Chapitre 4

Notes de l’auteur : J'ai pleuré en écrivant la fin de ce chapitre ;-;

- Tu n'es pas mort Milan...

 

Comme si c'était ce que je voulais entendre, les larmes choisirent cet instant pour perler au coin de mes paupières.

- Est-ce qu'on peut s'en aller, s'il te plaît... murmura la jeune femme.

Je hochai la tête et elle nous transporta sur la place du marché.

- Pardon, tu aurais peut-être aimé rester plus longtemps.

Je secouai la tête en essuyant mes joues. 

- Sais-tu quel jour on est aujourd'hui ? demanda la rousse, tentant un changement de sujet.

Je regardai autour de moi, à la recherche d'un indice, et ne vis rien de particulier sur la place. Il était vingt-et-une heures passées, et les habitants allaient et venaient de façon habituelle.

- Souviens-toi de ce que disait ton père à table.

Finalement, elle y avait prêté attention, à la conversation.

- Le réveillon de Noël, soufflai-je.

Annie hocha la tête avec un petit sourire.

- Il y a des festivités, ajouta-t-elle.

- On commence par quoi ? souris-je en lui tendant ma main.

Les lèvres rosées de la jeune rousse s'étirèrent, et elle glissa sa main dans la mienne.

***

Un marché nocturne. 

Annie m'entraîna vers un stand de petites figurines faites main, d'après la pancarte.

- C'est beau, fit-elle le regard lumineux en montrant un petit lutin.

Je voulus le prendre.

- Ne sème pas la panique maintenant, rigole-t-elle.

J'opinai, et les mains scellées, nous nous promenâmes tranquillement, sous les chants de Noël, sous la lumière douce et chaleureuse des guirlandes posées sur les arbres. Notre marche fut ponctuée d'œillades complices. C'était ironique, de marcher en étant invisibles aux yeux de tous.

Enfin... quasiment tous.

- Regarde, par-là, me chuchota la rousse à l'oreille en pointant du doigt un couple assis au pied d'un arbre.

Les deux individus se mirent à nous observer d'un œil inquiet, puis l'un des deux comprit, et murmura quelques mots à la personne à ses côtés. 

Nous nous mîmes à rire et reprîmes notre marche.

- Y a-t-il un endroit où tu souhaiterais aller ? questionna-t-elle lorsque nous sortîmes du marché nocturne.

- Il y a une patinoire installée à côté, mais tu ne pourrais sûrement pas...

- Allons-y, proposa-t-elle en tirant mon bras.

***

- Mais tu es folle ?! m'écriai-je en riant malgré-moi.

La rousse prenait actuellement le contrôle d'une femme et lui faisait faire plusieurs tours sur elle-même.

Les gens s'écartaient impressionnés, et Annie glissait, le vent dans les cheveux. Elle sautait, tournoyait, puis filait à nouveau de manière gracieuse. Le public applaudit, et moi de même.

Lorsque la jeune rousse quitta le corps de la jeune femme, l'humaine regarda ses mains, sous le choc.

- Alors, c'était comment ? s'enquit Annie, me rejoignant avec un sourire.

- Magnifique, fis-je admiratif. Tu en faisais...?

Elle hocha la tête, lentement, puis reprit ma main et m'entraîna autre part. 

Devant une immense église.

Nous y entrâmes et une musique puissante, très belle résonnait dans tout le lieu.

De longs bancs s'étalaient de part et d'autre de l'immense salle. Quelques personnes y étaient assises.

En face, il y avait un orchestre. Des instruments à cordes et à vents, avec un gigantesque orgue derrière.

Je m'assis sur l'un des bancs en bois massif. Annie ne me suivit pas. Elle me fit un clin d'œil et s'avança le long de l'allée. Je souris lorsque j'entendis l'orchestre s'arrêter soudainement. Le violoniste jouait quelque chose de différent. Le silence accueillait son morceau.

C'était un air lent, mélancolique, qui racontait une histoire.

Les notes s'allongeaient longuement. Durant une longue minute, c'était une suite de notes étirées. Elles marchaient lentement, hésitantes.

Puis elles furent de moins en moins longues, de moins en moins gracieuses. Les notes se mettaient à trottiner, puis à courir de manière saccadée, le plus vite possible.

Puis elles se calmèrent, revenant à des notes longues, douces et ponctuées de petites silences. Elles avaient trouvé ce qu'elles cherchaient. Elles étaient apaisées.

La mélodie fut poignante, elle racontait une ballade, du temps passé dans la joie, la peine, et la colère.

Puis sur une dernière note, longue, traduisant une peine infinie, Annie leva son archet.

Quelques applaudissements, puis de plus nombreux. Des sifflements, des cris. Certaines personnes, moi y compris, essuyaient quelques larmes.

J'avais compris.

J'avais compris, mais je ne voulais pas.

Lorsqu'elle revint à mes côtés, laissant un violoniste déboussolé, je me levai et la pris dans mes bras.

Elle m'accueillit d'une douceur et d'une chaleur propre à elle.

- Il reste un dernier endroit où aller, me chuchota-t-elle au creux de l'oreille.

Sa main retrouva la mienne et je fermai les yeux, retenant mes larmes.

***

J'eus un sursaut lorsque nous nous retrouvâmes tout en haut d'un toit.

Je distinguai la place du marché, grouillant de passants.

- On est...

- Sur l'horloge de la place, confirma la jeune femme, m'invitant à m'asseoir au bord.

C'était magnifique.

- Regarde, là-bas. C'est le marché nocturne où nous étions, m'informa-t-elle en me montrant les lumières visibles à quelques rues de la place.

- Là, c'est le cimetière, montrai-je.

- Et là, c'est l'église, murmura-t-elle.

Nos yeux se cherchèrent. Mes iris noisettes se lièrent aux siennes, bleues électrique.

- Joyeux anniversaire en avance, Milan.

Elle avait dit cela dans un souffle.

- Joyeux anniversaire en avance, Annie.

Mes pieds pendaient dans le vide, aux côtés de ceux de la rousse.

- Je le veux, le lutin du marché nocturne, chuchota-t-elle d'un coup.

Je me tus et admirai, d'un œil flou de larmes la jolie vue.

- Tu me l'offriras n'est-ce pas ? ajouta-t-elle.

Je voulus parler, mais une boule était coincée dans ma gorge.

- Il est bientôt minuit, murmura-t-elle, d'une voix tremblante.

Je ne voulais pas la voir. Je devais retenir ces larmes. Je devais être fort. Annie s'approcha et posa une main sur mon épaule, puis sur ma joue.

- Ne pleure pas, suppliai-je lorsque je vis des larmes couler de ses yeux tristes.

Elle renifla, et colla son front au mien. Ce contact intime me faisait lutter d'autant plus contre mes larmes.

Soudain, je vis des flocons tomber, recouvrant le sol de la place du marché.

- Tu es fort, souffla-t-elle.

Je vis son corps briller d'une lueur que je n'avais jamais vu encore. Une lueur dorée. Elle était encore plus belle, souriant malgré ses larmes.

- Milan... S'il te plaît... ne refais plus jamais ça.

Je sanglotai, ma peine redoublant après cette supplication de sa part.

- Annie... pleurai-je bruyamment, posant mes mains sur ses joues dorées.

Finalement, ce fut sous les coups de minuit résonnants de l'horloge, sous une douce neige, et devant mon corps secoué de violents sanglots...

 

...qu'Annie disparut, après avoir effleuré mes lèvres des siennes.

 

- Je t'aime Milan, mais ta famille t'attend, fut la dernière chose qu'elle murmura.

 

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez