Il fallut attendre trois semaines avant qu'on revit Portail ; Balthazar comptait les jours comme on égraine un chapelet.
Il avait finit par s'habituer au lit de plume, plus moelleux que la natte qu'il usitait dans la tente avec son frère. Ses journées commençaient avec le soleil. Il partageait le petit déjeuner des habitants du temple : café chaud, galette de millet aux dattes et au miel trempé dans du lait de chèvre. Puis il peignait et écrivait sans relâche, seul dans le patio contigu à sa chambre. Celle qui l'avait précédé à ce travail avait laissé des esquisses de ce que seraient les prochaines pages du livre.
Les premiers essais de Balthazar s'étaient révélés maladroits et il avait dû recommencer. Au bout de plusieurs semaines, il commença à obtenir un résultat qu'il jugeait acceptable. C'était un travail long et fastidieux, mais l’adolescent se disait que chaque jour qu'il passait ici à s'améliorer le rapprochait de Portail et de son assentiment.
Pour le moment, seul son élan de passion juvénile l'occupait et il évitait de trop songer au marché qu'il avait conclu avec son père. Il verrait en temps et en heures.
Une fois le soleil couché, il ne pouvait plus peindre ; Balthazar avait donc le loisir de ses soirées. Il en profitait pour déambuler dans la ville et gouter tous les plats qui lui faisaient envie, en payant à l'aide des piécettes que Andiberry lui dispensait à raison de trois par jour. Puis il montait sur les remparts et scrutait l'horizon pendant des heures, ayant acquis rapidement l'affection des gardes et des archères qui faisaient le guet.
Il lui arrivait parfois de croiser Dédale dans le temple, mais elle n'avait jamais un mot ni un regard pour lui. Au début, l'adolescent pensait qu'elle ne l'aimait pas, mais il remarqua bientôt qu'elle traitait Andr de même, sauf quand elle n'avait pas le choix. Ce n'était pas à sa personne que Dédale adressait sa répugnance, mais à l'ensemble de son sexe. Il se promit de ne pas trop trainer entre ses pattes.
Lorsque Portail revint, midi allait sonner et Balthazar venait de poser sa plume pour aller déjeuner. Il se dirigeait vers le réfectoire, quand il entendit une clameur venir de la place principale. Il courût plus qu'il ne marcha jusqu'au parvis et assista au retour d'une large patrouille menée par une jeune fille montée sur un chameau blanc.
Cependant, bien que Portail fut à la tête de ses troupes, celles-ci restaient à distance respectueuse et la population ne s'approchait pas. Cette attitude contrastait étrangement avec celle que les gens avaient eu avec la prêtresse lors de la fête où Balthazar l'avait rencontrée.
— Pousse-toi, tu bloques le passage.
L'adolescent sursauta et découvrit Andr qui se tenait derrière lui. L'homme se gratta le barbiche d'un air ennuyé :
— Bon, autant te rendre utile... aide-moi donc à ouvrir les portes.
Balthazar obéit et entreprit de pousser les lourds battants qui s'ouvraient sur la nef du temple d'Iilaaha. Sans hésitation, le chameau blanc et sa cavalière se dirigèrent vers l'ouverture béante. Une fois parvenue sur le parvis, Portail se laissa mollement choir de sa monture et de raccrocha in extremis à la longe pour ne pas s’écrouler par terre. L'adolescent voulut se précipiter, mais la poigne de fer de Andr se referma sur son épaule comme un serre.
— Non. Tu ne ferais que gêner.
La prêtresse de la naissance rassembla ses forces et esquissa quelques pas à l'intérieur en tirant l'animal derrière elle. En passant devant Andr et Balthazar, elle ne leur jeta pas un regard. Son visage était cave, ses lèvres boursoufflées et ses pupilles dilatées. Il ne restait rien de la lumière et de la beauté qu'elle diffusait le jour de la fête. Les deux hommes restèrent à distance, sans mot dire, la laissant s'éloigner dans la nef, puis disparaître en direction des patios, non sans que son animal blanc ait lâché quelques crottes sur les dalles bien astiquées.
— C'est la lèpre, murmura Balthazar et Andr acquiesça d'un long mouvement de tête avant de soupirer.
— Oui. Tu ne dois pas la déranger le temps que durera sa convalescence.
— On ne guérit pas de la lèpre.
— Une femme normale peut-être, mais 'Iilaaha a encore besoin de sa prêtresse et accomplira ce miracle. Tu dois garder confiance.
*
Portail resta enfermée trois semaines supplémentaires dans ses appartements avant que Balthazar ne la revit.
L’adolescent était dans la salle où séchaient les pages enluminées. Il était debout sur un tabouret, en train d'accrocher sa dernière page et faillit tomber quand elle se montra dans l'encadrement de la porte, toute entourée du halo du soleil couchant. Les stigmates de la maladie avaient disparues de ses traits ; elle était belle et dorée comme au premier jour.
— Da... Dame Portail ! Vous êtes guérie !
— Il semblerait. Je me sens tout à fait bien.
Sans rien ajouter de plus, la jeune fille se dirigea vers les pages neuves qu'elle contempla longuement et pensivement. Ebahit, le jeune enlumineur ne pouvait que la fixer. Andr avait raison ! 'Iilaaha avait sauvé sa prêtresse et c'était un miracle !
— Dame Portail, je...
Il se tût en voyant que la prêtresse avait recommencé à bouger. D'un geste assuré, elle avait arrachée une page dessinée par ses soins à sa pince et la déchira en deux. Balthazar en resta profondément choqué. Muet d'horreur, il la regarda faire de même avec une douzaine de feuillets sur lequel il avait travaillé de longues heures. Il en aurait pleuré s'il n'avait pas été si stupéfait. Portail se tourna vers lui.
— Ceux-là n'étaient pas aussi bien que les autres. Recommence.
Alors elle s'approcha de lui et quand elle posa sa main sur sa joue, il se suspendit à l’instant. Il était accroché tout entier aux prunelles de métal gris, à l'odeur entêtante d'herbe tendre et de soleil, à la douceur du tissus blanc qui l'effleurait en tombant des bras dorés, à la lumière des vitraux qui tâchait de couleurs le voile immaculé, au sourire qui se dessina sur ce visage d'une indicible bonté.
— Ne perd pas courage, tu es infiniment plus doué que tout ce dont j'aurai pu rêver. C'est 'Iilaaha qui t'a mis sur ma route, Balthazar.
Elle savait son nom !
Les doigts qui coulèrent sur sa peau furent comme une extase et une torture. En tout cas, c’est ainsi que son coeur d’adolescent se le rappela. Un instant plus tard, elle était partie.
*
On devrait partir. On devrait planter tout ce qui se passe ici et se barrer.
C'est ce que pensait Andiberry en traversant le patio qui menait à la salle du conseil. Malheureusement, il n'avait pas voix en ce qui concernait les ambitions de Lù. Celle-ci était debout devant la carte de la côte, déplaçant machinalement les pièce de l'un ou de l'autre camp.
En entrant, il croisa Dédale qui sortait, visiblement furieuse, et comme à son habitude, elle ne lui jeta pas un regard. Il n'avait pas besoin de savoir ce qui l'avait contrariée ; les discussions stratégiques entre Lù et la commandante des armées ne se passaient jamais bien. La jeune fille tourna la tête en l'entendant arriver :
— Ah, c'est toi. Parfait. J'avais justement besoin de tes lumières.
Il haussa les sourcils, se doutant de ce qui allait lui être demandé.
— Alors ? Tu as fini le livre que je t'avais recommandé ?
C'était bien ce qu'il craignait.
— Pas vraiment. Tu vois, pendant que tu te délitais en viande haché, j'ai dû prendre pas mal de décisions à ta place, ce qui ne laisse pas tant de temps pour pour bouquiner.
Lù hocha la tête lentement, sans le regarder ; son regard était revenu sur les pièces qui occupaient la carte géante.
— Ce n'est pas grave. J'ai pu réfléchir pendant ma convalescence et j'ai quelques idées d'avances pour nos prochaines batailles.
Quelques idées d'avance... Mais les idées de qui ?
Andiberry savait que c'était nécessaire, mais il en avait plus que marre de se plonger dans d'épais traités de guerre relatant les hauts faits des meilleurs stratèges des mondes qu'ils avaient traversé. Mais c'était en volant les idées des autres que Lù avait réussi à rassembler autour d'elle une puissance militaire qui en valait la peine.
Avant son arrivée, les brunes étaient dispersées en de nombreuses tribus qui préféraient se taper dessus que de s'unir contre la menace sombre qui se profilaient à l'horizon. Mais en s'alliant à Dédale, la cheffe de la plus grosse tribu de la région, le jeune Pilier avait réussi des miracle. Andiberry aurait dû être satisfait de ce qu'ils étaient parvenus à accomplir, cependant...
— Lù... Est ce que tout ça en vaut la peine ?
Elle leva vers lui des yeux surpris et soupira :
— Les sombres vont attaquer d'ici quelques mois, nous n'avons vraiment pas le temps pour ça, Berry.
— Ce n'est pas notre monde. Qui sommes-nous pour bouleverser le cours des choses ?
— Parce qu'il faut un laisser-passer pour ça ? Nous existons, c'est tout. C'est ce qui nous donne le droit de participer à ce que nous voulons. Nous qui ne sommes plus de nulle part, nous ne devrions plus nous impliquer nulle part ?
— Ça n'a rien à voir. Tu joues à Dieu.
— Oui. Et alors ? Je donne une chance à un peuple qui se serait fait éliminer purement et simplement si je n'étais pas intervenue.
Andiberry n'avait pas envie de s'engager sur cette pente là. Lù pouvait être aussi buttée qu'un chameau et il n'était même pas sûr d'avoir raison. De plus, malgré les nombreux griefs qu'il avait à son égard, elle lui avait manqué. Il s'approcha d'elle et épousa son dos de son torse ; son nez se glissa dans ses cheveux et ses mains glissèrent sous ses bras pour la caresser. La prêtresse émit un claquement de langue désapprobateur, mais un ronronnement grave le remplaça rapidement quand il la pinça doucement à travers le tissus. Il sourit au milieu des mèches auburns. Tout un chacun avait ses faiblesses.
Ils ondulèrent l’un contre l’autre. Lù finit par se dégager.
— On pourrait nous voir...
Il l'embrassa derrière l'oreille.
— Sans doute. Mais ces sociétés primitives sont infiniment moins pudibondes que d'autres par bien des aspects.
Au moment où il dit cela, il eut l'impression de voir une ombre dans sa vision périphérique, mais personne ne se montra. Il attendit quelques secondes, méfiant, avant de retenter son approche. Il la souleva pour l’asseoir sur la table où était tendue la carte. Les pions des différentes factions s’éparpillèrent. Lù lui lança un regard désapprobateur, mais se laissa faire avec bonne grâce.
— Il y a Balthazar. Ce n'est encore qu'un enfant.
— Tu te moques de moi ? Dans ce monde, il est considéré comme un adulte... et tu crois que je ne vois pas de quelle façon tu t'amuses avec lui ? Tes jeux de lumières ne sont jamais laissé au hasard, tu le frôles pour un oui ou pour un non, mais le reste du temps, tu l'ignores. C'est le genre de choses qui peuvent retourner un adolescent. Tu joues les madones bienveillantes, mais tu te fiches de le faire souffrir.
Elle voulut répondre mais sa phrase se mua en gémissement quand il recommença à caresser ses seins. Elle haleta :
— Ce... Ce n'est pas toujours facile de lutter contre tous ses travers en même temps. Et puis...
Au milieu du plaisir, son regard se fit plus dur :
— Les adolescent sont stupides. C'est trop facile. Ils confondent la beauté, la bonté et la pureté en un même désir qui n'est pas vraiment de l'amour. Mais les femmes ne sont pas de gentilles petites saintes-nitouches crées pour qu'ils les baisent. Bien fait pour eux s'ils tombent dans des pièges aussi grossiers.
— Les femmes aussi tombent dans ce genre de pièges.
— C’est vrai. J’étais aussi idiote quand je t’ai rencontré.
— Oui. Moi aussi, quand je courrai après ta sœur. Pourtant, je n'étais plus un adolescent.
*
Il n'avait pas été surpris. Il n'avait même pas été jaloux.
Depuis le départ, il y avait quelque chose d'évident entre eux et dans le monde tel que le concevait Balthazar, il ne pouvait y avoir de tel lien d'intimité et de confiance entre un homme et une femme qui ne soit soudé par des faveurs sexuels. Mais ce n'était pas le sexe animal qu'il connaissait.
La première fois, il les avait juste surpris dans la salle du conseil, puis il avait pris l'habitude de se glisser hors de sa chambre à la tombée de la nuit pour les épier par le trou de la serrure. La façon dont Portail et Andr s’étreignaient n'était pas dénuée de violence, mais elle n'avait rien à voir avec l'acte répétitif et triste auquel Balthazar avait si souvent assisté dans la tente du campement Euphrate.
L'homme et la jeune femme ne s'unissaient jamais de la même façon, victimes consentantes des lubies plus ou moins perverses de l'un ou de l'autre et nuit après nuit, Balthazar les observait danser, s'attacher, se mordre et jouir. Fasciné et terrifié à l'idée d'être découvert, il se masturbait derrière le battant, en se mordant les joues pour ne pas gémir.
Le lendemain, levé avec la lumière, il reprenait patiemment ses enluminures, enchainant les détails et repoussant le plus possible le moment où Portail n'aurait plus besoin de lui. Celle-ci venait voir son travail au moins une fois par jour et il attendait servilement ses apparitions, espérant pouvoir recueillir un sourire, un parfum, le contact d'un bras lorsqu'elle se penchait derrière lui, plus exceptionnellement l’effleurement d'un sein contre son épaule...
Il adorait sa poitrine. Il l’aimait d'autant plus qu'il savait qu'elle était capable d’avoir des orgasmes à leur seul contact. Savoir qu'elle s’abandonnait avec un autre n'avait en rien diminué son désir, et ses songes s'inspirait de ce qu'il voyait. En rêve, il lui caressait la poitrine et il jouissait en même temps qu’elle, d'un jet lent, puissant et infini comme une rivière. Il se réveillait malheureux et tout recommençait.
Une fois toutes les deux semaines, il retournait à son campement, au prétexte d’aller aider les gens de son village. Alors il dispensait les informations qu'il avait apprises en laissant trainer ses oreilles, tout en faisant attention de ne pas trop en dire.
Ainsi les Euphrates continuaient leur rapts et attaquaient toujours les villages des brunes les plus vulnérables, ce qui rendait Dédale et son armée complètement folles. Une petite voix insidieuse murmurait parfois à Balthazar qu'il ne pouvait pas continuer comme ça. Qu'il ne pouvait pas continuer à jouer sur les deux tableaux sans en subir les conséquences, mais l'adolescent ignorait cette petite voix du mieux qu'il pouvait.
Bien qu'il ressente un attachement fort secondaire à son peuple, il ne pouvait pas abandonner son petit frère, qu'il trouvait à chaque fois plus maigre et émacié ; son absence ne lui réussissait pas.
D’un côté, il attendait, d'une façon ou d'une autre, un signe d'assentiment de la part de son paternel, un signe qu'il avait fait ce qu’il fallait.
De l'autre, il était dépendant de sa passion sexuelle, comme un ivrogne, et la vie chez les brunes était plus douce que chez les euphrate.
Déchiré, il trahissait, culpabilisait et se caressait, sans jamais parvenir à trouver de fuite satisfaisante.
Jusqu’au jour où…
*
— C'est une bonne surprise au moins ?
Lù leva un regard circonspect sur ses poignets liés au dessus de sa tête. Andiberry étouffa un rire :
— Qu'est ce que tu racontes ? Bien sûr que c'est une bonne surprise.
— Je me dis qu'on va peut-être un peu trop loin. On est plus dans notre chambre.
— C'est la nuit, tout le monde dort.
Elle voulut protester quand il lui noua un foulard immaculé sur les yeux, avant de soupirer. Il l'embrassa :
— Je te laisse seule une minute, ça va aller ?
— J'ai le choix ?
Il pouffa doucement dans sa barbe avant de s'éloigner à pas de loups. Lù s'agita. En tordant les poignets, elle vérifia que l'attache n'était pas si solide que ça. Elle l’était. Elle marmonna faiblement :
— Berry… Andr, ce n’est plus drôle…
De son côté, le principal concerné retourna en direction des chambres en longeant les murs. Il ne mit pas longtemps à trouver ce qu'il cherchait : le jeune enlumineur venait de sortir de sa chambre pour les espionner. Andyberry se glissa derrière lui et lui posa une main sur l'épaule. Balthazar sursauta violemment avant de se retourner. L’homme haussa les sourcils :
— Tu cherches quelque chose ?
— Heu, je... je voulais...
— Epargne-moi un ou deux mensonge. Tu voulais nous épier comme tu le fais depuis des semaines, mais aujourd'hui, nous n'étions pas au bon endroit.
L'adolescent devint rouge brique et alors que la panique se mettait à l'envahir, Andiberry lui enserra plus fermement le bras :
— Calme-toi, petit imbécile. Crois-moi, si j'étais réellement fâché, ce serait la garde qui serait venue personnellement te mettre dehors à grand renfort de coup de pieds au derrière. Non, tu entends bien, je ne suis pas en colère, mais j'aimerai que tu fasses quelque chose pour moi. J'ai besoin qu'on me divertisse un peu.
Le visage de Balthazar, qui d'abord semblait soulagé, se durcit à nouveau. A quel point était-il tombé dans un piège ? Celui qui se faisait appeler Andr gloussa :
— Détends-toi. Tu ne vas rien faire de désagréable. Je pense même que ce sera le plus beau jour de ta vie. Et tu auras toujours le droit de refuser, si tu es trop lâche pour savoir t’amuser.
L'adolescent dégagea son bras :
— Qu'attendez-vous de moi ?
Andiberry contempla mélancoliquement le visage lisse et les boucles noires qui voilaient les yeux sombres.
— Suis-moi.
Ils se dirigèrent vers la salle où Balthazar avait l'habitude de travailler. A cette heure, le jardin était uniquement éclairé par la lumière de la lune et le seul bruit était celui de la fontaine qui déversait ses jets dans son bassin.
L'adolescent écarquilla les yeux.
*
Portail était debout dans la fontaine, dans l’eau jusqu’au cuisses, les yeux bandés et les poignets retenus au dessus de sa tête, accrochés sur l'anse d'un bras de marbre.
— Qu'est-ce que...
Le général le tira en arrière dans la pièce la plus proche et posa son doigt sur sa bouche :
— Tais-toi. Elle ne doit pas t'entendre, c'est tout l'intérêt.
— Vous voulez que je...
— Si tu le désires, je te laisse ma place.
Balthazar laissa l'idée couler en lui et secoua la tête :
— Impossible. Elle n'est pas consentante.
Andr eut un sourire malin.
— Ah bon ? Pourtant quand elle a accepté de se laisser lier à cette statue, elle acceptait de se plier à ma volonté pour ce moment précis. Et quand je lui ai dit que je revenais vite, elle a tacitement accepté que je lui préparait une surprise et a accepté de me faire confiance. Crois-moi, je la connais bien.
— Peut-être que je ne lui plait pas ?
— Oh, tu lui plait, il suffit de voir comme elle te laisse tourner autour d'elle. Elle te trouve juste un peu jeune pour t'entrainer sur la mauvaise pente. Mais si tu décides d'y aller, on ne peut pas vraiment dire que tu n'es pas consentant, n'est ce pas ?
Balthazar se sentit un peu humilié :
— Comment ça, trop jeune ? On a le même âge !
Une expression étrange passa sur le visage d'Andr et il lui sourit à nouveau :
— Moui, mais c'est une femme et une prêtresse. Elle est plus mûre, forcément.
— Est-ce qu'elle sait que je vous ai regardé ?
— Je ne lui ai pas dit. Ceci dit, elle s'en doute peut-être. Autre chose : bien sûr, il est interdit de la violenter de quelque façon que ce soit. Je fais ça pour son plaisir, pas pour le tiens, alors si tu trouves le courage d'y aller, met à profit ce que tu as observé. Elle aime beaucoup...
— Je sais très bien ce qu'elle aime, répliqua Balthazar sèchement.
L'homme eut un reniflement amusé :
— C'est vrai. Je te laisse prendre ta décision tout seul. Je ne voudrais pas que tu penses que je t'ai forcé la main.
Quand il s'éloigna, Balthazar paniqua :
— Où allez-vous ?
Andr lui fit une demi-révérence.
— Me chercher un thé. Mais ne t'inquiète pas, je reviendrai plus vite que tu ne l’espères.
En une poignée de secondes, l'adolescent se retrouva seul, ou presque. Le cœur battant la chamade, il retourna à l'entrée de la pièce. Bien sûr, Portail était toujours là, appuyée contre la statue. Elle appela à mi-voix :
— Andr ?
Balthazar s'approcha et la détailla : elle portait une de ses habituelles robes blanches couverte de piécettes, le bruit des grelots à ses chevilles étaient étouffés par l'eau du bassin. La lumière de la lune auréolait son visage et le haut de sa gorge.
Il enleva ses sandales, retroussa son sarouel de lin et rentra dans la fontaine. Portail tourna la tête vers lui brutalement, quand elle entendit les éclaboussures de l'eau.
— Andr ? murmura-t-elle encore, mais comme on le lui avait demandé, il ne répondit pas.
*
Quand on toqua à sa porte, Lù crut d'abord qu'elle avait rêvé ; elle grogna et renfonça son visage dans son oreiller, mais le bruit se répéta et elle finit par ouvrir les yeux et se redresser. Il y avait bien quelqu'un à la porte. Elle se leva, enfila un sarouel de lin blanc pour ne pas être complètement nue et alla ouvrir la porte. La soldate qui se tenait derrière le battant avait le souffle court et les joues rouges ; elle lui tendit un parchemin roulé et scellé à la cire.
— Amy kabira Portail, ce message est arrivée en urgence pour vous.
Lù attrapa le parchemin, brisa le sceau après avoir reconnu l'emprunte des clans du nord et parcourut rapidement le message des yeux. Ses sourcils se froncèrent imperceptiblement et elle referma le rouleau.
— Réveillez, Sir Andr, dites-lui de se tenir prêt pour voyager léger et faites préparer nos montures. Des chevaux, cette fois. En voyageant de nuit, ils ne devraient pas souffrir de la chaleur.
— Bien amy kabira.
— Réveillez Dédale et donnez-lui ce message. Dites lui de commencer à gérer la situation immédiatement.
La porte se referma. Lù s'appuya contre le bois une poignée de secondes avant de se ressaisir. Elle enfila une broigne légère par dessus sa tunique de lin et enroula son visage dans un keffieh couleur ivoire. Puis, elle accrocha un long poignard à sa cuisse, hésita et finit par soulever son matelas. Un trou était pratiqué discrètement dans l'épaisse couche de plumes ; elle en sortit un petit appareil noir et brillant qu'elle rangea dans une escarcelle où elle rangea également une carte du désert.
Une paire de bottes aux pieds, elle sortit d'un bon pas. Berry l'attendait dans la cour, habillé de pieds en cap, mais mal rasé et présentant la marque de l'oreiller sur la joue. Il bailla à s'en décrocher la mâchoire.
— Qu'est ce qui se passe ?
Elle le foudroya du regard.
— Suis-moi et ferme-là.
Il haussa les sourcils et obéit. Lù serra la mâchoire ; ses poignets portaient encore la marque des liens et ses épaules la faisaient souffrir. Ses trois heures de sommeil écourtées n'arrangeait rien.
— Tu es fâchée ?
Elle ne répondit pas et il la suivit jusqu'aux écuries où deux de leurs coursiers les plus rapide étaient déjà scellés, portant avec eux une besace remplie de nourriture. Ils sortirent en ville avant de monter en scelle pour chevaucher vers le nord.
Voici mes corrections pour ce chapitre :
Il avait finit par s'habituer → fini
Portail se laissa mollement choir de sa monture et de raccrocha in extremis à la longe pour ne pas s’écrouler par terre → et se raccrocha
comme un serre → une
Ebahit, le jeune enlumineur → Ébahi
elle avait arrachée une page dessinée → arraché
à la douceur du tissus blanc → tissu
tout ce dont j'aurai pu rêver → j’aurais
les pièce de l'un → pièces
tant de temps pour pour bouquiner → un « pour » de trop
des mondes qu'ils avaient traversé. → traversés
la menace sombre qui se profilaient à l'horizon → profilait
le jeune Pilier avait réussi des miracle → miracles
des faveurs sexuels → sexuelles
ses songes s'inspirait de ce qu'il voyait → s’inspiraient
chez les Euphrate → chez les Euphrates
un ou deux mensonge → un ou deux mensonges
j'aimerai que tu fasses → j'aimerais
A quel point → À quel
A cette heure → À cette
dans l’eau jusqu’au cuisses → jusqu’aux
je lui préparait une surprise → préparais
je ne lui plait pas → plais
tu lui plait → plais
je vous ai regardé → regardés
ce message est arrivée → arrivé
les plus rapide → rapides
monter en scelle pour chevaucher → selle
(je vais taper ce com à une main, parce que le chat dort sur l'autre "xD)
Je trouve très très cool ces FB sur Balthazar pour expliquer sa naissance en tant que Pilier (j'imagine). De manière générale je kiffe tes FB qui sont de vrais apports à l'histoire et jamais un truc accessoire mais plaisant qu'on pourrait juste enlever et résumer en un paragraphe. Ils ont toujours leur saveur bien à eux.
J'étais très surprise et heureuse de retrouver Berry. C'était logique, et j'ai toujours su que tes histoires sont liées, mais je me suis laissée surprendre et suis contente d'avoir son point de vue à nouveau. Cher Berry (coeur)
Bon on retrouve ses petites lubies, disons "xD Mais c'est léger. La scène passe nickel, à mon sens.
J'enchaîne donc !
Bisous !