Chapitre 37 - Lo

Notes de l’auteur : Bonjour :D On retrouve enfin le point de vue de Lo sans invités dans sa tête, ça faisait longtemps ! Bonne lecture :)

Lo n’avait jamais eu envie de mourir. Mais en cet instant, iel n’était plus si certain qu’iel était parfaitement à l’aise avec l’idée d’être en vie.

Les lueurs du jour étaient revenues à la terre depuis assez longtemps pour que Suzette, Del et Sehar soient déjà profondément endormis. Quelque part dans la petite maison, Lo entendait encore Chaussette et Maro discuter à voix basse avec Nodia, et par la fenêtre de la chambre - la même que celles qu’ils avaient occupés, lorsque le loup était apparu, la nuit avant que le chasseur de prime ne les trouve - iel voyait une tâche de lumière dans le ciel qui lui indiquait que les trois soeurs étaient encore éveillées aussi, à bord de l’Oursin.

Zakaria manquait à l’appel, mais c’était un grand garçon. S’il voulait se dégourdir les jambes seul dans la nuit, ce n’était pas son problème… Et probablement pas une si mauvaise idée. Puisque le sommeil lui échappait, peut-être qu’iel aussi devrait en profiter pour s’aérer l’esprit au-dehors.

Lo sortit de la chambre le plus silencieusement possible pour ne pas réveiller Sehar et Del, puis descendit l’escalier à pas feutré pour ne pas attirer l’attention de Maro, Chaussette et Nodia dans la grande pièce du bas. Une main sur les murs de bois mort usés par des milliers de passages, par l’humidité, le froid, la chaleur, Lo réussit à passer la porte sans se faire repérer. Iel jeta un oeil vers le toit, sur lequel Suzette s’était installée pour dormir, puis iel s’éloigna vers la forêt.

Lo n’avait pas réfléchi à sa destination, et s’y était rendu d’instinct, comme s’iel espérait y trouver un certain réconfort.

Mais quoi, exactement ? Ces arbres lui paraissaient toujours aussi vides et impossible à atteindre. Les voir sans réussir à les sentir était bien pire que de rester coincé entre des murs morts ou dans le ciel sans plantes de la Toile.

Iel n’était plus tout à fait isolé, cependant. Désormais, il y avait Erin. Aussi déroutant que soit ce lien, c’était mieux que rien, rassurant simplement parce que cela existait. Une connexion étrange valait mieux qu’aucune, surtout dans son état…

Mais Lo ne pourrait jamais faire ce que la maegis attendait d’iel. Iel n’avait plus la force. Et surtout, iel avait si peur, et était trop fatigué pour tout cela, trop fatigué pour être vivant ne serait-ce que pour iel-même. 

Alors le faire pour les autres ? 

C’était impossible. Pas maintenant. Peut-être plus jamais.

Ses sabots le portèrent plus profondément dans les bois, et des bruits étranges attirèrent son attention. Des branches qui craquaient, des objets lancés, un pas énervé - était-ce un nouveau chausseur ? Une Féroce, ou peut-être un Cauchemar sous une autre forme ?

— … trop con, comme d’habitude !

Lo sourit avec soulagement. La voix de Zakaria, légèrement éraillée lorsqu’il s’emportait, était facile à reconnaître. Mais avec qui parlait-il ? Lo s’avança, assez pour avoir la réponse à sa question. Le prince invectivait les arbres silencieux, et laissait aller sa rage avec la nuit pour seul public. Peut-être qu’iel devrait le laisser se défouler seul… mais repartir comme une ombre ne paraissait pas particulièrement poli, et Lo n’avait pas envie de retourner au village tout de suite. Alors pour annoncer sa présence, iel marcha en laissant ses sabots sonner lourdement sur les branches mortes, et le valeni se retourna presque aussitôt. En un battement de cil, sa colère se transforma en un sourire accueillant et étrangement sincère, après ce que Lo venait de l’entendre dire.

— Tu as déjà trop dormi pour une seule vie ? 

Lo haussa les épaules, et éluda la question. Parler d’iel reviendrait à admettre être vivant, et cela le fatiguait d’avance.

— Les arbres te parlent mal ?

Zakaria secoua la tête, un rire dans les yeux.

— Si tu as entendu des insultes, elles n’étaient dirigées que contre des personnes qui le méritaient, je le jure.

— Qui ?

— Moi, pour commencer. Puis ces connards de l’Armada… Et à peu près toute la Toile, aussi.

— C’est… 

— Beaucoup de monde ? 

Lo inclina légèrement la tête, incapable de déterminer si sa réponse était oui ou non. Y’avait-il une limite, sur le nombre de personnes contre qui un seul individu avait le droit d’être en colère ?

— Tu n’es pas en colère, après ce qui t’es arrivé ? demanda Zakaria.

Fatigué, terrifié, iel l’était. Mais en colère…

— Pourquoi les autres capitaines ne t’auraient pas prévenus de leur passage ici ?

Zakaria haussa les épaules, cogna une branche morte avec ses pieds et l’envoya se fracasser contre un tronc. Dans l’obscurité, ses nombreuses petites cicatrices luisaient de multiples couleurs, un peu comme celle de Del, mais bien plus discrètement, comme si la peau guérie masquait en partie la lumière de sa magie.

— Aucune idée. Et je peux rien y faire pour le moment. Pourquoi tu évites de répondre dès qu’il s’agit de parler de toi ?

Zakaria se tourna vers iel, une lueur espiègle dans le regard, et Lo fut tenté de faire demi-tour sans avertissement. Mais ses sabots restèrent fermement enfoncé dans les feuilles mortes, ses muscles engourdis, et une lourde fatigue nimba son esprit. 

— Je sais qu’on ne se connaît que depuis deux jours à peine, mais on s’est rencontré dans ta propre tête, continua le prince. Et même là-dedans, tu as l’air de te retenir.

Lo savait que la vague d’épuisement qui venait de lea frapper n’était dû qu’à iel même. Mais blâmer le valeni aurait été bien plus facile - était bien plus facile. Lo n’avait qu’à faire demi-tour et se traîner jusqu’au lit qui l’attendait chez Maro, et laisser le sommeil emporter ces souvenirs qui le tiraient vers le bas.

— Tu es spécialiste de la pensée ? 

— Je suis un expert dans le trop plein d’émotions et j’ai un sale passé de répression, donc je peux repérer très vite quand quelqu’un fait pareil.

Zakaria enjamba la distance qui les séparait pour se tenir à un pas de Lo. Avec une tête de plus qu’iel, le prince ne pouvait que lea regarder de haut. La lumière de ses cicatrices soulignait les contours irréguliers de son visage, et les couleurs de sa magie scintillaient au creux de son iris noir sans pupille. Comme un ciel nocturne dans lequel des lueurs de jours se seraient égarées pour y mourir.

— Et si je ne veux pas montrer mes émotions à un étranger ?

— Quoi, tu as peur de faire mauvaise impression si tu te laisses aller ? 

Même si ce n’était pas toute la vérité, Zakaria n’avait pas totalement tort. Lo n’avait pas peur de faire mauvaise impression - iel savait depuis longtemps que si quelqu’un voulait lea dénigrer parce qu’iel était un faune, rien de ce qu’iel ferait ne pourrait le faire changer d’avis. Iel ne pouvait pas non plus totalement blâmer son envie de ne rien ressentir du tout. 
La colère, iel prenait toujours garde à ne jamais la montrer. Parce que c’était plus simple d’être une bonne personne, ainsi. De prendre les bonnes décisions, de gagner et garder la confiance de ceux qui l’entouraient.

Un sourire espiègle fendit le visage de Zakaria, et sans autre forme d’avertissement, il poussa sur ses épaules pour l’envoyer par terre. Les fesses dans les feuilles, Lo le regarda, ombre parmi les ombres.

— Qu’est-ce que tu fais ?

— Mauvaise impression. 

Il l’attrapa par les chevilles, et le tira sur le sol. Si Lo ne voulait pas se faire traîner dans l’humus par un valeni un peu trop joueur, iel n’avait pas d’autre choix que de se débattre avec toute la force qu’il lui restait. Iel donna un grand coup de sabot pour dégager sa prise, et s’appuya sur cette impulsion pour se remettre debout, les muscles désormais tendus avec méfiance.

— Je ne vais pas m’énerver contre toi, si c’est que tu cherches.

Cette fois-ci Zakaria ne dit rien, et se contenta de sourire, toujours avec cette même lueur espiègle dans le regard. Le sourire s’agrandit presque imperceptiblement, juste avant qu’une main invisible ne saisisse les chevilles de Lo pour le renvoyer de nouveau au sol. Évidemment. En pleine nuit, Zakaria avait l’avantage de l’ombre dont il pouvait se servir à sa guise.

Lo n’était pas en position de force, mais iel n’avait aucune envie de céder à sa grossière tentative de manipulation, aussi bien fondée soit-elle.

La meilleure solution, c’était de faire demi-tour, et essayer de dormir. Même si pour ce deuxième point, iel savait déjà qu’iel n’y parviendrait pas. 

Une main d’ombre lea poussa en avant alors qu’iel se relevait, et Lo eut à peine le temps de rouler pour éviter de tomber face contre terre au pied du valeni, qui l’évita de justesse. 
Lo soupira. Iel pouvait esquiver les attaques du valeni toute la nuit s’il le fallait, en se concentrant un peu. Iel en était parfaitement capable. Et quelque chose lui soufflait que Zakaria en avait parfaitement conscience. Peut-être parce qu’il n’y avait aucune cruauté dans son jeu un peu brutal - mais surtout, parce qu’il ne le traitait pas comme si les récents événements l’avaient rendu plus fragile. 

C’était le cas, pourtant. 

Si Lo n’avait jamais eu envie de mourir, iel n’était plus si certain qu’iel était capable de se maintenir en un seul morceau bien longtemps.

Iel esquiva à la perfection l’attaque suivante, une fente en avant, mais ne repéra pas à temps le pied d’ombre qui le fit de nouveau tomber. Zakaria éclata de rire alors que Lo était de nouveau les fesses par terre, alors, sans y réfléchir, lea faune enfonça sa main dans l’humus humide. Iel créa une connexion, infime, minuscule, éphémère, juste assez pour qu’une des tiges qui couvrait le sol au pied du valeni s’enroule autour de ses jambes et le fasse tomber à son tour.

La surprise passée, le prince rit encore davantage, et Lo ne savait pas s’iel avait envie de lui donner un coup de cornes ou de rire aussi.

— Je m’en vais, annonça-t-iel. Il est tard, tu devrais dormir aussi.

— Nah. 

Zakaria se releva souplement, et Lo l’imita, ses sabots aussitôt fermement ancrés dans le sol. Mais s’iel en avait besoin, ils seraient tout aussi prêts à bondir pour esquiver.

— Et ne me fais pas croire que tu vas vraiment réussir à fermer les yeux et trouver le sommeil. Ceci, petit faune, n’est qu’une tentative de fuite pas très subtile.

— Petit faune ? répéta Lo, les oreilles redressées. 

— Tu n’es pas vraiment très très grand.

Il parcourut la distance qui les séparait et s’arrêta à une longueur de bras d’iel, juste assez pour que leur différence de taille soit d’autant plus évidente. Mais Lo n’était pas particulièrement impressionné. 

Plus c’est grand, plus ça tombe de haut.

Peut-être qu’ils pouvaient jouer, finalement. Juste un petit peu.

Lo fit un petit pas en avant, et Zakaria resta là où il était, un léger défi dans ses iris noirs. Iel ne le quitta pas des yeux un seul instant. Une esquisse de sourire étira ses lèvres, et sans laisser ses muscles ni son regard trahir un seul instant ses intentions, Lo l’attrapa par la taille pour le retourner contre terre comme un paquet de bois sec.

Iel n’eut pas le temps de l’immobiliser, cependant. Zakaria lui tira les chevilles et Lo tomba à son tour, et ils roulèrent dans l’humus comme de vilains petits chevreaux sans qu’aucun ne réussisse à prendre le dessus.

Tous les deux à bout de souffle et de nouveau sur pieds, ils s’arrêtèrent à une distance respectable, l’un de l’autre, muscles tendus et sens en alerte.

— Tu te retiens encore, constata Zakaria.

Malgré la fatigue - ou peut-être grâce à celle-ci - un sourire radieux illuminait son visage, et il semblait plus vivant que jamais.

— Et tu as l’air étrangement ravi de te rouler dans la boue au milieu de la nuit avec un inconnu.

— La nuit n’est pas encore finie.

Leur courte pause, en revanche, était arrivée à son terme. Le prince chargea de nouveau, Lo esquiva, donna un coup de sabot, trébucha sur une ombre, avant de réussir à lancer son adversaire dans un tas de buisson.

Cela n’empêcha pas le valeni de se relever dans la seconde, un rire dans la gorge.

— Aller ! Lâche-toi pour de bon ! De quoi t’as peur ?

Iel avait peur de tellement de choses. 

De se perdre de nouveau. D’avoir définitivement perdu sa connexion au monde, et que ce n’était pas la faute de cette terre, mais la sienne, s’iel ne ressentait plus rien.
Iel avait peur que quelque chose n’était pas revenu, lors du sortilège qui lui avait rendu ses souvenirs, et qu’iel avait perdu pour toujours une partie de ce qui faisait Lo quelqu’un.

Et iel avait beau savoir que la peur était une chose normale, qu’elle faisait partie d’iel comme de n’importe qui, Lo détestait avoir à ressentir tout cela à un moment où ils avaient besoin d’être les plus lucides et forts possible.

Alors, plutôt que de laisser la peur gagner, iel s’appuya sur un arbre et sauta sur le valeni, qui eut tout juste le temps de rouler hors de portée de ses sabots, avant de surgir des ombres juste derrière iel.

— T’es pas en colère, qu’on t’ait pris tes souvenirs pour ne laisser qu’une coquille vulnérable derrière ? murmura-t-il juste au creux de son oreille.

Lo l’attrapa pour le faire rouler sur son dos et l’envoyer au sol, mais Zakaria l’entraîna dans sa chute et bloqua ses bras en arrière. Le valeni avait vraisemblablement décidé d’augmenter la difficulté de son jeu - peu importe. Lo pouvait parfaitement suivre, s’il fallait en venir à ça.

Mais sa question était trop difficile à chasser de son esprit. Lo fit de son mieux pour rester concentré sur ses gestes, sans succès. Le prince utilisa contre lui la liane que Lo tentait de contrôler, et iel sentit son estomac se serrer lorsqu’il posa une deuxième question.

— T’es pas en colère, qu’elles aient essayé de tuer tes amis et tant d’innocents juste parce qu’on leur a demandé de le faire ?

Cette fois-ci, la réponse de Lo fut moins contrôlée, plus brutale, et Zakaria percuta un tronc à pleine vitesse.

Pendant quelques instants, iel eut peur de l’avoir blessé - mais non. Il se releva encore, sa lueur de malice désormais un feu brûlant. Il écarta les bras, comme pour s’offrir en pâture. 

— T’es pas en colère que malgré toutes les merdes qu’ils font jour après jour, ils pensent pouvoir aider et être de bonnes petites personnes alors qu’on galère et qu’on se foire misérablement à cause d’eux ?

Cette colère là était celle de Zakaria, mais Lo le comprenait. Iel ressentait sa peine.

Et sa rage.

Elle était là. Réprimée tout au fond, dévorant le reste.

Elle était là, cette chose qui lui faisait si peur. 

Cette chose qu’iel ne parvenait plus ignorer.

— T’es pas en colère contre le monde entier, après tout ça ? 

Zakaria criait presque. Mais dans le tumulte de son esprit, sa voix ne sonnait que comme un écho distant.

Peut-être qu’iel ne pouvait plus l’ignorer, cette colère.

Sans réfléchir, iel chargea comme un désespéré. Zakaria ne répliqua pas tout de suite, pris par la surprise - mais lorsqu’il le fit, ce fut avec la panoplie complète. Une lance d’ombre dans une main et une lance de lumière dans l’autre, il suivit Lo, qui avait enfin cessé de retenir ses coups.

Quelque part dans sa colère, dans sa peur, dans toutes ses incertitudes, iel avait trouvé quelque chose d’autre. Quelque chose à laquelle iel pouvait s’accrocher.

Lorsqu’iel improvisa de nouvelles connexions avec la végétation alentour, elles ne furent plus aussi éphémères que les précédentes. Ce n’était toujours pas la même chose que ce que Lo sentait lorsqu’iel était dans sa forêt, mais ce n’était plus un vide terrifiant. Les lianes surgissaient trop vite et trop nombreuses pour que Zakaria puisse s’en défaire aussi facilement que d’habitude, et Lo le plaqua au sol, ajoutant son propre poids pour le maintenir en place. Les mains sur ses poignets pour l’empêcher d’utiliser ses lances, le valeni ne bougeait plus, et plongea ses yeux noirs constellés d’éclats de sortilèges dans ceux de lea faune. Le temps d’un battement de coeur, il ne bougea pas. 

Un battement de coeur, c’était assez.

— Je ne suis pas en colère, murmura enfin Lo. Je suis furieux.

Zakaria esquissa un sourire, et le renversa brutalement pour reprendre le dessus. 

— Et est-ce que ça te donne l’impression d’être devenu quelqu’un de mauvais ?

Lo stoppa en plein élan l’impulsion qu’iel avait préparé pour se libérer.

Zakaria avait-il vu quelque chose, dans son esprit ?  Est-ce que sans s’en rendre compte, il l’avait compris mieux qu’iel ne pouvait se comprendre ?

Parce que le valeni avait vu juste. C’était bien de cela, dont iel avait vraiment peur. Pas seulement de perdre le contrôle, de blesser, de ne plus pouvoir aider parce qu’iel serait trop furieux pour bien appréhender les autres. Iel avait peur que sa colère le définisse, le consume, fasse disparaître tout le reste.

Mais Lo était furieux. Et pourtant, iel était toujours lea même faune.

Lo avait été beaucoup de choses. Chaotique, malicieux, rebelle masqué derrière ses airs de sages qui ne trompaient personne bien longtemps.

Mais jamais mauvais.

— Pas même un seul poil, répondit-iel finalement.

Zakaria laissa échapper un rire, et Lo rit avec lui, la tension dans son estomac et la colère dans ses muscles enfin dissipée.

— Je crois que je t’ai assez frappé pour cette nuit, constata lea faune.

— Mais je ne suis même pas fatigué… 

Une moue boudeuse tordit ses traits irréguliers, ses sourcils légèrement froncés, et Lo lâcha un soupir moqueur.

— Tu me tapais dessus pour m’aider ou juste pour te défouler ?

Pour seule réponse, le valeni lui adressa un regard énigmatique qui ne trompa pas Lo une seule seconde. Par principe - et parce qu’iel avait enfin les poignets libres, mais pas totalement envie de le pousser non plus - Lo attrapa une de ses oreilles pointées vers le bas et tira dessus en réprimande. Zakaria grogna, et se laissa tomber à ses côtés. 

Alors qu’ils étaient désormais tous les deux allongés sur le dos et immobiles, Lo avait enfin le temps de vraiment regarder la forêt. Dans le ciel nocturne se perdait encore quelques lueurs qui n’avaient pas retrouvées leur fleur d’origine, et la lumière tamisée des corolles refermées dessinaient des ombres entre les branches et sur le tronc. Les feuilles bercées doucement par le vent chantaient une étrange berceuse, presque inaudible si l’on ne tendait pas l’oreille, et l’odeur des feuilles humides sous eux remontaient à ses narines à mesure qu’iel s’y enfonçait plus confortablement. Iel sentit l’épuisement dans ses muscles, et la chaleur de Zakaria à ses côtés. La respiration du prince s’était stabilisée, et Lo tourna juste assez pour voir qu’il s’était déjà endormi.

Lo sourit, et se blottit contre lui pour continuer à profiter de sa chaleur, peau contre peau d’un côté, et les feuilles molles pour lea caler de l’autre. 

Peut-être, mais seulement peut-être, que ne pas faire partie de cette forêt et d’aucune forêt ici, n’était finalement pas si terrible.

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