Chapitre 4 : Une piste dans l'Ombre

Notes de l’auteur : A écouter : Everything Black de Unlike Pluto

Bonne lecture !

« Parfois il suffit d'un simple changement de point de vue pour distinguer une autre réalité. »
- Dan Brown

 

Lěng Eiran

Quelques jours auparavant…

Poste de Police, District de Tongzhou, Pékin.

Les jours étaient passés depuis qu'Eiran avait rejoint à nouveau la police. Le commissaire avait autorisé Alistair à former une brigade spéciale dédiée à traquer Adonis. Enfin, il l'avait plutôt reformée. À l’époque, c’était Eiran qui dirigeait l’équipe, mais en raison de son implication personnelle dans le groupe révolutionnaire, cela était simplement impossible. Cependant, cela n'avait pas empêché Alistair de le nommer comme second.

Eiran n'était pas dupe. Il savait que cette position était un compromis, une manière de le garder sous surveillance tout en utilisant son expertise. Alistair, bien qu'ayant confiance en ses compétences, devait jongler avec la méfiance de certains supérieurs et collègues. 

La brigade spéciale était composée d'anciens membres de l'équipe originale et de nouvelles recrues, tous choisis pour leurs compétences et leur loyauté indéfectible. Eiran se retrouvait à former et à coordonner des opérations, tout en veillant à ce que ses liens passés avec les révolutionnaires ne nuisent pas à leur mission.

Les tensions étaient palpables lors de la première réunion de l’équipe reconstituée. Eiran se tenait à côté d'Alistair, ses yeux parcourant les visages de ses nouveaux collègues. Il pouvait sentir leur méfiance et leur scepticisme, mais il savait qu'il devait faire ses preuves à nouveau.

— Nous avons une mission importante devant nous, commença Alistair, son ton ferme et autoritaire. Adonis est plus qu'une simple menace. Il représente une fracture dans notre société, et nous devons tout faire pour empêcher ses actions destructrices. L’Empereur est inquiet. 

Eiran prit la parole, sa voix calme et déterminée.

— Nous devons agir avec précision et intelligence. Adonis connaît nos méthodes, mais nous connaissons aussi les siennes. Utilisons cela à notre avantage. Je suis ici pour vous aider, pour nous aider à réussir cette mission.

Le silence qui suivit fut lourd, mais Eiran pouvait sentir une légère détente parmi les membres de l’équipe. Ils comprenaient l'importance de leur tâche et, malgré les doutes, étaient prêts à travailler ensemble.

— Adonis nous a lancé, une fois de plus, un défi. Ils ont tué une citoyenne et l’ont transformée en œuvre d’art. Leur but est de terrifier la population, de la faire se méfier de la police et, par extension, du pouvoir. Ils cherchent à reproduire un scénario similaire à la "Révolution de la Pluie"*, espérant ainsi rallier la population à leur cause. Cependant, il ne faut pas oublier qu’Adonis a plus de sang sur les mains que nos camarades lors de cette Révolution.

Le visage des agents reflétait un mélange de colère et de détermination. Ils savaient que chaque seconde comptait pour contrer la menace posée par Adonis.

— Nous ne pouvons pas les laisser manipuler la peur à leur avantage, continua Alistair, sa voix résonnant dans la salle. Nous devons rétablir la confiance du public en montrant que nous sommes ici pour les protéger. Eiran, je veux que tu t'occupes de l'analyse des preuves trouvées sur les lieux du crime. Utilise ton expérience pour déceler les indices que nous aurions pu manquer.

Eiran hocha la tête, acceptant la tâche avec une détermination silencieuse. Il savait que cette mission était plus qu'une simple enquête pour lui. C'était une chance de racheter ses erreurs passées et de prouver sa loyauté envers l'équipe et la justice.

— Quant aux autres, reprit Alistair, je veux que nous renforcions notre présence dans les quartiers les plus vulnérables. Montrez aux citoyens que nous sommes là pour eux. La peur est notre ennemi, et nous devons la combattre avec chaque ressource à notre disposition.

L'équipe se dispersa, chacun se mettant immédiatement au travail. Eiran se dirigea vers le laboratoire, les pensées tournées vers la scène macabre qu'il allait devoir analyser. Les images de la victime, transformée en une sinistre œuvre d’art, lui revenaient en mémoire, ravivant en lui une colère froide.

Eiran examinait attentivement toutes les preuves disponibles. Il passait en revue les enregistrements des caméras de surveillance, les photos de la scène du crime, et les différents rapports des agents. Il cherchait le moindre indice, quelque chose qui aurait pu échapper à une première analyse. Soudain, il stoppa une vidéo.

Là, juste là, en arrière-plan, il remarqua une voiture noire. Elle semblait stationnée discrètement, mais Eiran ne pouvait ignorer l'impression que le véhicule les observait depuis leur arrivée sur les lieux du crime. Il agrandit l'image, essayant de distinguer plus de détails. La voiture ne portait aucun signe distinctif, mais quelque chose dans sa position et sa présence le rendait méfiant.

— Alistair, viens voir ça, appela-t-il en haussant la voix.

Alistair se rapprocha, jetant un coup d'œil à l'écran. Son visage se crispa en voyant la voiture noire.

— Bien vu, Eiran. Elle est là depuis le début et personne ne l'a remarquée. C'est suspect.

Eiran acquiesça. Il fit défiler la vidéo en avant et en arrière, essayant de voir si la voiture avait bougé ou si quelqu'un en était sorti. Malheureusement, l'angle des caméras ne permettait pas de voir clairement les occupants du véhicule.

— Je vais voir ce que je peux tirer des autres caméras autour de la zone, dit Eiran, déjà en train de se connecter à d'autres flux vidéo.

Il passa plusieurs minutes à examiner les enregistrements des caméras voisines. Finalement, il trouva un angle qui montrait la voiture plus distinctement. Il fit un arrêt sur image et zooma sur la plaque d'immatriculation. Bien que partiellement floue, il pouvait en déduire suffisamment de détails pour lancer une recherche.

— J'ai une partie de la plaque, dit-il, notant les caractères lisibles. Ça devrait être suffisant pour notre base de données.

Alistair hocha la tête, appréciant l'efficacité d'Eiran.

— Fais-le tout de suite. Si cette voiture est liée à Adonis, nous devons savoir qui la conduit et pourquoi elle était là.

Eiran entra les détails dans le système de recherche, attendant que la base de données fasse son travail. Quelques minutes plus tard, un résultat apparut sur l'écran.

— La voiture appartient à une société pharmaceutique, “GreenLife”, dit-il en lisant les informations. Mais il y a une adresse enregistrée. C'est un point de départ.

Alistair posa une main sur l'épaule d'Eiran.

— Bien joué. Rassemblons l'équipe et allons vérifier cette adresse. Peut-être que nous pourrons enfin obtenir une piste solide pour les arrêter.  

***

Siège de Greenlife, 

District de Chaoyang, Pékin.

Quand les policiers arrivèrent devant l'immense bâtiment de la société pharmaceutique, ils furent rapidement accueillis par des gardes. Les hommes en uniformes noirs et équipés de casques les observaient avec suspicion, leurs postures tendues et prêtes à intervenir si nécessaire.

— Identifiez-vous, ordonna l'un des gardes, une main posée sur son arme de service.

Alistair s'avança, montrant son insigne de police.

— Inspecteur Alistair Walker, brigade spéciale. Nous avons une enquête en cours et nous devons parler à quelqu'un de la direction.

Les gardes échangèrent des regards avant de se consulter brièvement par radio. Après un moment, l'un d'eux fit signe aux policiers de le suivre.

— Attendez ici, nous allons informer la direction de votre présence, dit-il, les conduisant dans un hall d'accueil spacieux et moderne.

Les policiers patientèrent, observant les environs. L'intérieur du bâtiment était impeccablement propre, avec des murs de verre et des plantes soigneusement entretenues. Des employés en blouse blanche allaient et venaient, jetant des regards curieux aux nouveaux arrivants.

Eiran, se tenant légèrement en retrait, observait tout attentivement. Il cherchait des indices, des comportements suspects, tout ce qui pourrait les aider à comprendre le lien entre cette société et Adonis.

Après quelques minutes, une femme élégamment vêtue apparut, accompagnée d'un homme en costume. Elle s'avança vers le groupe de policiers, affichant un sourire professionnel.

— Bonjour, je suis Yanli Shu, directrice des relations publiques. Que puis-je faire pour vous ? demanda-t-elle d'une voix calme.

Alistair fit un pas en avant.

— Bonjour, Madame Shu. Nous enquêtons sur une affaire criminelle et avons des raisons de croire que ce bâtiment est lié à notre enquête. Nous devons parler à votre direction et avoir accès à certains dossiers.

Yanli conserva son sourire, mais Eiran détecta une légère tension dans ses yeux.

— Je comprends, inspecteur. Cependant, nous avons des protocoles stricts à suivre. Si vous avez un mandat de perquisition, nous serons heureux de coopérer pleinement. 

Alistair hocha la tête et tendit un dossier contenant le mandat de perquisition. Yanli le prit, l'ouvrit et le parcourut rapidement. Son sourire devint légèrement plus crispé.

— Très bien, inspecteur. Je vais vous conduire à notre service de sécurité, où vous pourrez commencer votre enquête. Veuillez me suivre.

Elle les mena à travers plusieurs couloirs jusqu'à un ascenseur. Pendant le trajet, Eiran continua d'observer les environs, notant mentalement les caméras de surveillance, les accès restreints et les portes sécurisées.

Ils arrivèrent finalement devant une porte marquée "Sécurité". Yanli introduisit un code sur le clavier à côté de la porte, et celle-ci s'ouvrit avec un léger clic. À l'intérieur, une salle de contrôle avec des écrans de surveillance montrait différentes parties du bâtiment.

— Voici notre centre de sécurité, annonça Yanli. Vous pouvez commencer ici. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, faites-le moi savoir.

Alistair remercia Yanli avant de se tourner vers l'équipe.

— Commençons par examiner les enregistrements de sécurité pour voir si nous pouvons identifier qui était dans cette voiture noire, dit-il.

Eiran et les autres membres de la brigade se mirent immédiatement au travail, scrutant les images des caméras de surveillance et cherchant des indices. 

Tous étaient à la fois nerveux et impatients de trouver le propriétaire exact de la voiture et d’enfin avancer sur l'enquête qui ne cessait de tourner en rond depuis six ans. Chaque minute passée dans la salle de sécurité renforçait leur détermination.

Les enregistrements vidéo défilaient sur les écrans, les agents analysant chaque mouvement, chaque véhicule entrant et sortant du bâtiment. Eiran, concentré, examinait les images avec une attention particulière. Après plusieurs minutes de visionnage minutieux, il stoppa soudainement une vidéo.

— Là ! Regardez, dit-il en pointant un écran. La voiture noire. On peut voir quelqu'un en sortir.

Tous les regards se tournèrent vers l'écran. La caméra montrait clairement la voiture noire garée à l'extérieur de l'immeuble. Un homme en sortit, portant une casquette et des lunettes de soleil, rendant son identification difficile. Il entra rapidement dans le bâtiment par une porte latérale.

— On peut suivre son parcours à l'intérieur, proposa un des techniciens de sécurité. Nos caméras couvrent la plupart des couloirs.

Eiran acquiesça et le technicien commença à faire défiler les enregistrements des caméras intérieures, suivant l'homme à travers le bâtiment. Ils le virent se diriger vers un ascenseur réservé au personnel et disparaître derrière les portes.

— Vérifiez où cet ascenseur mène, demanda Alistair, l'impatience palpable dans sa voix.

Le technicien consulta rapidement les plans de l'immeuble.

— Il va directement au niveau -2, l'accès sécurisé réservé au laboratoire de recherche et développement.

Alistair échangea un regard significatif avec Eiran.

— On va devoir descendre et voir ça de plus près, dit-il. Madame Shu, pouvez-vous nous conduire au niveau -2 ?

Yanli, toujours présente, hocha la tête, bien que réticente.

— Bien sûr, inspecteur. Suivez-moi.

Elle les guida jusqu'à l'ascenseur. Une fois à l'intérieur, elle utilisa une carte magnétique pour activer le bouton du niveau -2. L'ascenseur descendit en silence. Quand les portes s'ouvrirent, ils se retrouvèrent dans un couloir froid et clinique. Des panneaux indiquaient différentes directions vers les laboratoires. Yanli les mena vers une porte marquée "Laboratoire de Recherche et Développement - Accès Restreint".

— Voilà, dit-elle en se tournant vers eux. Vous avez accès, mais soyez prudents. Nos chercheurs travaillent sur des projets sensibles.

Alistair acquiesça et ouvrit la porte, menant l'équipe à l'intérieur. Le laboratoire était vaste, rempli d'équipements sophistiqués et de stations de travail. Ils avancèrent prudemment, cherchant des indices sur la présence de l'homme mystérieux.

Soudain, un bruit attira leur attention. Une porte au fond du laboratoire s'ouvrit, laissant apparaître l'homme de la vidéo. Il semblait surpris de voir les policiers, mais avant qu'il puisse réagir, Alistair et Eiran étaient sur lui, l'immobilisant.

— Qui êtes-vous et que faites-vous ici ?! demanda Alistair, la voix ferme.

L'homme, sous la pression, finit par avouer. Même si, étonnement, aux yeux d’Eiran cet aveu sembla trop rapide. 

— Je travaille pour Adonis. Mon rôle est de surveiller les activités policières et de rapporter à mes supérieurs.

Cette révélation fit l'effet d'une bombe. Après six ans de recherches infructueuses, ils tenaient enfin une piste concrète. Alistair se redressa, fixant l'homme avec intensité.

— Vous allez tout nous dire, et cette fois, nous mettrons fin à cette folie, déclara-t-il, une détermination renouvelée dans la voix.

*La "Révolution de la Pluie" fait référence à un soulèvement historique où la population, poussée à bout par des injustices et aidé par les Triades*, s'était révoltée sous une pluie battante, marquant un tournant décisif dans l'histoire du pays.

*Triades : Nom de la mafia chinoise.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez