Chapitre 3 - Roaris

Par Froglys
Notes de l’auteur : Bonjour bonjour !
Voici un nouveau chapitre !
Je compte encore sur vous pour me donner des avis que vous continuiez ou non afin que je puisse m’améliorer.
Bonne lecture !

Les affaires de William récupérées, nous nous sommes mis en route en profitant du silence des chemins pour discuter. Jusqu’à ce qu’un sujet n’arrive dans la conversation. Ou, disons plutôt, pour que ce gentil garde me pose une question qui me hantera pendant plusieurs années.

_ Au fait, tu as dit que ta famille était décédée en octobre mais qu’as-tu fait depuis ?

Placée devant lui, il ne remarqua pas mes sourcils se froncer.

_ Ex… Excusez-moi mais que voulez-vous dire ?

_ Nous sommes en juin. Tu es censée être morte il y a huit mois. Alors où…

Sa voix ne devint qu’un bruit de fond. Mes yeux se figèrent sur le cou du cheval.

Que venait-il de dire ? Huit mois ? Juin ? Comment ça ? Cela expliquait bien la couleur de la forêt, la température plus chaude ou encore l’endroit de mon réveil mais… C’était impossible ! Comment pouvais-je avoir disparu depuis octobre avant de réapparaître comme par magie dans le même état ?

Magie…

Était-ce la cause de mes ennuis actuels ?

Sans m’en rendre compte, je laissais échapper une plainte.

_ Anthéa ? Que se passe-t-il ?

_ Vous dites que… nous sommes en juin ? demandai-je fébrilement.

_ Oui, le onze juin très exactement. Mais tu ne me racontes pas comment tu as bien pu te faire poignarder ainsi.

Aucun mot ne sortit de ma bouche. J’avais disparu pendant huit mois et aucun souvenir de cette période ne m’apparaissait. Ne sachant pas ce qui avait pu se produire, j'ai pris une décision.

_ Oui excusez-moi. Je perds la notion du temps dernièrement, prétendis-je. Je me suis faite passée pour morte et je me suis cachée dans un village loin d’ici. Je passais près de là quand mes compagnons et moi nous sommes fait attaquer par des bandits.

Une interjection me fit comprendre qu’il n’y croyait pas vraiment.

_ J’ai entendu bien des histoires, jeune fille. Je sais reconnaître le mensonge. Je suis chevalier après tout, tâche de ne jamais l’oublier.

Une boule se forma dans ma gorge tandis que j’hochai la tête face à la remarque de l’homme.

_ Et sinon, tu habites au village de Roaris ? préféra demander le vieil homme.

_ Oui, le plus petit village du coin.

_ Pourtant vous possédez le meilleur fleuriste et urbaniste !

Je ris à sa suite. Avant de m'intéresser à mon compagnon de route.

_ Vous avez toujours été chevalier ?

_ Je faisais partie du corps secondaire de l’empire de Kassuz, il fut un temps. Maintenant, je fais ma retraite à la campagne.

Ma bouche s’entrouvrit légèrement. Kassuz… C’était un grand royaume, frontalier avec l’Orane. Si l’on disait qu’il existait trois grandes puissances dans le monde, celui-ci en faisait sans aucun doute partie. Situé au sud, il était le plus grand pays exportateur. Mobilisant près de deux millions de soldats chaque année pour assurer le transport des marchandises. Même s’il était aussi la plus grande domination militaire.

Il devait être un homme vigoureux.

_ Je pense que vous êtes une personne formidable.

William ne rebondit pas sur ma réponse. Comprenant qu’il ne souhaitait pas parler plus à ce sujet, je me tus et portais mon regard sur l’horizon verdoyant qui se dressait devant moi.

 

Alors que la lumière faiblissait, le cheval commençait à ralentir à la vue d’un arbre familier. Énorme tronc, vêtu d’un feuillage doux et majestueux, il se levait fier et surplombait la vallée qui recueillait mon minuscule village.

_ Cela te convient si je te laisse ici ? J’aimerais bien rentrer avant que le soleil ne disparaisse complètement.

Regrettant son départ aussi rapide, je descendis promptement du cheval.

_ Eh bien, je vous souhaite une bonne continuation, répondis-je en attrapant un sac de toile qui contenait mes vieux vêtements.

Je lui fis un signe de tête pour le remercier de tout ce qu’il avait pu faire pour m’aider.

_ Au plaisir de se revoir un jour ! lança-t-il finalement.

Il s’élança ensuite dans la direction de son propre hameau. Ma main se dirigea vers le grand arbre. Le contact entre l’écorce du bois et ma peau me fit beaucoup de bien. Je reconnaissais cette partie de la forêt. Celle que j’avais tant de fois parcourue.

Un sourire nostalgique s’afficha sur mes lèvres. Je me retrouvais seule dans ce village. Mon regard se dirigea sur une petite maisonnée un peu surélevée par rapport au reste de la vallée. Je décidai de m’y rendre avant toute chose.

Je descendis la côte pour accéder au village. Lorsque je passai devant une petite boutique de prêt à porter, j’attrapai discrètement un manteau cape foncé puis rabattis la capuche sur ma tête afin de passer inaperçue. Je continuais mon chemin et arrivais finalement face à mon objectif. L’abri des chevaliers. William m’avait donné une lettre à donner à un certain Rodric.

_ Eh toi ! m’apostropha un homme accompagné de deux chevaliers qui discutaient allègrement autour d’un verre. Que fais-tu près d’ici à cette heure ? Tu as peut-être besoin d'aide ?

Mon corps fit volte-face. Je me retrouvai face à un homme, assez jeune, et aussi grand que mon sauveur. Mon regard se posa sur ses joues.

_ Il a une tâche de naissance ronde sur la joue droite, m’avait dit William.

Trouvé, ai-je pensé.

_ Vous êtes Rodric Piore ? demandai-je avant de continuer, le voyant acquiescer. Un… ami m’a demandé de vous remettre ceci.

Je lui donnai le papier contenant la dernière aide que m’offrait le vieux chevalier. Il le déplia et le lut en silence. Il releva ensuite ses yeux vers moi.

_ Eh bien, je m’attendais à ce que ma soirée soit tranquille mais on dirait que je me suis bien berné, conclua-t-il avec un maigre sourire fatigué. Suis-moi, Anthéa. Je vais t’amener à la personne que tu cherches.

_ Mais je ne… commençai-je avant de me calmer.

Qu’avait donc écrit William sur ce papier ? J’aurais vraiment dû le lire avant.

Même si cet homme paraissait gentil, je ne pouvais m’empêcher d’avoir des soupçons sur ses intentions. Je ne cherchais personne en particulier. Je souhaitais juste rentrer chez moi et découvrir ce qu’il s’était passé. Alors que nous arrivions devant la forge du village où travaillait encore un homme, le chevalier s’arrêta.

_ Hé !

L’homme travaillant le métal arrêta son geste. Il tourna sa tête dans notre direction en se redressant.

Le forgeron était chauve avec de petits yeux noir qui scrutaient le moindre détail de leur environnement. Il était assez effrayant au premier abord mais sa forte carrure contrastait avec sa taille. Qui avoisinait celle d’un enfant d’environ quatorze ans. Il portait des vêtements légers pour supporter la chaleur du feu qu’il maîtrisait. Cependant, malgré leur blancheur d’origine, ils étaient à présent couverts de suie.

L’homme posa son marteau et s’approcha de Rodric.

_ Dric, que viens-tu faire par ici ?

L'intéressé se tourna alors vers moi pour esquisser un nouveau sourire. Plus amusé cette fois.

_ Figure-toi que William m’a écrit.

_ William Barfel !? Celui-là même qui ne m’a toujours pas payé la réparation de sa hache ?

_ Celui-ci, oui. Quoiqu’il en soit, il me dit que cette petite cherche quelqu’un. Et il se trouve que cette fameuse personne se trouve être chez toi.

L’homme dégarni fronça les sourcils.

_ Tu veux parler du gosse ? Il est à l’étage avec Karl. Ils devraient avoir fini de se doucher.

_ Je peux te la laisser ? Faut que retourne bosser.

_ Bien sûr… Tu m’en ramèneras une ?

Rodric sourit sincèrement avant de prendre congé. Le second homme m’indiqua de le suivre et s’avança vers l’intérieur du bâtiment. Je sentis ma gorge se serrer. J’étais attentive au moindre bruit, au moindre mouvement. Il me mena pendant pourtant seulement quatorze secondes avant de déboucher sur une salle à manger un peu petite mais très accueillante. Le forgeron se tourna alors vers moi.

_ Je m’appelle Yule. Mais tu dois sûrement me connaître, je possède l’unique forge à des dizaines de kilomètres à la ronde.

J’acquiesçai. Oui, effectivement. Je le connaissais pour être déjà passée plusieurs fois dans la rue.

_ Karl ! Hurla-t-il à l’intention de l’étage.

Aussitôt, des pas se firent entendre et un jeune homme d’une quinzaine d’années apparut dans l’encadrement de la porte, essoufflé.

_ Besoin d’un cuisto peut-être ?

_ Pour quatre, je te prie.

Il m’adressa un regard curieux avant de s’atteler à sa tâche.

_ Tu peux monter. C’est la porte rouge.

Toujours sans comprendre qui était la personne que tous pensaient que je cherchais, j'ai pris le chemin indiqué.

Il faisait plus chaud à ce dit étage. Devant moi trois portes. L’une bleue, l’autre brune et la dernière, rouge. Celle-ci était par ailleurs déjà entrouverte. Je pris tout de même la peine de frapper.

_ Karl… C’est pas drôle, répondit la voix d’un jeune homme qui, malgré sa mue, m’était familière.

Comment ?

Je poussai délicatement la porte. Une personne que je connaissais très bien est apparue dans ma vision.

Il était assis sur le sol dos à moi. Un plateau de jeu dispose devant lui, il ne me prêta pas vraiment d’attention.

_ Qu’est-ce que tu fabriques ? On a une partie à finir.

Je sentis intuitivement qu’il esquissait un sourire. Il commença à se retourner en se levant.

_ Tu as peur de per…

Une bouille d’ange, des pommettes irrésistibles.

Son visage se décomposa. Il n’était qu’à un mètre de moi. Il fit un petit pas, je vis ses yeux jaune foncé caractéristiques. Un nouveau pas, je me rendis compte qu’il me dépassait désormais de près d’une tête et demie. Tout se passa ensuite en une demie seconde. Il attrapa mon bras et me tira dans les siens. Ma tête vint se caler contre son buste et des larmes coulèrent sur mes joues, mouillant le haut de Thalion. Mon frère.

_ C’est vraiment toi ? Murmura-t-il à demi interrogatif mais soulagé.

_ Tu es vivant… soupirai-je en même temps.

Je le sentis rire. Je sortis de son étreinte. Un grand sourire était de retour sur ses lèvres.

_ Tu n’as pas changé. Tu es toujours aussi petite et pleurnicharde.

_ Tu as changé, toi.

La surprise passa dans ses yeux pendant un court instant.

_ Après la… mort des parents et la tienne, les Under m’ont offert un toit lorsque j‘étais au village. En échange, j’aide Yule à la forge, m’expliqua-t-il. Et toi ?

L’hésitation s’empara de moi. Devais-je lui donner la même réponse qu’au vieux chevalier ? Non, son inquiétude était déjà palpable.

_ Cette… Enfin, j’étais blessée, ma famille, morte. Donc je me suis enfuie dans la forêt. J’ai rencontré un groupe de marchands qui m’ont recueillie et soignée.

Thalion acquiesça. Voilà, ce fut mon mensonge pour le moment. Il allait m’en vouloir, c’était certain. Mais peut-être en saurais-je moi-même plus avant. Que s’était-il passé pendant ces huit mois ?

 

Une heure passa en un clin d’œil. Nous avons beaucoup discuté.

Mon frère avait réussi son examen de fin d’année à l’académie des mages de premier cycle. L’académie se situait à la capitale et accueillait tous les enfants à partir de douze ans qui souhaitaient devenir mages, et les formait. Il y avait six ans de scolarité totale. Les trois premières années étaient utilisées pour enseigner les bases de la magie, tous les sorts non spécifiques. Les trois années suivantes sont considérées comme celles qui définissent le mode de vie futur. On attribue une sorte de magie qui fera ensuite de l’élève, un potentiel candidat au clan du pouvoir choisi. J'espérais pouvoir y entrer l'année prochaine.

Thalion avait beaucoup changé. Il était devenu plus mature, plus altruiste et plus prudent. Cet événement l’avait véritablement marqué, chose normale étant donné son ampleur. En le regardant, je ne pouvait m’empêcher de le voir, là, étalé sur le plancher de ma chambre, inconscient, agonisant, alors que le tueur pensait en avoir fini avec lui.

_ Mais dis-moi, Anthéa, est-ce que tu as pu voir son visage ou quoi que ce soit qui pourrait nous aider à le retrouver ?

Ses balafres, il avait dû combattre des centaines de fois. Ces yeux bleu froids et glaçants, avaient vu tellement de champs de bataille. Et son maniement de l’arme, entraîné depuis des dizaines d’années.

Mais quelque chose clochait. S’il était un assassin, un homme dont le métier est de tuer. Comment mon frère et moi avions pu nous en sortir ?

_ Des yeux bleus, effrayant, un visage couvert de cicatrices… Mais rien de plus, expliquai-ai alors avec des frissons.

J’avais peur qu’il ressurgisse de nul part pour me tuer.

_ Il faut que je te dise quelque chose.

Mon oreille se fit plus fine. Attentive, mes yeux rivés sur ses lèvres.

_ Pendant ces derniers mois, j’ai mené quelques recherches, j’ai essayé de me rappeler des moindres détails de cette soirée et des jours suivants. Et j’ai fini par trouver quelque chose, raconta Thalion.

_ Quoi ! Me précipitai-je.

_ Il n’était pas totalement inconnu aux parents.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez