A L É G R I A
Je n'ai jamais eu aussi froid de ma vie. J'ai peur, je sens la mort se rapprocher et je n'ai aucune envie de m'abandonner à elle. Les soldats des deux districts sont dans le même état que moi. Le regard du commandant croise le mien. Je déglutis. Lui, qui me semble toujours calme, commence à s'agiter.
Le vent s'engouffre dans la grotte et y amène la neige. Je ne peux pas entourer mon corps de mes mains pour me réchauffer. Les poignets attachés dans mon dos, je ne sens plus mes doigts. J'observe les deux femmes : elles ne bougent presque plus, collées l'une contre l'autre. Les hommes n'ont pas meilleure allure, assis et immobiles.
Si ça continue, nous allons mourir.
Je ferme les paupières. Est-ce que je peux les révéler ? Qu'est-ce que je risque ? Beaucoup, mais si je reste passive, nous ne verrons plus jamais le soleil se lever. Je vais pouvoir négocier et éviter la sentence douloureuse que les Vélenkiens me réservent.
— Commandant, appelé-je.
Il ne m'entend pas, alors j'hausse la voix.
— Tais-toi ! ordonne celui de Vélenk.
— Commandant ! insisté-je.
— J'ai dit...
— Vous n'avez pas autorité pour lui interdire de me parler, le coupe-t-il en se levant.
Les deux hommes se regardent avec amertume, avant qu'il s'approche et se mette à croupi pour être à ma hauteur. D'un mouvement de tête, il me demande de prendre la parole.
— Je peux nous sauver.
L'autre commandant ricane.
— Elle est ridicule !
— Je suis très sérieuse, répliqué-je en captant le regard de « mon » commandant. Qu'est-ce que vous avez à y perdre ?
Il m'observe d'une telle intensité que j'ai l'impression qu'il lit dans mes pensées.
— Que proposes-tu ?
— Vous n'êtes pas sérieux ? Vous allez croire cette voleuse ?
Le commandant gonfle les joues, les yeux rivés au plafond avant de se tourner vers le vélenkien.
— Vous savez qu'on ne survivra pas à cette tempête.
— Bien sûr qu'on...
— Non, soyez pragmatique. Peut-être que ça vous est égal, mais personnellement, je ne tiens pas à mourir. Alors, si elle peut nous aider de n'importe quelle manière, je suis tout à fait ouvert à l'accepter. Parle, Alégria.
— Détachez-moi, requéré-je.
— Hors de question !
— Par Azixé, vous allez vous taire ! hurle le commandant.
— Vous osez vous adresser à moi de la sorte ?
— Et comment !
Soudain, la grotte est silencieuse. Le commandant semble gagner plusieurs centimètres, nous enveloppant dans son autorité. Je suis impressionnée par sa prestance, mais aussi... je ne saurais mettre un mot sur ce que je ressens. Être assise accentue ce sentiment.
Il marche jusqu'au Vélenkien, l'attrape par les épaules et le plaque contre une paroi. Mes yeux s'agrandissent.
— Je ne vais pas laisser ces femmes et ces hommes mourir à cause de votre égo ou de votre imbécillité. Je vous conseille de la fermer, si vous ne voulez pas que je le fasse moi-même !
Nom. D'un. Cheval.
Une bourrasque de vent nous attaque et disparaît dans les profondeurs de la grotte. Leur respiration est vive. Aucun ne lâche l'autre du regard. Les soldats de chaque district se sont relevés et semblent prêts à dégainer leur épée. La main du Vélenkien descend discrètement jusqu'à sa ceinture où est attaché un poignard. S'il attaque, cet endroit va se transformer en un massacre. Et je serai au milieu, sans pouvoir me défendre.
— Je suis une hostim. Voilà comment je peux tous nous sauver, lâché-je, résignée.
Tous les regards se tournent vers moi. Je ne suis plus une fourmi, mais un grain de sel. Je déglutis, les pupilles ancrées sur le bout de mes pieds.
— Elle va nous tuer si on la laisse faire !
J'écarquille les yeux et dévisage cet homme que je déteste sans le connaître.
— Je peux sauver la vie de tout le monde, même la vôtre, ajouté-je avec une mine de dégoût. En échange, je peux rentrer saine et sauve à Oktodur. Si non, nous mourrons tous. Ils le savent et vous aussi, claqué-je en levant le menton.
— Nous avons un accord, confirme le commandant d'Oktodur en croisant les bras sur son torse.
Les soldats des deux districts se rebellent. Aucun d'entre eux ne semble vouloir vivre, ou ils ont plus peur d'une hostim que de la mort.
— Silence ! Libérez-la.
Le commandant vélenkien obtempère et ouvre mes menottes. Soulagée, je ramène mes mains vers moi et frotte mes paumes. Je me lève péniblement, frigorifiée, puis détends les muscles de mes épaules et de ma nuque. Mes jambes me portent au centre de l'espace. Chaque soldat brandit son épée dans ma direction. Je pourrais les étouffer ou les brûler vif, mais ils ne le savent pas et surtout, ôter la vie à un humain est pour moi le pire des crimes.
— Mettez-vous en cercle autour de moi, demandé-je en posant ma couverture sur le sol gelé.
Je grimace quand je m'assieds en tailleur tant mes muscles sont raides.
Le commandant d'Oktodur est le premier à venir sans la moindre hésitation, et je suppose que son regard noir ordonne à ses soldats de l'imiter. Il m'a directement fait confiance sans avoir peur de moi – ou du moins, sans le montrer. Et bien qu'il m'ait arrêtée, il m'a toujours traitée avec respect. Un profond sentiment de reconnaissance m'envahit.
Les vélenkiens suivent enfin, après avoir jeté un coup d'œil vers la neige qui se rapproche de plus en plus.
Je prends une grande inspiration. Paumes vers le ciel, les mains sur mes genoux, je ferme les yeux pour me concentrer. Je les sens, ils vibrent en moi et j'adore ça.
Je vais sûrement devoir tenir toute la nuit, et si ça peut les sauver, ça peut aussi me tuer.
⚔️ 𝐎 𝐊 𝐓 𝐎 𝐃 𝐔 𝐑 ⚔️
Tu vois quand je disais que j’aimais bien Zyan😍
Et j’ai relevé « mon commandant » c’est ambiguë je trouve...
Quoi? Je veux du love, j’ai le droit non🤷🏻♀️
En revanche, l’autre crétin de vélenkien m’exècre ! Y a des baffes qui se perdent.
Concernant Alégria, je l’aime vraiment bien, mais j’en attends bcp plus d’elle et j’ai hâte de voir l’étendue de son potentiel. 😃😃
J'espère que tu ne seras pas déçue par Alégria 😍