La voiture brisa en mille morceaux la vitrine de la galerie des machines et fila sur le champ de Mars sous le regard médusé des soldats.
Fier, Armand zigzagua entre les troupes comme l’aurait fait un coureur automobile. Dimitri assis sur le rebord de la voiture, dos à la route et le fusil à la main, était paré à tirer en cas d’attaque. A l’arrière de la voiture, Hadrien et Bérénice frémissaient d’excitation. L’enfant se mit à bondir sur les fauteuils en cuir en s’écriant :
— Incroyable ! La Panhard est incroyable !
Charles, le petit frère de Héloïse, aurait payé cher pour être du voyage !
— Ils nous poursuivent ! le coupa Dimitri. Baissez la tête Bérénice, je vais essayer de les arrêter.
— Ralentis-les pour que je les sème ! cria Armand.
Bérénice baissa la tête, puis se retourna. Deux voitures et un omnibus, remplis à ras-bord de policiers et soldats, les avaient pris en chasse. Ils étaient si nombreux que certains se tenaient presque dans le vide, les mains accrochées aux rebords du véhicule. Icare volait autour d’eux pour leur faire obstacle. Les soldats le repoussaient de leur baïonnette avec crainte.
Armand braqua le volant à fond vers la droite. Dimitri mit en joue son pistolet et tira à plusieurs reprises. A chaque fois, les balles percèrent le pare-chocs de l’omnibus ou des voitures sans les ralentir pour autant. Un dernier tir et soudain, une voiture vira sur la gauche, percuta un lampadaire en essayant de dévier les tirs.
Le chauffeur de la seconde, voulant l’éviter, perdit l’axe de la route. Icare se posa sur son visage, l’aveuglant. La voiture plongea dans la Seine. De sa place, Bérénice se pencha vers les eaux du fleuve. Ses mains crispées sur la tôle de la Panhard, elle cria le nom d’Icare.
Comme un boulet de canon, Icare ressortit des eaux aux côtés des soldats. Il revint se poser sur l’épaule de sa maitresse :
— Bravo Icare ! fit fièrement Bérénice. Il ne reste plus que l’omnibus !
La Panhard longea le fleuve. Bérénice aperçut au loin le dôme des Invalides et les ouvriers qui, en équilibre sur leurs échelles, examinaient les dégâts. Une balle transperça le pare-chocs de la Panhard. Armand dévia le volant brutalement. Bérénice baissa la tête et attrapa celle de Hadrien pour le protéger. Armand revint sur la route, tandis que Dimitri tirait également. Ses tirs étaient hésitants, ils manquaient d’adresse.
— Il tire comme un pied ! s’écria Armand sans quitter des yeux la route.
Derrière eux, certains soldats brandissaient leur arme. D’autres essayaient de gravir le toit de l’omnibus pour mieux sauter sur la Panhard. Ils étaient si nombreux que le véhicule croulait sous leur poids.
— Je peux aider ? cria Bérénice à l’adresse de Dimitri.
— Vous savez tirer ? répondit-il, sceptique.
— Sans doute mieux que vous ! Donnez-moi votre pistolet. Icare, retournes-y !
Icare reprit son envol et s’agita autour du chauffeur de l’omnibus, le rendant fou de rage. Bérénice se releva, attrapa l’arme que lui tendait Dimitri, abasourdi. Elle s’assit sur le rebord de la voiture tandis que Dimitri, aux côtés de Hadrien, la tenait fermement pour l’empêcher de basculer.
Pour éviter le tir d’un soldat, Bérénice dévia son poids vers l’extérieur de la voiture. Dimitri l’aida à se redresser et Bérénice soupesa l’arme avant de la mettre en joue. Légère, elle se laissait facilement manier par une femme. Bérénice se tourna vers les soldats. Certains, amusés lui lançaient des remarques. Elle fronça les sourcils.
— Tellement prévisibles…, souffla-t-elle. Allons…messieurs, je suis d’humeur joueuse !
Une fois sûre de son coup, elle appuya sur la gâchette. La balle se logea directement dans l’un des pneus qui éclata brusquement. Le conducteur tenta de maintenir la trajectoire sans succès.
Dans un crissement terrible, le bus s’abattit sur la terrasse d’un café.
Bérénice s’assit aux côtés d’Armand et rendit son arme à Dimitri. Elle inspira un grand coup, alors qu’ils franchissaient un pont et rejoignaient l’autre rive de la Seine.
La conduite sportive d’Armand faisait gémir les pneus de la voiture.
— Où as-tu appris à conduire comme ça ? demanda Dimitri en lui donnant un coup de coude.
— Mon grand-frère ! Il tenait un garage !
— C’est comme ça que vous connaissez mon père ? l’interrogea Hadrien, en mâchouillant un bonbon dans sa bouche, penché vers l’avant.
— Honoré est connu parmi tous les ouvriers ! Où va-t-on ? C’est toi notre guide !
— Faubourg Saint-Antoine, bien sûr ! s’exclama Hadrien, toujours aussi rayonnant.
— Bien sûr, reprit Dimitri plus sombre.
Bérénice se tourna vers Dimitri en chuchotant :
— Un problème avec notre destination ?
— Le quartier le plus dangereux de Paris. Je me serai bien passé d’y faire un tour.
— Décontractez-vous ! souffla Bérénice avec amusement. Vous travaillez toute la journée avec ces mêmes ouvriers et vous avez peur d’aller chez eux. Armand, je crains que le sang de Dimitri ne soit trop noble pour vous ! reprit-elle plus fort.
Armand, le sourire aux lèvres lança :
— Dans le Faubourg Saint-Antoine habitent les ouvriers les plus vindicatifs, ceux qui pratiquent les métiers les plus durs. Tout effrayants qu’ils sont, ils ne font pas le poids face à ta tante, Dimitri !
Dimitri concéda cet argument à Armand. Ce dernier s’affirmait chaque jour un peu plus face à Dimitri et ce n’était pas pour lui déplaire.
— Quand je pense que je conduis une jeune fille de bonne famille dans ces quartiers effroyables et pestilentiels, marmonna Dimitri en scrutant le paysage.
— Vous parlez de moi ? demanda Bérénice. Je ne suis pas une fille de bonne famille.
La Panhard fila le long de la Seine, traversa la place de la Concorde, s’enfonça dans les ruelles du Châtelet et slaloma à travers les chemins alambiqués du Marais. Armand évitait les grandes avenues et fuyait les barrages de policiers qui se formaient ici et là dans les quartiers parisiens.
Arrivé à la Bastille, Armand délaissa l’immense rond-point qui se transformait en barricade. Chaises, tables, pare-cheminée, buffets et vieux outils s’entassaient pour empêcher les forces de l’ordre de passer.
La bataille ne saurait tarder.
— Arrêtez-vous ici ! s’exclama Hadrien en pointant du doigt une ruelle coincée entre deux immeubles en brique et en sautant de la voiture pour guider Armand.
Armand s’exécuta, cachant du mieux que possible la Panhard, l’un des joyaux de l’exposition, dans l’ombre d’un monticule de poubelles.
— Quel gâchis, gémit-il dans un dernier adieu à la voiture.
— Nous en referons une autre, répondit Dimitri dans un clin d’œil à Armand.
Tous sortirent et suivirent Hadrien avec confiance. Bérénice avait peine à croire que quelques mois plus tôt ce même garçon avait permis malgré lui sa rencontre avec les frères Coeurderoy.
Hadrien ouvrit la porte d’une arrière-boutique et les intima au silence. Des parfums délicieux, une chaleur étouffante, des pâtisseries et pains entassés sur un plan de travail : ils se trouvaient dans une boulangerie.
La tête à peine sortie de son four, le boulanger faillit les assommer de sa pelle, pris par surprise. Sans un mot, reconnaissant Hadrien, il leur indiqua une porte. Hadrien l’ouvrit et ils se retrouvèrent dans des toilettes.
— Qu’est-ce que cette drôle d’idée ? lança Bérénice.
— Attendez…articula Hadrien entre deux chouquettes avalées et volées sur le plan de travail.
Armand et Hadrien se penchèrent dans l’espace exigu et ils poussèrent les fausses toilettes sur le côté. Apparut un trou, laissant passer avec difficulté un homme moyen. Sans réfléchir, Hadrien s’y engouffra, suivi d’Armand. Bérénice échangea un regard avec Dimitri :
— Je ferme le groupe, siffla-t-il inflexible.
Bérénice haussa les épaules et plongea à son tour dans le trou. La traversée fut encore moins agréable que prévue. Elle rampait avec difficulté, soufflait fort, cherchait ses repères. Derrière elle, Dimitri patientait souvent. Bérénice retrouva la surface avec joie, aidée par Armand. Ils avaient atterri dans une cave.
— J’ai perdu tout sens de l’orientation, s’amusa Armand.
Ils montèrent tous les escaliers d’un immeuble, jusqu’à une terrasse. Sans hésitation, Hadrien sauta sur le toit d’un second immeuble, faisant chavirer des tuiles. Armand et Dimitri le talonnèrent. Bérénice grimpa, puis se figea, se rappelant soudainement l’aigle des Harcourt. Pourquoi la forçait-on à toujours prendre de la hauteur ?
— Vas-y ma grande, tu as vécu bien pire…s’encouragea-t-elle.
Bérénice inspira et posa ses pieds sur les tuiles en mimant les gestes de Dimitri, puis poursuivit sa lancée. Elle jura des noms d’oiseaux qui le firent pâlir. Avec sagesse, il se retint de lui faire une remarque. Avec le peu d’équilibre qu’elle avait, Bérénice traversa bon an mal an les toits parisiens. Une fois le pied à terre, elle soupira d’aise et ils reprirent leur route.
Hadrien les fit descendre deux étages et pénétrer un appartement. Ils traversèrent un trou béant dans le mur d’une chambre et pénétrèrent un second logement, sous le regard flegmatique des familles d’ouvriers. Dimitri et Bérénice découvraient un monde, là où Armand se révélait imperturbable :
— Les ouvriers utilisent souvent ces passages. Vous savez, quand une manifestation se déroule mal, il est bon de préparer une sortie de secours !
Bérénice se pencha à une fenêtre et aperçut un attroupement dans la cour intérieure.
— Oh il y a Héloïse ! Et Lysandre ! s’exclama-t-elle, toute fatigue évaporée.
Dimitri et Armand se penchèrent à la fenêtre : de façon incongrue étaient réunis autour d’une grande tablée des ouvriers, des soldats, Héloïse et Lysandre. La réunion était atypique. Habituellement, ouvriers et soldats se retrouvaient lors des manifestations, les uns s’opposant aux autres. Malgré l’animosité visible, tous étaient là pour Lysandre. Ces hommes représentaient les quatre coins de la France et croyaient en lui. Ils venaient se battre à leurs côtés.
Armand souffla :
— Regardez au centre. Voilà, Honoré.
— Qui est cet homme ? Pourquoi as-tu si confiance en lui ? s’enquit Dimitri.
— Je ne l’ai jamais rencontré, mais sa réputation le précède ! C’est l’une des têtes des ouvriers de Paris. Il travaille dans la métallurgie. Il est dans tous les syndicats qui défendent les ouvriers contre les grands patrons. Mon père me disait toujours que si jamais j’avais un souci sur Paris, je devais chercher Honoré.
Ils descendirent avec précipitation la cage d’escalier et Bérénice se jeta dans les bras de Héloïse en oubliant tout ce qui se trouvait autour d’elle. Dimitri fit une accolade à Lysandre qui se tenait fièrement debout, à l’aide d’une canne :
— Comment avez-vous fait pour rentrer dans Paris ? demanda Dimitri.
— Avec l'aide d’Honoré, lança Lysandre en se tournant vers l’un des ouvriers attablés. Il a eu l’idée folle et brillante de nous faire passer par les boucheries de la Villette, détestées et craintes des soldats. Réputées comme sales, nauséabondes et infectieuses, ils pensaient que jamais nous n’oserions passer par là ! Notre oncle ne cessera jamais de nous sous-estimer.
Dimitri et Bérénice se penchèrent pour scruter Honoré. Hadrien déjà installé sur ses genoux, l’homme dégageait une autorité naturelle. Bérénice se rappela les avis de recherche d’Edmond Hardi, le double journaliste d’Héloïse. Étrangement, cet homme avait les mêmes traits prononcés, les mêmes cheveux hirsutes, la même barbe soigneusement coupée et l’allure digne. Sa taille était imposante, ses épaules pareilles à celles d’un taureau. Bérénice figea son regard sur sa main, aussi épaisse qu’un melon. Elle s’était rarement sentie aussi intimidée que face à cet homme.
Une femme se tenait à ses côtés, essuyant ses mains sur son tablier. Elle attrapa Hadrien par une oreille et le traina de force à l’intérieur d’un des appartements.
Bérénice se retourna et enserra Héloïse en chuchotant :
— Héloïse, tu es sûre vraiment que l’on peut faire confiance à cet homme ?
— Certaine ! répondit-elle sur le même ton. Hadrien est un chapardeur. Son travail est de renseigner son père – et donc l’ensemble des ouvriers – sur les affaires politiques. Honoré déteste l’empereur et Harcourt. Je peux t’assurer que c’est l’homme qu’il nous faut !
Tandis que Bérénice écarquillait les yeux, Léopold Renan les rejoignit en s’exclamant de sa voix gargantuesque :
— Ahah ! Nos aventuriers ! Encore une fois vos exploits ont fait le tour de Paris !
Lysandre ajouta :
— Oui ! Nous avons entendu parler d’histoires invraisemblables !
— Ce n’est pas peu dire ! reprit Léopold avec son panache habituel, la serviette autour du cou rempli de taches de poulet en sauce. Tenez, prenez cela Bérénice, vous semblez avoir besoin d’un petit remontant. Et je déteste attaquer l’apéritif alors que les autres n’ont rien à grignoter.
Il offrit à Bérénice un verre de vin rouge et un morceau de viande qu’elle attaqua avec appétit. Ils se dirigèrent vers la table :
— Rocambolesque ! Ma chère Bérénice, on raconte que vous avez monté l’emblème des Harcourt et que vous l’avez terrassé à mains nues ! Ce n’est pas possible ! Nous devons absolument savoir la vérité.
Bérénice se rendit compte avec gêne que les ouvriers s’étaient en partie tus pour l’écouter. Des soldats tendaient également l’oreille. Dès son arrivée, elle avait perçu un gel dans les relations entre soldats et ouvriers. Tous soutenaient Lysandre, pourtant entre eux, des tensions demeuraient.
— Je confirme ! s’exclama Armand derrière elle. Vous auriez dû la voir. Impossible de deviner que cette femme a peur du vide !
— Mais comment l’avez-vous tué ? Et est-il vraiment mort ? fit un soldat, plein de curiosité.
— L’emblème serait actuellement inanimé, au ministère des Habiles. On ne sait pas s’il fonctionnera de nouveau, fit Lysandre, aux côtés d’Honoré toujours silencieux.
Tous deux scrutaient Bérénice. Elle lâcha :
— Je l’ignorai. Lorsque je suis ressortie de l’eau, l’emblème était en train de couler.
— Apparemment, Harcourt est au plus mal. Reclus chez lui, il ne s’est pas présenté à la convocation de l’empereur au Louvre. L’empereur est fou de rage, reprit un ouvrier.
— Mais si on détruit un emblème, on tue celui qui le possède, non ? s’enquit un second ouvrier.
— Encore une fois, je n’en sais rien, reprit Bérénice, embarrassée par tous ces regards sur elle. Je n’ai pas vraiment réfléchi…
— Vous êtes étrangement toujours à proximité de Harcourt ou de son maudit oiseau. Vous ne seriez pas une espionne par hasard ? la questionna un général.
Avant qu’elle n’ait pu répondre, la femme d’Honoré frappa un chiffon sur son tablier et prit une voix agacée :
— Laissez-moi cette petite respirer ! Vous l’étouffez avec vos questions !
Une énorme marmite dans les mains et chacun de ses nombreux enfants portant des couverts, elle se faufila à travers les soldats et ouvriers qui, pour la première fois, s’étaient rapprochés pour écouter le témoignage de Bérénice.
— Et je me porte garant de mademoiselle Savary ! Elle a été l’un de mes seuls alliés dans des moments bien sombres, fit Lysandre, un sourire chaleureux et complice aux lèvres.
— Nous nous portant tous garants, ajouta Héloïse, d’une fidélité à toute épreuve.
— Allez, à table ! Rangez-moi ce fourbi ! On mange !
— Quand je dis que ce n’est pas moi qui dirige ici, personne ne me croit ! A présent, vous en avez la preuve ! gronda Honoré en retirant son épais tablier en cuir et en attrapant les assiettes.
Il reprit à l’adresse de Bérénice de sa voix puissante :
— Excusez-nous, jeune fille. Vos exploits aux Invalides nous rendent méfiants. Vous êtes extrêmement chanceuse…
Bérénice retint un rire. Elle, chanceuse ? La bonne affaire. Elle s’assit aux côtés d’Héloïse et lui chuchota en lui glissant la lettre d’Alexandre :
— Un petit cadeau. Il n’a pas renoncé à toi. Réponds-lui, mais sois prudente.
Héloïse prit la lettre en y jetant un regard mélancolique. Léopold s’installa en face d’elles, ignorant le visage baissé d’Héloïse et ses pommettes rosées.
Bérénice songea un instant qu’au moment où Honoré manifestait sa méfiance à son égard, elle jouait les entremetteuses entre le fils Harcourt et Héloïse.
Dimitri glissa ses jambes entre la table et le banc et accrocha sa serviette à son cou. Autour d’eux, ouvriers et soldats attaquèrent le repas sans cérémonial. Lysandre conversait avec Héloïse, Honoré et Dimitri. Entre deux bouchées, ce dernier expliqua :
— Je n’ai aucune garantie que cet emblème fonctionnera. Mais j’ai le « squelette » entre les mains. Il ne me reste plus qu’à lui donner une enveloppe corporelle et une âme…
— Le plus difficile reste donc à faire ? le coupa Héloïse.
— En effet, souffla Dimitri entre ses dents. Le plus dur reste à faire et rien n’est assuré, mais je suis plus près du but que n’importe qui en quatre cents ans !
— Nous pourrons vous aider à bâtir cette machine, lança Honoré d’un air entendu. Nous manquons de votre science pour vous aider mais nous avons du métal, des outils et des bras solides. Nous serons vos mains pour construire le corps.
Honoré ne laissa pas Dimitri refuser son aide. Pourtant, il en crevait d’envie. Bérénice pouvait voir entre les deux hommes une connivence : ils ne s’appréciaient pas, mais chacun savait l’autre nécessaire pour que Lysandre remporte la guerre. D’un côté, Dimitri se tenait sur ses gardes face aux ouvriers, naturellement opposés aux empereurs. De l’autre, les paroles de Honoré révélaient la méfiance qu’avaient le peuple pour les Habiles.
— Plus que quatre jours avec l’arrivée des troupes de Harcourt…toute aide sera la bienvenue ! Et le peuple aimera voir notre alliance, reprit Héloïse.
— De toute façon, Decas et Harcourt ne feront rien tant que leurs troupes n’arriveront à Paris. Ils ont trop peur de se compromettre auprès de l’empereur, fit Léopold, une fois son assiette achevée.
Il se frotta la panse d’un air satisfait et reprit :
— Bérénice, sans le vouloir, vous nous avez au moins accordé du répit.
Quant à la réunion, je ne sais pas trop qu’en penser : d’un côté, elle est sympa, et de l’autre, on sent qu’il y a deux groupes qui ne s’apprécient pas, et ça ne présage rien de bon pour le jour où ils n’auront plus besoin l’un de l’autre.
Concernant Bérénice, ce n’est pas à travers sa formation de géographe qu’elle a appris à se battre (en maniant une dague ou une arme à feu). C’est peu habituel pour une femme de son époque de savoir faire ce genre de chose alors qu’elle n’est pas une espionne. Son entourage a trop l’air de trouver ça normal et je pense qu’il faudrait que tu parles d’un élément de son passé qui explique comment et pourquoi elle a développé ces aptitudes. À mes yeux, son statut d’héroïne n’est pas une justification suffisante.
Coquilles et remarques :
— Dimitri assis sur le rebord de la voiture, dos à la route et le fusil à la main, était paré à tirer en cas d’attaque. A l’arrière de la voiture, Hadrien et Bérénice [Il faudrait placer « assis sur le rebord de la voiture » entre deux virgules / l’expression « paré à tirer » me laisse dubitative ; ça s’emploie dans la marine dans les dialogues entre celui qui donne les ordres et ceux qui les exécutent / À l’arrière.]
— Charles, le petit frère de Héloïse, aurait payé cher pour être du voyage ! [d’Héloïse]
— Ils nous poursuivent ! le coupa Dimitri. [Il ne lui coupe pas la parole. En plus, il ne faut pas mettre de COD dans les incises. Je propose « s’écria Dimitri ».]
— Deux voitures et un omnibus, remplis à ras-bord de policiers et soldats [à ras bord ; sans trait d’union]
— A chaque fois, les balles percèrent le pare-chocs [À]
— Icare se posa sur son visage, l’aveuglant [« pour l’aveugler » serait plus naturel, plus fluide]
— Bravo Icare ! fit fièrement Bérénice. [Virgule avant « Icare ».]
— Bérénice baissa la tête et attrapa celle de Hadrien pour le protéger. [Habituellement, le « H » du prénom Hadrien est considéré comme « muet » et non « aspiré », ce qui appelle l’élision. Quel que soit ton choix, il faudra faire la même chose partout.]
— Pour éviter le tir d’un soldat, Bérénice dévia son poids / Dimitri l’aida à se redresser et Bérénice soupesa l’arme / Bérénice se tourna vers les soldats. Certains, amusés lui lançaient des remarques. [Il faudrait placer « amusés » entre deux virgules. / Tu répètes trop le prénom Bérénice. Je propose : « et elle soupesa l’arme ».]
— Tellement prévisibles…, souffla-t-elle. [Normalement, on ne met pas la virgule après les points de suspension.]
— Une fois sûre de son coup, elle appuya sur la gâchette. [Emploi abusif. On appuie sur la détente d’une arme à feu. La gâchette est une pièce interne. Voir ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A2chette.]
— Le conducteur tenta de maintenir la trajectoire sans succès. [J’ajouterais une virgule avant « sans succès ».]
— Mon grand-frère ! Il tenait un garage ! [grand frère ; sans trait d’union]
— C’est comme ça que vous connaissez mon père ? l’interrogea Hadrien, en mâchouillant un bonbon dans sa bouche, penché vers l’avant. [Le verbe « interroger » n’est pas adéquat pour les incises, parce qu’il appelle un COD autre que la citation. Je propose « demanda Hadrien », « questionna Hadrien » ou « s’enquit Hadrien ». / Pas de virgule avant « en ». / La mention « dans sa bouche » me semble superflue.]
— Bien sûr, reprit Dimitri plus sombre. [Virgule après « Dimitri ».]
— Le quartier le plus dangereux de Paris. Je me serai bien passé d’y faire un tour. [Je me serais ; conditionnel présent]
— Armand, le sourire aux lèvres lança [Virgule avant « lança ».]
— Dans le Faubourg Saint-Antoine habitent les ouvriers les plus vindicatifs [le faubourg Saint-Antoine (mais la rue du Faubourg-Saint-Antoine)]
— Ce dernier s’affirmait chaque jour un peu plus face à Dimitri et ce n’était pas pour lui déplaire. [Comme Rachael l’a relevé, on ne comprend pas bien qui est « lui » dans « lui déplaire ».]
— Armand s’exécuta, cachant du mieux que possible la Panhard [Tu as fait un mélange d’expressions : « le mieux possible », « du mieux qu’il pouvait » ou « autant que possible »]
— Bérénice avait peine à croire que quelques mois plus tôt ce même garçon avait permis [Virgule après « plus tôt ».]
— Hadrien ouvrit la porte d’une arrière-boutique et les intima au silence [leur intima le silence]
— Attendez…articula Hadrien entre deux chouquettes avalées et volées sur le plan de travail. [Là, on dirait qu’elles ont été avalées avant d’être volées ; comme elles n’ont pas non plus été avalées sur le plan de travail, je propose « entre deux bouchées de chouquettes volées sur le plan de travail », même si elles sont assez petites pour que chacune fasse une seule bouchée.]
— Apparut un trou, laissant passer avec difficulté un homme moyen. [Le participe présent se prête mal au contexte. Je propose « à peine suffisant pour laisser passer un homme de corpulence moyenne ».]
— Je ferme le groupe, siffla-t-il inflexible. [Virgule avant « inflexible ».]
— La traversée fut encore moins agréable que prévue [que prévu ; « prévu » ne se rapporte pas à « La traversée ».]
— Vas-y ma grande, tu as vécu bien pire…s’encouragea-t-elle. [Si elle pense cette phrase sans la dire, il faudrait la mettre entre guillemets. / Virgule avant « ma grande ».]
— Avec sagesse, il se retint de lui faire une remarque. Avec le peu d’équilibre qu’elle avait, Bérénice traversa bon an mal an les toits parisiens. [Deux phrases de suite commencent par « Avec ». Il faudrait en modifier une des deux.]
— Hadrien les fit descendre deux étages et pénétrer un appartement. Ils traversèrent un trou béant dans le mur d’une chambre et pénétrèrent un second logement [dans les deux cas, il faut dire « pénétrer/pénétrèrent dans » ; pour éviter la répétition, je propose « s’introduisirent dans »]
— Oh il y a Héloïse ! Et Lysandre ! s’exclama-t-elle, toute fatigue évaporée. [Virgule après « Oh ».]
— La réunion était atypique. [Je propose plutôt « étonnante », « singulière » ou « insolite ».]
— Pourquoi as-tu si confiance en lui ? s’enquit Dimitri [à part avec des expressions comme avoir faim, soif, mal, chaud, froid, on ne met pas d’adverbe devant un nom. Je propose « une telle confiance en lui ».]
— Il est dans tous les syndicats qui défendent les ouvriers contre les grands patrons. [Je propose « Il fait partie de ».]
— et Bérénice se jeta dans les bras de Héloïse en oubliant [d’Héloïse]
— Dimitri fit une accolade à Lysandre qui se tenait fièrement debout, à l’aide d’une canne [Je placerais la virgule avant « qui » plutôt qu’avant « à l’aide ».]
— Réputées comme sales, nauséabondes et infectieuses, ils pensaient que jamais nous n’oserions passer par là ! [Faute de syntaxe : l’apposition devrait se rapporter au sujet du verbe conjugué. Il faut reformuler la phrase.]
— Héloïse, tu es sûre vraiment que l’on peut faire confiance à cet homme ? [tu es vraiment sure (selon la graphie rectifiée) ; il faut placer l’adverbe avant l’adjectif]
— Léopold Renan les rejoignit en s’exclamant de sa voix gargantuesque [« gargantuesque » ne se dit pas pour une voix ; je propose « sa voix tonitruante » ou « sa voix de stentor ».]
— la serviette autour du cou rempli de taches de poulet en sauce [remplie]
— Tenez, prenez cela Bérénice, vous semblez avoir besoin d’un petit remontant. [Virgule avant « Bérénice ».]
— Dès son arrivée, elle avait perçu un gel dans les relations entre soldats et ouvriers [« un gel » m’a fait tiquer ; des tensions ? des crispations ? des dissensions ?]
— On ne sait pas s’il fonctionnera de nouveau, fit Lysandre, aux côtés d’Honoré toujours silencieux. [Je placerais la virgule après « Honoré », pas après « Lysandre ».]
— Je l’ignorai. Lorsque je suis ressortie de l’eau [Je l’ignorais ; imparfait]
— Vous ne seriez pas une espionne par hasard ? la questionna un général. [Virgule avant « par hasard » / « questionna » ; pas de COD dans une incise.]
— Avant qu’elle n’ait pu répondre, la femme d’Honoré frappa [qu’elle ait ; le « ne » explétif n’apporte rien]
— Nous nous portant tous garants, ajouta Héloïse [Nous nous portons]
— A présent, vous en avez la preuve ! [À]
— Il reprit à l’adresse de Bérénice de sa voix puissante [Il vaudrait mieux inverser les compléments : « Il reprit de sa voix puissante à l’adresse de Bérénice ».]
— Elle, chanceuse ? La bonne affaire. [Point d’exclamation.]
— Autour d’eux, ouvriers et soldats attaquèrent le repas sans cérémonial [sans cérémonie]
— Le plus difficile reste donc à faire ? le coupa Héloïse [« interjeta Héloïse », « jeta Héloïse » ou « coupa Héloïse » (sans COD).]
— Nous manquons de votre science pour vous aider mais nous avons du métal [Virgule avant « mais ».]
— Honoré ne laissa pas Dimitri refuser son aide. Pourtant, il en crevait d’envie. [Ça manque de clarté, et « crevait » détonne dans le style ambiant (par sa vulgarité). Je propose « Pourtant, celui-ci en mourait d’envie » (si tu veux bien dire que Dimitri a envie de refuser).]
— De l’autre, les paroles de Honoré révélaient la méfiance qu’avaient le peuple pour les Habiles [d’Honoré / qu’avait le peuple]
— Plus que quatre jours avec l’arrivée des troupes de Harcourt…[avant l’arrivée]
— De toute façon, Decas et Harcourt ne feront rien tant que leurs troupes n’arriveront à Paris [tant que leurs troupes ne seront pas arrivées à Paris.]
La deuxième partie est bienvenue car elle apporte une paue dans l'action et nous aide à enfin visualiser la coalition qui se monte pour soutenir Lysandre.
Comme je ne peux pas m'empêcher de lire les commentaires des autres plumes (je suis une sale curieuse ha ha !), je me rends compte que je ne suis pas du tout partie dans la même direction que Peneplop concernant la dimension romance. Moi ça fait un moment que j'attends quelque chose entre Dimitri et Bérénice qui forment un duo si touchant <3 mais pareil, je me trompe peut-être complètement xD Bon ça n'avait aucun rapport avec ce chapitre, mais voilà, il fallait que je le dise hi hi
Détails
et ce n’était pas pour lui déplaire : pour déplaire à qui ?
La bataille ne saurait tarder : entre qui et qui, exactement ? comme il y a trois forces en présence, ça ne me parait pas évident, ni d’ailleurs le fait que tout d’un coup, on découvre une bataille… je pense qu’il faudrait qu’on sache plus tôt où en sont les forces en présence, ça motiverait grandement les péripéties des chapitres précédents.
et les intima au silence : leur intima le silence
entre deux chouquettes avalées et volées : elles sont volées avant d’être avalées
un homme moyen : de taille moyenne ? de corpulence moyenne ?
et pénétrer un appartement : et pénétrer dans un appartement
repet : pénétrer un appartement.(…) et pénétrèrent un second logement,
C’est l’une des têtes des ouvriers de Paris : bizarre cette tournure
la serviette autour du cou rempli de taches de poulet : remplie
elle avait perçu un gel dans les relations entre soldats et ouvriers : un gel ce serait un refroidissement, non ? là c’est un état stable de semi hostilité. Une tension ?
Nous nous portant tous garants : portons
Elle s’assit aux côtés d’Héloïse : tu dis quelquefois « d’Héloïse » et d’autres fois « de Héloïse ». Il faut harmoniser, c’est l’un ou l’autre (les deux sont possibles). Même chose pour Honoré (quelquefois « d’ », d’autres « de »)
Pourtant, il en crevait d’envie. : pas très clair ici, c’est Honoré qui crève d’envie que Dimitri refuse ? en général on crève d’envie de faire quelque chose, pas que quelqu’un d’autre fasse quelque chose.
Decas et Harcourt ne feront rien tant que leurs troupes n’arriveront à Paris : il manque un truc ici. N’arriveront pas ? ne seront pas arrivées ?
Plus que quatre jours avec l’arrivée des troupes de Harcourt : avant l’arrivée ?
Deux petites coquilles :
Il leur intima le silence
Plus que quatre jours avant l'arrivée
Tant que leurs troupes ne seront pas arrivées à Paris
A bientôt pour la suite !
Petit chapitre sympathique avant la grande bataille! J'ai beaucoup aimé la scène de la poursuite, notamment l'aspect comique et la répartition des rôles entre chacun: on sent que la complicité a vraiment grandi dans le temps qu'ils ont passé tous les trois!
Petites remarques de détail:
"entre deux chouquettes avalées et volées sur le plan de travail": logiquement ce ne serait pas plutôt volées puis avalées?
"Je l'ignorai": j'ai l'impression que l'imparfait serait plus indiqué "ignorais"
"nous nous portant tous garants": petite coquille "portons".
Voili voilou hâte de lire la suite ;)