L’inconnu emmena Oriana dans une ruelle direction les égouts. Il déposa des dizaines d’objets ronds sur une épaule d’Oriana. Ils restèrent collés quelques secondes avant de s’en aller dans toutes les directions.
- Qu’est-ce que… commença Oriana qui s’éveillait de son cauchemar.
- C’est pour les semer. Je ne leur ai pas laissé le temps de s’imprégner de mon odeur. Ils suivront la tienne qu’ils connaissent bien. Nos amis vont les envoyer dans de mauvaises directions. Viens ! Il faut aller vite.
Il parlait français en roulant les « r » comme s’il venait de l’est de l’Europe. Oriana le suivit dans le dédale d’égouts. Il tournait apparemment aléatoirement à chaque intersection.
- Vous savez où vous allez ?
- Une IA me guide, indiqua l’inconnu. Sinon, nous serions trop facilement repérables.
- Comment ça ?
- Quand un être humain se dirige aléatoirement dans un labyrinthe, il tourne en réalité plus souvent à droite qu’à gauche. Si bien qu’en le cherchant dans le quart sud est, vous avez plus de chances de le trouver. En utilisant une IA, je suis certain de réellement avancer au hasard. Mes poursuivants devront élargir leur zone de recherche. Je leur fais perdre du temps, ce qui exactement ce que je veux.
- Vous voulez dire que l’IA se contente de vous dire, aléatoirement, de prendre à droite ou à gauche ? s’étrangla Oriana. Vous ne savez pas où vous allez ?
- Exactement, dit l’inconnu. À un certain moment, aléatoire, l’IA nous dira de sortir et nous le ferons. Ils ne pourront pas déterminer notre porte de sortie par des moyens stratégiques. Le hasard leur retire cette possibilité. Ne pas avoir d’objectifs. Agir n’importe quand, n’importe où, sur un coup de tête de préférence. C’est redoutable. Ils ne peuvent rien prévoir, rien anticiper.
Oriana dut admettre que le raisonnement se tenait. À une intersection, Oriana se sentit happée par une main ferme.
- Je t’ai, dit son agresseur. Baptiste sera content.
L’inconnu se retourna et se dirigea vers l’assaillant.
- Tu comptes faire quoi ? dit l’homme dans le dos d’Oriana en ricanant.
Elle ressentit une profonde terreur qui ne sembla pas affecter l’inconnu. Il s’avança vers le collaborateur de Baptiste, faisant en sorte de laisser Oriana entre eux deux, puis, avec un petit sourire, toucha la main de l’agresseur sur le ventre de sa prisonnière.
- Perdu, mon gars, dit l’inconnu.
Oriana se retourna pour constater qu’il n’y avait plus personne. L’inconnu se pencha sur le sol. S’y trouvaient des vêtements vides.
- Que vient-il de se passer ? demanda Oriana.
- Je l’ai tué, annonça l’inconnu. J’en tuerai autant qu’il faudra. Ils ne te reprendront pas.
Il fouilla les habits et en sortit un téléphone. Il accrocha l’appareil à un petit drone qui disparut rapidement derrière un mur.
- Ainsi, ils le penseront encore vivant, annonça-t-il en jetant les vêtements dans les égouts. On avance !
Oriana, désorientée, ne s’opposa pas. Ils sortirent des égouts pour continuer dans un bidonville. Il attrapa une casquette cachée sous une pierre et la plaça sur la tête d’Oriana. Il lui mit un manteau sur le dos.
Dans une rue bondée, il échangea aisément sa casquette contre celle d’une autre personne qui accepta en haussant les épaules. Le manteau connut le même sort. Ce mec n’avait aucune difficulté à négocier.
Il réalisa cette manœuvre plusieurs fois avant d’entrer dans un bâtiment et de descendre une volée de marches. Il réfléchit quelques instants devant une porte blindée, entra un code et l’ouverture céda. Ils pénétrèrent dans ce qui s’avéra être un bunker aux étagères garnies.
Avec un immense sourire, Oriana constata la présence d’un réchaud électrique et d’une immense boîte de raviolis. Pas de quoi sustenter ses papilles mais au moins son estomac serait rempli. Elle ajusta rapidement l’ensemble tandis que l’inconnu prenait des objets de ci, de là, remplissant deux sacs à dos. Lorsqu’il revint vers elle, la nourriture était presque chaude.
- C’est super que tu saches te servir de ça, dit-il. Par contre, il y a 5 kg de nourriture là-dedans.
Oriana acquiesça.
- J’ai faim, annonça-t-elle.
Il lui lança un regard bizarre.
- Ils ont enclenché énormément de ressources pour te retrouver. Tu sais pourquoi ils te cherchent ?
- Baptiste me considère comme la poule aux œufs d’or, indiqua Oriana en enfournant une première fourchette dans sa bouche, se ravissant de ce premier repas chaud depuis des mois.
- Baptiste ? répéta l’inconnu. Le frère du roi ?
- Il me parle souvent de son frère, oui, qui est censé être Dieu. M’enfin ce mec est fou.
- C’était Baptiste le mec à la pomme ? s’étrangla l’inconnu. Oh merde ! On s’en va, tout de suite !
- Quoi ? s’exclama Oriana en avalant un ravioli sans le mâcher. Pourquoi ?
- J’ai volé le frère du roi. Putain ! On est mal ! Il faut partir immédiatement.
- Pourquoi ? gémit Oriana dégoûtée de devoir arrêter ce repas qui commençait si bien.
- Ce ne sont pas quelques hommes qu’ils vont mettre à nos trousses mais tout ce qu’ils ont ! L’intégralité des ressources du palais. Oh merde ! Je suis mort. Baptiste m’a menacé. C’est Baptiste, putain !
Il semblait terrifié. Jusque-là, l’inconnu s’était montré calme, tranquille et serein. Ce n’était pas de la compétence mais de l’ignorance. Il ne savait juste pas à qui il avait affaire.
- Oriana, on y va !
Il connaissait son prénom. Il l’utilisait pour la première fois. Il l’attrapa et la força à se lever. Elle s’opposa à lui.
- J’ai faim ! cria-t-elle en l’obligeant à la lâcher.
- Tiens !
Il lui mit une poche dans les mains.
- Il y a trente barres de céréales là-dedans. De quoi nourrir un régiment. Maintenant, on y va !
Elle passa le sac à dos qu’il lui donna puis ouvrit le paquet et commença à manger, plaçant les emballages dans ses poches afin de ne pas semer comme le petit poucet.
Ils sortirent par une autre porte. Oriana le suivit sans parler – elle ne pouvait pas, elle mangeait. Ils empruntèrent de nombreux couloirs, des souterrains, des volées de marches. Oriana se sentait de mieux en mieux. Elle reprenait de l’énergie. Finalement, elle enfourna le sac vide dans sa poche en soupirant. Elle avait encore faim.
Ils arrivèrent devant un trou d’eau rond.
- Tu sais nager ? demanda-t-il et Oriana hocha la tête. Tu as peur de l’eau ?
Elle secoua négativement la tête.
- Il va falloir nager la tête sous l’eau jusqu’au prochain point d’air. Ça ira ?
- Oui, dit Oriana.
Elle se plongea dans l’eau. Elle était salée.
- Ils ne pourront pas nous suivre sous l’eau, assura l’inconnu.
Oriana n’en était pas si sûre. BX1 n’aurait probablement aucune difficulté à les retrouver. Heureusement, il était probablement trop petit pour être utilisé de la sorte. Oriana plongea et suivit l’inconnu sous l’eau.
Elle n’eut aucune difficulté à le suivre. Il haletait à l’arrivée là où Oriana avait encore largement de la réserve. Son organisme amélioré s’en sortait bien mieux que celui de l’inconnu qui peinait.
Finalement, il lui tendit un masque respiratoire et deux petites bouteilles.
- Il va falloir descendre profondément. Ceci te sera nécessaire. Surtout, ne me perds pas !
Oriana hocha la tête. Ils franchirent un siphon profond, remontèrent et l’inconnu s’arrêta, cherchant quelque chose. Il redescendit un peu, remonta et son visage se fit affolé. Visiblement, la chose attendue n’était pas là. Oriana resta stoïque, l’observant nager en tout sens, caressant la paroi de l’impasse. Un mécanisme permettait-il d’ouvrir un passage ? Si c’était le cas, l’inconnu ne le trouvait pas.
Il observa sa jauge d’air et blêmit. Il lança un regard terrifié à Oriana. Elle s’avança vers lui. Ses deux bouteilles étaient vides. Il suffoquait. Elle dévissa sa bouteille pleine et remplaça une des vides de l’inconnu. Dès le vissage terminé, elle ouvrit le robinet et l’inconnu inspira fortement. Il reprit des couleurs puis attrapa la jauge d’Oriana pour la découvrir à peine entamée. Il ouvrit de grands yeux ahuris.
Oriana lut de la peur dans ses yeux. Il approcha la main de son visage et posa sa paume sur sa joue. Oriana ressentit de multiples petites piqûres, comme si un gant de crin venait de se poser sur elle. Il l’observa avec attention puis retourna à sa recherche.
La bouteille était presque vide lorsqu’enfin, un passage se dégagea. Il l’emprunta, poussé par la peur de se noyer. Ils sortirent dans un trou d’air et l’inconnu s’agrippa en respirant fortement. Oriana se contenta de retirer calmement son respirateur et de s’extirper hors de l’eau. Elle aida l’inconnu, qui, à bout de force, peinait.
- Départ, ordonna l’inconnu.
Un très léger bruit de moteur se fit entendre et une plaque d’acier referma le trou.
- Destination ? demande une voix métallique sortant de nulle part.
- Code rouge.
- J’ai faim, dit Oriana.
L’inconnu la regarda et rit. Qu’il trouve la situation coquasse la dépassait.
- Tu respires pas mais qu’est-ce que tu manges, bordel !
Il se leva péniblement. Elle le suivit.
- Nous sommes dans un sous-marin, expliqua-t-il. Il est prévu pour une dizaine de personnes alors à deux, ça devrait largement aller. Voilà le mess. Sers-toi !
Oriana prépara un repas chaud. L’inconnu se servit une part et Oriana prit le reste. Cela ne lui suffirait pas mais ce début promettait.
- Tu t’appelles comment ? demanda Oriana après avoir avalé sa première bouchée.
- Fabien, répondit-il.
- Pourquoi tu risques ma vie pour m’aider ?
Il leva les yeux sur elle puis tristement, annonça :
- Parce qu’il ne me reste plus que ça. J’ai capté leurs recherches. J’ai décidé de les faire chier. Tu te souviens : des actes aléatoires.
- Tu es un terroriste.
- En quelque sorte, oui.
- Tu fais ça depuis longtemps ?
Fabien fronça les sourcils.
- Le voyage sera plus agréable, je suppose, si on discute mais Oriana, j’ai fait des choses horribles que je regrette terriblement. J’étais jeune. Je pensais que la victoire permettait tous les excès, que je pouvais tout me permettre pour les atteindre. J’avais tort. Faire le mal pour combattre le mal est mal. Il ne faut pas user de leurs méthodes. J’ai… Je regrette profondément.
- Je promets de ne pas te juger, dit Oriana. Raconte-moi…
- J’ai été élevé par mon père, commença Fabien. Quand j’étais tout petit, il m’a mis au…
Il chercha ses mots, prononçant des sons qu’Oriana ne comprit pas.
- Le lieu où on amène beaucoup d’enfants pendant que les parents travaillent, périphrasa-t-il.
Oriana comprit qu’il cherchait le mot en français. Il ne s’agissait donc pas de sa langue maternelle. Gentiment, Oriana proposa :
- Crèche ?
Il secoua la tête.
- Jardin d’enfants ? continua Oriana que ce petit jeu amusait.
- Oui, jardin d’enfants, confirma Fabien. La première année s’est bien passée. J’étais un enfant facile. Il m’a inscrit pour l’année suivante. J’étais très sociable. J’allais facilement vers les autres enfants pour jouer. J’aimais bien découvrir de nouvelles têtes alors j’étais aux anges. Je suis allé vers un petit garçon et on a commencé à jouer. Pas ensemble, pas vraiment, à deux ans, les enfants jouent au même jeu, au même endroit, mais sans réelles interactions. C’est plus de l’imitation et les balbutiements de la sociabilisation.
Oriana hocha la tête.
- À un moment, nous avons voulu le même jouet en même temps alors nos mains se sont touchées et il…
Fabien dut faire un effort pour garder contenance.
- Il a disparu.
- Disparu ? Comment ça ? demanda Oriana.
- Pouf ! Redevenu poussière. Il ne restait que ses petits vêtement sur le sol. Je venais de toucher un enfant et de le faire disparaître. Un petit garçon adorable. Je n’ai pas pleuré. Je n’ai pas appelé. Je me suis éloigné et j’ai joué tout seul, dans mon coin. Je me suis renfermé sur moi-même, n’osant plus m’approcher des autres.
- Tu m’étonnes ! C’est hyper traumatisant.
- La disparition de l’enfant n’est évidemment pas passé inaperçue mais personne n’aurait accusé un de ses camarades. C’était ridicule. Ils ont pensé à un enlèvement. Mon père a constaté mon changement d’attitude et il m’a interrogé sur l’un de mes dessins. J’ai expliqué, avec mes mots d’enfant, ce qui s’était passé. Il m’a retiré du jardin d’enfants et nous sommes partis, loin de la civilisation, dans les montagnes. Je suis russe, précisa Fabien. Il y a de nombreuses zones naturelles là-bas. On peut marcher des mois sans rencontrer personne. Mon père m’a élevé seul. Il m’a appris tout ce qu’il savait. Comment survivre en milieu naturel mais aussi comment échapper à la surveillance et à la toute puissance numérique. Comment passer entre les mailles du filet. Il m’a appris à utiliser ça, dit Fabien en sortant une puce de sa poche, la meilleure arme en ce monde.
Oriana sourit. Elle comprenait totalement.
- Il m’a obligé à apprendre d’autres langues que le russe. Je portais un traducteur si bien que les mots de mon père m’arrivaient dans une autre langue et si je parlais russe, mon père ne comprenait pas car son traducteur lui envoyait des sons modifiés. J’ai appris douze langues.
- Ouah ! s’exclama Oriana impressionnée. Tu parles bien le français.
- Je te remercie, dit Fabien. J’ai appris à lire sur les lèvres mais mon père refusait obstinément de m’apprendre le maniement des armes à feu, dont il se servait pourtant souvent. Un jour, je me suis rebellé. Je n’étais plus un petit garçon. J’étais un adolescent, presque un homme. Je voulais qu’il me voit pour ce que j’étais. J’ai exigé qu’il m’apprenne. Il a souri et il m’a dit : « Tu es prêt ».
- Prêt à quoi ? demanda Oriana.
- « À embrasser ta destinée », répondit Fabien.
- Ta destinée ? s’exclama Oriana.
- Il m’a expliqué qu’il n’était pas mon père biologique, que j’avais été crée dans un laboratoire.
Oriana frémit et blêmit. Avait-elle devant elle une création de Baptiste ?
- Des scientifiques avaient eu accès à un être génétiquement amélioré par nos ennemis. En l’étudiant, ils ont appris énormément et ont pu réutiliser ce savoir pour me créer.
Oriana comprit son erreur. Fabien n’avait pas été crée par Baptiste mais par ses adversaires, ceux-là même dont le Diable tentait de la protéger, ceux qui n’hésiteraient pas à la couper en petits morceaux pour en tirer un maximum de connaissances. Oriana eut soudain très peur. Son cœur s’emballa et elle contrôla sa respiration pour tenter de se calmer. Toute son âme appela Baptiste à l’aide. Si cet homme apprenait ce qu’elle était, que ferait-il ?
- Je suis une arme vivante, dit Fabien et son visage se couvrit de tristesse. Je n’ai pas besoin d’une arme à feu. Le temps que je la sorte, mon adversaire est déjà sur moi. Ça ne me servirait à rien. Mes mains sont bien plus dangereuses.
- Quand tu m’as caressé le visage sous l’eau, j’ai senti… des petites piqûres, confirma Oriana.
- Je libère une… je ne sais pas, je l’appelle toxine mais j’ignore ce que c’est exactement. Je ne suis pas scientifique, admit Fabien. Ce que je sais, c’est que ça les tue, en un claquement de doigts sans affecter les êtres humains. Je suis l’arme ultime contre eux.
Ils les opposaient aux êtres humains, tout comme l’IA dans la navette.
- J’ai sauté de joie en l’apprenant. J’ai dit à mon père à quel point j’étais heureux de pouvoir me battre. Il m’a refroidi instantanément. Je ne devais surtout pas lutter.
- Pourquoi ? demanda Oriana.
- Parce que je suis le seul, dit Fabien. Un être humain unique n’est rien. Nous ne sommes puissants que par le nombre. Les scientifiques avaient volontairement crées un garçon afin qu’il puisse féconder le plus de femmes possibles et transmettre le gène.
- Ta destinée est… de te reproduire ? comprit Oriana qui trouva cela horrible.
- Mon père m’a donné un immense paquet de fric. Je n’en avais jamais vu autant. Il m’a donné des papiers d’identité et il m’a dit : « Tu es riche maintenant. Amuse-toi. Va dans toutes les fêtes et baise, autant que tu le peux, toutes les femmes du monde et mets-les en cloque. »
Oriana grimaça. Baiser par envie oui mais sur ordre ! Quelle horreur !
- Au début, j’ai trouvé ça sympa, admit Fabien. J’ai fait la fête. J’ai dragué. J’étais charmant.
Oriana devait admettre que son interlocuteur était mignon. Rien à voir avec Baptiste : le blond contre le brun teinté de poivre et sel, les yeux bleus contre les yeux marrons, un corps musclé contre un corps fin, un jeune contre un homme mûr. L’un n’avait rien à envier à l’autre. Deux corps différents, deux personnalités différentes, incomparables dans leurs différences.
- De nombreuses femmes ont accepté mais… il y avait un petit souci, admit Fabien.
- Lequel ? demanda Oriana.
- Elles avaient un moyen de contraception. Toutes, précisa Fabien. Je ne baisais pas pour le plaisir mais pour me reproduire alors j’ai fini par refuser celles ne pouvant enfanter et rapidement, il n’y eut plus personne.
Fabien fit une pause puis reprit :
- Je devais remplir ma mission, d’une façon ou d’une autre. Il fallait peupler le monde d’armes vivantes. C’était mon objectif, ma destinée. Alors, j’ai commencé à… violer des femmes.
Oriana pâlit.
- J’ai utilisé les réseaux sociaux pour les débusquer. Trouver les jeunes adolescentes fertiles mais pas encore actives sexuellement et donc pas sous contraceptif. Je violais vite et je disparaissais, aussi vite.
Oriana tremblait devant cette terrible confession.
- J’ai agressé tellement de femmes que je ne saurais même pas dire le nombre. Il y en avait parfois dix par jour. Je les traquais sur Internet. C’était si facile. Je prenais celles qui se vantaient de refuser la pilule et de préférer des méthodes plus naturelles de suivi de son corps, ne baisant pas les jours de fertilité, dont elles annonçaient le début sur leur groupe de discussion. Je fondais sur elle avant de disparaître. Je suppose que la police me cherche. Ou pas. Je ne sais pas. Je n’ai jamais été inquiété, jamais poursuivi, jamais interrogé.
- Tu frappais au hasard. Il n’y avait pas de logique. Personne n’a fait le lien avec l’absence de contraception.
- Il faut croire, dit Fabien. Ceci dit, je n’ai pas baisé que sous contrainte. J’ai aussi dragué via des sites de rencontre. J’ai promis à des filles que je prenais un contraceptif masculin ou je mettais des préservatifs que je perçais moi-même.
- Tu n’as pas attrapé de maladie ?
- Étonnamment, non, répondit-il.
S’il ne baisait que des vierges ou des femmes prenant bien soin de leur corps, cela se tenait.