Chapitre 26

J'avais terriblement l'impression d'être un cliché sur pattes pour le coup.

Je pensais que tout dire à Rey ne me bouleverserait pas à ce point, mais en réalité, totalement. Dès qu'on était retourné dans le salon, je m'étais senti terriblement plus léger et plus ouvert aux autres. Certes, j'avais toujours mes problèmes pour échanger spontanément avec les autres, mais ça me paraissait beaucoup plus acceptable désormais.

— C'est l'heure du bière-pong ! annonça Poe en entrant dans le salon.

— Voilà pourquoi je n'ai pas commencé par de l'alcool directement, je m'y attendais à celle-là ! rétorqua Finn, amusé.

Poe avait presque un sourire machiavélique sur son visage et se lança dans la préparation de son jeu improvisé.

M'étant éloigné de Rey pendant un moment, je m'approchais d'elle pour la prendre dans mes bras.

— Tu essaies de te planquer pour éviter le jeu ? me demanda-t-elle en riant.

— Tu es au courant que tu n'as pas l'âge légal pour boire ? l'interrogeai-je, plus ou moins sérieusement.

— Bien évidemment que je sais... Mais qu'est-ce que tu comptes faire ?

— Tout dépend de ce que tu me laisseras faire...

Elle approcha ses lèvres de mon oreille et celles-ci frôlèrent sensuellement ma peau.

— Tu sais où sont mes menottes si jamais tu veux me punir, me murmura-t-elle d'une voix suave.

Elle s'éloigna pour me lancer ce regard que j'aimais tant, plein de malice et attendant le moment où je répondrais à sa provocation.

— Hé les tourtereaux ! s'écria Poe en se tournant vers nous. Vous vous bécotez encore longtemps ou vous venez jouer avec nous ?

Rey se colla contre mon torse et me serra fermement dans ses bras.

— Il faudrait m'arracher de lui alors, lança-t-elle tout aussi amusée.

— Et si j'ai envie d'y jouer ?

Elle leva son regard vers moi, un sourire en coin. Elle avait un peu envie de s'y opposer, juste pour que je reste à ses côtés un peu plus longtemps, mais elle finit par me relâcher en mordant sa lèvre inférieure.

— T'as intérêt à gagner alors, dit-elle dans ce qui pouvait presque sonner comme une menace.

— Ne t'en fais pas pour ça...

Elle me relâcha pour que je puisse rejoindre les équipes en train de se former. Même si Poe avait voulu rendre la partie un peu plus compliquée par rapport au nombre de verres, il fut rapidement arrêté, juste au cas où. Le nombre de verres pour chaque équipe fut réduit et si jamais un joueur ne voulait pas boire un verre, il pouvait le refiler à un autre membre de son équipe.

Une fois ces quelques règles de sécurité mises en place et les équipes faites, le jeu put enfin débuter.

Poe avait déjà pris suffisamment d'alcool pour foirer une grande partie de ses lancers, ce qui porte un bon gros préjudice à son équipe. Autrement dit la mienne. Heureusement, j'étais là pour rattraper le coup. Et je lui interdis un ou deux verres que je m'engageai à prendre à sa place, juste au cas où. 

Par miracle, notre équipe avait fini par gagner. Va savoir comment. En tout cas, Poe ne put s'empêcher de se vanter pour cette victoire, comme s'il avait tout fait. Au moins, ça avait le mérite de tous nous faire rire. Et je m'étonnais presque d'être aussi pris dans ce jeu. Dire que d'habitude, j'aurais soupiré et aurais commencé à réfléchir à un prétexte pour partir au plus vite de cette soirée...

Je revins auprès de Rey, installée sur un fauteuil où elle était extrêmement concentrée sur son téléphone. Quand elle me vit arriver, elle leva son regard et se leva d'un bond.

— J'ai vu que tu t'en étais plutôt bien tiré.

— On peut dire ça comme ça...

