Chapitre 18

Par Cerise
Notes de l’auteur : Bon, je m'excuse d'avance, c'est un chapitre court qui ne fait pas avancer beaucoup... J'espère que vous le lirez quand même avec plaisir

Mila se réveilla à potron-minet. Seule une pâle lueur ensommeillée forçait l’interstice entre les lattes de ses persiennes. Un tic-tac accusateur tintait à ses oreilles : plus que deux journées avant que Sylvestre se retrouve propulsé dans la stratosphère, et dans un court laps de temps après, elle avec.

Un bruit dans l’appartement la mis sur le qui-vive : des pas feutrés, rapides, dans son salon ou son entrée, elle n’était pas sûre.

L’adrénaline gicla dans ses artères, elle se souvenait qu’on ne savait toujours pas comment le simili-djinn avait pénétré chez Cadaral, et elle regrettait amèrement de l’avoir appelé fantôme la veille. Et s’il était venu achever l’œuvre ratée de son complice ?

Sans bouger sous ses draps elle parcourut dans sa tête sa petite chambre à la recherche d’une arme, ou de quoi que ce soit qui pourrait en faire office. Mais à part sa collection de chaussures à talons d’hiver, rangée en haut de son dressing, tout s’avérait soit trop mou, soit trop petit. On n’assommait pas quelqu’un avec un oreiller ni avec une boule à neige de la Sagrada Familia.

Un bruit de placard manqua de la faire sursauter. Que cherchait-il dans la cuisine ? Elle avait reconnu la porte qu’il avait ouverte, elle ne rangeait qu’un peu d’épicerie à cet endroit. Aucune chance de ranger avec le café son carnet, elle l’avait probablement laissé sur la table basse hier à côté de l’ordinateur de Sylvestre…

Sylvestre ! Elle aurait parié que c’était lui ! Il avait promis de rentrer plus tard, elle était allée se coucher, épuisée, ils avaient convenu qu’il claquerait la porte en partant, elle était sécurisée de toute façon.

Elle déboula dans la cuisine pour le trouver perplexe, cherchant sur le paquet une information là où on lisait : « Ses arômes complexes de noix torréfiées et de cacao sublimés par une note de vanille vous procureront un réveil intensément doux et suavement orchestré par l’enchaînement des saveurs... »

– Mais qu’est-ce que tu fais ?

Il prit un air contrit :

– Ça fait un petit moment que je n’ai pas préparé de café, je ne me souviens plus du dosage. Mais je ne vois rien d’indiqué là dessus !

Elle ne savait pas si elle devait l’engueuler, le renseigner ou retourner se coucher. Elle commença par respirer un grand coup, avant de poursuivre plus posément :

– Tu m’as fait une peur bleue, tu m’avais dit que tu rentrerais chez toi sitôt que tu aurais terminé la mise à jour de tes dossiers d’enquête ! Et, reprit-elle moins fort, c’est trois cuillères à café pour un mug.

– Ah. Merci. En fait, expliqua-t-il en arasant soigneusement la première cuillère, il me semble que je me suis assoupi un instant. Lorsque je me suis réveillé, il était déjà presque cinq heures, et donc…

– Sylvestre, je t’ai dit trois cuillères.

– Je t’ai bien entendu, attends… cinq… et six ! Et pour l’eau ?

– Avec tout ce café, tu remplis jusqu’à cette graduation, là. Mais tu as dormi où du coup ?

– Jusque là, tu dis ? Ah, eh bien, sur ton canapé. Là où je me suis assis hier soir.

Il appuya sur le bouton, et résignée, elle sortit deux mugs. Il confirma :

– Je vais retenter le café, peut-être que cela m’empêchera de sombrer aussi facilement. Je ne sais pas si la fatigue est une maladie contagieuse, mais à chaque fois que je viens chez toi, je dors comme une souche !

Elle installa sur la table un paquet entamé de Princes, avant d’inspecter son frigo. Elle n’avait plus d’œufs, et le referma bredouille :

– Je suis désolée, je n’ai pas grand-chose à te proposer. Un choco ? Il doit y avoir des traces d’œufs en poudre dedans.

Il grimaça, et la regarda s’installer à sa place. Elle s’interdit de penser à ce qu’il venait de dire. Il n’avait pas de raison de dormir mieux ici que chez lui. Si ?

Le contenu de la tasse de Sylvestre termina, pour les trois quarts, au fond de l’évier. Le peu avalé lui avait permis de retrouver du poil de la bête, et lorsqu’il relança du pouce son ordinateur afin de vérifier les éventuels mails de la nuit, son aura de commandant l’accompagnait de nouveau. Avant de partir, il récapitula mécaniquement :

– Je t’attends à 18 h ce soir, pour la reconnaissance du berserk. J’espère en avoir appris plus d’ici là, mais ce n’est pas gagné, il a mis les nerfs de l’équipe de nuit à rude épreuve en restant complètement muet. Ensuite, nous irons directement rencontrer le représentant de ce comité de chimères. Ensuite… avec un peu de chance, ce que nous aurons trouvé à nous mettre sous la dent suffira pour nous occuper.

Son ton avait baissé à ces derniers mots, et Mila ne put s’empêcher de feindre un optimisme qu’elle ne ressentait pas vraiment :

– Le berserk avait un peu l’air d’un bleu, je suis certaine que si tu le cuisines deux minutes, il te dira tout ! Et puis, ce Comité, là, s’ils ont accepté de te rencontrer, c’est peut-être qu’ils ont des infos à te donner ?

– Peut-être… Mais j’ai toujours l’impression de naviguer à vue dans cette affaire. Je n’aime pas trop l’idée de m’en remettre au hasard. Enfin… à tout à l’heure ?

– Bonne… bonne chance !

Elle avait failli dire « bonne journée ». Comme ça, d’un ton badin, comme si rien n’était plus normal qu’il passe la nuit chez elle après qu’elle ai manqué de se faire agresser, et alors que par sa faute, il n’avait plus que deux jours pour trouver un meurtrier dont il ne connaissait même pas le nom. « Bonne journée ». Comme… comme un vieux couple quoi. « Bonne journée ». Non mais vraiment ?

Elle passa les heures suivantes à son poste dans une bulle de coton, les oreilles bourdonnantes et les nerfs à vif. Elle s’attendait à tout instant à ce que Miss Acid réclame son dû, ou qu’une nouvelle bombe fasse trembler les hashtags, mais non. Une trêve impromptue lui laissa le temps de rattraper son retard sur des dossiers de fond, et elle précéda de peu le plus gros des troupes en s’échappant en anticipé pour le week-end.

Tic-tac. Plus que 24 h et des poussières. Ses pas martelant le trottoir rythmaient le décompte restant avant l’échéance. Elle accéléra encore le rythme. Elle espérait de tout cœur que Sylvestre avait pu progresser de son côté.

Un rapide topo la fit déchanter. Le berserk n’avait pas moufté, et répétait à l’envi qu’il ne parlerait qu’avec un avocat — commis d’office, il n’avait pas les moyens de s’en payer un. Sylvestre lui raconta cela d’un ton pressé, plus tendu qu’à son habitude. Mila comprit qu’ils y avaient passé la journée. Le berserk semblait compter sur des nerfs en acier plutôt qu’en fil à tricoter.

En quelques minutes, ils expédièrent la paperasse. Sylvestre lui relut ce qu’il avait déjà préparé pour sa déposition, et elle signa électroniquement avec la pulpe de son index.

– Et maintenant ?

– Maintenant, nous allons voir si ce Comité, malgré sa virulence apparente, veut bien se montrer coopératif.

Ils allaient sortir, lorsque le lieutenant Soufflet les alpagua depuis le bout du couloir :

– Commandant !

Elle les rejoint en quelques enjambées pressées, et après avoir adressé à Mila un rapide signe de tête — elle n’en attendait pas plus — elle demanda à Sylvestre :

– Avez-vous ouvert vos mails ?

Il ne répondit pas, mais sortit son téléphone. Le lieutenant l’interrompit :

– Si vous avez deux minutes, est-ce qu’on peut en discuter ? Je pense que cela va vous intéresser.

Sylvestre et Mila regardèrent leur écran de veille de concert. Elle se retint de répliquer qu’ils n’avaient pas le temps, mais elle venait juste de rentrer dans les bonnes grâces du commandant, ce n’était pas le moment de se faire remarquer. Un peu dépitée, non, si elle était honnête, franchement vexée, elle vit la porte du bureau de Sylvestre se refermer sur eux deux. Un instant, elle crut percevoir derrière les lunettes du lieutenant un regard d’excuse, mais bien vite elle se retrouva seule.

Aucune chaise pour s’asseoir dans ce couloir trop petit : elle manqua de se faire bousculer deux fois, et à chaque fois elle crut qu’on allait lui demander ce qu’elle faisait là. Prenant son mal en patience, elle s’adossa à une armoire métallique du siècle dernier, qui ne devait plus héberger que des nids de souris dans des dossiers papier archaïques, et attendit.

Sylvestre ressortit plus d’un quart d’heure plus tard, le regard pétillant et monté sur ressort. Le lieutenant Soufflet le précédait, et s’éclipsa d’un pas pressé. Le commandant pila net devant la mine noire de Mila :

– Ah, oui, le Comité. Et bien, allons-y ! ça tombe bien, nous allons avoir matière à discuter sur le trajet !

Dans le couloir, elle le harcela de question à voix basse, mais il ne répondit pas. Sur le parking, elle le harcela de question à voix haute, mais il ne répondit pas. Une fois dans la voiture, elle referma la portière, et ouvrit la bouche, quand Sylvestre l’interrompit d’un geste. Elle resta les lèvres entrouvertes lorsqu’il annonça :

– Ce n’est pas un djinn. C’est un huldre.

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Fannie
Posté le 08/10/2020
Peut-être que ça n’avance pas beaucoup, mais la révélation de la fin rend l’espoir aux protagonistes… ainsi qu'aux lecteurs. ;-)
Il y a de l’action dans ce chapitre, un certain dynamisme. Je dois dire que je l’ai préféré au chapitre précédent qui me semblait creux par moments. Si tu le trouves trop court, tu pourrais rendre le chapitre 17 plus concis et le fusionner avec celui-ci.
Coquilles et remarques :
— Mila se réveilla à potron-minet [dès potron-minet]
— Un bruit dans l’appartement la mis sur le qui-vive [la mit]
— Sans bouger sous ses draps elle parcourut dans sa tête [virgule après « draps »]
— Mais à part sa collection de chaussures à talons d’hiver [de chaussures d’hiver à talons]
— Il avait promis de rentrer plus tard, elle était allée se coucher, épuisée, ils avaient convenu [Point après « épuisée ».]
— Mais je ne vois rien d’indiqué là dessus ! [là-dessus]
— Elle commença par respirer un grand coup, avant de poursuivre plus posément [Je ne mettrais pas la virgule.]
— Mais tu as dormi où du coup ? [Virgule avant « du coup ».]
— Jusque là, tu dis ? [Jusque-là]
— Il appuya sur le bouton, et résignée, elle sortit deux mugs. [Il faut placer la virgule après « et ».]
— Elle installa sur la table un paquet entamé de Princes, avant d’inspecter son frigo. [de Prince / je ne mettrais pas la virgule.]
— Elle n’avait plus d’œufs, et le referma bredouille [Pas de virgule avant « et ». / Je propose : « Elle vit qu’elle n’avait plus d’œufs et le referma bredouille ».]
— Il grimaça, et la regarda s’installer à sa place. [Pas de virgule avant « et ».]
— afin de vérifier les éventuels mails de la nuit [les éventuels courriels]
— Je t’attends à 18 h ce soir, pour la reconnaissance du berserk [Je ne mettrais pas la virgule.]
— J’espère en avoir appris plus d’ici là, mais ce n’est pas gagné, il a mis les nerfs de l’équipe de nuit à rude épreuve [Point ou point-virgule après « pas gagné ».]
— Ensuite, nous irons directement rencontrer [Puis nous irons ; il y a « Ensuite » un peu plus bas.]
— Son ton avait baissé à ces derniers mots [sur ces derniers mots]
— Et puis, ce Comité, là, s’ils ont accepté de te rencontrer [Je ne mettrais pas la virgule après « Et puis ».]
— Enfin… à tout à l’heure ? [Pas de point d’interrogation]
— comme si rien n’était plus normal qu’il passe la nuit chez elle après qu’elle ai manqué de se faire agresser [après qu’elle avait manqué : « après que » commande l’indicatif ; au subjonctif, ce serait « ait manqué ».]
— en s’échappant en anticipé pour le week-end [en avance, pas en anticipé]
— Tic-tac. Plus que 24 h et des poussières [« heures » en toutes lettres parce que c’est une durée]
— Le berserk n’avait pas moufté, et répétait à l’envi [Pas de virgule avant « et ».]
— Ils allaient sortir, lorsque le lieutenant Soufflet les alpagua [Je ne mettrais pas la virgule.]
— Elle les rejoint en quelques enjambées pressées, et après avoir adressé à Mila un rapide signe de tête [Elle les rejoignit / Il faut placer la virgule après « et ».]
— Avez-vous ouvert vos mails ? [vos courriels]
— mais elle venait juste de rentrer dans les bonnes grâces du commandant, ce n’était pas le moment de se faire remarquer. [Point-virgule après « commandant ».]
— elle manqua de se faire bousculer deux fois, et à chaque fois elle crut [« à deux reprises » pour éviter la répétition de « fois » / il faudrait placer la virgule après « chaque fois »]
— Le lieutenant Soufflet le précédait, et s’éclipsa d’un pas pressé. [Pas de virgule avant « et ».]
— Le commandant pila net devant la mine noire de Mila [Le regard noir, mais la mine revêche, boudeuse, voire hargneuse.]
— Ah, oui, le Comité. Et bien, allons-y ! ça tombe bien [Eh bien / Ça]
— Dans le couloir, elle le harcela de question à voix basse / Sur le parking, elle le harcela de question à voix haute [de questions (les deux fois)]
— Une fois dans la voiture, elle referma la portière, et ouvrit la bouche [Pas de virgule avant « et ».]
— Ce n’est pas un djinn. C’est un huldre. [Ah, quand même ! Ça fait depuis le chapitre 7 que je le dis !  ;-)]
Et dire que tu as osé nous laisser en plan comme ça…
AudreyLys
Posté le 27/09/2019
Coucou ! J’ai lu les deux précédents chapitres et je viens te faire un petit retour.
J’aime beaucoup le chapitre 17, le trio Estérifia, Mila et Sylvestre qu’on suit pendant quelques paragraphes marche bien, en tout cas il est vachement drôle. Après j’ai tout autant aimé la réconciliation officielle de Mila et Sylvestre. Et surtout le fait qu’ils fassent alliance et qu’on sache maintenant où on va dans les prochains chap. J’aime bien avoir des jalons qui m’indique la trame globale de l’histoire, sans forcément gâcher le suspens.
Pour ce chapitre... bah oui il est court mais franchement je l’ai trouvé bien. Bon n’est sûr il s’y passe pas grand chose mais c’est plutôt plaisant. Après la révélation de la fin est un peu trop prévisible je trouve mais c’est juste mon avis.
Une question : est-ce que tu as fait un plan pour cette histoire ?
Bref, j’attends le prochain chapitre, bisouilles !
Aliceetlescrayons
Posté le 23/09/2019
Alors moi, je nuancerais un peu le propos de Tac (avec tout le respect qui lui est du ^^ ).
Oui, il n'y a pas énormément d'action dans ce chapitre mais il marque quand même la réconciliation entre Mila et Sylvestre et leur retour en tant qu'équipe. Après, l'intégralité du petit-déjeuner n'est peut-être pas essentiel, il y aurait un équilibre à trouver. Cependant, je ne peux pas dire que je me sois ennuyée.
Tac
Posté le 16/09/2019
Oh mais non, il m'en restait un ! youpi !
C'est pas juste d'être exclu de la discussion entre Soufflet et Sylvestre. Voilà, c'est à peu près tout ce que j'avais à dire. En effet, le chapitre est très court, heureusement vu le peu d'informations réellement pertinentes qu'il apporte. Je me demande s'il est bien pertinent de bien suivre au jour le jour ainsi Mila ? Ou alors, si tu veux prendre le parti de bien suivre les heures qui décomptent jusqu'au moment où l'épée de Damoclès s'abattra sur Mila et Sylvestre, il y a peut-être des choix que tu peux faire pour dynamiser ces journées ? Montrer à quel point ils sont désespérés et sont prêts à tout ? Mila pourrait retourner essayer trouver des trucs à la Villa, essayer d'arranger une rencontre avec un obscur personnage rencontré en ligne qui lui assure être de telle espèce qu'elle soupçonne être coupable (je t'aurais bien proposé un djinn mais comme cette théorie a été évacuée ça ne marche pas) etc. Enfin bref, ce ne sont que des idées, elle pourrait aussi aller chercher un scoop énorme dans un autre domaine que l'enquête pour essayer de sauver son poste autrement qu'en résolvant l'enquête (et se trouver dans une situation compliquée où, par association d'idées, elle comprend des trucs sur l'enquête, ou elle tombe sur des acolytes du berserk, bref, je pense que tu saisis l'idée).Enfin je n'en sais rien, je lance ça au hasard. Je regrette juste un peu le manque de dynamisme dont ton texte fait parfois preuve, selon moi (et uniquement moi).
Plein de bisous <3
Cerise
Posté le 18/09/2019
Merci pour tes remarques et suggestions qui tapent là où ça fait du bien (là ou ça fait mal...). Oui il est tout pourri ce chapitre, non il se passe pas grand chose. En fait, c'est là où je me dis qu'un plan ça aide. Parce que typiquement sur ce chapitre, je commence à écrire avec en tête à peu près où je veux aller, je dérive à un moment donné (là, typiquement le petit déjeuner), je m'amuse bien à imaginer la scène, et puis au final ça ne sert pas à grand chose, mais j'ai pas envie de couper. Le seul truc vraiment important dans ce chapitre, c'est quand on apprend que ce n'est pas un djinn, mais un huldre. Et c'est tout à la fin.
Bref, tu as raison, clairement ce chapitre est soit en trop, soit pas assez développé...
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