Je sortis du sommeil à deux heures de l’après-midi, nue et passablement désorientée. Compte-tenu de mes deux nuits quasiment blanches et de l’heure très avancée où Éric et moi nous étions endormis, j’avais rattrapé mon sommeil sans que mon horloge biologique ne me réclame de petit-déjeuner.
Éric travaillait en silence sur la table de mon studio. Il me vit bouger, se leva, et se dirigea vers ma kitchenette d’où il revint avec un plateau.
-Ben toi, quand tu dors…
-Euh… il se passe quoi, là ?
-Il est deux heures, on est dimanche. Allo, t’es avec moi ?
Il posa un plateau sur mon lit. Il y avait disposé deux mugs de café préparés et tenus au chaud, un grand verre de jus d’orange dont je me demandais d’où il sortait, vu que je n’avais ni jus ni oranges chez moi, ainsi qu’un panier rempli de mini-viennoiseries.
-Mais t’as fait pousser des oranges, ou quoi ?
-Oui, en même temps que je préparais la pâte feuilletée pour les croissants.
-Je suis naze.
-Complètement.
-Mais t’es levé depuis quand ?
-Depuis onze heures.
-Et t’as rien mangé ?
-Si, j’ai déjà pris un café et un croissant, mais vu l’heure ton petit déjeuner va être mon déjeuner donc je vais t’accompagner.
-T’es sorti, c’est ça ?
-Ouah t’es lente à la détente ce matin…
-Oui.
-T’as du sommeil en retard on dirait.
-Oui.
-Tu veux t’habiller ?
-Non, pourquoi, t’as peur de mes seins ?
-Au contraire.
Je me vautrai sur les viennoiseries, avec la même avidité que Charlotte lors de la clôture de la nuit du cinéma fantastique. Le panier contenait des mini-croissants, des mini-pains au chocolat, des mini-chaussons aux pommes et des mini-escargots aux raisins. Qu’est-ce que ça faisait du bien d’avoir enfin dormi, aussi tard, et de se réveiller dans ces conditions !
Ouais
Le secret
Ça coupe et ça donne
Oh, oh, faut que j’moove
Il partit rapidement après ça. Je me levai, me douchai, appliquai une bonne couche de pommade sur ma cheville, et me mis au travail, après avoir allumé le portable de Lola.
Il y avait un sms de Nicolas. Il m’informait de l’hôtel qu’il avait choisi, et précisait qu’il me transmettrait le numéro de la chambre dès qu’il serait arrivé sur place jeudi un peu avant midi. Je voyais très bien de quel hôtel il s’agissait. Sans aller chercher un palace, Nico avait trouvé un hôtel charmant, trois étoiles, en plein centre-ville, dans une ruelle discrète. Le projet se mettait en forme. Je répondis simplement « ok, à jeudi, bises » à son message.
Je lus d’autres sms en diagonale. L’avant-dernier retint mon attention. C’était Kevin, mon footballeur préféré : « Salut. J’aimerais te revoir. J’ai vu ton site. Trop canon ! »
Mon site… ?
Ah mais oui, mon site ! Nous étions le dimanche 1er avril, l’annonce était supprimée depuis quelques heures, et le blog monté par Silia avait pris le relai. Kevin avait dû recevoir le sms que nous avions envoyé Mélanie et moi, et par curiosité il s’était surement connecté, ce qui semblait avoir ravivé son envie de revenir. Je répondis « Merci. Appelle-moi si tu le souhaites ».
L’après-mit suivit son cours « comme un dimanche », de ceux qui passent avec ce petit sentiment de nostalgie inexplicable, dans le silence qui s’est installé après l’agitation du samedi, et que bien qu’encore en week-end, c’est davantage la semaine suivante que l’on appréhende désormais, plutôt que la fin de la précédente que l’on célèbre dans la joie et les amitiés débridées. Je travaillai, finalisant mon projet de mémoire que j’irais proposer à l’un des professeurs pour qui j’avais le plus d’estime, et que j’avais eu en cours magistral ces deux dernières années. Puis je me plongeai dans quelques lectures de livres empruntés à la bibliothèque.
Charlotte appela, et me raconta ses premiers clichés. J’avais promis de passer le dimanche après-midi suivant avec elle et nos parents. Je la sommai donc d’être prête à photographier sa grande sœur !
Lola reçut quelques appels. J’avais déjà trois rendez-vous pour lundi, et mon jeudi serait consacré à Nicolas entre midi et deux. Devais-je encore planifier des massages dans la suite de la journée ? Je me retrouvais dans l’expectative, d’autant plus que, suite à la disparition de l’annonce, le nombre d’appels était en baisse. Comme Mélanie l’avait prévu, il ne restait que les demandes intéressantes. Un certain Gaspard, jeune habitué d’Alessia, voulait venir soit demain soit jeudi entre midi et deux, ce qui s’avéra donc impossible. Je lui proposai de reporter au lundi suivant, ce qu’il accepta, bloquant pour une heure le premier créneau de midi. Plus tard ce fut Serge, autre client de Mélanie, qui chercha une disponibilité sans la trouver. Il me proposa de me rappeler dans la semaine. Enfin, Kevin se manifesta.
-Salut Lola.
-Ça va Kevin ?
-Très bien, merci pour ta réponse.
-Mais je t’en prie. Alors tu veux un massage ?
-Oui, j’ai essayé de t’oublier, mais j’y arrive pas. Alors je me dis que faute de mieux, un massage ce serait super.
-Excellent raisonnement.
En moi-même, Lola se remémora la proposition déraisonnable que mon super footballeur m’avait formulée au téléphone il y a dix jours. « Si tu savais… » commentai-je dans ma tête.
-J’aimerais venir demain.
-Je ne peux te proposer que 16h30.
-J’ai entrainement à 18h, tu peux un peu avant ?
-Non, désolée.
-Bon alors ok, je reste trois quarts d’heure, ça me laisse le temps de filer au stade ensuite.
-C’est noté.
-Super, à demain Lola.
-A demain Kevin.
J’envoyai un sms à Mélanie, lui demandant si elle voulait passer la soirée avec moi. Elle répondit au bout d’une heure, m’informant qu’elle était en ville, et m’invitait à l’y rejoindre. Je remis de la pommade sur mon tatouage, enfilai mon jean flare, mes Converse et ma nouvelle veste en cuir, et sortis. Je la trouvai vers 19 heures dans un bar à tapas du centre-ville, attablée avec Amine. Celui-ci me complimenta sur ma nouvelle coupe, resta encore un quart d’heure, puis prit congé en me faisant la bise, et en enfournant goulûment sa langue dans la bouche de Mélanie.
-Tu continues de jongler sur les deux tableaux ?
-Oui. Mais je suis honnête, ils savent.
-Et eux… de leur côté ?
-Même chose.
-D’acc !
-Tu veux une assiette de tapas, du vin ?
-T’as déjà mangé ?
-Non pas du tout, j’ai passé l’après-midi chez lui, et quand t’as appelé, je suis venue t’attendre ici, et il m’a juste accompagnée. On a seulement pris une bière.
-Alors fais péter l’huile d’olive !
Plus habituée que moi, Mélanie commanda un plateau qui arriva recouvert de petites tartines grillées au jambon, aux aubergines grillées, au saumon, au chorizo, mais également de beignets de volaille, de croquettes de fromage, de frites de patates douces, de tortillas, de crevettes à l’ail, et de brochettes de boulettes de viande à la tomate. Deux généreux verres de sangria furent nécessaires pour faire glisser ces délices.
Mélanie me proposa ensuite un ciné. J’acceptai avec plaisir et nous nous hâtâmes en direction du multiplex pour la séance de 20h30 de « Young adult » de Jason Reitman, dont j’avais adoré « Juno » quatre ans plus tôt, après quoi nous nous faufilâmes dans la salle de « Hunger games » pour la séance de 22h30. Nous sortîmes du cinéma vers 1h15 du matin et rentrâmes à pied en bavardant des films, de la beauté incendiaire de la débutante Jennifer Lawrence qui, à quelques jours près, avait exactement un an de moins que moi, puis, enfin, de mes atermoiements.
Quand
Le serpent
Chaloupe et console
Oh, oh, faut que j’moove
C’est Mélanie qui lança le sujet.
-Alors t’en es où avec Nicolas ?
Je mentionnai l’hôtel où il avait réservé une chambre.
-Ah oui, il ne se fout pas de toi.
-Non, c’est du sérieux.
-Il t’a demandé quelque chose de précis ?
-Non, il a dit qu’il me faisait confiance pour être sexy.
-Avec ta pommade sur la quille, il va pas être déçu.
-Ça va, ça commence à désenfler.
-Et tu te sens comment vis-à-vis de tout ça ?
-Pareil qu’hier.
-Ça allait avec Éric ?
-Génial, oui.
-Tu sais, le pire ce serait que tu ne décides rien.
-Comment ça ?
-Que tu ailles au rendez-vous, juste parce que voilà, ça y est, il est planifié.
-Je ne comprends pas ce que tu veux dire.
-C’est à toi de savoir si tu le fais ou pas. Mais ne la joue pas passive, comme sur un tapis roulant où t’aurais mis le pied et qui ferait le reste à ta place. Que tu ailles au bout ou que tu renonces, décide un truc !
-Tu trouves que je suis trop attentiste ?
-Mais évidemment. T’as fixé le rendez-vous parce que ce ne sont que des mots. Mais maintenant qu’il est pris, tu ne vas quand même pas coucher avec Nicolas juste parce que c’est écrit dans ton agenda ! Si tu fais un truc pareil, il faut au moins que tu l’assumes, que tu le veuilles, que tu te dises « ok c’est une connerie, mais je la fais quand même ! ».
-J’ai du mal à me dire ça, justement.
-Mais oui, mais tu ne renonces pas pour autant. Et ça c’est encore pire. Si tu t’envoies en l’air dans ces conditions, avec tout ce que ça implique, jamais tu ne te pardonneras de l’avoir fait à la légère. Crois-moi, ce sera plus facile à porter si tu en as fait la force d’une décision, que la faiblesse d’un doute que les événements auront résolu à ta place.
-En gros, si je baise, il faut que je le veuille.
-C’est exactement ça. Parce que si tu ne le veux pas, ne le fais surtout pas.
L’Ami Sadi
S’enlise
Et là ça fait peur
Le raisonnement par contraposition était parfait. J’enchaînai en tentant une diversion.
-Tu sais, Kevin m’a encore appelée.
-Ah bah il tombe bien, lui, tiens…
-Oui, mais j’ai juste pris un rendez-vous pour un massage.
-Il t’a reproposé des sommes de dingue pour te sauter ?
-Euh non, il avait pris acte de mon refus de l’autre jour.
-Donc t’as pas à nouveau dit « non ».
-Euh…
-Ben alors présente pas ça comme si tu avais fait un effort surhumain !
-T’es dure, là…
On ne fait pas diversion aussi facilement avec une sicilienne.
Nous arrivâmes dans notre couloir peu avant deux heures du matin. Mélanie me proposa de dîner chez elle mercredi soir. J’acceptai, et l’embrassai en lui souhaitant bonne nuit.
Ça le susurre
A mes entournures
Ah, ah, faut que j’moove
Ma semaine débuta de fort belle manière. A la pause de dix heures, je montai au bureau du professeur dont j’espérais qu’il accepterait de diriger mon mémoire. Il me fit entrer et m’écouta proposer le thème et l’orientation que j’avais en tête pour le traiter. Il trouva la perspective intéressante et me suggéra quelques modifications, après quoi il m’invita à repasser la semaine suivante, au même moment, avec un projet affiné. Je n’étais pas dupe, et je compris que cela représentait une sorte de pré-accord. Je redescendis dans l’amphi pour la fin de la matinée puis m’achetai une salade que j’emmenai au local où mon premier rendez-vous devait arriver à 13 heures.
Avec Martin, je me savais en terrain dangereux. Il était ce genre de client très tendre, très sensuel et très tactile, avec lesquels j’étais trop facilement en phase. Je me souvenais de cette finition les yeux dans les yeux, siège relevé, où il avait clairement exprimé son envie de faire l’amour avec moi.
Je pris quelques précautions au début. Il avait payé le maximum, pour une heure topless, et je restai assez neutre pendant la première moitié du massage. Toutefois, dès qu’il fut sur le dos, la nature badine de Martin reprit ses droits. Il m’avait longuement félicitée pour ma coupe de cheveux, et y passa abondamment les mains, caressant avec délicatesse ma nuque, ma gorge, qui devenait un tremplin vers ma poitrine. C’était l’un des clients qui utilisait le plus ses mains, ne se contentant pas de simples attouchements pour accompagner l’excitation croissante, mais, à l’instar de Nicolas, il caressait réellement mon corps, avec respect et délicatesse, ce qui était flatteur et grisant.
Il n’eut pas besoin de me demander que je redresse le siège pour la finition : j’en pris l’initiative. Comme la première fois, au comble de son désir, qu’il n’était absolument pas dans sa nature d’économiser, il ne dura pas longtemps. Il n’en avait pas l’intention. L’ensemble de la séance était à ses yeux une langoureuse montée en puissance vers le feu d’artifice, et chaque minute avait la même valeur et provoquait la même sensualité que les trois dernières. J’aimais cette façon de voir les choses, extrêmement valorisante pour mes massages. Quand son pénis disparut entre mes mains pour que le bouquet final prenne son élan, il me serra dans ses bras, les enroulant autour de ma taille, et posa son visage sur mon torse, le menton entre mes seins.
-Vous sentez très bon, j’adore votre parfum.
-Merci.
-C’est quoi ?
-Very irresisitble.
-Qu’est-ce qu’on est bien entre vos mains.
Il resserra l’étreinte au fur et à mesure de la montée de la sève. Je sentais sa respiration contre ma poitrine, son souffle diffusant un air tiède sur mes mamelons.
-Mmmmh Lola, je vais venir…
-Mais oui, c’est le moment, laissez-vous aller.
-Juste encore un peu, juste une minute, s’il vous plait.
Je ralentis mes mouvements, laissant son gland tranquille quelques instants. Ne sachant subitement plus quoi faire de mes mains au chômage technique pendant la petite pause que je lui octroyais, je les posai sur sa tête, et nous nous retrouvâmes dans un vrai moment de câlin, lui lové tout contre mes seins, et moi prenant sa tête dans mes bras. Quelques secondes de douceur …
-On y retourne, Martin ?
-Oui.
Je repris la verge dans ma main gauche et posai la droite sur le gland turgescent. Tenant compte de son extrême sensibilité, je me contentai de l’effleurer avec la paume, faisant onduler cette partie charnue sur tout le tour de son bourgeon, puis je serrai la hampe avec tendresse pour marquer ma présence sur l’ensemble de son anatomie masculine. La paume mobile arracha des spasmes et Martin écrasa son nez contre ma cage thoracique. Ses mains, dans un ultime sursaut d’érotisme, cherchèrent mes fesses et il éjacula en les caressant.
Après sa sortie de la douche, il se rhabilla en discutant. Très vite, nous nous retrouvâmes au même point que lors de sa première visite.
-Quel dommage, quand même, que nous ne proposiez pas davantage que des massages.
-Ah vraiment ?
-C’est parfait, ce que vous faites… Mais on a envie de faire honneur à votre corps, de vous rendre tout ce plaisir et cette sensualité que vous donnez !
-Mais vous me la rendez…
-Vous voyez ce que je veux dire.
-Oui, oui, Martin, j’ai bien compris.
-Je ne veux pas être lourd, et j’ai pas envie que vous me mettiez en blacklist… mais vous le savez, je vois de temps en temps des escorts, et aucune n’est aussi coquine et tendre que vous.
-Mais c’est pas le même métier. Lors d’un massage, je joue un peu avec vos nerfs, ça fait partie du jeu et du plaisir recherché. Avec une escort, vous faites l’amour, point.
-J’ai l’impression que vous seriez la synthèse des deux.
-Vous me prêtez beaucoup trop de qualités, Martin !
-En tout cas s’il y avait ne serait-ce que l’ombre d’une possibilité, je serais partant.
-Rappelez-moi en fin de semaine, et on en reparle, d’accord ?
-Vous êtes sérieuse ?
-Je suis sérieuse sur le fait que je vous invite juste à m’appeler, et j’aviserai. Je n’ai absolument rien promis.
-D’accord. Merci en tout cas d’y réfléchir.
Martin sortit tout ragaillardi, plein d’espoir, et je restai de mon côté avec deux fois plus de doutes qu’avant.
Ça le grince
Juste pendant la nuit
Raymond venait d’avoir soixante ans, et entamait sa septième décennie en se faisant plaisir. Il était veuf, sa femme étant décédée d’un cancer cinq ans plus tôt, et avait pris sa retraite anticipée il y a six mois. Il s’était habitué aux massages érotiques en passant entre les mains expertes de Mélanie, et avait souhaité découvrir la blonde qui l’avait rejointe récemment sur les photos. Il remarqua la différence entre les clichés et la réalité de mes cheveux courts, et exprima un petit regret. Il avait toujours fantasmé sur les cheveux longs.
Ce détail ne l’empêcha pas de passer trois quarts d’heures épanoui sur la table de massage. Il me paya pour être en sous-vêtements, et, quand il se retourna, il eut l’air de le regretter.
-Lola, j’aimerais bien qu’on continue sans votre soutien-gorge, c’est encore possible ?
-Mais bien sûr que c’est possible. Je l’enlève ?
-Oui attendez je vais vous donner les vingt euros supplémentaires.
-Oulah, bougez pas, restez tranquillement allongé et profitez du spectacle, vous me paierez après.
-D’accord, merci.
Je lui fis un petit show façon strip-tease, profitant de l’occasion qui m’était donnée de procéder à l’effeuillage en pleine séance. Je poussai même le vice jusqu’à faire glisser mon soutien-gorge noir dégrafé le long de son corps, jusque sur son visage. Le pénis bienheureux s’en trouva ragaillardi, et Raymond salua la fin de l’intermède polisson par une belle érection.
Moins démonstratif que son prédécesseur sur cette table, Raymond utilisa beaucoup ses yeux, regardant mon corps sous toutes ses coutures, le touchant peu, comme s’il risquait de se brûler au contact de la peau d’une jeune femme qui aurait mathématiquement pu être sa petite-fille. La verge de soixante ans n’accusa aucune baisse de forme, bien au contraire, et quand mes mains se firent artificières, le vigoureux se retint plus longtemps que la moyenne des clients. Il profita de chaque seconde au contact de mes doigts malicieux qui eurent le dernier mot, arrachant deux jets puissants qui inondèrent son ventre légèrement rebondi.
Le retraité heureux s’en alla vers d’autres expériences.
Tiago était un jeune homme filiforme d’une trentaine d’années. Il ne connaissait pas Alessia, et avait trouvé directement notre annonce, préférant visiblement tenter d’abord sa chance avec la blonde. Assez discret, il ne s’épancha pas sur ses habitudes en matière de massages érotiques, et, s’il ne fut pas silencieux, il était clair qu’il n’était pas venu raconter sa vie. Il se contenta de ma tenue du jour, ce qui ne donna pas à ses mains le droit au contact avec le corps de sa masseuse. Cela rendit la séance plus impersonnelle. Tout en harassant la verge lubrifiée de ce portugais d’origine, je réfléchis à cette dernière impression. Contrairement à ce que j’avais craint au tout début, être seins nus était devenu plaisant. Non pas que je me découvrisse des fantasmes exhibitionnistes, mais cela permettait d’installer une réciprocité dans l’érotisme, qui était devenue le moteur de mes séances et de ma façon d’en exploiter toute la crapulerie. Je tenais donc là la raison pour laquelle les clients tendres étaient ceux qui me faisaient le plus d’effet. Ils me ressemblaient. Et cette réciprocité était à son comble avec eux.
Sans aller jusqu’à parler de frustration, la séance avec Tiago fut donc neutre. Il m’exprima quelques compliments, davantage sur ma façon de masser que sur mon physique. Je finis par comprendre que ce jeune homme aurait préféré une poitrine plus généreuse. On ne peut pas plaire à tout le monde ! Il aurait dû commencer par appeler la brune…
A l’heure de lâcher les fauves dans l’arène, Tiago ferma les yeux, garda les deux bras bien serrés le long de son corps, et jouit dans un long gémissement.
Prévoyant, Kevin était arrivé avec un peu d’avance. Il avait guetté la sortie du client précédent, et, celui-ci ne s’étant pas attardé après sa séance mi-figue mi-raisin, cela avait permis au footballeur impatient de sonner dès 16h20.
-Ben toi dis-donc, t’es pressé.
-Je t’ai dit, j’ai entrainement après. Mais… tes cheveux sont passés où ?
-Envolés ! Tu aimes ?
-Ah oui, c’est sexy cette coupe ! La mèche qui tombe devant ton œil, là, ça donne un petit côté mystérieux à ton regard. C’est très réussi.
-Merci !
Il se dépêcha de se déshabiller. Il avait pris une douche après la séance d’entrainement du matin et court-circuita cette étape.
-Comme je suis en avance je te paye pour une heure.
-Mais on ne fera que cinquante minutes, vu ton entrainement.
-C’est pas grave, c’est normal. Est-ce que tu proposes un tarif, pour être entièrement nue ?
Je pensai au body, mais j’eus un peu peur de débordements. Pas forcément venant de lui. Néanmoins sa demande était davantage circonscrite. Et être entièrement nue, je l’avais déjà fait.
-Si tu ne me touches pas sur les parties intimes, d’accord.
-Promis !
-Alors cent-cinquante euros.
Il me donna la somme convenue, et je me dévêtis entièrement. Il me regarda, assumant son regard sur mon sexe.
-Tu me plais vraiment beaucoup.
-Tant mieux, non ?
Le massage ressembla à celui d’il y a deux semaines, sans la présence de Mélanie et d’Adrien. Et surtout, je pus enfin le masser sur la table, sans être obligée de me contorsionner autour du canapé. Le jeune-homme au corps de rêve était tout aussi tactile que la première fois, et sentir ses mains parcourir mon entière nudité ne me laissa pas insensible, même si, respectueuses de mon interdiction, elles ne s’aventurèrent pas en des zones sauvegardées.
J’avais craint que Kevin ne réitère sa proposition de coucher avec moi, et tente de me culbuter sur le canapé contre billets sonnants et trébuchants. Mais il eut la courtoisie de s’en tenir au cadre que nous avions fixé.
Alors que mes seins basculaient sur le beau visage, et que mes mains glissaient sur les rebonds virils de sa musculature féline, à la recherche du pénis déjà dressé, une petite voix au fond de moi le regretta.
La finition entamée, Kevin caressa mon dos. Ce geste me surprit, car il était dénué d’érotisme. C’est rarement mon dos que l’on caressait ou touchait dans des moments aussi intenses… Non seulement il était beau, mais en plus il était tendre. Cela commençait à faire beaucoup !
Lorsque j’eus complètement décalotté sa verge, les sensations explosives prirent le relai et ses mains baladeuses se souvinrent que j’étais une femme. Moins à l’aise que sur le canapé, il ne put m’enlacer comme il l’avait fait. Cela m’arrangeait, car indéniablement, il me plaisait. Pour autant, il me caressa, longuement, résistant à la finition dont j’imprimai le rythme endiablé sur le gland généreux. Pour un homme pressé par l’horaire de son entrainement à venir, il m’étonnait. Le corps crispé par les vagues de plaisir, Kevin pivota sur le côté, et sa bouche embrassa mon ventre, pendant que ses mains prirent mes fesses. Nous étions à quelques centimètres du cunnilingus. La position extrêmement osée sembla l’exciter plus encore, et enfin les tressautements annonciateurs déferlèrent dans le pénis dont je n’avais plus lâché le gland depuis près de dix minutes. Mes mains furent subitement engluées par une longue coulée blanche, et Kevin me serra encore plus fort contre lui.
-Tu as eu du mal à jouir, demandai-je une fois qu’il eût recouvré ses esprits ?
-J’ai … enfin…
-Ah, t’as fait un gros câlin avec une supportrice aujourd’hui ?
-C’est à peu près ça.
-Donc c’est normal.
-Oui surtout que je l’ai fait deux fois avec elle.
-Ah oui, donc là c’était ta troisième éjaculation de la journée, je comprends mieux. Nouvelle petite amie ?
-Non, une fille rencontrée hier soir, et voilà.
-D’accord m’sieur.
Il fila à la douche. Je n’étais pas sûre qu’il aurait encore de l’énergie pour un entrainement, mais ça, c’était davantage son problème que le mien.
Avant qu’il ne parte, la conversation dévia, comme de bien entendu.
-Tu sais, j’ai toujours très envie de toi.
-Non, c’est vrai ?
-Ouais. Ma proposition de l’autre fois tient toujours. Un hôtel, du champagne, et tu fixes ton tarif.
Je lui fis la même réponse qu’à Martin.
De toute façon, maintenant, c’était de deux choses l’une. Soit j’ouvrais la boite de Pandore avec Nicolas, et alors autant s’y engouffrer complètement. Soit je la laissais fermée, et il me suffirait de confirmer le refus qu’auraient déjà entendu ces deux postulants quand ils m’appelleraient.
Après un tour au lavomatic comme je l’avais promis à Mélanie, je rentrai chez moi en toute fin d’après-midi. Je n’avais pas avancé d’un pouce sur mes réflexions. Mais derrière ma décision il y avait désormais trois propositions en attente, et non plus une seule.
Je démarrai la troisième saison de Lost, engouffrant un demi-poulet rôti ainsi que quatre épisodes.
Cette série n’avait jamais aussi bien porté son nom.
Hé, viens près de moi
Que je te le dise
Ce secret qui me tord le cœur
Ah la la la
C’est comme ça