Trois pour régner, six pour les servir, une pour les protéger toutes.
Proverbe, origine inconnue
Comme il était navrant de voir combien un simple nom pouvait changer le regard qu'on posait sur quelqu'un. Avant que le prêcheur n'amène l'attention de la foule sur lui, il n'était qu'un adolescent banal, certes avec des vêtements bien coupés mais sans plus. Sauf à l'examiner avec attention, on aurait jamais pu deviner son ascendance.
Mais dès que le nom Mesric fut mentionné et que ses voisins prirent le temps de l'observer assez pour remarquer le symbole sur sa veste, ils eurent un mouvement de recul. Sa réponse en elle-même n'avait eu aucune importance, les images parlaient d'elles mêmes.
Résigné, il s'avança vers le prêcheur d'un pas lent, son cœur se serrant de voir la foule s'écarter devant lui. Finalement, ici ou au palais cela ne changeait pas grand-chose, même si ce n’était pas pour la même raison. Il regretta de s'être laissé aller à s'aventurer en dehors des murailles de la place forte.
—Comment puis-je vous appeler jeune seigneur ?
Théo planta son regard dans celui du prêcheur.
—Je ne suis pas un seigneur. Alors appelez-moi comme vous voulez Ewen, énonça-t-il d'une voix calme.
Sa réponse sembla déconcerter l'homme. Pour la première fois depuis le début de son discours, il perçut une lueur de malaise dans le regard de l'homme. Théo se demanda jusqu'à quel point sa présence et sa réponse mettaient à mal les plans de l'homme.
—Vous avez une jolie cape commenta t-il.
—Merci, un cadeau de mon père qui le tenait lui-même de son père. Mais je pense que vous comprendrez que personne ici ne souhaite nous entendre parler chiffons.
—Vous êtes bien présomptueux de parler au nom de toutes les personnes présentes.
—Je pense qu'il me pardonneront. Comme moi ils veulent des réponses.
Théo se tendit en entendant des approbations derrières lui. Visiblement il n'allait pas pouvoir s'en sortir comme ça. Le jeune homme chercha avec une rapidité proche de la panique une idée pour pouvoir se dégager, sans en trouver. S'il venait à se retrouver en difficulté, pris dans un mouvement de foule, et que cela parvenait aux oreilles de sa mère, serait le cadet de ses soucis.
Cependant, pour une fois, le destin semblait décider à l'aider, même s'il le fit avec une certaine ironie.
—Moi, personnellement, je vous trouve bien présomptueux de penser que cet idiot impotent pourra vous apporter la moindre réponse
Cette remarque, venue du ciel fit sursauter plusieurs personnes autour du jeune homme. Pour sa part, Théo qui avait parfaitement identifié le propriétaire de cette voix grinça des dents. Peut-être que finalement sa mère n'aurait pas été une trop mauvaise option. Au bout de quelques secondes à souhaiter que cette situation ne soit qu'un cauchemar, il leva la tête, résigné.
La silhouette d'un homme se découpait à contre-jour, ombre vivante sur la clarté du ciel. Assis au bord du toit, il contemplait de haut les hommes et femmes rassemblées. Théo pouvait voir d'ici son sourire.
—Si tu veux m'insulter Saël, pourrais-tu au moins le courage de le faire depuis le sol ?
—Mais avec plaisir cousin.
La seconde suivante, il se jeta dans le vide.
Théo entendit quelqu'un hurler dans foule. Il ne pouvait en vouloir à cette personne tant la scène était impressionnante. Mais il ne chercha pas à intervenir, d'une part parce que l'idée que son cousin s'écrase au sol était plus que séduisante, et d'autre part parce qu'il savait que Saël n'avait pas besoin d'aide.
Comme pour lui donner raison, à l'instant où ce qui était une fanfaronnade allait se transformer en tragédie, les ombres prirent vie. Elles se renforcèrent, se densifièrent, jusqu'à paraître plus vivantes que beaucoup des personnes présentes. Avec la douceur d'une mère, elles saisirent Saël au niveau de la taille, s'insinuant sous ses vêtements jusqu'à l'envelopper totalement, stoppant sa chute avant de le déposer avec douceur sur le sol. Puis, comme de véritables serpents, elles s'enroulèrent autour de son torse et de ses épaules.
—Suis-je assez proche maintenant cousin ? demanda-t-il
Par les oiseaux, que Théo pouvait le détester. Le voir devant lui, c'était revoir des années d'humiliation, d'insultes et de coups bas. C'était l'entendre le traiter de moins que rien régulièrement depuis ses cinq ans.
—Cela dépend. Mais vu la taille de ton ego, toi, tu dois te sentir à l'étroit.
Le gris des yeux de Saël, si semblables au sien, prit une teinte acier. Théo sut qu'il ne devait pas pousser trop loin s'il ne voulait pas regagner le palais sur une civière. A cet instant, Ewen sembla vouloir reprendre le contrôle de la discussion.
—Je suis ravi de vous rencontrer également, seigneur. Puis-,je avoir votre nom ?
—Je suis Saël Mesric, et pour quelques semaines encore je suis le cousin de ce sombre imbécile.
—Pour quelques semaines encore ? releva Ewen.
Un sourire purement prédateur étira les lèvres de Saël. Théo sut à cet instant qu'il avait emmené Ewen juste là où il le voulait.
—Oh vous n'êtes pas au courant ? fit-il mine de s'étonner.
—Non mais dites moi, répondit Exan qui semblait avoir complètement oblitéré son sujet de départ.
Théo devait admettre que Saël était bon orateur. S'il n'affichait pas ouvertement son don de contrôle des ombres, on aurait vraiment pu croire qu'il avait un potentiel en rapport avec le contrôle mental. Mais les lois de la magie étaient claires : le potentiel est l'expression de la personnalité. Une fois éveillé, il ne donnait qu'un pouvoir. Le don des mots de son cousin était parfaitement naturel et il ne se privait pas de l'utiliser pour rabaisser son cousin.
—Mais c'est très simple. Théo et moi avons atteint nos seize ans cette année. Nous allons donc, comme tous ceux de notre âge, passer la cérémonie du nom.
—Mais vous possédez déjà un nom, le coupa Ewen.
Le regard que lui adressa le jeune homme aurait suffi à faire geler les enfers. Quand il était lancé, Saël détestait plus que tout être interrompu.
—Vous prétendez connaître beaucoup de choses prêcheur, mais cela rend vos lacunes d'autant plus criantes. Que savez-vous de la cérémonie ?
—Que tous les adolescents dont l'existence est enregistrée doivent la passer à seize ans. Grâce à un processus dont j'ignore tout, la Mère Magie détermine alors qui sont les méritants et leur accorde alors le droit de porter le nom d'une famille. Lorsqu'ils acquièrent ce nom, celui-ci éveille le potentiel qui dormait au fond d'eux.
—Effectivement, voici la version des personnes du peuple. Mais il y a un adage qui circule au sein des membres des gens : triomphe le méritant, confirme le bon sang, perd le faible. Le méritant qui n'a pas de nom en gagne un, le fort qui possède déjà un nom par sa naissance le garde. Mais le faible... Celui qui possède un nom par son sang, mais n'est ni méritant ni fort... Lui... Il perd tout : nom, pouvoir, famille, rang social..
—Mais ça n'est qu'une légende !
—Oh non. Ce n'est pas une légende. Cela arrive de temps à autre, même si c'est moins fréquent dans la zone franche. D'ici quelques semaines, cela sera à Théo de subir cette infamie. Il débarrassera enfin la gens Mesric de la souillure qu'il est, de la honte que ses échecs a apporté à ses proches.
Théo perdit contact avec la réalité, alors que son cœur s’accélérait et que son sang battait fort à ses oreilles. La douleur enfla dans son dos et il dût serrer les dents pour ne pas gémir. On était en train d'exposer sa vie devant une foule d'inconnue, de montrer la honte qu'était son existence... Le pire dans tout ça était sans doute qu'il ne pouvait rien faire. Les ombres autour de corps de Saël se mouvaient peut-être avec une certaine langueur, mais s'il faisait un geste déplacé, il savait qu'elles pouvaient fondre sur lui avec la rapidité et la force d'un cheval au galop.
—Mais pourquoi retirer à quelqu'un ce nom ?
—Faiblesse du corps... Faiblesse de l'esprit... Ou alors absence de potentiel. Mon cousin réunit les trois. »
Lorsque Saël lâcha la bombe, un murmure horrifié parcourut les personnes présentes. Le potentiel était le plus beau cadeau fait à l'homme, un don de la magie elle-même. Qu'il reste endormi ou qu'il soit éveillé grâce à un nom, il était le ciment de l'âme humaine. Dire à quelqu'un qu'il n'avait aucun potentiel, c'était lui jeter à la figure qu'il n'était personne, un oublié, un maudit par la magie.
Ne supportant pas d'être sous le feu des regards, Théo commença à reculer. Il devait partir de là. Il devait partir, tout de suite, avant que la honte ou une crise ne le fasse s'effondrer. Les joues rouges de hontes, il salua à mi-voix Ewen et fendit la foule à la recherche d'une issue. Les gens s'écartèrent de lui comme s'il était malade et contagieux. Lorsque les murmures enflèrent encore, il se mit à courir, fuyant cette intersection de la rue des bouchers comme s'il avait le diable aux trousses.
— Pas étonnant que son père ait préféré mourir avant sa naissance. Il devait être voyant et a voulu s'épargner la honte d'être associé à quelqu'un comme lui.
Cette dernière attaque gratuite lancée par Saël lui transperça le cœur. Serrant les poings pour ne pas réagir, il se contenta de disparaître, se fondant dans la foule du marché. Mais au fond de lui, il se haïssait de ne pas avoir été capable de réagir.
Sa réponse en elle-même n'avait eu aucune importance, les images parlaient d'elles mêmes -> répétition elles-mêmes
Alors appelez-moi comme vous voulez Ewen -> virgule avant Ewen
—Vous avez une jolie cape commenta t-il. -> virgule avant commenta + au début je n'ai pas compris qui disait cette phrase, la dernière personne mentionné avant l'incise étant le prêcheur, il m'a semblé ensuite que c'était Théo mais je ne suis même pas sûre
Comme moi ils veulent des réponses. -> virgule avec moi
S'il venait à se retrouver en difficulté, pris dans un mouvement de foule, et que cela parvenait aux oreilles de sa mère, serait le cadet de ses soucis. -> il y a un problème de syntaxe ici, je ne comprends pas le sens de la phrase, qu'est-ce qui serait le cadet de ses soucis ?
Pour sa part, Théo qui avait parfaitement identifié le propriétaire de cette voix grinça des dents. -> virgule avant qui et après voix
—Mais avec plaisir cousin. -> virgule avant cousin
tout de suite, avant que la honte ou une crise ne le fasse s'effondrer. Les joues rouges de hontes,-> répétition de honte
Voilà :3
A très vite j'espère.