Chapitre 3 : Pendentif

– Tu es réveillée, alors ? demanda-t-il.

Elle le regarda, voulant savoir à quoi l’homme qui l’avait sauvée ressemblait. Il avait des cheveux gris en bataille et des yeux semblables à deux profonds trous noirs aspirant tout. Il lui faisait peur, ses mains tremblaient légèrement. Il y avait quelque chose dans cet homme qui l’impressionnait. Elle joignit les mains sur sa poitrine tandis qu’il la regardait de haut en bas. Elle avait la gorge nouée et ne pouvait pas parler. L’homme baissa la tête pour la regarder dans les yeux.

– Ton nom, dit-il.

Elle ne bougea pas, ne dit rien. Elle se mordit la lèvre inférieure.

– Donne-moi ton nom.

– Je… Je ne sais pas, je ne…, commença-t-elle d’une voix rauque.

À la manière dont l’homme le regardait, elle n’était pas sûre qu’il l’avait entendue. Elle répéta d’une voix plus forte et qu’elle espérait moins tremblante.

– Je n’ai pas de nom. Ou alors je ne m'en souviens pas.

L’homme la considéra pendant un instant qui lui parut une éternité.

– On t’en trouvera un plus tard. 

“Quoi ? Mais ça ne pose pas de problème que je n’ai pas de mémoire ? Et il n’y a personne pour m’expliquer ce qui se passe, où je suis ?”

– Prends ça, ordonna l’homme.

– Pardon ?

Il lui tendit une chaîne en argent avec un pendentif bleu au bout.

– Et à quoi cela va-t-il me servir ? demanda-t-elle d’une petite voix.

L’homme l’ignora et lui tourna le dos. Elle fronça les sourcils et, remarquant qu’elle avait toujours le livre dans les mains, elle le reposa sur le bureau avec le mystérieux pendentif.

– Je t'expliquerai peut-être plus tard. Pour l'instant, contente-toi d’attendre ici.

Frustrée, elle regarda l’homme partir. Il s’arrêta seulement un instant pour lui souffler :

– Au fait, je m’appelle Arthur. Duc Arthur Silverwood.

Puis il quitta la pièce en claquant la porte derrière lui. Elle resta debout pendant un moment, à réfléchir.

“Cet homme est un duc, alors… Le duc Arthur. Pourquoi il ne m’a rien expliqué de plus ?”

– Pour l’instant, contente-toi de rester ici, marmonna-t-elle en l'imitant. C’est ça ! Je voudrais bien comprendre, moi !

Elle se demanda quand exactement, on viendrait la chercher pour lui expliquer un peu les choses et pour répondre à ses innombrables questions. Elle ferma les yeux, pensive. Elle ne savait pas si elle était de nature impatiente avant son amnésie, mais cet homme l’avait vraiment exaspérée. Alors qu’elle essayait de se calmer, elle jeta un coup d’œil au bureau, où le pendentif étincelait comme pour lui rappeler sa présence. Elle s’approcha, voulant l’examiner de plus près, mais son regard tomba alors sur la fenêtre.

“Je l’avais oubliée…, se dit-elle. Elle pourrait m’indiquer plus en détail où je suis !”

Pleine d’espoir, elle marcha vers la fenêtre et essaya de l’ouvrir, mais elle remarqua qu’elle était fermée à double tour, sans doute par le duc pour l’empêcher de s’échapper.

  Elle était encore plus énervée, maintenant, mais aussi un peu terrifiée. Même beaucoup, à vrai dire. Elle dut se contenter de coller son nez à la vitre et de regarder à travers malgré la buée qui s’y déposait. Mais ce qu’elle vit ne manqua pas de la surprendre. 

Par la fenêtre, elle apercevait une gigantesque forêt où dansaient des lucioles et des sommets déchiquetés derrière, au loin. À droite, elle voyait un lac qui reflétait le ciel tel un miroir géant.

Elle ne reconnaissait pas du tout ce paysage. Elle était perdue. Pourquoi ne se souvenait-elle de rien ? De plus, elle avait le sentiment désagréable d’oublier quelque chose de très important.