le son de l’appareil se déclencher…

 

 UNE ENQUÊTE AU POINT MORT

 

L’inspecteur O’Brien se veut rassurant alors que le nombre de victime du mystérieux Tueur de Fée ne fait qu’augmenter. L’elfe affirmait ce matin à nos reporters lors d’une interview qu’il mettait tout en œuvre pour retrouver le coupable et qu’il avait une piste sérieuse. Son partenaire, le loup-garou Henrik Graham ne semble, quant à lui, pas concerné par l’affaire outre mesure, affirmant devant qui veut l’entendre que le tueur finirait par se lasser un jour ou l’autre de ces meurtres qu’il juge « facile et sans intérêt ».

Des rumeurs circulerait sur la possible implication de certaines familles de loups-garous pro-Lerouge dans cette guerre silencieuse qui perdure entre cette famille de sorcier de sang et le peuple des fées depuis bientôt un siècle. En effet, selon nos sources, l’ancienne Première Famille ayant jadis régné sur Osha n’aurait pas pardonné aux fées les évènements passés ayant provoqué la Séparation et le bannissement pur et simple de ce peuple enchanté du pays. De nombreuses guerres de clans lupins auraient d’ailleurs éclaté dans le Quartier des Loups-Garous causant trois morts et une dizaine de blessés.

À l’heure actuelle, nous ignorons encore si le Tueur de Fée sera un jour appréhendé. Il est donc vivement conseillé à tous les citoyens féeriques de Riverfield de se montrer prudent lorsque tombe la nuit.

Pour finir, l’inspecteur O’Brien lance, avec le soutien de Nausicaa Moonfall, un appel à témoin.

Si vous avez la moindre information susceptible de faire avancer l’enquête, vous êtes prié de vous rendre au commissariat central afin de mettre au courant les autorités compétentes.

 

Amélia fronça un peu plus les sourcils. Des loups-garous pro-Lerouge ? Il ne manquait plus que ça ! Si même les autres enfants d’Aurora commençaient à se mettre de leur côté contre les fées, cela serait catastrophique… La jeune fille imaginait sans mal le sourire des Lerouge si une guerre civile venait à éclater. Avec les loups-garous de leur côté… cela promettait d’être sanglant. Ces enfants de la lune n’étaient pas vraiment connus pour leur patience ni leur délicatesse. Beaucoup étaient des brutes sans cervelle qu’il valait mieux éviter, la faute à une consanguinité bien connue mais dont on se plaisait à taire la rumeur.

Comme ceux de Loup Cellier, pensa soudain Amélia.

La jeune fille se rembrunit. Pas étonnant que Luvenia et ses confrères et consœurs soient débordés. Si tout le monde se mettait à faire comme ce maudit sorcier…

Amélia secoua la tête et se replongea dans le journal. En le parcourant un peu plus, elle fut attirée par un tout petit article en fin de page.

La rubrique mortuaire…

 

FUNÉRAILLES AU CIMETIÈRE DES CENDRES

 

Ce matin a été mis en terre Emily Sparkles, une fée d’à peine seize ans retrouvée assassinée dans les rues du Quartier des Vampires le 7 novembre dernier. L’enterrement s’est fait en petit comité dans le Cimetière des Cendres, tout près du Parc de Lune où la jeune fille aimait tant se promener.

La fée, qui travaillait depuis bientôt cinq ans au service de la famille Moonfall a bénéficié d’un traitement de faveur assez révélateur quant à l’attachement que cette grande famille lui portait.

En effet, Roman Moonfall s’est occupé lui-même de prendre en charge les frais de cérémonie, permettant à la famille Sparkles de se recueillir sur une tombe ouvragée habituellement réservée aux sorcières de bonnes familles.

Cette action, bien que très honorable, a soulevé les contestations et critiques de plusieurs membres importants de notre précieuse Sorciété, ce qui ne semble pas choquer outre mesure notre bon roi qui répond à ses détracteurs…

 

Amélia se figea. Les yeux grands ouverts, elle dut relire plusieurs fois l’article pour en comprendre le sens. Une main portée à ses lèvres, elle ne pouvait détourner le regard de ces mots. Il lui fallut un moment avant de se rendre compte qu’elle tremblait. Ses yeux s’étaient embués de larmes, sa gorge se serra.

Son père avait payé l’enterrement d’Emily ? Elle l’ignorait…

D’un bond, Amélia se releva et quitta sa chambre. Le journal toujours en main, elle traversa le couloir à grands pas et entra en trombe dans le bureau de son père. Roman releva des yeux surpris sur sa fille. Après quelques instants de flottement, il se leva de son fauteuil, les sourcils froncés par l’inquiétude et s’approcha.

– Amélia ? demanda-t-il d’une voix douce. Tout va bien ?

L’adolescente serra plus fort le journal dans son poing avant de fondre sur son père. Elle le serra dans ses bras, et, n’y tenant plus, éclata en sanglot.

– Merci… renifla-t-elle dans sa chemise. Merci d’avoir fait ça pour Emily.

Le sorcier resta figé un moment avant de serrer Amélia dans ses bras. Un doux sourire étira ses lèvres alors qu’il lui caressait tendrement les cheveux.

– C’était la moindre des choses, mon ange. Emily était une jeune fille remarquable, j’aimais beaucoup parler avec elle. Et je sais à quel point elle comptait pour Azriel et toi. Sa famille n’aurait jamais eu les moyens de lui offrir un enterrement digne de ce nom.

– Mais ils n’ont pas protesté ? demanda-t-elle en s’écartant un peu, les yeux encore humides.

– Au début, si, avoua Roman en se grattant la joue.

D’un geste de la main il l’invita à s’asseoir et tous deux prirent place devant la cheminée. Les flammes la réchauffèrent tout de suite et l’adolescente remonta ses genoux à sa poitrine. Ce ne fut qu’à cet instant, alors qu’Amélia observait plus attentivement son père, qu’elle remarqua les cernes sous ses yeux. Depuis quand n’avait-il pas dormi ?

– Mais, poursuivit-il d’une voix toujours aussi douce, quand je leur ai expliqué la situation, que je leur ai dit à quel point nous étions tous attachés à Emily, ils ont accepté.

– Leur as-tu donné le dernier salaire d’Emily ? demanda soudain Amélia en se penchant en avant. Ils doivent en avoir besoin.

– Ils l’ont refusé.

– Q-quoi ? s’étrangla-t-elle.

Roman se pencha en avant et passa une main sur la joue de sa fille. Mais son sourire semblait un peu amer, comme s’il regrettait, lui aussi, que les Sparkles aient refusé l’argent.

– Ses sœurs et son frère étaient prêts à l’accepter, expliqua-t-il, mais sa mère a refusé.

– Mais pourquoi ? Ils ont besoin de cet argent !

– Mme Sparkles m’a expliqué que le règlement des funérailles lui suffisait. Je crois qu’elle ne voulait pas avoir l’air de quémander, même si ça lui coûtait.

– Mais l’argent…

– Ne t’inquiète pas, je l’ai donné à M. George pour qu’il aille acheter des fleurs pour Emily. Peut-être que tu pourrais l’accompagner, je ne suis pas certain qu’il sache quelles fleurs étaient ses préférées.

Amélia regarda longuement son père avant de se lever et de le serrer dans ses bras.

– Tu es le meilleur père du monde, murmura-t-elle dans son cou.

Roman serra plus fort sa fille contre lui. Mais les mots d’Amélia lui serrèrent la gorge. Lui, le meilleur père au monde ? Il en doutait… sinon, il n’aurait jamais laissé sa fille souffrir autant de la solitude et aurait tout de suite remarqué la maladie qui rongeait son fils. Non, Roman ne se sentait pas le meilleur père du monde.

Ravalant ses pensées, le sorcier se contenta d’afficher un fin sourire.

– Et toi, dit-il en s’écartant, tu devrais aller te coucher.

Il repoussa quelques mèches rebelles de son visage, et essuya les dernières larmes de l’adolescente.

– Il se fait tard.

Amélia lui rendit son sourire et l’embrassa avant de ramasser le journal qu’elle avait abandonné par terre. Elle le plia soigneusement et le serra contre son cœur avant de se tourner vers son père qui s’était levé.

– Bonne nuit, papa.

– Bonne nuit.

Puis elle sortit de la pièce, plus légère, et se dirigea vers sa chambre.

Il faisait sombre. Amélia regarda une dernière fois le journal avant de se tourner vers le ciel nocturne, plus déterminée que jamais. C’était décidé, elle retournerait demain dans le Quartier des Fées. Et, avec un peu de chance, elle recroiserait l’inconnu aux yeux turquoise.

À ce moment-là, elle pourrait enfin lui rendre son pendentif.

Et avoir des réponses.

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MarenLetemple
Posté le 19/12/2021
Salut ! Je ne pense pas que ce chapitre ait un problème comme tu sembles le penser. Il est plus concis que les autres et va à l'essentiel. Il n'y a pas beaucoup d'action, mais des informations, ce qui m'enchante tout autant.

J'ai remarqué une phrase qui, à mon sens, est relativement inutile, puisqu'aucune transition n'est nécessaire entre les deux paragraphes .
« Et aussitôt, elle se prépara pour aller dormir.” --> si tu sautes une ligne de plus, les lecteurs sauront que du temps est passé entre sa décision et le moment où elle entre dans son lit.

Coquilles : “Puis, le temps passant, Azura s’était montré de plus en plus oppressantes avec ses obligations” --> oppressante
« L’inspecteur O’Brien se veut rassurant alors que le nombre de victime du mystérieux Tueur de Fée ne fait qu’augmenter.” --> victimes

:)
Lunatique16
Posté le 19/12/2021
Salut et merci pour les coquilles !
Maintenant que tu le dis (et ayant relu le passage en question) c'est vrai que cette phrase semble de trop. Faut vraiment que j'apprenne à pas forcer sur les détails...

À bientôt ! :)
Zoju
Posté le 01/06/2021
Salut ! Même si l'histoire est pour l'instant en pause, je vais quand même te donner mon avis sur ce chapitre ;-) Encore désolée de ne pas l'avoir fait plus tôt.

En tout cas, j'ai pris beaucoup de plaisir à le lire. C'est toujours aussi fluide (les descriptions sont toujours plaisante à lire) et je continue de m'évader à chaque fois que je me replonge dans ton récit. J'ai beaucoup aimé la réflexion d'Amélia sur l'histoire écrit par la gagnant. C'est très intéressant qu'elle s'en rende compte. Cela nous permet aussi d'en apprendre plus sur le monde des fées. Je me suis demandée si le mystérieux sauveur ne serait pas un descendant de la famille royale. Je me demande bien qui s'est.

Toute ses recherches l'amènent à se poser beaucoup de questions et à mettre en avant bon nombre d'élément plus profond. L'idée du journal est très bonne et les articles sont bien amené. Le passage où Amélia retrouve son père est vraiment très touchant. Je n'ai eu aucun mal à m'imaginer la scène et ce passage m'a ému
"Roman serra plus fort sa fille contre lui. Mais les mots d’Amélia lui serrèrent la gorge. Lui, le meilleur père au monde ? Il en doutait… sinon, il n’aurait jamais laissé sa fille souffrir autant de la solitude et aurait tout de suite remarqué la maladie qui rongeait son fils. Non, Roman ne se sentait pas le meilleur père du monde."

Si j'avais juste une petite remarque, ce serait avec M George et son arrivé tard le soir. Est-ce que Azriel a insisté pour que sa sœur l'ai dans la journée ? Et si Amélia dormait, il l'aurait réveillé ?

Quoi qu'il en soit, Amélia a désormais un nouvel objectif. Je me demande ce que cela va lui réserver ! Hâte de connaitre la suite et ne t'inquiète pas pour le temps, moi-même il m'arrive de mettre des projets en pause car je n'ai absolument pas le temps et l'esprit à tout gérer de front. Courage pour la suite ! :-)
Lunatique16
Posté le 01/06/2021
Salut !
Wouah, ton commentaire m'a fait sourire du début à la fin, merci ! x) Je suis contente que ce chapitre t'ai plu et j'ai bien aimé tes déductions, j'ai vraiment hâte de vous faire découvrir la suite des aventures d'Amélia (même si je cafouille encore dessus T-T)
Pour ce qui est de l'intervention de M. George, pour être honnête je n'y avais même pas pensé ! C'est très bien vu ! Mais bon, ce vieux bonhomme fait quasiment parti de la famille, Amélia ne lui en aurait pas voulu de la réveillé, et quand bien même, si elle n'avait pas répondu, il se serait contenté de déposer le journal sur sa table de chevet ou le laisser derrière la porte, il n'aurait pas insisté. Mais c'est une très bonne question !

Merci encore pour tes encouragements, ça fait plaisir de te revoir par ici ! ^^

A bientôt ! :-)
Elora
Posté le 27/04/2021
J'aime beaucoup ce chapitre, il a une ambiance assez douce et l'action redescend lentement, comme pour nous permettre de nous reposer.
Ce qui est bien, c'est que tu t’attardes sur la mort d'Emily et le deuil d'Amélia, d'autres vont trop vite et c'est vraiment dommage.
Je suis intriguée par l'inconnu aux yeux turquoises, j'ai hâte d'en savoir plus ! J'ai plusieurs théories en tête, je vais bien voir si j'ai raison ou pas !
Roman est un très bon père, je trouve triste qu'il pense le contraire. Le pays est entre de bonne main, il a un cœur pur. Les Fées m'intriguent, il y a une grande histoire derrière tout ça, tout tourne autour d'elles.

Profite bien de ta pause, il vaut mieux écrire à tête reposée qu'écrire avec le cerveau en vrac !
P-S : Je l'ai dis plus haut, c'est un très bon chapitre, et PP-S : Il est exactement à la bonne taille !
Lunatique16
Posté le 28/04/2021
Merci pour ton commentaire il est adorable, ça me fais beaucoup trop plaisir ! Je suis contente que ce chapitre t'ai plu et rassurée, du coup, qu'il soit aussi bien reçu ^^

A bientôt ! :)
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