Chapitre 3

Après une bonne nuit de sommeil, Alexie se leva et descendit dans la pièce principale de l’appartement. Les garçons l’attendaient, l’un une tasse de café à la main, l’autre plongé dans un journal quotidien. La jeune fille avait encore du mal à les reconnaître. Ils faisaient environ la même taille, leurs cheveux étaient du même brun tirant sur le chocolat. Leurs yeux, verts, pétillaient avec la même joie. 

Alors qu’elle s’approchait d’eux, ils ne l’avaient pas entendue arriver, elle put les détailler de plus près. Celui qui lisait le journal avait les sourcils plus broussailleux. Et encore, il fallait être de près pour le remarquer. Le jumeau à la tasse de café remarqua le regard d’Alexie et sourit.

_ Pour nous différencier, soit tu regardes nos abdos, évidemment j’en ai plus que mon frère. Sinon Tyméo a le nez plus long que moi, et les yeux plus clairs. Si ça peut aider.

L’intéressé releva les yeux du journal et fit un clin d’oeil à Alexie.

_ Bonjour beauté, tu as bien dormi ?

_ Oui vraiment, et ça faisait longtemps que je n’avais pas fait une si bonne nuit. Il est quelle heure d’ailleurs ?

Mathéo regarda son poignet. Alexie ne put s’empêcher de remarquer la montre de luxe que portait le jeune homme.

_ Eh bien, Belle au bois dormant, il est onze heures et quart.

_ Quoi ?

Alexie s’affola. Elle avait vraiment dormi longtemps.

_ C’est le décalage horaire, miss. Tu veux quoi pour ton petit déj ?

_ Euh Tim, je viens de dire qu’il est onze heures passées…

_ Et alors ? C’est dimanche, on n’a rien à faire aujourd’hui.

Tyméo se tourna vers Alexie.

_ Hein, tu n’as rien à faire aujourd’hui ?

_ Et bien je voulais visiter un peu Manhattan, mais je ne suis pas pressée.

Alexie se détendit. C’était dimanche, pas de quoi paniquer à cause d’une grasse matinée. Elle s’installa autour de la table haute typiquement américaine et, avec un grand sourire, demanda :

_ Je voudrai un café avec un sucre s’il vous plaît.

Cela fit sourire les deux garçons qui se mirent à la disposition de la jeune fille en lui servant sa commande. Pendant qu’ils lui préparaient son café, Alexie prit le journal, curieuse de découvrir un quotidien américain. En première de couverture, un article sur le climat semblait évoquer le réchauffement climatique et un sommet qui aurait bientôt lieu dans la ville. On pouvait voir aussi les résultats des Knicks, l’équipe de NBA de New York. Et en bas de la page, une photo attira l’attention d’Alexie. C’était une photo de Caroline, la jeune femme qu’elle avait rencontrée lors du covoiturage puis dans l’avion juste après. Les quelques lignes en dessous expliquaient vaguement une agression. Alexie se rendit à la page indiquée pour lire l’article entier. Elle n’eut pas trop de mal à traduire l’article de faits divers :

“Ce matin, aux alentours de minuit vingt, deux jeunes femmes ont été retrouvées poignardées dans une ruelle de Brooklyn. L’une est d’origine française et est hôtesse de l’air, l’autre est franco-américaine et travaille chez MetLife dans les assurances. Elles ont été hospitalisées au Mount Sinai Hospital où on leur a procuré les meilleurs soins possibles. La française Caroline Dubreuil est dans un état critique. L’autre jeune femme a succombé à ses blessures et est décédée à quatre heures trente-deux…”

La suite de l’article parlait du commencement de l’enquête, mais apparemment la police n’avait pas encore voulu donner beaucoup de détails. Alexie avait la main plaquée sur la bouche. Alors que Mathéo déposait sa tasse de café sur la table, il lui demanda, inquiet :

_ Qu’est-ce qu’il y a Alexie ?

La jeune fille détacha ses yeux du journal et regarda les jumeaux devant elle. Son regard était empli de tristesse et de peur.

_ Une fille que j’ai rencontrée hier dans l’avion… Elle s’est faite agresser dans la nuit, ici, à New York.

Tyméo qui essuyait la vaisselle, fit tomber le verre qu’il tenait à la main. Au contact du sol, le verre se brisa dans un bruit sourd. Alexie sursauta.

_ Tim, qu’est-ce qu’il y a ?

Mathéo aida son frère à ramasser les morceaux de verre.

_ Rien, rien, j’étais dans mes pensées, désolé. Je dois aller faire un tour en ville, des choses à régler.

Il reposa son torchon et se dirigea vers la porte. Il mit son manteau et se retourna vers son frère et leur invitée. Son air étrange avait disparu, il affichait à nouveau son sourire serein. 

_ Pas de bêtises tous les deux. On se retrouve en ville.

La porte se ferma derrière lui et Alexie, surprise, se retourna vers Mathéo.

_ J’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas ?

_ Non, pas du tout. Ça lui arrive parfois d’être dans ses pensées et puis paf, maladresse il casse un verre.

Mathéo rit avant de poursuivre.

_ Je te laisse boire ton café et te préparer. Si tu as besoin de quoique ce soit n’hésite pas, je serai au bureau, j’ai des choses à régler moi aussi. Quand tu seras prête on sortira, que je te fasse visiter.

Avec un clin d’oeil, le jeune homme prit le journal posé sur la table et monta l’escalier. Alexie entendit une porte se fermer à clé. Elle pensa tout haut :

_ Pourquoi s’enferme-t-il à clé ?

Puis, sans prêter plus attention à cela, elle prit son café, le but d’une traite et monta se doucher. Une serviette sur la tête, elle retourna dans sa chambre pour allumer son téléphone. Elle avait encore quelques appels et messages de ses parents. Elle se promit de les appeler rapidement. 

***