Elle me poussa à m'asseoir sur le fauteuil et s'installa sur mes genoux.

— Tu aurais pu me demander, même si tu sais très bien que j'aurais accepté...

— C'est bien pour ça que je ne te l'ai pas demandé, rétorqua-t-elle d'un ton enjôleur tout en croisant mes bras derrière mon cou.

Son regard se plongea dans le mien et je sentis un brin d'hésitation dans celui-ci.

— Alors, ça te fait quoi de te retrouver dans ce genre de soirées complètement en dehors de tes habitudes ? me demanda-t-elle d'une voix timide.

— Disons que je m'y habitue petit à petit... Surtout si tu es à mes côtés.

— Me sors pas tes belles paroles, mais plutôt ce que tu as dans le cœur.

Elle posa son index sur mon torse et j'eus comme la sensation que ce geste la perturba, comme si elle avait soudainement pris peur de ce que je pourrais lui dire.

— Tu veux vraiment que je te le dise ? m'enquis-je en voyant son hésitation.

Elle prit quelques secondes pour prendre une longue inspiration puis me répondit :

— Oui. Dis-moi ce que t'as au fond de ton cœur...

— Je t'aime Rey.

Elle posa sa paume sur mon torse, comme un moyen maladroit pour s'en assurer.

— Moi aussi, je t'aime Ben. Et maintenant je m'en veux de t'avoir foutu ce rouge à lèvres.

Elle laissa échapper un petit rire nerveux que je rejoignis immédiatement.

— Ne t'en fais pas, dès qu'on rentrera chez toi, tu pourras m'embrasser autant que tu veux et où tu veux.

— Et toi tu pourras me redire que tu m'aimes jusqu'à l'orgasme...

— Voilà un plan qui me plaît beaucoup.

Elle posa ses mains sur mon cou et me fixa, sans la moindre honte ou gêne. Tandis que de mon côté, j'admirais chaque élément de son visage. Ses petites taches de rousseurs, ses petites pattes-d'oie qui se dessinaient aux coins de ses yeux... J'aurais pu passer la fin de la soirée à l'observer sans jamais m'en lasser, et ce, même dans le silence ou le bruit.

— Ça ne te gêne pas que beaucoup de personnes nous observent ? me demanda-t-elle, un brin provocatrice.

— Et alors ? Qu’est-ce que ça va changer depuis qu’on s’est affiché dans une de tes vidéos ?

— Ce n’était qu’une vidéo... Les gens auraient pu l’ignorer.

Ses lèvres frôlaient dangereusement les miennes et je ne pus m’empêcher de sourire à ce doux contact.

— Et je suppose que ça ne sera pas la dernière, repris-je de plus belle.

— Clairement pas... Pourquoi je me priverais de montrer au monde entier que j’ai le copain le plus sexy au monde.

Elle caressa de son pouce ma joue alors qu’elle me fixait d’un air languide. Si seulement nous étions chez nous, on se serait sauté dessus depuis bien longtemps.

Finn nous interrompit en s’asseyant dans un canapé à côté de nous.

— Je vois que vous êtes vraiment devenus inséparables depuis la dernière fois, nous taquina-t-il en sortant un paquet de clopes de sa veste.

— Tu comptais nous séparer ou quoi ? lâcha Rey en se collant de plus belle contre moi.

— Peut-être pendant un instant. Je comptais aller fumer.

Finn m’adressa un regard pour me proposer de le suivre. Immédiatement, Rey était un peu triste de devoir m’abandonner, même si ce n’était que pour quelques secondes.

Elle se colla contre moi pendant de longues secondes, juste pour un dernier câlin, puis elle accepta de me laisser à Finn, juste le temps d’une discussion.

Je le suivis jusqu’au balcon de son appartement. Sachant que je ne fumais pas, il ne me proposa pas une clope cette fois-ci.

— Ça y est, c’est officiel à ce que je vois, me fit-il remarquer.

— Bien plus officiel que je n’aurais pu le croire.

On rit ensemble, pendant un court moment.

— Vous avez réglé vos problèmes ? me demanda-t-il assez maladroitement.

— En grande partie, oui. Le reste, ça se réglera petit à petit, comme toute relation, je suppose.

Il tira une brève tarte sur sa cigarette puis s’appuya sur la rambarde de son balcon.

— En fait, vous êtes tous les deux des inadaptés des relations amoureuses et vous n’avez aucune idée de comment gérer ça.

— C’est pas si loin que ça de la réalité. Mais au moins, on est consentant.

Il se tourna vers moi pour m’adresser un bref sourire.

— Tu sais que, par curiosité, je suis allé fouiller un peu sur ce que tu faisais côté professionnel ? Parce que tu n'avais pas été très équivoque à ce sujet.

— Tu as dû comprendre pourquoi du coup, rétorquai-je un brin amusé.

— En effet ! T'es une vraie saloperie dans le milieu.

— Merci, lâchai-je, sarcastique.

— Ce n'est pas un compliment !

Il faillit faire tomber sa clope du haut du balcon et son visage n'était pas sur le point de se détendre.

— Ne t'en fais pas, je m'en prends qu'à des corrompus du pouvoir... Ils avaient déjà un très mauvais karma. Je n'allais pas m'en prendre à quelqu'un comme Rey.

Un mensonge. Un horrible mensonge. Mais ça ne l'était plus désormais. Et je ne pouvais pas m'empêcher de trouver ça étrangement drôle.

Finn fronça ses sourcils un instant, puis un timide sourire se dessina sur son visage. Il n'était pas entièrement convaincu. Après, ça n'avait pas une grande importance sur le coup.

— Je t'avoue que ça ne donne pas très envie de te faire confiance, finit-il par dire dans un soupir. Mais vu comment Rey est méfiante avec les autres, je suppose que je ne devrais pas m'en faire...

— Tu peux toujours douter de moi, je ne t'en voudrais pas. Peut-être même que je ne me ferais pas confiance non plus.

Il laissa échapper un bref rire et tira une taffe sur sa cigarette qu'il avait presque oubliée pendant quelques secondes. Puis son visage redevint sérieux un instant. De toute façon, je n'allais pas lui inspirer confiance en une soirée, surtout s'il savait ce que je faisais au travail.

— T'es quand même bien bizarre... Je me demande bien ce que Rey fout avec toi par moment.

— On a des ressemblances assez... particulières.

Même si ça pouvait vraiment sous-entendre quelque chose de purement sexuel, en réalité, c'était peut-être en dernier sur la liste. On avait appris à se connaître et malgré les apparences, on s'en était plutôt bien sorti.

Finn n'insista pas sur ce point et dès qu'il termina sa clope, il me proposa de retourner à l'intérieur.

Rey me remarqua aussitôt et s'approcha de moi. Je sentais qu'elle avait terriblement envie de me serrer contre elle. Parfois, elle avait ces moments où elle était incapable de se détacher de moi et c'en était adorable.

— Ça va ? Tu ne t'es pas trop engueulé avec Finn ? me demanda-t-elle, amusée.

— Pourquoi on se serait engueulé ?

— Finn peut être parfois très protecteur... Et disons qu'il m'a posé pas mal de questions à ton sujet pendant quelque temps. Des questions que j'ai un peu... Comment dire ? un peu évitées.

Elle pencha sa tête, presque fière d'elle.

— Il t'a demandé à quel point j'étais un connard de journaliste ?

— Dommage pour lui que j'ai été au courant dès notre rencontre.

Elle jouait agréablement avec mes nerfs, ce pour quoi un sourire s'esquissa sur son visage. Elle croisa ses bras derrière mon cou et son regard se plongea intensément dans le mien.

— Je t'aime Ben...

Elle posa sa tête contre mon torse, comme si nous étions seuls dans le salon de ses amis. Mais nous ne serions plus seuls, plus maintenant...

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