Chapitre 27 [NOUVELLE VERSION]

Notes de l’auteur : MAJ : 23/11/2024

Ce sont ma vie, mes souvenirs

tous les mots que je n’ai jamais pu dire

la voix que vous avez fait taire

celle de l’enfant qui crie : « Aidez-moi ! »

alors qu’il me frappait

celle de l’enfant qui demande : « Pourquoi ne voyez-vous pas ? »

alors que tous voyaient

sans jamais parler

Ce sont les reflets de ma colère

qui hurlait : « Je vous hais »

alors que ma souffrance n’était que

silence

Écoutez !

je parle

 

Son dos percute le sol. La lame heurte les pavés de la cour.

— Relève-toi.

Altaïs esquisse un mouvement pour se redresser, mais une violente douleur au niveau des côtes lui coupe le souffle. Il serre les dents pour réprimer ses larmes ; Elaran sait où viser pour faire mal.

— Relève-toi.

— Oui, murmure-t-il.

Il se remet debout en vacillant, ramasse son arme entre ses mains tremblantes. L’épée lui semble si lourde, et son corps d’enfant si frêle… Il n’a plus la force de la brandir. L’entraînement dure depuis des heures ; des heures que son oncle le frappe et l’envoie à la terre comme s’il était aussi léger qu’un fétu de paille.

Il ne peut rien faire.

Il raffermit sa prise sur la poignée de l’épée. Un nouveau coup le renvoie à terre avant qu’il ne songe à passer à l’offensive. Le fil d’une lame déchire sa manche et trace une ligne de feu sur son bras, comme pour l’avertir qu’un rien suffirait à le tuer. Un gémissement lui échappe, mais il retient ses larmes. Elles ne doivent pas couler.

— Relève-toi.

Il se redresse sur ses genoux, le souffle court. Du sang imbibe le tissu de sa tunique. La plaie le brûle.

— Tu ne peux pas te montrer aussi pitoyable, siffle Elaran. Tu fais déjà suffisamment honte à notre famille.

Altaïs baisse la tête en essayant de dissimuler son expression blessée.

Il sait tout cela.

— Relève-toi, à moins que tu ne veuilles que je sévisse.

Il s’exécute, l’esprit vide.

 

Regarde…

Ce que tu m’as fait.

 

— Tue-le.

Altaïs écarquille les yeux alors que l’ordre claque dans l’air glacial. Il observe l’homme agenouillé devant lui ; un condamné à mort, lui a dit Elaran. Son regard éteint et son expression amorphe provoquent chez lui un malaise poisseux. Il ne sait pas quel crime lui a valu cette peine, mais il ne peut pas le tuer.

— Je…

— Tue-le.

Il reste figé, écrasé par la silhouette de son oncle. Son silence doit lui déplaire, car le cliquetis caractéristique d’une boucle qu’on dégrafe résonne dans son dos. Il a tout juste le temps de se retourner et de lever un bras pour protéger son visage. Le ceinturon cisaille son avant-bras. Un hoquet de douleur s’étrangle dans sa gorge. Il trébuche vers l’arrière, mais Elaran attrape son poignet avant qu’il ne s’écroule et le serre si fort que la trace de ses doigts marque sa peau.

— C’est un ordre.

— Je… Je ne peux pas… S’il te plaît…

Ne m’oblige pas à le tuer…

Il n’a que dix ans… Même si son oncle l’entraîne depuis des années, qu’il se montre impitoyable avec lui, il ne peut pas lui ordonner une telle chose…

Il ne veut pas…

Elaran le force à faire de nouveau face au condamné, puis il glisse un poignard entre ses doigts.

— S’il te plaît, balbutie Altaïs.

Le sang dévale son bras, goutte sur le sol. Les larmes affleurent à la lisière de ses cils. L’air se refroidit autour de lui alors qu’une fine pellicule de givre s’étend sous ses pieds. La main d’Elaran s’abat sur son épaule.

— Cesse immédiatement ! Tu n’utiliseras ta magie que si je t’en donne l’autorisation.

Il se recroqueville, mais son oncle se penche pour murmurer dans le creux de son oreille :

— Tue-le.

Sa magie écrase son esprit, la douleur poignarde son crâne. Ses doigts tremblent en raffermissant leur prise sur le manche de l’arme. Animé par une volonté qui n’est pas la sienne, il efface la distance qui le sépare du prisonnier et lui tranche la gorge d’un geste brusque. Du sang gicle, éclabousse son visage, tandis que le cadavre s’effondre sur le sol comme une poupée de chiffon. La magie d’Elaran relâche son emprise sur son esprit et ses jambes se dérobent sous son poids. Le poignard tombe sur les pavés avec un tintement métallique.

Un sanglot meurt avant de franchir ses lèvres. Son regard brouillé par les larmes se pose sur ses mains souillées par le sang. L’horreur lui noue le ventre lorsqu’il réalise ce qu’il a commis.

 

Regarde…

Ce que je suis devenu entre tes mains

une marionnette ; un objet ; une arme.

 

L’odeur de la viande grillée le dégoûte. Il essaie de ne pas bouger sur sa chaise malgré l’angoisse qui lui écrase sa poitrine ; les entailles qui strient son dos le brûlent dès que le tissu de sa tunique les effleure. Il entend de nouveau les hurlements de ceux qu’il a calcinés plus tôt dans la journée, sous les ordres d’Elaran, la douleur qui lui a vrillé le crâne lorsqu’il a tenté de résister, celle qui a lacéré sa chair lorsque son oncle l’a châtié pour son indocilité.

Les souvenirs achèvent de lui couper l’appétit. Il repousse son assiette alors que les conversations de sa famille se poursuivent autour de lui comme s’il n’existait pas. Thorvald et Harald échangent avec animation, Elaran acquiesce de temps à autre. Aalis écoute d’un air concentré et ponctue la discussion de quelques remarques qui lui valent parfois des coups d’œil approbateurs de son père, d’autres fois son indifférence, tandis que Soren mange comme si tout l’ennuyait.

Personne ne fait attention à lui, et il s’étouffe dans son silence, les souvenirs et les sentiments qui l’empoisonnent.

Le regard de Thorvald se pose soudain sur Altaïs. Il ne l’a jamais apprécié, a toujours laissé son frère agir en toute impunité, mais depuis la mort de sa femme des suites d’une maladie, il semble encore moins enclin à faire preuve de patience à son égard.

— Tu ne manges pas, constate-t-il.

Altaïs se crispe en percevant le reproche sous-jacent, aussitôt sur la défensive, relève le menton avec aplomb.

— Le cuisinier devrait apprendre à cuir la viande, rétorque-t-il avec ironie.

Le silence tombe sur la table. Même les domestiques qui évoluaient dans la salle se figent dans l’attente de la réponse du roi. Mais c’est finalement celle de son oncle qui claque avec sécheresse.

— Reste à ta place.

« Reste à ta place ou je te promets que tu paieras pour cette nouvelle impertinence. »

Altaïs laisse échapper un ricanement moqueur, puis il se lève en repoussant sa chaise.

— Regarde. Je donne ma place à qui la voudra.

— Personne ne t’a autorisé à partir.

Pour seule réponse, Altaïs s’incline avec insolence. Les plaies à vif sur son dos manquent de lui arracher une grimace. Il n’attend pas davantage pour tourner les talons, conscient que les rumeurs se répandront dans son sillage dès qu’il aura quitté la salle et qu’il paiera cette incartade avant la fin de la soirée. Mais à cet instant, il savoure ce maigre acte de rébellion.

 

Regarde…

Les années passent et je meurs toujours plus.

 

La gifle est si violente qu’il perd l’équilibre. Son dos heurte la harpe derrière lui, et il l’entraîne dans sa chute avec un hoquet paniqué. L’une des cordes lui scie la peau lorsqu’il s’écrase sur l’instrument dans un craquement. Il veut se redresser, mais un deuxième coup percute son visage. Un grondement lui échappe alors qu’il lève un regard haineux vers Elaran, qui le toise avec fureur.

— Le premier ne t’avait pas suffi ? siffle-t-il.

Un troisième coup le fait taire. Un goût métallique envahit sa bouche. Il devine que des hématomes parsèmeront son visage le lendemain, mais il n’est plus un enfant.

Il refuse de s’écraser.

— Petite enflure ! crache son oncle. Tu crois que je n’ai pas vu comment tu regardes les hommes ?

Son cœur sombre dans sa poitrine. Comment Elaran l’a-t-il su ? Il pensait avoir réussi à enfouir ses émotions loin dans son esprit, à effacer cet aspect de ses sentiments pour ne garder que cette crainte sourde. Même cela, il ne peut le cacher à son oncle ?

Le cliquetis d’une boucle que l’on dégrafe le fait sursauter. Il n’a pas le temps de s’écarter ; une douleur soudaine lui brûle la joue. Il écarquille les yeux sous le choc, sa voix reste coincée dans sa gorge, puis la colère le submerge et prend le dessus sur sa peur.

— Vas-y, frappe-moi ! rugit-il. Tout n’est qu’un prétexte pour me haïr de toute manière !

Il soutient le regard d’Elaran de ses prunelles flamboyantes, mais ne peut réprimer un mouvement de recul lorsque l’homme fait un pas vers lui. Le bois des vestiges de sa harpe craque et fissure son cœur. La magie de son oncle se déploie autour de lui et se jette à l’assaut de son esprit, lui arrachant un gémissement. Il plaque ses mains contre ses tempes dans l’espoir d’atténuer la douleur, mais rien, rien, rien…

Elaran utilise son pouvoir pour le manipuler,

pour le contrôler,

pour le blesser.

— Arrête ! crie-t-il dans un sursaut de désespoir.

Mais la douleur s’accentue et il se cambre sur le sol avec un hurlement.

Des larmes roulent sur ses joues, la haine empoisonne son cœur.

Il se promet qu’un jour il détruira ce palais et tous ceux qui y vivent.

Qu’un jour il sera libre.

 

Regarde…

Je ne suis plus que haine et colère.

 

Les muscles de sa monture ondulent sous ses cuisses alors qu’elle galope le long de la falaise. Aveuglé par la pluie torrentielle et le vent qui cingle son visage, il ne voit rien au-delà d’une dizaine de pas, mais il entend la course de ses poursuivants derrière lui. Il laisse échapper une injure ; il a manqué de prudence en utilisant sa magie. À cause de cela, Elaran a retrouvé sa piste.

S’il parvient à atteindre Isshaf, peut-être trouvera-t-il l’un des rares navires qui voguent vers d’autres contrées. La ville portuaire n’est plus très loin…

Il ferait n’importe quoi pour être libre.

— Plus vite, supplie-t-il.

Tout plutôt que de retourner au palais.

Tout plutôt que…

Un sort frôle son visage. Le sol explose quelques pas devant lui dans une gerbe de terre humide. Sa monture se cabre et le projette dans la boue. Le choc lui coupe le souffle. La vision trouble, il voit des cavaliers se dessiner, essaie de se redresser…

Il doit se redresser.

Il s’agenouille en vacillant, le corps meurtri par sa chute. La pluie ruisselle sur son visage, trempe ses vêtements. Les cavaliers s’immobilisent. L’un d’entre eux descend de sa monture et s’approche d’une démarche arrogante.

— Tu n’es qu’un imbécile.

Elaran le toise d’un regard si orageux qu’il se recroqueville.

— Un imbécile qui a compris que tout valait mieux que cette famille ! rétorque Altaïs malgré la peur qui lui tord le ventre.

Il lève une main, prêt à déchaîner une tempête, mais un rictus retrousse les lèvres de son oncle. Un instant plus tard, Altaïs se fige, paralysé par sa magie. Il lutte, lutte pour lui résister, échoue dans un gémissement. La pluie se densifie autour d’eux, les gouttes translucides gèlent peu à peu comme des centaines de cristaux de givre…

— Cesse.

La glace se fendille. La pluie reprend son cours tandis que son oncle se penche pour le redresser de force. Et la violence que dégage son geste figure la promesse qu’il ne se relèvera pas lorsque Elaran en aura fini avec lui.

 

Regarde…

 

Le fouet claque et laisse une longue estafilade dans son dos. Il carre les épaules dans l’espoir d’atténuer la douleur, mais celle-ci déferle et lui arrache un cri étouffé. Les cordes qui attachent ses poignets au poteau de bois dressé au milieu de la cour du château cisaillent sa peau.

Vingt coups de fouet, avait ordonné Thorvald.

Son corps ne tiendrait pas si longtemps.

Le fouet déchire son dos une nouvelle fois. Il rejette brusquement la tête vers l’arrière, la mâchoire si crispée que ses dents lui semblent sur le point de se briser.

Il les hait.

Il les hait, tous autant qu’ils sont.

Son sang ruisselle sur son dos et sur les pavés.

Chaque coup amplifie sa haine jusqu’à ce qu’elle envahisse chaque fibre de son corps, de son esprit, de son âme.

 

Tu as déjà gagné.

 

Des éclats de voix attirent son attention. Altaïs hésite un instant à rebrousser chemin, lui qui ne désire que le calme, mais il reconnaît les intonations glaciales d’Elaran. Il ne lutte pas longtemps contre la curiosité et s’approche discrètement du salon d’où viennent les sons, grimaçant lorsque les plaies qui strient son dos se rappellent à ses bons souvenirs. Thorvald a interdit qu’un Guérisseur le soigne suite à sa flagellation.

— Dans le Nord ? siffle Elaran. Hors de question que je l’envoie là-bas ! Il restera au palais avec moi !

— Allons, répond Thorvald. Il ne fait que nous causer des ennuis au palais et entache l’image de notre famille. Sa fugue nous le prouve. Envoyons-le dans le Nord, un autre s’occupera de lui…

— Et laisser son pouvoir incontrôlable nous échapper ?

— Il ne s’agira plus de notre problème. Il ne menacera plus la famille royale.

— Son existence même nous menace, c’est pour cela que nous ne pouvons nous permettre de l’éloigner.

— Ma décision est déjà prise, réplique Thorvald. Il partira. Quant à nous… Nous vieillissons, il est temps qu’Harald ait davantage de responsabilités.

Un long silence suivit son propos.

— Tu m’écartes…

— Je sais que tu as dévoué ta vie à notre famille, mais Harald est l’héritier légitime. Tu es un bâtard ; tu savais que tu ne demeurerais pas l’adal éternellement.

Altaïs recule, sonné par la discussion qu’il vient d’entendre.

— Attends, ordonne Elaran.

Il met un instant à réaliser que des bruits de pas résonnent, puis la porte du salon s’ouvre à la volée. Le regard gris de son oncle le transperce.

— Que fais-tu là ? gronde-t-il.

Il relève le menton avec un aplomb qu’il est loin de ressentir. Elaran lui fera regretter sa présence de toute manière.

— La conversation me paraissait intéressante, réplique-t-il.

Sa voix monte plus dans les aigus qu’à l’ordinaire. Du coin de l’œil, il aperçoit Thorvald assis dans un fauteuil, le dos très droit et les sourcils froncés. Altaïs lui adresse une supplique muette, mais le roi se contente d’observer la situation sans un mot. Il est seul ; personne n’empêchera la colère de son oncle de s’abattre sur lui.

— Nous en rediscuterons, déclare Elaran à l’adresse de Thorvald. Et toi, suis-moi, ajoute-t-il en regardant son neveu. Je dois visiblement revoir ton éducation.

Altaïs ne bouge pas, tétanisé par la menace qu’il perçoit. Son oncle émet un claquement de langue agacé et empoigne son bras. La douleur fuse dans son dos alors que ses pieds suivent traîtreusement le mouvement. Elaran perd rapidement patience ; il le jette contre un mur au détour d’un corridor désert, et sa plainte étouffée résonne dans le silence.

— Tu ne cesseras donc jamais de nous causer des ennuis ? gronde son oncle.

— Qu’est-ce que cela changerait ? souffle Altaïs. Tu trouveras toujours des raisons de me haïr, peu importe que je sois responsable ou non de ce que tu me reproches.

— Idiot… Tu ne comprends toujours pas ? Après tout ce temps ?

Les battements de son cœur s’affolent dans sa poitrine.

— Je comprends surtout que tu tiens à m’avoir en ton pouvoir.

Le coup vole.

Sa lèvre éclate sous le choc.

— J’en ai assez. Il est grand temps que tu disparaisses.

Altaïs écarquille les yeux.

— Tu vas me tuer ? chuchote-t-il dans un filet de voix.

Il ne veut pas mourir.

Il veut s’échapper, être libre.

Elaran ne répond pas tout de suite, mais son regard étincelant lui apprend qu’il a autre chose en tête. Est-ce en lien avec la conversation qu’il vient de surprendre ?

— Tout sera bientôt fini.

Son oncle tourne les talons alors qu’il glisse contre le mur en tremblant. Sa respiration atteint difficilement ses poumons. Des bruits de pas lui font brusquement relever la tête. Il se fige en découvrant un jeune garde avancer vers lui avec une expression inquiète. Ses cheveux forment un halo doré autour de son visage. La colère l’envahit ; parce qu’il ne peut pas la diriger contre son oncle, parce qu’il ne supporte pas qu’on le voie dans une position aussi vulnérable.

— Va-t’en ! crache-t-il.

L’air se refroidit autour d’eux alors que sa magie crépite sur sa peau. Une bourrasque glaciale s’engouffre dans le corridor. Le garde frissonne, mais il ne bouge pas, ses prunelles vertes rivées sur lui.

— Tu es sourd ?

Il se redresse avec un regard orageux. Pourquoi le garde n’obéit-il pas ? Est-ce parce qu’il sait que tout prince qu’il soit, il n’a aucun pouvoir ? Va-t-il s’en prendre à lui ?

Il fait volte-face dans l’espoir de fuir sa présence. Il n’a plus la force de tenir tête à qui que ce soit.

— Attendez ! s’écrie le garde. Puis-je vous aider d’une manière ou d’une autre ?

Altaïs se fige lorsque sa voix résonne dans son dos. Les larmes lui brûlent les yeux. C’est absurde, c’est un piège peut-être, et pourtant, il ne peut s’empêcher de croire à l’inquiétude qu’il discerne dans ses mots. Mais le garde ne pourra rien changer.

Il secoue brièvement la tête, sans se retourner, puis il reprend son chemin en s’efforçant de ravaler ses larmes.

 

Regarde…

Tu es en train de me tuer.

 

Altaïs se redresse en posant une main sur sa tempe. Quelque chose l’appelle, l’attire hors de sa chambre. Quelque chose contre lequel il ne peut pas lutter. Il s’écarte de la fenêtre ouverte et sort de la pièce. La lune diffuse une lumière blanchâtre dans le corridor.

Alex

Ils devaient se retrouver dans ses appartements. Pourquoi ne l’y attend-il pas ?

Alex Alex Alex

Ses pieds le portent à travers le palais sans qu’il en ait réellement conscience. Son corps lui semble si lourd… Il cligne des yeux. Lorsqu’il relève la tête, ses pensées s’éclaircissent. Il réprime un sursaut en reconnaissant les portes de la salle du trône.

— Je t’ai attendu.

Il pivote dans un mouvement brusque pour voir Elaran sortir de l’ombre. Il comprend à cet instant que les griffes d’un piège se referment sur lui.

— C’est toi qui m’as attiré ici…

— Qui d’autre ?

— Que veux-tu de moi ?

Son oncle efface la distance qui les sépare.

— Suis-moi.

Altaïs ne bouge pas. Elaran soupire et répète l’ordre d’une voix dure, tandis que sa magie se déploie autour d’eux. Altaïs serre les dents lorsque son corps se mue contre son gré et qu’il s’engouffre à sa suite dans la salle du trône.

Il n’y a aucun garde, ni dans la salle ni dans les couloirs avoisinants. Parce que son oncle les a éloignés ?

Alexander… Où es-tu ?

La lumière de la lune baigne l’espace d’une lumière si pâle qu’il voit presque aussi bien qu’en plein jour. Les colonnes blanches se confondent avec des spectres.

— Elaran ? Nous devions nous entretenir seuls… Pourquoi l’amènes-tu ?

Le regard d’Altaïs dérive vers le trône, près duquel se tient la silhouette de Thorvald. Le malaise qui lui noue le ventre s’accentue.

— Pour te montrer ce que nous pouvons faire de lui.

Altaïs sursaute en entendant les mots de son oncle ; l’instant d’après, ses jambes se dérobent alors que cette magie qu’il abhorre s’insinue dans son esprit. Il se retrouve agenouillé au milieu de la salle, la nuque courbée.

— Il suffit d’un rien pour qu’il s’incline.

Altaïs doit utiliser toutes sa force pour relever la tête, les prunelles orageuses. Elaran ne prend pas la peine de le regarder, son attention rivée sur Thorvald.

— À quoi cela rime-t-il ?

— En le contrôlant lui, nous contrôlons sa magie. Il ne sera plus un danger pour la royauté, au contraire ; nous pourrons en faire ce que nous voulons.

La rage lui brûle le ventre, bouillonne dans ses veines.

Il voudrait le tuer.

Alors pourquoi est-il si vulnérable face à lui ?

— Va… Va crever… Tu n’auras jamais ma magie, et tu ne m’auras jamais moi…

La pression sur son esprit s’accentue, la douleur est si vive qu’elle lui coupe le souffle, mais son cri reste coincé dans sa gorge. Thorvald l’observe sans la moindre émotion, puis il reporte son attention sur son frère.

— Il est trop imprévisible, réplique-t-il. Pourquoi tiens-tu tant à le garder au palais ? Lorsqu’il était enfant, tu étais le premier à plaider pour que nous le tuions.

— Je m’en débarrasserai s’il échappe à mon contrôle. Mais nous pouvons l’utiliser pour restaurer la grandeur de notre famille.

— Famille à laquelle tu n’appartiendras jamais qu’à moitié, le coupe Thorvald.

L’expression d’Elaran s’assombrit.

— Je me doutais que tu répondrais cela, mais ton règne touche à sa fin. Tu n’es pas destiné à porter cette couronne plus longtemps.

— Nous sommes peut-être demi-frères, mais c’est à ton roi que tu parles.

Elaran se tourne vers Altaïs sans lui répondre.

— Lève-toi, ordonne-t-il. Et approche.

Contraint par la magie de son oncle, Altaïs n’a pas d’autre choix qu’obéir. Il s’immobilise près d’Elaran, le regarde avec toute la haine qui l’empoisonne. Son oncle se penche pour murmurer dans le creux de son oreille.

— Tue-le.

Altaïs écarquille les yeux alors qu’Elaran glisse un poignard entre ses doigts.

— Qu’est-ce que cela signifie ? siffle Thorvald.

Ses mots s’étranglent soudain dans sa gorge, et tout son corps se fige, paralysé par l’emprise que la magie de son frère exerce sur lui.

— Tue-le, répète Elaran.

— Ne… Ne me demande pas cela, balbutie Altaïs.

La magie de son oncle l’écrase au point de l’asphyxier. L’esprit vide, Altaïs avance vers Thorvald.

Serait-ce si terrible de le tuer ? murmure une voix dans son esprit. Il t’a toujours méprisé, il a toujours laissé son frère faire ce qu’il voulait de toi… Il ne mérite pas de vivre…

Altaïs voudrait se débattre, mais ses muscles ne lui répondent plus. Sa conscience s’étiole.

Il ne veut pas tuer.

Il ne veut pas tuer.

Où peut-être que si ?

Il est grand temps que tu disparaisses. Tout sera bientôt fini.

La peur lui glace les veines. Quel sort lui réservera Elaran ensuite ?

La main de son oncle se pose sur son épaule. Face à eux, Thorvald se débat en vain contre la magie d’Elaran.

— Tue-le.

Le regard voilé, Altaïs efface la distance qui le sépare encore du roi. Celui-ci semble enfin réaliser l’erreur qu’il a commise.

Sa mort ne serait-elle pas justice ?

Il lève le poignard.

je ne veux pas le tuer

je ne veux pas le tuer

je ne veux pas le tuer

Son mouvement se suspend alors qu’il lutte de toutes ses forces contre la magie de son oncle.

— Je ne le tuerai pas, articule-t-il.

Son esprit se fissure. Il hurle sans un bruit, lutte, lutte, lutte…

C’est ta volonté ! crie-t-il en silence. Ta volonté !

La douleur le déchire.

— Non ! hurle-t-il.

Le poignard s’enfonce brutalement dans le cœur du roi.

Thorvald s’écroule avec un hoquet ensanglanté, les mains sur le manche du poignard. La magie d’Elaran relâche son emprise sur l’esprit d’Altaïs. Ses genoux se dérobent sous son poids.

— Non…

Ce n’est pas possible.

Rien de tout cela n’est réel.

Des larmes lui brûlent les yeux alors que ses doigts essaient d’empêcher le sang de Thorvald de s’écouler. Des plaques de givre fleurissent sur le sol. Il répète inlassablement les mêmes mots, non non non, comme s’il refusait de croire ce qu’il venait de faire. Des bruits de pas retentissent à l’extérieur, les portes s’ouvrent en claquant et révèlent un domestique. Altaïs tourne la tête dans sa direction, les yeux écarquillés.

Est-ce son cri qui l’a attiré ici ? Elaran ?

Il voudrait le supplier de l’aider, d’appeler un Guérisseur, mais ses mots ne franchissent pas la barrière de ses lèvres. Le domestique fait volte-face avec une expression horrifiée.

Thorvald est déjà mort.

Elaran sort de l’ombre des colonnes où il s’était dissimulé. Altaïs lève un regard désespéré vers lui.

— Je t’en supplie, balbutie-t-il.

— C’est fini, Altaïs. Je t’épargnerai, parce que tu pourras m’être utile à l’avenir, mais tu demeureras enfermé ailleurs que dans ce palais. Et jamais, jamais tu ne pourras parler.

Ses doigts effleurent son front,

et la douleur explose dans sa tête,

Alex

l’obscurité l’engloutit,

alors que la magie d’Elaran étouffe son esprit et scelle ses souvenirs.

 

Regarde…

 

— Elaran !

Son oncle marque un temps d’arrêt sur le seuil de la cellule, alors qu’Altaïs se débat comme un fou entre ses chaînes.

— Ne me laisse pas ici ! hurle-t-il. Ne me laisse pas avec lui !

Un sanglot s’étrangle dans sa gorge.

— Je t’en supplie ! Je ferai tout ce que tu voudras !

Mais Elaran reprend son chemin, et Altaïs se brise en morceaux. Il se recroqueville contre le mur en pleurant. Les ténèbres s’insinuent dans les lambeaux de son esprit.

 

Après tout ce temps, malgré tout ce que tu m’as fait, je me bats encore.

Et je briserai tout ce que tu as créé ;

le sceau et l’oubli.

 

Altaïs éclate de rire alors que son père ébouriffe ses cheveux avec tendresse. Le soleil décline peu à peu et baigne la plaine où ils sont installés d’une douce lumière dorée. L’enfant se blottit contre Eigil.

— Pas envie de rentrer, murmure-t-il.

Au palais, il sent qu’on le regarde différemment, même s’il ne comprend pas pourquoi. Une partie de sa famille le traite avec une hostilité palpable. Son père passe ses bras autour de ses épaules.

— Je sais. Je te promets que nous trouverons rapidement l’occasion de faire une nouvelle escapade.

Altaïs acquiesce sans un mot, et son père raffermit son étreint. L’instant est brisé par des bruits de cavalcade. Eigil se raidit alors que son fils relève la tête. Un cavalier solitaire s’arrête non loin et descend de sa monture ; Altaïs reconnaît aussitôt la haute silhouette de son oncle. Il ne peut réprimer un frisson.

Eigil se redresse lentement, les sourcils froncés. Son regard habituellement si doux se durcit lorsque Elaran s’approche.

— Que fais-tu ici ?

— Thorvald a demandé à ce que ton fils ne s’éloigne pas du palais.

— Je veille sur lui, réplique Eigil. C’est un enfant, vous ne pouvez pas l’emprisonner dans le palais !

— Tu sais aussi bien que nous que cela importe peu qu’il soit enfant.

Altaïs se recroqueville derrière son père. Le mépris qu’il perçoit dans la voix de son oncle lui fait peur. Il baisse les yeux, tressaille en remarquant que des brins d’herbe ont gelé. L’angoisse lui tord le ventre ; la dernière fois que sa magie lui a échappé, alors qu’il était au palais, le roi Thorvald et Elaran étaient entrés dans une colère noire. Seule l’intervention d’Eigil avait calmé la situation, mais il avait ensuite passé la nuit à cauchemarder.

Il ne doit pas utiliser sa magie.

Il ne doit pas…

Même si l’attention de son père reste rivée sur Elaran, sa main se pose sur sa tête dans un geste apaisant.

— Nous ne tarderons pas, répond Eigil. Mais va-t’en, tu l’effraies.

Elaran ne bouge pas, sa bouche se tord de contrariété.

— Tu sais ce qu’il est ; tu sais ce que son existence représente pour notre famille. Tu as été témoin de ce qu’il s’est passé avec notre grand-père. Nous ne pouvons pas laisser le passé se reproduire.

— Notre grand-père était aveuglé par le pouvoir ! riposte Eigil. Et aujourd’hui, tu te sers de cette histoire pour t’en prendre à mon fils !

L’éclat de voix de son père fait sursauter Altaïs. Avec lui, Eigil s’est toujours montré doux et affectueux, il n’a jamais haussé le ton.

— Ton fils qui a tué ton épouse en venant au monde ? Ton fils qui pourrait nous conduire à notre perte ?

Altaïs émet un hoquet étranglé, les yeux écarquillés par l’horreur. Il ne comprend pas la teneur de leur conversation, mais il comprend au moins cela.

Ton fils qui a tué ton épouse en venant au monde.

Il serait responsable de la mort de sa mère ?

— Assez ! rugit Eigil. Que fais-tu ici, Elaran ?

Soudain, tout son corps se fige. Il recule d’un pas, et Altaïs trébuche en suivant son mouvement.

— Tu viens t’en prendre à lui, n’est-ce pas ?

Elaran ne répond pas, mais son silence vaut tous les mots qu’il ne prononce pas.

— Non ! siffle Eigil, les traits métamorphosés par la rage. Je ne te laisserai pas faire !

— L’incident survenu la dernière fois montre que c’est un danger.

Altaïs tressaille. Des larmes embuent ses grands yeux pâles.

— Je suis désolé, souffle-t-il.

Il ne doit pas utiliser sa magie.

Il ne doit pas…

Il a failli geler la cour du palais, ainsi que les domestiques et les gardes qui y effectuaient leurs tâches.

Il ne doit pas utiliser sa magie.

Mais lorsqu’il baisse la tête, il voit que l’herbe gèle sous ses pieds. Les brins blanchissent, se rigidifient, craquent lorsqu’il recule.

— Je suis désolé ! répète-t-il en paniquant.

Eigil se tourne brusquement vers lui, pose un genou à terre et une main sur son visage, malgré le froid mordant qui l’agresse aussitôt.

— Tout va bien, chuchote-t-il. Tout…

Ses mouvements se figent, sa voix s’étrangle dans sa gorge. Altaïs lève un regard terrifié vers Elaran, qui s’avance vers eux en déployant sa magie pour immobiliser Eigil.

— El… Elaran…

— Je ne laisserai pas le passé se reproduire avec sa magie souillée.

— Il… Il… n’est pas…

Eigil ferme brièvement les yeux avec une grimace. Lorsque Elaran le dépasse, il essaie de se redresser mais ses muscles ne lui répondent pas.

— El… Elaran !

Altaïs recule en trébuchant, s’étale sur l’herbe avec un gémissement étranglé, alors que son oncle dégaine un petit poignard.

— Ce n’est… qu’un enfant ! crie Eigil. Son avenir… dépendra de… ce que nous lui offrirons !

Elaran secoue la tête sans répondre.

— Papa, hoquette Altaïs.

Il se recroqueville sur l’herbe gelée. L’air se refroidit tellement qu’un nuage de buée s’échappe de sa bouche. La lame miroite sous les rayons mourants du soleil.

— Je suis désolé, Eigil.

— Non !

Altaïs voit l’arme s’abaisser, aperçoit une silhouette bouger du coin de l’œil. Un poids le percute de plein fouet. Un hoquet de douleur résonne dans ses oreilles alors que des bras chauds l’enlacent.

— Papa… Papa !

Le corps de son père s’affale sur le sol. Altaïs n’entend plus que le sang battre ses tempes ; du givre recouvre le bout de ses doigts alors qu’il se jette sur son père. Le manche du poignard dépasse de son dos. Des pétales écarlates fleurissent sur ses vêtements.

— Papa !

La main d’Eigil monte difficilement jusqu’à sa joue. Il peine à garder les yeux ouverts, mais ses prunelles d’un bleu plus foncé que celles de son fils brillent de tendresse.

— Altaïs… Mon étoile…

Quelqu’un repousse brutalement Altaïs.

— Imbécile ! siffle Elaran, le visage blême. Tu ne devais pas mourir !

Eigil s’étouffe dans une quinte de toux.

— Je t’en… supplie… Ne le tue pas… C’est… mon fils… et je l’aime plus que tout…

— C’est un danger !

— Je t’en supplie… Elaran…

Elaran rive un regard haineux sur Altaïs, dont les joues sont marbrées de larmes.

« Rien ne serait arrivé si tu n’étais pas né. »

Altaïs ne bouge pas, tétanisé.

— El… aran…

Eigil bat des cils pour maintenir ses paupières ouvertes, mais sa respiration se dissout peu à peu.

— Je l’épargnerai, abdique Elaran. Je l’épargnerai tant qu’il restera sous mon contrôle, mais s’il s’échappe un jour, si j’estime qu’il est impossible de le garder en vie, je le tuerai. Peu importe ton souvenir.

Eigil ferme les yeux, et son souffle meurt sur ses lèvres. Les larmes d’Altaïs gèlent avant de toucher le sol. Les iris gris d’Elaran flamboient lorsqu’ils se posent de nouveau sur lui.

« Tu oublieras. Tu te tairas. Tu exécuteras chacun de mes ordres. »

Sa magie frappe l’esprit d’Altaïs comme une lame.

« Et je te haïrai. »

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Edouard PArle
Posté le 07/02/2024
Coucou Mathilde !
Non seulement Elaran s'en est pris à Adela, mais en plus il s'en sert pour faire à nouveau passer Altais pour le bouc-émissaire. Très fort de sa part, il semble plus que jamais intouchable.
Très bon chapitre, avec une grosse confrontation entre Harald et Altais. Grosse intensité dans cette scène, très bien écrite. On comprend la colère d'Altais, sa perte de moyens et son envie de tout détruire, de faire du mal aux autres et à lui-même. On sent qu'il est au bord de basculer, que seule la présence d'Alexander peut encore l'en détourner.
Plus que jamais curieux de voir comment tu vas conclure tout ça. Il y a pas mal de choses où je ne sais pas comment tu vas terminer, il reste beaucoup de choses à dénouer en seulement quelques chapitres.
Une petite remarque :
"Quelle part au loin, le ciel pâlissait." -> quelque ?
Un plaisir,
A bientôt !
Nathalie
Posté le 02/04/2023
Bonjour Mathilde Blue

Altaïs perd pied face une autre accusation infondée, le bouc émissaire. Même la peste et les doryphores sont de sa faute, c’est bien connu. Enfin, le sceau est brisé. La vérité va pouvoir éclater. Qui sait ? Il l’a peut-être tué, le roi, en fait ?

Propositions de correction :

Quelle part au loin, le ciel pâlissait.
→ Quelque part

déclara-t-il d’une vois désincarnée.
→ voix
Mathilde Blue
Posté le 08/05/2023
Bonjour Nathalie,

C'est cette injustice et cette colère si longtemps enfouie qui lui permet finalement de briser le sceau, un mal pour un bien peut-être.

Merci pour les coquilles :)
MrOriendo
Posté le 28/03/2023
Hello Mathilde !

Et bien, quel chapitre ! Tu maîtrises encore une fois très bien l'intensité dans la confrontation de tes personnages, à tel point que le duel contre Harald dans la salle du trône éclipse presque cette scène pourtant si touchante et cruciale où Altaïs accepte enfin de parler de viol devant Alexander. En tout cas, c'est mon ressenti.
Cela dit, je ne pense pas que ce soit dû à une faiblesse d'écriture de la première partie : c'est fluide, ça se lit bien, il y a de l'intensité et de l'émotion, c'est juste super bien écrit en fait. Mais ce combat avec Harald installe une telle tension dans la fin de chapitre qu'en arrivant à la dernière ligne, au moment d'écrire mon commentaire, il a fallu que je me dise "ah mais oui c'est vrai, il y avait ça aussi au début !"

En tout cas, on peut dire que ton histoire se bonifie avec les chapitres. Tu m'as encore une fois attrapé et je pense que cette fois, je ne parviendrai pas à m'arrêter de lire avant la fin ^^

Quelques remarques :

- "Quelle part au loin, le ciel pâlissait" --> quelque
- "déclara-t-il d’une vois désincarnée" --> voix
- "détruire tout, tout, tout…" --> Je ne pense pas que tu aies besoin de cette emphase ici, on l'a très bien compris :)
Mathilde Blue
Posté le 28/03/2023
Hello Ori !

Je suis heureuse que le chapitre t'ait plu et qu'on ressente bien toutes les émotions qui se dégagent des confrontations entre les personnages, il m'a donné un peu de fil à retordre. Je vois ce que tu veux dire sur le fait que la scène dans la salle du trône éclipse un peu celle qui précède. Dans ma tête, il y avait vraiment un cheminement logique avec le fait que la fin du chapitre n'aurait sans doute pas eu lieu si Altaïs n'avait pas réussi à mettre des mots sur une partie de ce qu'il avait vécu au préalable, donc il y a forcément une gradation liée à cette accumulation tout au long du chapitre, mais il faudrait que je trouve un moyen de bien appuyer sur ce lien pour que cette première scène ne passe pas à la trappe !

Merci beaucoup pour ton retour qui me touche beaucoup :) Et je note les remarques !
MrOriendo
Posté le 28/03/2023
Il y a effectivement un cheminement logique et je l'ai bien perçu, je ne remets pas du tout en cause la construction de ton chapitre, elle fait totalement sens ! C'est vraiment juste une question d'intensité pour le coup, cette gradation est effectivement présente mais l'intensité dans la confrontation avec Harald est telle à la fin (ou devrais-je dire, tellement bien réussie) qu'elle éclipse un peu le début a posteriori.
En soi, à la lecture tout fonctionne bien et s'enchaine bien, c'est juste que lorsque j'arrive à la fin du chapitre et que je pense à ce qui m'a marqué, ce que je retiens c'est ce duel avec Harald et pas nécessairement le fait qu'Altaïs ose enfin parler de son viol.
Je ne sais pas si c'est très clair ce que je raconte...
Peut-être qu'une piste à explorer serait de passer par ces pensées d'Altaïs que tu distilles pendant le duel, par exemple "Si je ne les tue pas, c’est moi qui mourrai…", ou "Je ne sais plus si j’existe encore…"
À ce moment, il pourrait peut-être justement y intégrer le viol, faire un amalgame entre Dagmar et Harald en se disant qu'ils sont tous responsables de son malheur, de tout ce qui lui est arrivé ?
C'est juste une idée, je ne sais pas si ça colle avec ce que tu veux transmettre ici, mais ça permettrait de renforcer ce lien entre le fait qu'il ose pour la première fois libérer sa parole, son agressivité contre Harald et le fait que ses souvenirs se libèrent à la fin du chapitre. Ça ferait un fil conducteur pour ton chapitre, le terme de "viol" est central ici, c'est la libération de sa parole, pour la première fois il pose un mot sur ce qu'ils lui ont fait subir. Et il n'apparait que deux fois.

Après, ce n'est que mon ressenti perso, l'avis des autres lecteurs sera peut-être différent. Ne modifie pas forcément tout ton chapitre juste sur mon retour, prends un peu la température auprès des autres pour te faire un avis constructif sur la question :)
Mathilde Blue
Posté le 28/03/2023
Je comprends tout à fait ce que tu veux dire ! En fait, la structure et l’enchaînement fonctionnent mais il manque juste d’une sorte de rappel dans la deuxième partie pour bien insister sur le lien avec la première partie et montrer que ça contribue à mettre Altaïs dans cet état :) Passer par les pensées d’Altaïs distillées au fil de la scène est une bonne idée en tout cas, je vais creuser cette piste, l’amalgame également (d’autant plus qu’il a déjà fait cet amalgame lorsque Harald l’a torturé avant le procès).
Mais je suis tout à fait d’accord sur le fait que le terme de « viol » est central, et il n’apparaît en effet que deux fois, mais il apparaît surtout deux fois dans le roman dans ce chapitre, parce que je trouvais essentiel qu’Altaïs soit le premier à mettre un mot sur ce qu’il avait vécu (et le seul de fait). Mais le rappel dans la suite pour bien faire le lien sur ce qu’il ressent est une bonne idée :)
Et pas de soucis, je trouve ta remarque très pertinente, et ça va plutôt se jouer sur le détail que sur l’ensemble du chapitre je pense ^^ Ça ne devrait pas être un retravail très conséquent !
espritdepapier
Posté le 26/03/2023
Woh.
C'est le bazar au chateau ! (pire manière de résumer un chapitre ultra intense, je sais. navrée ?)
Harald a perdu pied, Adela est surement six pieds sous terre... Mais Elaran prend-il son pied ? that's the question !
Et je veux la réponse !
Mathilde Blue
Posté le 28/03/2023
Hahaha, ce jeu de mots si bien trouvé xD Bon en réalité Elaran est peu dans la merde maintenant qu'Altaïs a brisé le sceau, la suite risque de moins lui plaire x)
espritdepapier
Posté le 30/03/2023
Altaïs a ma bénédiction pour lui mettre son pied où je pense, pour filer la métaphore plantaire o:)
(j'ai lu la suite, j'aime la suite, merci pour la suite ♥)
Mathilde Blue
Posté le 30/03/2023
Bien vu pour la métaphore filée xD
(merci <3)
Flammy
Posté le 10/03/2023
Coucou !

Ce chapitre est pour le moins intense ='D On sent qu'on arrive sur la fin et que ça pète dans tous les coins ='D En même temps, Harald... Ahem. Bref.

La première scène est vraiment très touchante, très poignante et très forte. Le fait qu'Altaïs arrive enfin à parler de ce qui s'est passé avec Dagmar, c'est tellement un énorme pas en avant mine de rien ! C'est dur, mais c'est déjà ça. Et on sent à quel point c'est pas facile pour lui, mais aussi à quel point il ne veut plus se laisser enfermer dans le silence. D'ailleurs, je me demandais, à quel point le fait de ne plus refouler ça de manière très très forte ne fait pas déjà disparaître une strate et ne permets pas déjà à l'esprit d'Altaïs d'aller mieux ? Bon, c'est pas trop le moment de vérifier ça, mais bon ^^

En tout cas, c'est vraiment avec ce passage-là que je me rends compte que, même si Altaïs faisait style au début, il était pas juste brisé physiquement, il allait pas bien du tout mentalement non plus, et sans Alex, c'est pas juste qu'il aurait été recapturé plus vite ou qu'il serait mort de ses blessures, il aurait probablement pas attendu trop longtemps pour mettre fin à ses jours, sa haine d'Elaran ne suffisant simplement pas à continuer vu tout ce qu'il avait subi ^^' On sent déjà au début qu'il allait pas bien hein, faut pas exagérer, mais c'est à ce point, avec la rétrospection, ça fait encore plus mal au coeur après coup pour lui ^^'

Bon, et bien sûr, après, Harald revient faire n'importe quoi. Bien sûr. Meilleur roi du monde. Mais en vrai, pour le coup, je comprends qu'il puisse déraper là, il aime vraiment sa femme, ça se sent, et vu qu'il est du genre à s'en prendre au compagnon d'Altaïs, il doit se dire que, logiquement, Altaïs doit être capable de faire pareil avec Adela. Bon, c'est pas le raisonnement le plus extraordinaire du monde, mais pour le coup, ça se comprend. Bon, après il se plante totalement et c'est Elaran le souci comme d'habitude, mais c'est pas le problème là. Normal qu'il pète un câble, même si pour lui, ça aurait été mieux qu'Altaïs accepte de se faire enchaîner, mais dans aucun monde ça passait quoi ^^'

Harald qui tente de s'en prendre à Alex par contre, c'est vraiment la pire idée du monde, c'est vraiment le truc pour faire perdre les pédales à Altaïs x) Et il dérape d'ailleurs totalement. Je me suis faut la réflexion, c'est la première fois qu'il utilise sa magie sous forme d'eau liquide, non ? Il faut tellement qu'il aille dans le sud pour lutter contre les sècheresses en fait ='D Bon, et plus sérieusement, clairement, faut pas l'embêter, parce qu'il rétame vraiment tout le monde, ça rappelle son combat contre les mercenaire, sauf que là il utilise sa magie x) Bon, il perd clairement le contrôle et va vers la pente dark choupette, mais bon ^^' L'épreuve dans le premier temple avait prévenu, il ne fait pas céder à dark choupette. Bon, Alex s'acharne à ramener pink choupette (tu sais pourquoi pink :p ), et c'est touchant de voir qu'à la fois, Altaïs veut pas le blesser, mais il en est à un point où ça ne suffit pas.

Mais bon, le pousser à bout, c'était visiblement la bonne chose à faire, vu que ça le pousse tellement à bout qu'il brise le sceau sur ses souvenirs ^^' Même si bon, c'est un peu violent comme méthode et pas très recommandé quoi ^^'
Mathilde Blue
Posté le 12/03/2023
Coucou Flammouille !

La première scène est vraiment un énorme pas en avant pour la guérison, alors ça ne règle pas tout évidemment, mais c’est la première fois qu’il envisage réellement de guérir de ce qu’il a vécu ! Et oui le fait d’en parler effrite la strate qu’il avait créé en le refoulant :) Mais c’est certain qu’au début, il était en ruines d’un point de vue psychologique et sans Alexander il aurait sans doute arrêter de lutter… Il a tellement évolué depuis <3

Ouais clairement Harald est en roue libre, maiiiiis ça fait sens dans son esprit que ce soit Altaïs qui s’en soit pris à Adela comme tu dis et comme il tient vraiment à son épouse… Dommage qu’il ne l’ait pas écoutée x) Mais donc logiquement s’en prendre à Alex était un juste retour des choses ^^’

Pour le fait qu’Altaïs utilise de l’eau liquide, il y fait plus ou moins appel quand le gamin tombe dans l’eau quand ils arrivent dans le Nord, mais pas de cette manière ! Mais il est très capable de l’utiliser, c’est juste que la glace c’est stylé :p

Mais oui clairement Harald était pas prêt à encaisser ce qu’il a engendré ^^’ Altaïs a complètement lâché prise (pour le meilleur et pour le pire j’ai envie de dire), et à cet instant même Alexander ne peut pas entièrement le ramener (non, je ne vois pas de quoi tu parles)…

Bisous bisous :p
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