Pdv de Lyna
Reprendre le cours de ma vie, l'imaginer, le rêver aura été une douce et courte illusion. Penser que la vie est agréable et délicate n'est point la réalité. Pour 1984, je dois arrêter d'être trop fleur bleue et rêveuse. Non, en fait, je dois arrêter maintenant.
Le plus frappant dans tout ça c'est qu'à aucun moment je n'aurais cru que cela empirerait. J'ai bêtement pensé que Mark Taylor aurait agi avec bonne volonté pour cesser tous les problèmes que j'ai eu. Rien, absolument rien ne s'est déroulé comme ma mère l'aurait voulu. Le cœur bon, elle a pensé que tout se serait arrangé, que je reviendrais le lendemain comme si rien ne s'était passé, le problème culminant désamorcé, détruit pour de bon.
J'arrive à un point "ras-le-bol" de non retour. Les émotions fortes que je ressentais dépassaient la sagesse d'une Serdaigle, et c'est très mauvais pour moi, même si j'ai évolué depuis six ans. D'une certaine façon, je pouvais dire que j'avais du mal à contenir mon humeur. Je n'arrive pas à me l'expliquer mais une chose est sûre c'est qu'elle était réveillée depuis un moment, mais je l'avais caché en moi. Je ressemblais à une bombe à retardement dont le chrono était lancée. Si quelque chose de négatif pointait le bout de son nez, j'avais le choix entre me contenir ou exploser telle une bombe. La première solution annonçait la deuxième. Mais ai-je la possibilité entre ces deux solutions ? Je n'ai jamais été prête à cela.
Alors que j'étais dans la salle de duel, je me posais encore cette question. Qu'avais-je à offrir à la future moi, à mes amis, à mes futurs enfants ? Serais-je la bonne personne, cette personne qui a réussi à se défaire de son harcèlement ? Le mot le plus approprié serait « vainqueur » mais pour l'instant, je ne ressens que de la défaite, de la honte, et je veux que la roue tourne. Le karma doit enfin agir et je dois utiliser cette carte « joker » pour en sortir.
Face au diable de Poudlard, cet humain dont la seule occupation est de ressentir cette grandeur venimeuse, perçue à jour par à peu près tous les élèves, les professeurs, de même pour le chat de Rusard, se retrouvait seul parmi tous. Une poignée d'élèves vénéraient Julian comme un Dieu et d'autres en avaient peur. La plupart des élèves ne croyaient plus à son cinéma de "je suis le plus fort et Lyna n'est qu'une trainée". Beaucoup d'élèves sont venus me voir pour s'excuser de ne pas m'avoir cru plus tôt. Parmi eux, des élèves qui me détestaient sont venus me prendre dans leur bras. Pendant un court instant, je trouvais cette sensation désagréable mais douce. Incroyable de penser que la douceur était en partie présente dans la vie de ces camarades-là.
Un soir, au moment du couvre-feu, je rentrais dans la salle de Serdaigle, le moral affligé, la mine probablement abattue par certaines nouvelles peu encourageantes par la suite. Tous les Serdaigle étaient réunis dans le salon, des septièmes années comme des premières années. Je peux vous dire que cela faisait un sacré paquet de monde concentré dans une pièce un poil trop petite pour nous tous.
Notre préfet en chef, Mélanie, s'avança vers moi et m'entraînait alors au milieu du groupe. Je n'avais aucune idée de ce qu'il se passait. Les chuchotements s'affaissaient, tout le monde me regardait. J'en venais à me dire que tous ces regards étaient intimidants. Je questionnais la préfet mais il ne disait aucun mot durant de longues secondes. Toute cette mascarade me parut comme une éternité dans laquelle j'étais la moins à l'aise. Je ne vis pas Matthew, ni même Ashley. Où étaient-ils ?
- Il faut qu'on parle, Lyna, dit-elle calmement.
Mon dieu, mais qu'ai-je fait encore ?
Elle se tourna vers les autres.
- Nous avons tous été témoins de ce que Julian et ses sbires ont fait à Lyna. Mais pas que, plusieurs élèves ont notamment été victimes de ces agissements. Il est temps que ça s'arrête. Même si nous sommes des Serdaigle, cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas faire preuve de courage pour nous battre. Il est temps de faire régner l'ordre !
- Ouais ! crièrent certains élèves.
Soudain, toutes les voix se tuent dans la salle. Quelques élèves se poussèrent pour laisser passer Matthew, dévisagés par ces derniers. Certains le regardaient de haut en bas avec un regard de dégoût. Pleins de chuchotements se déployaient dans la salle commune.
- Que veux-tu Matthew ? demanda notre préfet.
- Je fais partie de cette maison autant que vous... Je peux vous aider.
- On n'a pas besoin de ton aide ! cria un élève.
- Va-t'en ! s'énerva une autre élève. On ne veut pas d'hypocrite et de lâche avec nous !
Mélanie intervint.
- On se calme ! (elle se tourna vers Matthew) Si tu es des nôtres, tu es le bienvenu. Sinon, je te demanderais de partir.
- Je suis là pour vous aider, affirma Matthew.
Je le regardais attentivement. Il était sérieux, je le savais au fond de moi. Il n'a pas manqué à sa parole depuis le début de cette année. Je serais assez étonnée qu'il change soudainement d'avis après m'avoir juré qu'il m'aiderait. Il finit par me regarder et nous étions pris chacun dans le regard de l'autre. Je compris à cet instant que ses intentions n'avaient pas changé et que sa confiance en lui pour m'aider était la même. J'eus eut étrangement envie de le prendre dans mes bras, mais comment réagiraient les autres si j'agissais ainsi ?
- Je lui fais totalement confiance, affirmai-je avant de le regarder à nouveau. J'espère juste que je ne le regretterais pas.
- Tu ne le regretteras pas, je te le promets.
- Bien, répondit Mélanie. Si tout le monde est d'accord, nous allons créer un plan. Pour cela, nous aurons besoin des autres Maisons pour nous aider. J'ai réussi à parler aux préfets de Gryffondor et de Poufsouffle, nous aurons une réponse définitive d'ici demain. De nombreux Gryffondor semblent être d'accord pour nous aider mais les Poufsouffle sont encore retissant et ne voudront peut-être pas se mêler. Mais il n'est pas encore trop tard pour changer d'avis. Je compte sur vous pour les mettre de notre côté.
Elle ajouta :
- Ah oui, bien évidemment le préfet de Serpentard semble être du côté de Julian, alors ne vous attendez pas à une quelconque aide de sa part.
- Bouh ! fit un élève, suivi des autres Serdaigle.
- Nous devrons aussi mettre les professeurs de notre côté. Si ce n'est pas le cas, nous aurions de gros ennuis.
- Ils ne vont quand même pas nous virer ? demanda Matthew. On est au moins soixante-dix Serdaigle.
- Je... ne parle pas forcément de virer mais plutôt de retirer d'abord des points maisons, ce qui nous placerait en quatrième position automatiquement. Comme nous sommes premiers depuis trois ans, ma fierté en prendrait un coup. Ils vont uniquement virer les leaders du mouvement, c'est-à-dire moi, Lyna et... toi.
Nous échangeons un regard incertain. Elle avait raison. Je risque de ne pas finir ma scolarité à Poudlard, mais je préférerais partir avec dignité plutôt que de finir ma scolarité dans la misère, la crainte et la peur qu'un jour, je me fasse tuer sous les yeux de mes camarades.
- Que faisons-nous alors ? demandai-je.
- Comme je l'ai dit, on doit attendre la confirmation des autres pour agir.
- Oui, mais en attendant ? insistai-je.
Elle réfléchit un instant.
- En attendant... tu vas devoir combattre Julian en duel.
De nombreux chuchotements apparaissaient dans la salle. Chacun était étonné des paroles de Mélanie. Semblerait-il qu'elles aient eu un énorme impact sur chaque Serdaigle présent.
- ... avant la fin de la semaine.
Mon cœur loupa un battement.
- Quoi ? répondis-je doucement.
- Tu plaisantes, j'espère ? retorqua Matthew.
Elle nous prit à part un instant pendant que les autres parlent et nous chuchota, discrètement.
- Pas du tout, affirma Mélanie. De plus, il faudra que tu t'entraînes en dehors des cours. On va te trouver une salle pour ne pas que tu sois dérangée. Il faut absolument être discret jusqu'au jour J. Personne ne doit être au courant à part nous trois ni Ashley, c'est une question de vie ou de mort. Tant qu'on ne sait pas si on peut faire confiance à tout le monde, tout ça doit rester entre nous.
Une fois l'heure du coucher, il ne restait que quelques élèves dans la salle, Matthew et moi. Alors que je préférais être seule, il restait avec moi pour me tenir compagnie. L'idée de combattre Julian, devant sûrement tous les élèves de Poudlard voire les professeurs qui ne laisseront rien faire, me paralysait. Ma vie entière dépend ce combat, mais aussi la tranquillité des autres, or la colère des adultes et de mes amis n'en sera que plus grande.
- Tu vas bien ?
- Je crois... En réalité, j'espère juste me réveiller d'un sombre cauchemar dans lequel tout cette mascarade sera partie.
- Je te comprends, ça ne doit pas être évident.
Il s'interrompit un court instant alors que je replongeais dans mes pensées. Etrangement, je n'avais pas goût à réitérer ce que Mélanie m'a dit plus tôt ce soir. J'espérais secrètement m'endormir sans m'en rendre compte. Une bonne nuit n'a jamais été autant la bienvenue que depuis ce soir.
Je me dépêche d'écrire la suite :D