« Tu nous rejoins Hector ? » s’enquerra Magalie, sa collègue qui travaillait au bureau en diagonale du sien.
Magalie est menue et le dépasse de quelques centimètres à peine. Elle remonte ses lunettes rouges avec son index, tic qui lui revient de temps à autre. Hector la trouve plutôt gentille et il aime les moments où ils prennent le café à la machine, car au contraire des autres employés, elle s’accommode bien du silence gêné du presque trentenaire. Elle ne semble pas percevoir la transpiration nerveuse de son interlocuteur qui ne lui coupe jamais la parole.
« J’ai encore quelques documents à compléter, décline Hector.
- Mais la dernière fois tu m’as dit que t’allais venir et en plus tu as participé à la cagnotte, elle lui sourit pour l’encourager, tu n’as pas envie de voir le moment où on lui offrira le cadeau ?
- C’est gentil, merci, peut-être que je vous retrouverais plus tard » répond-il, bien qu’il ne veuille pas aller rejoindre ses collègues qu’il voit déjà tous les jours dans un bar où les bières sont beaucoup trop chères. Il sait déjà qu’il vont désespérément tenter de parler d’autre chose que du travail comme si leurs liens avait une fondation plus stable que la simple politesse professionnelle.
Alors non, il préfère ne pas aller les rejoindre ce vendredi soir-là.
-« D’accord, bon courage alors, à lundi » dis Magalie en fermant la porte, une petite moue sur les lèvres qu’Hector n’as pas le temps d’apercevoir.
Il se retrouve alors tout seul dans le bureau dépeuplé, avec pour seule compagnie le silence ronronnant des radiateurs et le cliquetis irritant de l’alarme incendie dont les piles doivent être changées. Il termine son dossier, qu’il doit rendre avant la fin du mois et l’imprime pour pouvoir le plastifier et le remettre sur le bureau de Charles, son supérieur hiérarchique, lundi.
Hector se lève et marche vers la chambre où se trouvent les trois imprimantes HP 750x. Il n’y a plus que le bruit de ses pas feutrés sur la moquette grise et le bruit au loin de la machine qui crache son document feuille à feuille. Il ouvre la porte qui grince légèrement et attrape la première page, encore chaude d’être passée sous la machine.
Il reste encore 3 minutes avant la fin de l’impression.
C’est alors qu’il sent un souffle froid dans son dos. Plus froid que l’air du dehors, alors que c’est déjà le début de l’automne. Non, un bout d’air venu comme d’ailleurs.
Hector a soudain peur. Il ramasse toutes les feuilles déjà imprimée, s’imprègne de leur médiocre chaleur et les froisse dans ses mains en se retournant lentement. C’est alors qu’il la voit. La faille. Le trou.
Dans le mur de la salle d’imprimante, au deuxième étage de son bureau de vente d’acrylique professionnelle pour murs et toutes surfaces larges, un léger déchirement qui mène nulle part.